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Vie quotidienne

J’ai vaincu le cancer et j’en ai fait une force, à tous les niveaux de ma vie

Styliste, entrepreneuse, activiste de la vie et de la quête de sens… Charlotte Husson a vaincu le cancer, et a transformé cette dramatique expérience en force. Créatrice du vestiaire engagé Mister K, elle a raconté son histoire à Océane.

Publié le 10 février 2020

Pendant plusieurs mois, tous les 15 jours, tu verras défiler sur madmoiZelle des portraits d’instagrammeurs et instagrammeuses que tu connais peut-être, ou peut-être pas.

10 personnalités, qui ne sont pas forcément des stars d’Instagram, mais juste des personnes simples, au vécu empouvoirant, avec un message à faire passer, ou un contenu original à proposer.

Qui sont-ils derrière les likes et les K du réseau social ? Comment en sont-ils arrivés là ? Quel est leur message ?

Je vais tenter à travers ces 10 portraits de te le faire découvrir, et de peut-être te donner envie de les suivre.

Mais surtout, je l’espère, de te donner envie de t’affirmer et t’exprimer librement, comme elles et eux !

Retrouve les portraits déjà publiés

Si tu as apprécié ces portraits et les valeurs que véhiculent ces femmes et ces hommes sur Instagram, je te donne rendez-vous sur le site No Pressure by Instagram, une surprise t’y attend ! 

Battante. Indépendante. Engagée.

Après une demi-heure passée avec Charlotte Husson, ce sont ces mots qui me viennent à l’esprit. Et je me suis dis qu’elle aurait pu m’emmener n’importe où tant son énergie est forte et communicative !

Charlotte a 33 ans, elle est autrice du livre autobiographique L’Impossible est mon espoir, entrepreneuse et créatrice du vestiaire engagé Mister K.

Elle m’a raconté sa tumultueuse vie professionnelle, de laquelle on ne peut séparer l’épreuve qu’elle a surmonté : un cancer de l’ovaire agressif qui a remis tous ses choix de vie en question.

L’enfance et l’adolescence de Charlotte Husson

Si l’on remonte un peu en arrière, avant d’être entrepreneuse et de propulser sa marque sur Instagram, Charlotte était styliste.

La mode n’a pas toujours été une évidence pour elle, mais sa créativité et sa conception du beau, elles, sont là depuis le début :

« Je pense que j’ai toujours eu une sensibilité, je suis hyper curieuse depuis petite, parce que j’ai des parents qui m’ont ouvert les yeux très grands.

Depuis que j’ai 3 ans, mon père me fait parcourir tous les musées, m’emmène dans des églises et des mosquées pour écouter des chants, pour m’enrichir au maximum.

Ma grand-mère que j’adorais était une couturière incroyable, elle me faisait des costumes sublimes, et je pense que j’ai eu une sensibilité du beau très petite. Ma mère était aussi sensible à tout ça.

Mais je me suis dit assez tard que j’allais bosser dans la mode.

Quand j’ai passé mon bac (que j’ai eu miraculeusement), en filière littéraire, je suis allée en fac de droit parce que je ne savais pas trop ce que je voulais faire de ma vie, comme beaucoup d’étudiantes.

Je dessinais déjà beaucoup depuis petite, mais comme j’étais dans un lycée généraliste, je ne m’étais jamais dis que le dessin était une vraie option.

C’était la voie de garage, à l’époque en tout cas, donc je n’ai pas osé me lancer tout de suite. Mais j’étais super douée, et un prof d’art plastiques m’a dit, un jour, que je devrais faire une école d’art…

C’est après 3 semaines en fac de droit que j’ai réalisé que ce n’était pas du tout mon truc. J’ai annoncé à mes parents que ce n’était pas fait pour moi.

Qu’il fallait que je dessine.

Ma mère m’a beaucoup aidée à trouver une école, et j’ai intégré un an plus tard une prépa de dessin. Mon rêve était, au départ, d’être illustratrice de livres pour enfants.

J’avais un trait très enfantin et très féminin en même temps : je faisais beaucoup de petites silhouettes avec des vêtements parce que j’étais sensible aux matières et aux looks…

Alors une de mes profs m’a dit que le stylisme me correspondrait peut-être mieux.

