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Capture d'ecran Youtube du compte Mûre et Noisettes
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Je suis frugaliste : je vis en dépensant moins de 1000 euros par mois (et je vais très bien)

À 28 ans, Raphaëlle, alias Mûre et Noisettes, pratique le frugalisme. Concrètement, elle fait très attention à son budget et économise près des trois quarts de ses revenus. Elle raconte à Madmoizelle sa vie minimaliste qui la comble totalement.

« Je m’appelle Raphaëlle, mais vous me connaissez peut-être sous le nom de Mûre et Noisettes sur les réseaux sociaux. J’ai 28 ans, et il y a quelques années, j’ai créé ma chaîne YouTube pour parler de sujets qui m’intéressent et s’entrecroisent : de cuisine, de véganisme, d’écologie… mais aussi de mon mode de vie minimaliste. Je vous raconte mon parcours et comment j’en suis venue à dépenser peu, très peu. Et je vous rassure, cela ne m’empêche de profiter de la vie et d’être heureuse.

J’ai commencé à épargner très jeune

Parce que le rapport à l’argent varie grandement selon les personnes, on peut expérimenter la sobriété de nombreuses manières différentes. Pour moi, cela a commencé avec l’envie de me mettre en sécurité financièrement.

J’ai vu mes parents gagner des revenus confortables. Je n’ai jamais été soumise à la peur de manquer, mais ils m’ont donné l’exemple d’un rapport assez rigoureux à l’argent : j’ai toujours vu mon père faire ses comptes, refuser tout crédit à la consommation, et dépenser moins que ce qu’il gagnait, épargner. Enfant, je posais beaucoup de questions et mes parents ne m’ont jamais caché le moindre détail. J’ai toujours eu une idée assez claire du prix de chaque chose, d’une maison à un objet du quotidien. 

Même si mes parents ne sont ni particulièrement économes, ni frugalistes, je pense qu’ils m’ont transmis certaines valeurs et certaines habitudes liées à l’argent. Par exemple, ils m’avaient ouvert un compte épargne très tôt, et ils m’en parlaient souvent. Quand ils me donnaient de l’argent de poche, ils me laissaient toujours le choix d’en épargner une partie, même si je ne savais pas exactement ce que cela voulait dire.

Je n’ai jamais vraiment aimer consommer

Je crois que je n’ai jamais été particulièrement consommatrice, et je ne me souviens pas d’un déclic net. Cependant, je me souviens que dès très jeune, l’idée de ne pas savoir ce que je voulais faire plus tard m’angoissais beaucoup. On me demandait quelles études j’aimerais faire, quel métier j’aimerais exercer, et pour moi, c’était le vide – je n’en savais rien.

Je me disais que j’allais avoir besoin d’options, d’explorer un peu et que pour cela, il me faudrait de l’argent. En prévision, à 13 ans, j’ai commencé à faire du baby-sitting et à épargner tous mes salaires, à être économe en me disant que ce que je mettais de côté pourrait me servir de filet de sécurité au moment fatidique des études supérieures.

Et puis, il y a eu ma propre curiosité, et mon attrait pour ces questions. Le temps est passé, et à 17 ans, j’ai su que je quitterai la maison familiale l’année suivante pour mes études. Pour préparer ce départ, j’ai commencé à m’intéresser aux questions de budget : comment le gérer ? Combien pouvait coûter un loyer, une semaine de course, une facture ? Mes parents avaient les moyens de me soutenir pendant mes études, mais je tenais à leur coûter le moins possible, surtout en sachant que je risquais de changer d’avis rapidement.

J’ai lu des récits d’expériences, des témoignages de personnes qui vivaient avec 0 € par mois qui m’ont aidé à comprendre que dans certaines situations, il était possible de ne pas dépenser absolument tout son salaire. À l’inverse, je voyais aussi des gens enlisés dans des crédits qui partageaient leurs regrets, et qui disaient ce qu’ils auraient fait différemment.  

Quand j’ai eu mon bac, entre le baby-sitting, l’argent des anniversaires, mon argent de poche et des ventes de vide-greniers, j’avais environ 15 000 € de côté. Même si on m’encourageait à m’en servir ou à partir en voyage avec, j’ai choisi de ne pas y toucher.

