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Un homme en train d'embrasser les cheveux d'une femme et de lui offrir des roses // Source : Shironosov de la part de Getty Images
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« Profem », « #MMM » : ces hommes qui manipulent les discours féministes et sex-positifs pour séduire

Dans une période où de plus en plus d’hommes cisgenres et hétéros se revendiquent « pro-féministes », beaucoup de femmes, de leur côté, dénoncent une appropriation du mouvement dans le simple but de perpétuer les schémas de domination masculine en place dans notre société.

À première vue, ils redonnent espoir en l’avenir. Un futur où l’égalité femmes-hommes est enfin effective sur tous les plans. Qu’on les rencontre au travail, sur internet ou en soirée, ces hommes cisgenres et hétérosexuels qui se disent pro-féministes nous séduisent avec leurs beaux discours à base d’anti-sexisme et de déconstruction des masculinités. Et si, historiquement, ils sont considérés comme des alliés au combat féministe, ils sont malheureusement bien souvent problématiques. Noémie, 27 ans, s’en est récemment vite rendu compte  : 

« J’ai rencontré ce mec sur Tinder avec qui ça a tout de suite matché, principalement parce qu’il se disait hyper féministe. Il suivait des comptes sur Instagram qui libèrent la parole sur les sexualités féminines, se disait pour des relations plus bienveillantes, parlait beaucoup de l’égalité femmes-hommes… Même physiquement, il était aux antipodes du mec viril. Mais plus le temps passait, plus je me rendais compte que son comportement était plus problématique qu’il ne le laissait croire. »

Mais alors, pourquoi le discours des hommes qui se revendiquent pro-féministes finit-il toujours par nous déranger profondément ?

@madmoizellecom

Concrètement, vous savez ce qu’est un profem ? 🤔 madmoizelle concretement profem #feminisme

♬ son original – Madmoizelle – Madmoizelle

S’approprier le discours féministe pour mieux choper 

Pour Anaïs Bourdet, militante féministe et créatrice du Tumblr Paye ta schnek, c’est tout simplement parce qu’il s’agit la plupart du temps d’un discours totalement creux : 

«  Leurs discours ressemblent souvent à des pages Wikipédia apprises par cœur. Ces mecs reprennent les expressions génériques associées à la lutte féministe, comme l’égalité salariale par exemple. Les profems adorent utiliser les mots techniques qu’ils ont repérés, mais ce n’est qu’une façade pour donner une bonne image d’eux. »

Une appropriation d’un discours féministe devenu aujourd’hui populaire et qui, de fait, est plus accessible. Charline Vermont, formatrice en santé sexuelle et animatrice du compte Instagram Orgasme et moi sur la sexualité bienveillante, partage l’avis d’Anaïs. En effet, elle aussi a constaté que les hommes cisgenres et hétéros s’étaient massivement approprié le discours féministe, notamment celui autour de la sexualité positive : 

«  J’ai lancé il y a 4 ans le hashtag #MMM [qui signifie « Meufs Mecs Merveilleux.ses », ndlr] pour que l’on puisse se reconnaître entre personnes volontaires pour porter la charge éducative sexuelle et s’éduquer au consentement sexuel. Malheureusement, ce hashtag a été beaucoup repris sur les réseaux sociaux et les applications de rencontre par les mecs cishétéros, à l’instar du hashtag #jouissanceclub, sans qu’ils aient vraiment pris le temps de réfléchir au consentement. Des phrases comme « mon podcast préféré c’est Les couilles sur la table » ont fleuri dans le seul et unique but de choper. »

Déconstruire les masculinités, ou comment dépolitiser le discours féministe et servir ses propres intérêts

Mais alors, tous les hommes cisgenres et hétéros sont-ils des gros sexistes cachés qui ne pensent qu’à choper sans une once de culpabilité ? Ne sont-ils pas capables de s’intéresser sincèrement à la lutte féministe et d’y participer de façon bienveillante ? 