En cherchant des écoles je suis tombée sur le Studio Berçot, j’ai eu un véritable coup de cœur pour sa directrice qui était trop géniale, et j’ai fait mes études là-bas. »

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Illustrations réalisées par Charlotte

Quand Charlotte Husson a appris qu’elle avait un cancer

Une fois son diplôme de styliste de mode en poche, Charlotte fait ses armes pendant 4 ans auprès de la créatrice d’Heimstone, en tant qu’assistante styliste et directrice de production.

Plus tard, elle est engagée en tant que salariée chez Sézane, anciennement Les Composantes, dont elle dessine la première collection.

Et c’est à cette période, alors qu’elle a 27 ans, que la nouvelle tombe :

« On m’a diagnostiquée le 1er avril 2013. Et ce n’était pas une blague.

J’avais mal au ventre depuis 2 ans et très mal depuis six mois, j’allais voir un gynéco et un gastro-entérologue, et les deux se renvoyaient la balle.

Ils me disaient que j’étais un peu le malade imaginaire, que j’avais mal au ventre parce que je faisais un métier stressant, que je n’avais qu’à prendre du Spasfon et que ça irait mieux.

Mais pendant ces deux ans je suis quand même beaucoup allée les voir, et le diagnostic est tombé parce que j’ai fait une occlusion intestinale le 1er avril 2013.

Le chirurgien qui m’a opérée a vu l’étendu des dégâts : j’avais un cancer à un stade hyper avancé, stade 3C, veille de stade 4, dont l’origine était l’ovaire, alors que moi je pensais que c’était le ventre.

Mon monde s’est effondré, évidemment, mais je me disais surtout que je n’étais pas dingue et que j’avais bien un truc, après deux ans pendant lesquels on me disait que je n’avais rien.

Là j’avais enfin des mots sur mes maux, donc j’étais rassurée, même si j’aurais préféré qu’on me dise autre chose.

Une fois que le diagnostic a été posé, j’ai été très très bien prise en charge. Le traitement a duré 2 ans, j’ai eu 6 opérations en 1 an et demi, et 36 séances de chimiothérapie pour éradiquer le cancer de l’ovaire.

Pendant mes 2 ans de traitement je bossais en freelance pour Sézane mais j’étais un peu hors-circuit. J’avais une promesse d’embauche pour le jour où on m’annonçait que je serais en rémission, ce que j’espérais. »

Comment Charlotte Husson a vécu avec son cancer

Quand Charlotte me raconte toute sa période de lutte contre la maladie, elle ne me transmet que le plus positif. La douleur, la souffrance, le chamboulement sont là, bien sûr, mais surtout toutes les leçons qu’elle a pu en tirer.

Elle explique comment elle a vécu cet âge charnière de 27 ans avec ce boulet de canon qui a tout bouleversé :

«  Le plus dur à encaisser ça a été de comprendre l’origine, c’est-à-dire les ovaires.

Parce que ça remettait plein de choses en question, notamment le fait d’être maman — en tout cas « naturellement ». Et ça ça a été vraiment très très dur à encaisser.

Après, tout le reste a été très dur. Mon monde s’est effondré. J’avais peur de mourir, évidemment, mais maintenant que j’étais prise en charge par de bons médecins, j’ai fait confiance.

Et à partir de là j’étais dans une lessiveuse.

J’ai accepté les protocoles, même si je me révoltais parfois parce que j’ai un caractère bien trempé, mais j’ai déroulé en espérant que ça se passe le mieux possible.

J’étais en couple, ça a chamboulé plein de choses, mon mec de l’époque est resté (on s’est séparés, mais après la maladie), il a été d’un soutien incroyable pendant ces deux ans.

Il est certain que notre couple en a pris un coup, ma vie avec mes potes aussi, même si j’essayais d’être comme avant, et qu’eux faisaient tout pour que je me sente comme avant.

J’étais quand même très jeune, 27 ans c’est l’âge un peu charnière où tu deviens vraiment adulte…

On commençait tous à avoir nos apparts, des boulots de plus en plus installés, des mecs ou meufs, peu importe, mais bon, on construisait un peu notre vie d’adultes quoi.

J’étais tout d’un coup coupée dans mon élan de construction de vie d’adulte. Ça, c’est le plus dur je trouve, en tout cas quand j’étais en rémission ça a été le plus dur à accepter.

De devoir réécrire une page blanche alors que je viens d’avoir deux ans entre parenthèses.