Les débuts du frugalisme

J’ai commencé mes études, et à vivre une sobriété plutôt imposée : mon copain et moi avions des revenus sous le seuil de pauvreté, et nous n’avions pas vraiment le choix de consommer ou non. Progressivement, différentes valeurs sont venues se mêler à ce mode de vie.

D’abord, mon copain et moi sommes devenus végans. À partir de là, on a commencé à se renseigner sur l’écologie, sur notre empreinte carbone, et cela a déclenché des réactions en chaîne. 

Car pour ma part, la sobriété, c’est notamment une question d’écologie. Consommer, c’est polluer : d’ailleurs, les personnes pauvres, même si elles ne se revendiquent pas écolo, polluent beaucoup moins que les personnes qui ont un gros revenu et le dépensent.

Refuser de consommer, ça réduit mon empreinte carbone et sur ce point-là, il n’y a pas à choisir entre éthique et économie, l’objet le plus écolo, c’est celui qu’on n’achète pas ! C’est une valeur importante pour moi, et elle me suit partout.

D’un point de vue plus personnel, je n’aime pas l’effet d’habitude qui va avec l’argent, cette idée que plus on gagne, plus nos dépenses augmentent, au point qu’on ne peut plus revenir en arrière sans frustration. Je trouve ça assez toxique, cette idée que quiconque évolue dans son salaire évolue aussi dans ses dépenses : cela veut dire qu’on ne répond pas à ses envies ou à ses besoins, mais à son salaire, et j’ai toujours voulu éviter de tomber dans ce cycle.

Enfin, du côté des projets, nous avions envie, mon copain et moi, d’acheter un logement. Nous tenions à être propriétaires du toit au-dessus de nos têtes, sans avoir à passer par un crédit auprès d’une banque.

C’est le croisement de tout ça qui m’a amenée vers la sobriété. Je ne me définis pas foncièrement comme frugaliste, minimaliste ou écolo — il y a plein de choses que je fais qui ne sont pas parfaites, ne collent pas parfaitement à ces étiquettes. Mais en gros, trois facteurs entrent en compte dans mon quotidien : l’écologie, le budget, et l’éthique. Je fais mes choix en fonction de ces trois facteurs, de et l’équilibre que je peux trouver entre eux.

Je ne suis pas à plaindre, loin de là

Avant toute chose, j’ai à cœur d’être transparente : mon mode de vie est lié à certains privilèges. Par exemple, la sobriété nous a permis, à mon conjoint et à moi, d’acheter sans crédit notre premier appartement — Mais il n’y a pas que ça ! Mes parents m’ont aussi donné 22 000 euros d’avance sur héritage, ce qui est loin d’être accessible à tout le monde. Même si ça pourrait arranger mon storytelling de dire « Je l’ai fait toute seule », il est important pour moi de rappeler que ce n’est pas parce que j’ai réussi à le faire que n’importe qui peut y arriver.

Car tout le monde n’a pas le même capital financier, ou le même rapport à l’argent. Il existe des études qui montrent bien que les affects liés au budget n’ont rien de neutre, et que les pauvres n’épargnent pas de la même manière que les gens qui n’ont jamais manqué de rien.

Vivre avec peu, quand on est précaire c’est stressant, ça peut être humiliant, et ça n’a rien à voir avec un choix : ma situation serait très différente si je n’avais pas de filet de sécurité, en plus des sommes très peu élevées que je dépense.

Par ailleurs, être en couple est un avantage indéniable, puisque la vie est plus chère pour les célibataires, et nous n’avons ni enfants, ni parents à charge.

Nous avons réussi à épargner 80 000 euros à deux

Ce cadre étant posé, il est temps de vous expliquer un peu plus en détail comment mon conjoint et moi avons planifié l’achat de notre appartement.

Tant que nous étions encore étudiants, nous avons pris l’habitude de bosser tous les étés en intérim. Ce n’était pas mal payé, même si c’étaient des boulots difficiles, et comme nous avions quatre mois de vacances, cela nous permettait de mettre nos salaires de côté.

