Dans cet océan de marasme qu’est le Totem Modzi, cet épisode aura un peu rebattu les cartes. Ils furent dix, mais ils sont en réalité trois contre sept — et ça n’aurait pas été le cas avec un peu d’esprit stratégique, deux rounds plus tôt.
Les ex-rouges ont désormais trois rounds gratuits, et seul un rituel peut sauver les miches des minoritaires. Les destins liés groupent les candidats deux par deux, et à l’instar des yakuzas liés par le sang, ils tombent deux par deux. それはコラヌタです [« Koh-Lanta » en japonais ]. Tehehuira va-t-il réussir à ressortir via ce mécanisme une troisième fois de suite sans même participer ? Voyons.
C’est le jour de la marmotte des deux côtés du jeu. Dans la résidence du jury final, « on a mal joué », se désole Anne-Sophie.
En vérité, c’est surtout un manque de chance – les rouges n’ont pas assez étalé leurs votes et c’était une chance sur deux, il n’y a pas grand-monde à blâmer. Dans le jeu, Olga se réveille avec la gueule de bois et pleure un allié perdu. Et je viens de résumer l’intro des cinq derniers épisodes.
Biathlon bizarre
Mais ohlalalalalala les ami·e·s. Un insert pas terrible de bouteille qui flotte mollement nous annonce une épreuve de confort qui fait son grand retour dans la mythologie de Koh-Lanta : la dégustation d’un truc dégueu.
Et par « un truc », comprendre : des vers de coco, livrés partout autour du monde pour Koh-Lanta, prévisible mais peut-être un peu moins condescendant que le schéma : « c’est dégoûtant pour vous mais les locaux adorent ça. » En vrai, même après trente jours de privations, un sandwich triangle Casino me paraîtra toujours vaguement pire et moins nutritif qu’un gros ver décapité, et pardon si je viens de torpiller un brand content.
Denis rappelle ce qui arrive traditionnellement aux Lantos quand ils ne sont plus que dix. L’un « entraînera l’autre dans sa chute » (toujours une légère satisfaction à dire cette phrase toute faite, on le sent). C’est aussi une belle manière de jauger qui est en bonne posture, en l’occurrence Ambre, très populaire, et François, qui a l’air aimé de ses camarades. Ça tire quelques Apéricubes (couleur saumon et avocat), et ça nous donne :
Bastien avec Ambre, Olga avec François, Louana et Maxime, JC et Nicolas, et donc Fouzi et Géraldine.
En vérité, si les huit autres sont un peu malins, ils doivent tous penser de concert : cartonner le duo Olga/François. Une jaune en moins, une menace pour la victoire finale qui part avec, c’est gagnant/gagnant, et on peut même vaguement se dédouaner de l’autre éliminé, qui peut endosser le rôle de dommage collatéral. C’est comme ça que Téhé se faisait sortir, pour ne pas avoir à directement endosser la responsabilité de virer le petit ange de Koh-Lanta. C’eût été mon plan de bataille.
Au menu : un cafard, un ver de cocotier, et un ver de mangrove qui doit avoir un bon goût musqué d’eau stagnante. De l’autre côté, un scorpion, un scolopendre, un ver qui se tortille et un œil de poisson ; on peut donc choisir son repas, comme dans l’avion. Et comme les épreuves mythiques© sont aussi liées, le jeu est asymétrique — une fois le bazar mangé, les aventuriers doivent affronter l’épreuve de la boue, dans ce qui constitue un étrange biathlon de Koh-Lanta.
Même quand il s’agit d’ouvrir et fermer la mâchoire, Jean-Charles est dernier et se fait engueuler par Denis, c’est prodigieux.
Une page pub et douze référence à la série HPI plus tard, les candidats se tripotent (un peu trop généreusement pour certains) et font pleuvoir des jets de bouillasse dans des plans qui, personnellement, me mettent assez mal à l’aise. Ambre et Bastien gagnent une Wonderbox « Séjour Détente à deux », avec pêche, puis dégustation de langoustes. Le meilleur moment reste sans doute quand ils font semblant de se réjouir d’une assiette de légumes.