Pour le YouTubeur trans Léo, qui a récemment sorti une vidéo au sujet du créateur de contenus profem Ben Névert dans laquelle il analyse le discours de ce dernier sur les masculinités déconstruites, c’est l’incapacité des hommes bourgois à reconnaître leurs privilèges qui empêche ces derniers précisément d’être de véritables alliés :

« Certains ont vraiment à cœur de lutter pour le féminisme. Le truc, c’est que l’incapacité des hommes bourgeois à reconnaître qu’ils profitent du patriarcat les rend incapables de lutter activement pour le démantèlement des structures de pouvoir. Leur discours relève plus d’un jeu d’équilibriste entre leur petite conscience morale, leurs idéaux d’égalité et leurs intérêts. Et c’est un phénomène qui s’appliquent également aux questions liées au racisme, à la transphobie, au validisme, etc »

Ces hommes pro-féministes bourgeois que l’on croise en soirée ou sur Tinder et qui ont un discours moralisateur autour de la déconstruction des masculinités sont donc avant tout des personnes pour qui déconstruire le patriarcat n’a aucun intérêt, car leur participation à la lutte consisterait à abandonner leurs privilèges, explique brillamment Léo dans sa vidéo : 

« La masculinité déconstruite est une masculinité bourgeoise sans cesse en évolution qui se reconfigure selon les demandes de l’époque. C’est d’ailleurs une masculinité qui est en passe de devenir la masculinité dominante.

Seulement, lutter contre le sexisme revient à remonter à sa source, qui se trouve dans les structures de pouvoir qui organisent notre société et qui sont systématiquement au profit des hommes bourgeois, justement, et au détriment du reste de la population. Ces derniers n’ont donc aucun intérêt à changer ces structures de pouvoir. Eux, ce qu’ils veulent, c’est aménager ces systèmes de pouvoir afin de pouvoir naviguer en leur sein, tout en conservant leur privilège, mais la conscience tranquille. » 

S’éduquer, mais surtout, se taire 

La participation de ces hommes à la lutte féministe est-elle donc vaine ? Selon Anaïs Boudet, les hommes cishétéros peuvent tout à fait être de véritables alliés. À condition, dans un premier temps, de s’éduquer, mais surtout, d’écouter ce que les femmes ont à dire et se taire quoi qu’il arrive : 

« Si un homme veut participer à la lutte féministe, il doit inévitablement s’éduquer sur la question. Et, logiquement, s’il a bien compris tout ce qu’il a lu, il devrait simplement ne pas la ramener sur la question. Ça, c’est la première chose. Car même s’il sait des choses sur la lutte féministe, personne ne pourra comprendre mieux que les personnes sexisées ce que c’est que de le vivre au quotidien. Un vrai allié ne produit pas de discours. Il lit et il se tait, point »

Anaïs Bourdet, militante féministe et créatrice du Tumblr Paye ta schnek, officie desormais derrière le compte Instagram Mauvaise Compagnie.

Découvrez le BookClub, l’émission de Madmoizelle qui questionne la société à travers les livres, en compagnie de ceux et celles qui les font.

Les Commentaires

13
Avatar de Penny65
22 mars 2023 à 23h03
Penny65
Un peu de mal à tout comprendre moi aussi (mais c'est peut être parce que j'approche à grands pas de la soixantaine et que j'ai trop l'habitude du patriarcat toussa ...).
Par contre, il n'y a peut être que moi que ça gène (j'ai faille mettre "choque", mais c'est un peu trop fort) que l'article prenne comme exemple deux mecs (un mec qui reprend un mec, si j'ai bien compris) qui expliquent que le problème "c’est l’incapacité des hommes bourgeois à reconnaître leurs privilèges qui empêche ces derniers précisément d’être de véritables alliés" : en fait, ce sont des hommes qui nous expliquent comment il faut faire pour être féministe, ou bien ... ?
Je ne connais pas trop de bourgeois, mais par contre je connais quelques machos bien "bourrins", et là, on est très loin de la masculinité non déconstruite pour cause de bourgeoisie .
L'article était au départ sur les hommes qui utilisent le discours féministe pour séduire : en fait, ça a toujours existé, ça s'appelle des "beaux parleurs" : les nouveaux utilisent juste des outils différents et des références différentes, c'est tout. C'est désagréable d'être prise pour une quiche (ou une poire, je vous laisse choisir), et si ce n'était que ça, ça fait un peu mal à l'égo, mais ce n'est peut être pas si grave.
Sérieusement, là où il faut se méfier, à mon sens, c'est que ce véhicule de "faux féministe" peut être utilisé par des gens mal intentionnés : les relations toxiques, avec emprise etc, ça commence souvent par un homme "parfait", séduisant, compréhensif, attentionné ... "trop beau pour être vrai".
Faites attention à vous, les filles ... !
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