Trois ans après mon bac, j’ai arrêté mes études et commencé à travailler dans un restaurant vegan, en service puis en cuisine. Mon salaire était assez bas (je gagnais environ 1 400 euros par mois), mais j’adorais ce que je faisais ! Je me disais « C’est bien de ne pas être trop dépendante de l’argent : ça me permet de continuer à faire ce métier, même si c’est mal payé ». 

Mon copain était toujours étudiant en alternance, et notre mode de vie n’avait pas changé donc je mettais la majeure partie de mon salaire de côté. Après des années à vivre avec très peu, cette paie à peine plus élevée que le SMIC me paraissait énorme.

Je faisais plein d’heures supplémentaires que mon patron n’arrivait pas à me payer. Du coup, on s’arrangeait : je pouvais récupérer énormément de nourriture au travail, et notre budget alimentaire était presque réduit à zéro.

On s’organisait pour utiliser le moindre avantage financier à notre portée, pour sortir le moins d’argent de notre poche possible. On ne dépensait que pour le strict nécessaire : on vivait dans des tous petits studios même en ayant la possibilité de louer plus grand, refusait les abonnements (Netflix ou autre) parce que ça gonfle un budget mensuel, et tous les loisirs étaient hyper réfléchis.

Notre budget établi ne nous empêchait pas d’aller boire des verres ou de manger dehors, mais c’était toujours prévu et encadré. À titre d’exemple, si on allait au restaurant, on ne prenait jamais de boisson parce que si on avait envie de boire un verre, c’était à un autre moment et sur un autre budget. Socialement, c’était très accepté : nos amis étaient étudiants aussi et ils ne dépensaient pas d’argent non plus.

En tout, on avait très peu de charges : le loyer, notre électricité assez basse (nous vivions dans le sud, et dans des petites surfaces, donc nous ne chauffions pas) notre budget alimentaire minuscule, 50 € de loisirs à deux pour le mois et les tickets restaurants que mon mec a commencé à toucher quand il est entré en alternance.

Être vegan a considérablement joué dans cette sobriété. À partir du moment où nous le sommes devenus, nous avons réalisé qu’il y avait des produits animaux dans beaucoup de vêtements, ça nous a calmé sur les achats de fringues ! Par souci écologique, on essayait de boycotter au max les enseignes de fast-fashion et de ne rien acheter. On louait des meublés et nous n’y ajoutions rien, pas de budget meuble.

En restant les plus sobres possibles, À 23 et 24 ans, nous avions mis 80 000 euros de côté à nous deux.

Acheter son appartement sans crédit

Nous avions une idée claire en tête, acheter notre logement. On ne voulait pas l’appartement de nos rêves, pas un endroit immense, juste pouvoir arrêter de payer un loyer. On a cherché un logement pas trop cher dans notre ville (Marseille), et sommes tombés sur un 39 m² à 100 000 euros en tout, frais de notaire compris que nous avons pu acheter et meubler avec notre épargne et l’aide de mes parents.

C’est à partir de là que nos économies ont commencé à devenir vraiment conséquentes, et à atteindre 70 % de nos revenus. Nous n’avions plus de loyer mensuel, étions entrés tous les deux dans la vie active, et ne souhaitions pas consommer plus. Moi, j’ai commencé à créer du contenu sur internet, et des marques ont commencé à m’envoyer des produits où à m’inviter au restaurant : ce sont des dépenses en moins, grâce aux avantages en nature de mon métier.

Un quotidien minimaliste

Nos courses nous coûtent environ 200 € par mois. J’utilise de temps en temps des applis anti-gaspillage comme Too good to go, et je pratique le freeganisme en récupérant parfois les invendus d’un magasin bio. Pour faire baisser ce poste de dépense, c’est très utile de connaître des recettes petit budget et de les intégrer dans ses repas de la semaine ! Pour moi, ça fait partie du travail : je fais régulièrement des défis comme « Manger une semaine pour 20 € » sur ma chaîne Youtube, par exemple.