Mais, j’en suis sûr, vous vous posez une question d’importance : comment peut-on ajouter une surcouche « maudite » à l’équation ? On le sait sur l’épreuve d’immunité suivante, et c’est un peu mou : chaque membre du duo perdant doit inscrire une voix supplémentaire dans l’urne. Et j’ai sincèrement l’impression que c’était déjà le cas dans les autres saisons, mais soit. Le totem modzi peut aussi servir de blanc-seing pour les petites incartades arbitraires des autres saisons.
Corde raide
Pour éviter cette situation funeste, tous doivent s’adonner à un jeu d’équilibriste — un petit exercice de team building pour ce casting si LinkedIn-compatible — tenir sur une poutrelle maintenue de part et d’autre de vos jambes, et les deux tiennent le même bambou pour s’équilibrer sur l’autre axe.
Ça a même l’air un peu facile. JC et Nicolas sont les premiers à chuter après 33 minutes, et si tu avances quand je recule, comment veux-tu éliminer Olga et Nicolas qui viennent de gagner ? Eh bah voilà, c’est la défaite du bon sens. C’est la défaite du suspense, c’est la défaite de la télévision. Même Jean-Charles passe à un tiers de sourire pour aller inscrire son auto-vote tant le potentiel de l’épisode est flingué.
Coup double
C’est la dernière phase du jeu où il est possible de faire un peu de politique. Il reste quatre duos éligibles, un rouge sortira par définition, et il reste un duo à deux. JC et Nicolas peuvent être des cibles, tous deux en bas de la chaîne alimentaire de leurs équipes respectives avec Maxime.
J’ai aussi une pensée pour le duo Fouzi/Géraldine, qui est méta-menacé. Qu’est-ce que je veux dire par là ? Les gens toujours sans rapport avec la choucroute, qui errent dans le jeu au hasard selon le montage, ont souvent tendance à sortir à cette étape (parce que leur narratif ne va nulle part). C’est d’ailleurs le scénario qui semble émerger, vers trois autres duos… mais un retournement intéressant de situation s’amorce — tous les votes sont concentrés vers Maxime, ce qui fait sortir Louana dans la foulée. Le groupe des ex-(ex-)verts se préserve soudainement, une manière prosaïque de dire qu’on se dirige vers un trio final Ambre-François-Nicolas.
Deux rouges qui sortent pour le prix d’un dans un rapport de force qui ne s’inverse pas mais s’amenuise — on passe à cinq contre trois, mais il y a un vote noir dans l’équation et il y aura également une dernière épreuve éliminatoire la semaine prochaine, donc l’espoir d’un changement est permis.
La rédaction apprécie l’ironie de la situation. À force de se lancer des gnons ensemble, Maxime et Louana sont tombés de concert, ça ne manque pas de romantisme. Dans un conseil avec une minute chrono de banalités, cinq de votes, et dix de justifications lénifiantes. Le « plan humain, les valeurs, tu était une guerrière gna gna gna », le verbatim de François, on adore. Attention quand même, dans la mafia japonaise, les traîtres et les déserteurs doivent se couper les phalanges.
Et voici la fameuse liste de fin de récap :
- Fouzi, le M’bappé de la finance : « j’ai une grosse glotte. »
- Treize « entraînés dans sa/ma chute » ont été prononcés dans cet épisode (chiffre non-contractuel et dépendant d’éventuelles siestes et hallucinations auditives).
- Après une année à faire monter la sauce pour cette blague, Denis n’a pas dit « TOP POUR MANGER » sur l’épreuve de dégustation. Cette blague est désormais une construction sociale.
- Et comme dirait Napoléon : « L’important, c’est de gagner, et surtout de ne pas perdre. »
À lire aussi : Le récap salé de Koh-Lanta : Le Totem Maudit, épisode 11 — Un coup dans l’eau
Image en une : © capture d’écran TF1
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