Aujourd’hui, c’est le Black Friday. Ou peut-être hier, on ne sait plus. On a reçu des dizaines de notifications de marques : prix cassés. Click & Collect demain. Sentiments distingués. Cela ne veut rien dire. C’était peut-être hier.
Au fait, c’est quoi le Black Friday, d’où ça vient et pourquoi ?
Le Black Friday nous était peut-être encore complètement étranger en France avant 2013. La greffe a pris d’autant plus difficilement à cause des attentats du Bataclan qui ont eu lieu le 13 novembre 2015, un vendredi, associant fatalement l’expression « vendredi noir » à ce traumatisme national. Pourtant, les marques persistent et signent à proposer des offres toujours plus alléchantes, pour tenter d’installer en France cette période de promotion venue des États-Unis où elle suit Thanksgiving. Ce qui ne devait durer que 24h se prolonge tout le week-end jusqu’au lundi (surnommé Cyber Monday), voire commence toujours un peu plus tôt (au point qu’on parle même de Cyber Week ou de Black Week).
Toujours est-il que proposer une courte période de forte promotion peut avoir pour effet de provoquer l’acte d’achat, plutôt impulsif, faute d’avoir le temps de réflexion. C’est une technique marketing semblable qui régit les soldes, ventes privées, et autres « Journées privilèges », etc. Qu’importe l’expression pourvu qu’on ait l’ivresse de la surconsommation.
Le Black Friday, prétexte pour cette performance qui dénonce les ravages de la fast-fashion
Or, à l’heure de l’urgence écologique, une partie grandissante du grand public, mais aussi de marques (qui affichent alors fièrement ne faire aucune promotion ou réductions et ainsi s’adonner à un « Green Friday ») veulent dénoncer à ce matraquage. À la croisée de ces prises de conscience, Le Bruit qui court (collectif d’artistes, activistes et artivistes qui veulent mettre l’art au cœur de l’engagement pour la justice sociale et écologique) a donné une performance sur le parvis du centre commercial du Forum des Halles au cœur de Paris, capitale mondiale de la mode, le 24 novembre 2022, soit la veille du Black Friday.
À partir de midi, une dizaine d’anonymes du collectif ont commencé à amasser au sol des vêtements, d’abord noirs, puis colorés, formant un grand carré d’environ 20 mètres par 20 mètres. Ces fringues venaient des bornes de collecte Le Relais, donc envoyés au recyclage par des Françaises et Français. Au bout d’une trentaine de minutes à réunir littéralement une tonne de vêtements de façon volontairement désordonnée, en les malmenant et les piétinant, le collectif s’est ensuite mis à danser. Et ce, dans une forme de va-et-vient de part et d’autres du carré ainsi formé, comme une vague de tendances incessantes nous donnant envie d’acheter, de jeter, et de recommencer encore et encore. À la fin de la performance, les vêtements colorés formaient les mots « Stop Fast Fashion » sur un fond de fringues noirs.
La fast-fashion fait des ravages tous les jours et partout, pas que pendant le Black Friday
Si cette performance a eu lieu à la veille du Black Friday, jour de promotion éclair pour mieux inciter à l’hyperconsommation, son questionnement va bien au-delà de ce jour de promotion éclair qui nous incite à l’hyperconsommation. À l’heure où l’on réfléchit sans doute aux cadeaux qu’on pourrait offrir à ses proches pour Noël ou Hanoucca, il convient donc de s’interroger sur nos habitudes d’achats, en particulier en matière de mode, industrie particulièrement polluante.
Autour de cette performance, se trouvait la compagnie Malaxe qui l’a imaginée et mise en scène. Mais aussi le collectif En Mode Climat (coalition d’acteurs privés du secteur pour une mode plus responsable), ainsi qu’une délégation de Ghanéens qui travaillent sur le réemploi des vêtements envoyés au Ghana (où ils finissent surtout par y former une décharge à ciel ouvert tant les quantités sont importantes). L’ONG The Or Foundation et des vendeurs de vêtements de seconde main du marché de Kantamento (à Accra au Ghana) étaient également présents pour sensibiliser le grand public à ce problème mondialisé, qui perdure bien au-delà du Black Friday.
Crédit photo de Une : Capture d’écran YouTube.
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