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J’ai des taches sur 70% de mon corps, et je m’aime !

Julie, c’est la créatrice positive et solaire du compte @lafillequiadestaches. Atteinte d’angiomes sur 70% de son corps, elle est un modèle d’assurance malgré la violence dont elle est parfois la cible.

Pendant plusieurs mois, tous les 15 jours, tu verras défiler sur madmoiZelle des portraits d’instagrammeurs et instagrammeuses que tu connais peut-être, ou peut-être pas.

10 personnalités, qui ne sont pas forcément des stars d’Instagram, mais juste des personnes simples, au vécu empouvoirant, avec un message à faire passer, ou un contenu original à proposer.

Qui sont-ils derrière les likes et les K du réseau social ? Comment en sont-ils arrivés là ? Quel est leur message ?

Je vais tenter à travers ces 10 portraits de te le faire découvrir, et de peut-être te donner envie de les suivre.

Mais surtout, je l’espère, de te donner envie de t’affirmer et t’exprimer librement, comme elles et eux !

Retrouve les portraits déjà publiés

Si tu as apprécié ces portraits et les valeurs que véhiculent ces femmes et ces hommes sur Instagram, je te donne rendez-vous sur le site No Pressure by Instagram, une surprise t’y attend ! 

Publié le 13 janvier 2020

Positive. Puissante. Bienveillante.

Julie, créatrice du compte Instagram @lafillequiadestaches, est venue à la rédaction le jour de ses 38 ans, et ce ne sont que quelques-uns des mots qu’elle m’inspire !

Depuis qu’elle est née dans les années 80, Julie a des angiomes sur 70% de son corps. Les angiomes, ce sont des taches de naissance qui résultent d’une mauvaise circulation du sang.

C’est un problème cardio-vasculaire qui peut engendrer d’autres problèmes plus graves, mais dont Julie est épargnée.

Quand elle est née, ils n’étaient que 7 en France à avoir des angiomes aussi étendus.

Accepter sa différence quand on a des angiomes

Comme beaucoup de ceux qui percent sur Instagram, Julie ne pensait pas du tout possible d’atteindre les 17 000 abonnés en à peine un an et demi, et ce n’était même pas un objectif, en réalité.

« Le premier but de mon compte c’était de trouver des gens qui ont des angiomes comme moi, parce que je n’en avais jamais rencontré en étant adulte.

Quand j’étais jeune j’avais déjà vu des enfants avec des angiomes, mais pas autant que moi, et je m’étais dit que ce serait chouette de voir comment d’autres le vivent.

Parce que moi aujourd’hui je le vis très bien.

Ça a pris une ampleur à laquelle je ne m’attendais pas, je rencontre plein de gens, je me rends compte que j’aide aussi beaucoup de personnes qui sont complexées par leur poids ou par des angiomes, sans vraiment le vouloir. »

Quand elle se regarde dans un miroir, Julie ne remarque pas ses angiomes puisqu’ils font partie d’elle depuis toujours.

Mais au cours de sa vie le regard et les paroles blessantes des autres lui ont parfois fait détester sa différence :

« Ça a été longtemps difficile de m’assumer.

On me demande souvent si j’ai une recette miracle, je réponds que non, mais qu’en grandissant j’ai fini par m’accepter telle que je suis et apprendre à m’aimer, tout simplement.

J’ai un souvenir assez fort, quand j’étais en CP, d’une maîtresse qui me mettait tout le temps à côté d’un petit garçon qui avait la leucémie et qui n’avait pas de cheveux.

On faisait toutes les activités ensemble, nous étions vraiment les deux différents de la classe.

En primaire je n’ai pas de souvenirs qui m’ont vraiment marqués, j’ai grandi dans une famille qui ne m’a jamais fait me sentir à part.

Par contre, au collège et au lycée c’était l’hécatombe.

On déménageait souvent avec mes parents donc j’étais souvent la nouvelle, la nouvelle avec des taches. La fille qui a des taches.

Le nom de mon compte est parti de là parce qu’on me décrivait comme ça.

J’ai eu le droit à tout : des brimades, des moqueries, des insultes, on me balançait du ketchup, on imitait les « Indiens » en me voyant (rapport à la peau rouge), etc.

Et quand j’ai commencé à vouloir sortir avec des garçons comme toutes les ados de mon âge, c’était « non, je ne vais pas sortir avec la fille qui a des taches ».

Au début de l’âge adulte je suis partie travailler au Club Med pendant 9 ans, et là j’ai commencé à vivre ma vie.