Une fois ces dépenses alimentaires et nos charges fixes réglées, on s’est fixés 80 € de loisirs et 80 € de restaurants par mois à deux, et on se sert des chèques vacances de mon copain quand on veut partir. En tout, nous dépensons environ 800 € par mois à deux, sans avoir la sensation de nous priver et en se faisant plaisir.

Bien sûr, depuis que nous avons deux salaires, notre niveau de consommation a quand même un petit peu augmenté. On peut se permettre de sortir plus, d’avoir des loisirs payants, mais ça ne se ressent pas tellement sur notre épargne, parce que nous restons très en dessous d’un mode de consommation « classique ». On ne commande jamais de nourriture en livraison, prend très rarement à manger à emporter, on ne boit pas d’alcool… On essaie aussi de ne pas accumuler les petites dépenses irréfléchies, comme un café dehors le matin, ou les petits à côté.

Dans la consommation courante, il y a beaucoup de choses qu’on considère comme normales alors qu’elles tiennent du luxe : se faire livrer des repas par exemple, c’est une nouvelle norme alors qu’on peut parfaitement se cuisiner sa nourriture soi-même. Ne pas s’organiser, c’est un luxe aussi : planifier ses repas, prévoir ses vacances à l’avance, ça coûte bien moins cher, et avoir la flemme, ça coûte de l’argent !

Bien sûr, la charge mentale est importante à prendre en compte, et on a le droit d’avoir la flemme. Mais à mon sens, il faut avoir en tête ce que ça coûte, et avoir conscience des petits luxes qu’on s’offre sans en faire des habitudes. Même chose pour les dépenses plaisir : manger à l’extérieur, c’est un plaisir et si je le fais, je ne veux pas que ce soit par flemme, ou pour quelque chose que j’apprécie moyennement. Je veux que ce soit un bon moment !

Nous avons investi dans l’immobilier

En ayant un mode de vie sobre et des revenus devenant de plus en plus confortables, notre épargne a commencé à s’accumuler jusqu’à ce que la question devienne : que faire de cet argent ? Est-ce qu’on cherche des placements éthiques — et même, est-ce qu’il en existe, des placements éthiques ? Est-ce qu’on laisse tout sur un compte, quitte à perdre de l’argent en période d’inflation ?

Nous avons choisi d’investir cet argent dans l’immobilier. Dans un monde parfait et juste, ça n’est pas la solution la plus éthique, mais dans notre cas de figure, ça nous permet de nous protéger et de protéger notre argent, et à nos yeux, ça nous paraît plus juste que d’investir sur des gros groupes en actions, ou de le placer dans une banque qui investirait dans les énergies fossiles. 

Nous avons donc acheté (sans crédit, une fois encore) un studio à la montagne qu’on loue juste pour rentabiliser nos charges. On ne se fait pas de bénéfices dessus, mais c’est un endroit où on passe la plupart de nos vacances. Ça ne colle pas vraiment à la définition d’être frugaliste ou minimaliste, d’avoir une résidence secondaire, mais pour nous, c’est ce qui correspond à un équilibre entre toutes nos priorités et nos valeurs. 

Cet équilibre est une question qui se pose au quotidien, y compris pour les petites dépenses. C’est pour ça qu’il est difficile pour moi de me définir par une étiquette à laquelle je ne corresponds pas parfaitement. Mais ce n’est pas grave : on a établi ce qui était important pour nous, et en fonction, on s’arrange.

Moi, le truc sur lequel je ne vais pas faire d’écart, c’est le véganisme : ce sera toujours ma valeur principale de trouver que je ne peux pas consommer des animaux pour me simplifier la vie sur d’autres points. Sur le reste, cela peut varier — parfois, je choisis l’option la plus économique sur la plus écolo, et c’est ok ! Sans tomber dans le relativisme absolu ou la déculpabilisation extrême, il faut aussi pouvoir prendre ses décisions sans culpabiliser ou se faire du mal.

À lire aussi : Marine, 1 845 € par mois à deux « Je paie environ un tiers de nos dépenses communes »

Crédit photo : Capture d’écran YouTube / Mûre et Noisettes

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