Mais j’ai été hyper soutenue, très très très entourée, aussi bien par ma famille, que par mon mec de l’époque, que par mes amis qui ont été incroyables.

Ça joue beaucoup de ne pas être seule. »

La rémission compliquée de Charlotte Husson

Après deux ans de traitement, Charlotte est en rémission, et c’est cette étape de la maladie qu’elle décrit comme la plus dure qu’elle a vécue.

Ce vide après le combat, il a été source d’angoisse et de dépression, mais aussi la genèse de son nouveau projet :

« Mon projet pro ne s’est pas dessiné tout de suite.

En septembre 2014, une semaine après ma dernière chimio, j’ai recommencé à bosser. Autant te dire que c’était beaucoup trop tôt.

Je n’avais pas anticipé le choc que ça allait être de me retrouver avec une équipe, avec beaucoup de nanas. Beaucoup de nanas enceintes. Qui pour certaines se plaignaient d’être enceintes…

J’étais devenue tellement sauvage, je me suis fait d’une violence beaucoup trop forte, et au bout de trois mois j’ai réalisé que je n’avais pas du tout ma place là où j’étais.

C’est là que l’idée du blog est venue, parce que j’avais besoin de parler de ce que j’avais traversé. En fait, je me suis littéralement effondrée.

Pas pendant la maladie : pendant la maladie, j’étais un vrai bulldozer. Même si j’étais hyper affaiblie et que j’ai eu des périodes très dures physiquement, j’étais dans le combat.

Quand on m’a dit que j’étais en rémission, c’est là que je me suis vraiment effondrée.

C’est ce que j’appelle la catalepsie dans mon bouquin, l’effondrement après l’effort. Le moment où je me dis : et maintenant ? Est-ce que j’ai vraiment envie de cette vie-là ?

Je n’étais plus dans l’urgence, l’immédiateté, maintenant il fallait se projeter dans l’avenir de quelqu’un qui va bien, avec malgré tout une épée de Damoclès au-dessus de la tête parce que j’ai eu un cancer à très mauvais pronostic.

Et c’est là où je me suis dis… Attends, tu t’es battue pour ta vie, tu ne peux pas te laisser abattre maintenant ! Donc il faut que tu construises un projet à toi.

Cette mode, là, ça n’a pas de sens pour toi, tu n’as plus envie d’être salariée, tu n’as plus envie de tout ça.

C’est comme ça que l’idée est venue.

Tout ce cheminement a été hyper vertueux, ça a été une thérapie de soutien de ouf, mais j’ai vraiment mis un an et demi à sortir d’une petite dépression — on peut le dire aujourd’hui. »

La reconstruction de Charlotte Husson, et ses débuts sur Instagram

Reconstruire, c’est ce à quoi s’est attelée Charlotte dès qu’elle en a eu la force, avec pour objectif de donner du sens à ce qu’elle fait.

Son blog, elle l’a appelé Mister K fighting kit, K étant le code clinique pour désigner le cancer. Pour Charlotte, ça a été un exutoire, et une thérapie :

« Ce que j’écrivais sur le blog a trouvé écho chez des gens, en plus je parlais de tout ça avec beaucoup de naturel, sans pathos, en faisant des blagues, de manière très très libre.

Je pense que ce ton désarçonnait, le fait de parler d’une maladie terrible mais avec légèreté, avec la voix de quelqu’un de mon âge… ça a été, je pense, un catalyseur d’énergie de dingue pour des filles jeunes et moins jeunes.

Et le fait de trouver écho, ça a été aussi ma thérapie. »

À travers le blog, Charlotte donne ses astuces pratique bien-être et beauté pour accompagner les personnes malades, et finit par lancer The Fighting Kit, des box beauté pour gens atteints de cancer.

Sa communauté grandit, elle est engagée, mais plus le temps passe, plus elle souffre de ressasser en permanence le cancer et le combat qu’elle a mené contre lui :

« Maintenant, faut transformer le truc. Il faut continuer à donner du sens, mais pas ressasser le cancer toute la journée, ce que le blog et les box me faisaient faire. »

Transformer, faire de sa maladie le point de départ d’un cercle vertueux, c’est en partie Instagram qui a aidé Charlotte à le faire. Instagram a été un outil tremplin, et un moyen d’expression qui lui a permis une sincérité dont elle ne peut plus se passer.