Une fois que j’ai commencé à m’affirmer en tant que femme, à marcher la tête haute sans vouloir cacher mes taches, ça n’a jamais été un frein pour les garçons.

J’ai vécu quasiment 3 ans en République Dominicaine, et en 3 ans on ne m’a jamais demandé ce que j’avais alors que j’étais tout le temps bras nus avec la chaleur. »

Enlever ses taches, Julie y a beaucoup pensé quand elle a eu 14 ou 15 ans, l’époque du collège qui a été la plus difficile à vivre pour elle.

Suivie depuis toute petite par des spécialistes, elle a fait la douloureuse et coûteuse expérience du laser :

« J’ai fait des séances de laser pendant un an et demi, ce n’était pas remboursé par la Sécu, c’était hyper douloureux, je ratais l’école, et surtout ce n’était pas du tout efficace.

En un an et demi, j’ai juste eu de petits points blancs sur certains angiomes.

Je sais qu’aujourd’hui la technologie du laser a évolué mais je n’ai pas envie de le faire. J’y ai repensé il y a 4 ou 5 ans quand je suis arrivée à Paris (où je vis depuis 8 ans).

À la base je viens de province et j’ai vécu longtemps à l’étranger. Mais ici dès que je suis bras nus dans le métro, tout le monde se retourne, tout le monde me regarde, on me prend en photo, des gens hyper insistants me posent des questions.

Après avoir passé 9 ans au soleil avec des gens hyper accueillant, je me suis dit : Paris, c’est la capitale, les gens vont être ouverts d’esprit… eh bien non.

J’ai entendu des réflexions comme « t’approche pas, c’est contagieux », des choses que je ne pensais jamais entendre à notre époque !

Pendant très très longtemps, l’été, pour ne pas qu’on me regarde, je mettais des gilets et j’avais chaud. Maintenant c’est terminé, mais c’est aussi une question d’humeur du jour, comme tout le monde je pense.

Il y a des jours où on peut me regarde 150 fois et je ne vais rien dire, et d’autre où la première remarque va m’énerver. »

Les angiomes et le poids vus par @lafillequiadestaches

En dehors de la particularité de son épiderme, Julie m’a parlé d’elle-même de son poids.

S’affirmant dans tous les aspects de son corps et de sa personnalité, elle fait quotidiennement passer un message de body positivisme :

« Mon poids ça toujours été le yoyo, je n’ai jamais été fine de toute façon, mais je suis quelqu’un qui est hypersensible donc quand ça ne va pas, je mange et je stocke de la graisse.

Cette année par exemple, ça a été particulièrement compliqué. Forcément j’ai pris du poids, et même si je vis très bien avec mon corps, je sais qu’il faudrait que je maigrisse un petit peu pour ma santé.

Là j’ai entrepris un régime et je vais me remettre au sport, mais je ne serai jamais filiforme, ça je le sais.

Il y a des jeunes filles qui me demandent comme je fais pour accepter mon poids et mon corps, je leur réponds qu’il faut qu’elles soient en accord avec elles-mêmes.

Il y a 4 ans j’ai fait un régime pendant lequel j’ai perdu 35 kilos en 3 mois et demi, j’ai perdu très vite en faisant 17 kilomètres par jour et en ne mangeant que du poisson et des légumes…

Forcément j’ai perdu très vite, mais ensuite j’ai repris 10 kilos par an.

En tout cas pour moi ce n’est pas un complexe, je m’accepte vraiment dans toute l’entièreté de ce que je suis et je suis fière d’être ce que je suis. »

Sur son compte Instagram public, Julie respire la joie de vivre, et surtout, elle semble parfaitement à l’aise devant l’objectif, avec son corps, et même dans la nudité :

« La photo c’est quelque chose que j’ai toujours adoré, j’ai un appareil depuis très longtemps, j’ai toujours pris des clichés de moi et des autres.

Donc quand il a fallu se prêter au jeu d’Instagram et faire des photos, je l’ai fait avec plaisir.

La première photo que j’ai publié sur mon compte, elle a été faite avec quelqu’un que je considère comme ma petite sœur. Cette personne a été la première à me dire :

« Julie, tu peux être belle en mettant tes angiomes en avant. »

Avant je ne les montrais pas spécialement, je prenais juste des photos de moi, quoi.

Un jour cette personne m’a dit qu’elle allait venir chez moi pour faire un shooting où je serai nue. Je me suis dit qu’on n’allait jamais faire ça, mais elle a insisté… et on l’a fait !

