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Culture

Halftime, ou la revanche de Jennifer Lopez sur les années 2000

Au-delà de la préparation de son concert au Super Bowl en 2019, Halftime (disponible sur Netflix) montre que Jennifer Lopez a gardé la tête haute pendant une bonne partie de sa carrière, alors qu’elle faisait les frais d’un acharnement médiatique profondément raciste et sexiste.

Autant le dire tout de suite : j’ai regardé Halftime sans avoir d’affection particulière pour JLo, mais davantage parce que par temps de canicule, et après avoir passé deux heures devant un film d’espionnage sur la traque du criminel de guerre nazi Adolf Eichmann, j’avais besoin de souffler un tout petit peu et de poser mon cerveau.

Tourné juste avant la pandémie en 2019, Halftime raconte un moment charnière de la vie de Jennifer Lopez : alors qu’elle fête ses 50 ans, elle est choisie pour chanter à la mi-temps du Super Bowl (le fameux « halftime »), et pourrait bien enfin obtenir la consécration cinématographique tant attendue grâce à son rôle dans Queens, où elle brille dans le rôle de Ramona.

jlo queens

Évidemment, le ton est hagiographique, et JLo glorifiée, portée aux nues : une popstar au top de sa carrière, mais aussi une mère attentionnée, attachée à sa vie de famille, restée simple et accessible, en dépit de la fortune et de la célébrité. Un portrait de femme entière, déterminée, qui n’a plus rien à prouver… enfin presque.

Jennifer Lopez, une popstar qui voulait tout

Jennifer Lopez, c’est une carrière qui débute au milieu des années 90. Très vite, elle affirme ne pas vouloir se limiter : elle veut jouer, elle veut chanter, elle veut danser, et elle fera tout ça sans avoir à choisir.

Un choix de carrière ambitieux et complet qui pourtant lui attirera le mépris et les railleries de pas mal de médias. Car à vouloir tout faire, Jennifer Lopez a-t-elle tout bien fait ? On ne lui pardonne rien, ni les quelques navets de sa filmographie (mais qui à Hollywood peut se targuer de n’avoir joué dans aucun film un peu honteux ?), ni sa voix souvent critiquée comme assez limitée et pas franchement intéressante.

Mais ce que rappelle très justement Halftime, c’est que les médias n’en avaient finalement pas grand chose à faire des choix de carrière de JLo. Ce qui comptait, c’était de pouvoir commenter sa vie amoureuse, de pouvoir gloser sur son corps, de pouvoir dénigrer ses fesses, le plus souvent sous couvert d’humour. Et pendant une bonne décennie, ils ne se sont pas privés.

Lors des MTV VMA Awards de 1999, voilà par exemple ce que l’humoriste Chris Rock dit d’elle :

« Jennifer Lopez est là ce soir. Elle est venue avec deux limousines, une pour elle et une pour son cul. J’adore Jennifer, mais on ne dit pas assez merci à son cul. Je vois Jennifer à la télé remercier sa mère et son père et son prof de comédie. Dis merci à ton cul, meuf. Dis-lui merci avant que ton cul fasse une carrière solo, car c’est ton cul qui est la star du show. »

Plus récemment, c’est Ben Affleck, avec qui Jennifer Lopez s’est remise en couple, qui relatait la violence des propos à son égard : « Les gens ont été putain de méchants avec elle, toutes ces horreurs racistes, sexistes, cruelles qui ont été écrites sur elles, si on les écrivait aujourd’hui, on se ferait littéralement virer »

Dans Halftime, Jennifer Lopez réagit à la colère de son ex-ex par ces mots :

« Je suis latina, je suis une femme, je m’y attendais… toi non. Tu t’attends à être traité de façon juste. »

De la lassitude ? Plutôt une conscience aigüe des mécanismes médiatiques à l’œuvre quand on est une femme racisée issue d’un quartier populaire et qu’on ne s’en excuse pas. Qu’on garde la tête haute.

Le reflet des années 2000

Ces railleries, et le fait qu’elles soient adressées à une femme latina ambitieuse, apparaissent donc comme le reflet d’une époque où, pour coller aux standards de beauté, il valait mieux être blanche, blonde et très mince. Ne pas cocher ces cases signifiait être exposée à des attaques permanentes dont la violence était complètement banalisée.

En ce sens, Halftime rejoint les récents documentaires consacrés à Britney Spears et à sa descente aux enfers, où l’on constate l’ampleur du dénigrement et du harcèlement médiatique et publique que subissaient les stars de la pop pendant les années 2000, scrutées davantage pour leur vie intime que pour leurs albums ou leurs films.

jennifer lopez rehersal
Halftime – Netflix

Alors oui, on peut regarder Halftime pour prendre des strass plein les yeux et voir JLo en répèt’, en essayage, ou en dîner de famille à Thanksgiving, mais il permet aussi de voir le parcours hors du commun d’une popstar pleine de conviction et qui prend sa revanche après en avoir pris plein les dents pendant des années…

À lire aussi : Le retour des années 2000 rappelle combien elles glamourisaient les troubles du comportement alimentaire

Crédit photo : Netflix

Les Commentaires

4
Avatar de Imleanne
27 juin 2022 à 13h06
Imleanne
"I don't know her."
1
Voir les 4 commentaires

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