En 1975, la plus punk des créatrices de mode anglaise Vivienne Westwood sortait un t-shirt blanc avec une photo de sein pile au niveau de la poitrine des personnes qui le portent, comme un geste de provocation contre l’hypersexualisation des boobs féminins.
À sa suite, en 1996, Jean-Paul Gaultier échauffait les esprits par ses vêtements dont l’imprimé anatomique grandeur nature donnait l’impression d’afficher son corps nu.
Aujourd’hui, plusieurs stylistes se mettent à réinterpréter ce motif trompe-l’œil du grand couturier désormais retraité, en faisant une tendance mode inattendue qui pointe l’absurdité de la censure des tétons féminins par certains réseaux sociaux, et leur hypersexualisation par la société. #FreeTheNipple but make it fashion.
L’imprimé seins nus en trompe-l’oeil devient une tendance mode

À l’instar de l’influent créateur belge Glenn Martens (qui a signé une collab haute couture avec la maison JPG pour ce printemps-été 2022, présentée en janvier) : il a ré-imaginé cette illusion d’optique pour Y/Project automne-hiver 2022-2023 (label pointu dont il est directeur artistique, en plus de Diesel qui est en plein retour de hype grâce à lui).

Le Français Olivier Rousteing l’a lui aussi réinterprété pour Balmain automne-hiver 2022-2023 (un signe annonciateur qu’il serait le prochain directeur artistique invité de JPG, car sa collab’ défilera en effet le 6 juillet 2022).

Outre la haute couture, le prêt-à-porter Jean Paul Gaultier s’offre aussi une collection capsule avec la styliste en vue Lotta Volkova pour un résultat qui regorge de fausse nudité. Même gimmick du côté de la créatrice londonienne Sinead Gorey et du créateur espagnol Sergio Castaño Peña.
Plusieurs personnalités ultra-médiatisés comme Kylie Jenner, Iggy Azealia, Demi Lovato, Maisie Williams, Aya Nakamura, Miley Cyrus, ou encore Bella Hadid, se sont adonnées à cette tendance mode ironico-érotique. Et c’est justement ce qui fait trembler Facebook et Instagram (propriétés du même groupe, Meta).
Le double-standard de la censure de tétons sur Instagram et Facebook continue
Car en même temps que ces imprimés questionnent ce qu’on considère comme un corps idéal, ce qui relève de la pudeur, et pourquoi l’on sexualise tant la nudité, ils challengent également certains algorithmes de reconnaissance automatisé de tétons féminins.
Les vêtements portés de la collab’ Lotta Volkova en particulier ont été plusieurs fois censurés d’Instagram, à cause de mamelons trop vraisemblables. Si bien que de nombreuses personnes se sont mises à retoucher numériquement leurs images pour y ajouter des cache-tétons, afin d’éviter que leurs publications ne soient supprimées. Même la créatrice a dû couvrir de petits cœurs blancs ces détails si dangereux aux chastes yeux d’Instagram. Une situation particulièrement ironique, soulignant toute l’absurdité du rapport de la société aux tétons féminins.
Alors qu’au même moment, le même genre d’imprimés portés aux nues par la mode peut être adopté sans sourciller par ces messieurs, sans provoquer la censure du groupe Meta. Couvrez ce sein que je ne saurais voir, sauf si vous êtes un homme, bien sûr.
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Crédit photo de Une : Captures d’écran Instagram.
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
Twitter et YouTube autorisent la nudité (sans contexte pour Twitter, contexte artistique / éducationnel nécessaire pour YouTube), donc visiblement aucune loi n'empêche Meta d'autoriser aussi les tétons féminins. Maintenant la question c'est à quel prix ? Est-ce que les stars d'Instragram sont prêtes à se faire démonétiser / moins bien référencer et est-ce que Meta veut s'assoir sur les revenus publicitaires de certaines marques qui risquent d'aller voir ailleurs ?
Ce qu'il serait surtout bien c'est d'avoir de la transparence et savoir qui fait pression pour que cette politique archaïque perdure chez Meta. Peut être que si les clientes savaient que les marques dont elles achètent les produits sont en coulisses dirigées par des personnes ultra conservatrices (pour ne pas dire réac) alors la donne changerait. La seule idéologie de Meta c'est l'argent, si avoir des tétons féminins sur Insta = plus de fric alors il n'y aurait déjà plus de censure il faut pas se leurrer. On parle d'une plateforme qui fait son beurre avec des contenus complotistes, haineux ainsi que la manipulation d'elections... Bizarrement cela semble déranger moins les annonceurs que les tétons des femmes