Quand j’ai vu ses photos je me suis dit : woah, elles sont trop belles.

Maintenant je fais des collabs avec des photographes, mais sinon c’est mon iPhone et mes copines qui me prennent en photo ! »

Cultiver la différence, pour le meilleur et pour le pire

Même si la communauté de Julie est majoritairement bienveillante et positive, elle a, à plusieurs reprises, fait face à des vagues de cyber-harcèlement.

Bien qu’elle soit solide sur ses appuis, elle prend de plein fouet les insultes qu’on lui adresse parfois en messages privés ou en commentaires :

« J’ai eu une grosse période de harcèlement sur les réseaux, notamment deux semaines pendant lesquelles on m’a insultée, j’ai reçu des messages et commentaires hyper violents.

À la suite de ça je me suis dis ok j’arrête, j’en ai pleuré, ça m’a vraiment atteinte, donc j’ai fait une pause.

Je suis revenue une semaine après avoir mis mon compte en stand-by.

J’étais passée de 1 000 à 2 000 abonnés, et j’avais 300 400 messages de gens me disant que je ne pouvais pas arrêter, qu’ils avaient lu mon histoire et qu’ils me soutenaient.

Après cette période de harcèlement j’ai décidé de poster une photo de moi nue avec écrites sur mon corps les insultes que j’avais reçues. Sans que je ne l’ai prévu, c’est la publication qui a fait buzzer mon compte.

J’ai été contactée par Konbini, par Loopsider… et là j’ai halluciné. Je suis hyper touchée, il m’arrive plein de choses géniales. »

Pour autant, comme c’est dans sa nature, Julie a décidé de transformer cette expérience pour qu’il en ressorte du positif.

Elle a pour projet d’œuvrer pour sensibiliser les jeunes (et moins jeunes) à l’acceptation de toutes les différences, quelles qu’elles soient :

« C’est là que je me suis dis que j’avais peut-être quelque chose à faire sur les réseaux, et qu’il fallait que je parle de harcèlement, c’est un peu devenu ma mission.

J’ai un projet en tête, j’aimerais beaucoup intervenir dans les collèges et les lycées, raconter mon histoire, faire venir des intervenants.

En étant sur Instagram j’ai rencontré plein d’hommes et de femmes qui ont des histoires très belles à raconter à propos du handicap, du body-positive, etc. Il y a du boulot pédagogique à faire. »

Après un an et demi sur Instagram, ce que Julie retient de son expérience, ce sont les rencontres formidables qu’elle y a faites :

« J’ai notamment rencontré Claire, il n’y a pas très longtemps nous sommes allées au concert de Zazie.

J’ai un ami qui m’a offert deux places, donc j’ai fait un concours sur mon compte pour offrir la deuxième et c’est tombé sur elle.

Elle habite à Paris et elle a un angiome sur tout le bras droit, on avait hyper hâte de se rencontrer, et quand on s’est vues on s’est serrées fort.

C’était un moment très émouvant, on avait l’impression de se connaître, on n’arrêtait pas de se prendre en photo, on se regardait…

C’était tout de suite familial et émouvant, parce qu’on a vécu la même chose.

En rediscutant, elle m’a dit que je lui avais donné envie de mettre du vernis, parce que j’en portais, alors qu’elle avait toujours trouvé ça moche avec son angiome. »

Cette revanche sur la vie, une diseuse de bonne aventure la lui avait prédite…

Même si elle ne croit pas en ces choses-là, Julie me raconte cette anecdote, qui sera parfaite pour clore cette jolie rencontre :

« Cet été, j’étais au Franprix, et une diseuse de bonne aventure me chope à la sortie en me demandant si je veux qu’elle me lise l’avenir.

Je dis non je ne veux rien savoir, et je ne crois pas trop à tout ça. J’allais partir, mais elle m’a pris la main en caressant mes angiomes, et elle m’a dit :

« Elles vont vous porter chance, ces taches-là. »

Et elle est partie. Deux semaines après Loopsider m’appelait, et tout s’enchaînait. Je suis super contente de tout ce qui m’arrive. »

À lire aussi : J’ai ZÉRO seins et je m’en CONTREFOUS

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Les Commentaires

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Avatar de Toffee
16 janvier 2020 à 13h01
Toffee
Super article ! C'est une warrior cette meuf, transpirer la positivité comme ça après tout ce qu'elle s'est pris dans la gueule... Chapeau
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