En 2018, elle décide d’arrêter les box The Fighting Kit et de lancer le vestiaire engagé Mister K, qui s’inscrit dans la parfaite continuité du blog, puisque Charlotte en est le dénominateur commun :

« Avec Mister K, on a un engagement qui est au cœur de l’histoire de la marque.

D’abord, on reverse 5% de chaque vente à la recherche contre le cancer à l’hôpital Gustave Roussy, jusqu’ici on a réussi à verser 32 000€.

Notre autre part d’engagement c’est que chacune de nos pièces est brodée d’un mantra pour s’insuffler de la confiance en soi, de la force, se booster, etc.

Et enfin nous avons aussi un engagement du point de vue de notre sourcing et notre traçabilité de marque : 40% de nos productions sont fabriquées dans le cadre de ce qu’on appelle notre engagement zéro gâchis.

C’est-à-dire qu’on rachète des stocks de matière déjà existants, et on fabrique nos vêtements dedans, on ne crée pas de matière.

L’idée c’est de faire avec tout ce qu’on a déjà plutôt que de produire plus.

Le K a aujourd’hui pris tout son sens avec cet engagement pour la recherche contre le cancer, et le Mister aussi parce que notre vestiaire s’inspire beaucoup du vestiaire masculin.

En fait la boucle s’est bouclée sans que ce ne soit réfléchi ! »

Instagram, un outil sincère pour un projet sincère

Rester proche de sa communauté, la solliciter, mais aussi vendre ses pièces Mister K… Instagram permet à Charlotte une véritable transparence :

« Sur Instagram, notre communauté s’est fédérée avec un taux d’engagement très important très vite. On est une micro communauté, mais HYPER engagée.

Aujourd’hui avec le recul, je réalise que 80% de nos ventes sont générées grâce à Instagram. Ce lien qu’on a en direct avec la communauté, c’est hallucinant, il n’y a que sur Instagram que tu peux avoir un truc pareil !

Et autant de bienveillance, autant de participation, j’adore.

Les filles donnent des conseils, partagent leurs photos avec toi, te donnent des exemples de modèles qu’elles aimeraient que tu développes pour elles, etc.

C’est tellement génial.

Instagram est un réseau hyper précieux quand tu es une marque sincère. »

Si Mister K a été pendant longtemps le prolongement de la propre vie de Charlotte, le nouvel objectif qui lui a permis d’avancer après l’épreuve de la maladie, elle se réjouit de voir que de nombreuses femmes s’approprient aujourd’hui ses valeurs :

« Aujourd’hui j’ai pris goût à cette vie d’entrepreneuse, et je pense que c’est aussi très inconsciemment pour noyer ce qui fait mal, parce que j’ai toujours les mêmes séquelles vis-à-vis de la maladie.

Mais maintenant la vie est belle, j’ai un chien qui est extraordinaire et qui m’a beaucoup aidée à me relever, j’ai un nouveau mec avec qui on a des projets, dont des projets d’enfants avec la GPA…

Donc voilà, aujourd’hui les cases de ma vie se remettent en ordre, et je suis hyper fière de la marque qu’on a créée. Je dis « on » parce que maintenant on est deux, j’ai une associée, et une équipe.

Cette marque c’est mon bébé, et aujourd’hui notre bébé, mais au départ j’ai mis toute mon énergie dedans, c’était ma manière de ne pas penser.

J’y ai aussi mis toute ma colère, mais pour le meilleur, finalement.

Ce que je trouve trop mignon, c’est quand je vois les filles de l’équipe qui récemment sont allées filmer à Gustave Roussy l’équipe qui s’occupe des dons… J’ai senti que même ça ça m’échappait.

C’est elles maintenant qui reprennent ce flambeau de fierté et de se dire, putain, avec la vente de nos fringues on fait du bien !

Ce n’est plus que mon histoire maintenant, c’est elles qui se la sont appropriée.

Aujourd’hui ça touche même des filles qui ne sont pas concernées par la maladie, et c’est ça que je trouve très beau dans tout ce qu’on construit maintenant. »

Charlotte m’a donné une jolie leçon de vie, et si tu veux suivre son engagement personnel de plus près et la soutenir, rendez-vous sur les comptes Instagram @misterk et @charlotte_husson !

À lire aussi : J’ai 19 ans et j’ai enfin vaincu mon cancer

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Les Commentaires

1
Avatar de Polaire
11 février 2020 à 10h02
Polaire
Cette série d'articles commence bien, c'est inspirant !
1
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