Live now
Live now
Masquer
feel-good-netflix
Série télé

« Feel Good » sur Netflix, la première série sur des lesbiennes où je me sens représentée

Déployée depuis 2020 sur Netflix, la série britannique de Channel 4 a signé son ultime saison début juin. Souvent acclamée par la critique, Feel Good n’avait, sur papier, rien pour m’attirer. Et pourtant…

Dans cet article, nous utiliserons les termes « non-binaire lesbienne ». Bien que l’expérience lesbienne soit souvent définie comme « une femme avec une femme », la réalité est plus complexe : pour de multiples raisons, certaines personnes ne s’identifient pas à la binarité du genre, mais se reconnaissent dans l’orientation sexuelle lesbienne !

Pour en savoir plus : Les lesbiennes non binaires ont toujours existé, un article passionnant.

Nous utiliserons aussi le pronom neutre « iel » pour désigner Mae Martin, la personne non-binaire en question.

En tant que lesbienne, il y a des moments où j’en ai ma claque des séries censées parler de moi.

Je sais, je ne devrais pas dire ça, on nous voit tellement peu qu’une représentation de temps en temps, ça peut faire du bien. Mais ça ne vise pas toujours juste, et souvent je m’ennuie devant !

Ma réticence face aux séries lesbiennes vient essentiellement de mon expérience avec The L Word. J’y suis pourtant attachée, c’est ma madeleine de Proust à moi… mais je n’ai de cesse de critiquer cette représentation de femmes riches, toutes très belles qui habitent à Los Angeles et dont les (pré)occupations sont souvent loin des miennes.

Bien que nous ayons eu droit depuis à quelques très beaux essais et exploits représentatifs (le couple de femmes dans Sense8, les adolescentes dans Sex Education, la lesbienne âgée dans Work In Progress ou le très tordu, mais délectable Killing Eve pour ne citer que celles-ci), mon impression générale reste mitigée face à des personnages lesbiens soit très sexualisés, soit très lisses, et qui ne font pas de vagues.

Feel Good, la « série lesbienne » qui a su me convaincre

Je reste donc toujours sur mes gardes lorsque je lance une série estampillée « lesbienne » (ou plus largement LGBTI+). Alors quand j’ai vu les images promo de Feel Good, j’ai soupiré et roulé des yeux…

Feel Good | Official Trailer | Netflix

Ni l’affiche ni le pitch ne m’enchantaient, mais finalement ce qui me décide à presser le bouton play, c’est l’apparence de Mae Martin, qui a créé la série et y joue presque son propre rôle. C’est une petite butch (« une femme qui utilise l’espace et l’occupe d’une façon que l’on pourrait qualifier de masculine », comme le définit une femme butch dans un documentaire), certes blanche et normée… mais sur Netflix, il est vrai que des butches je n’en croise que trop rarement, voire jamais, alors je me laisse tenter !

Très bien reçue par les critiques de façon générale pour ses qualités d’humour noir et grinçant, Feel Good fait cependant débat dans mon entourage majoritairement lesbien. Effectivement, tout n’est pas parfait dans cette série, mais elle laisse poindre quelque chose d’intéressant dans les modes de représentations lesbiennes : une personne non-binaire et masculine, en couple lesbien, se battant pour sa sobriété tout en naviguant entre ses problèmes familiaux et l’homophobie quotidienne.

« Le poids de la normativité sur les corps et les vies lesbiennes »

Ici, pas de misérabilisme ou de personnage tronqué : Mae est multi-traumatisé.e, mais iel navigue comme iel peut.

À la manière de la dernière et sublime saison de Master of None (entièrement centrée sur un couple butch/fem formé par deux Afro-Américaines qui n’arrivent plus à vivre dans le mariage) la série de Mae Martin recentre son sujet lesbien autour de la question du poids de la normativité sur les corps et les vies lesbiennes.

J’ai été frappée — d’abord négativement — par la présence romantique des hommes dans la vie de Mae. Dans son rapport aux mecs, pour lesquels iel admet encore une forme d’attirance, Mae cherche avant tout une façon de prouver sa valeur. Sous cet angle, les références récurrentes à ses relations passées avec des hommes transparaissent non plus comme de simples relations amoureuses, mais bien comme une éducation coercitive à la validation masculine.

S’installe alors une forme de compétition : dans la société patriarcale, les couples lesbiens sont soumis non seulement au regard fétichisant des hommes cishétéro, mais également à une comparaison incessante avec eux. Mae n’y échappe pas. L’auteur.e en parle d’ailleurs à demi-mots, de ce sentiment d’infériorité :

« C’est une oeuvre de fiction, mais qui porte en elle une vérité émotionnelle basée sur des expériences vécues. Je suis sorti.e avec beaucoup de filles qui n’avaient jamais été avec une autre femme avant. C’est une dynamique romantique, mais aussi douloureuse. »

C’est cette complexité qui permet de lire Feel Good non pas comme une simple série montrant une vie romantique lesbienne, mais une création permettant de voir les côtés un peu plus sombres de nos parcours. Car la réussite de la série réside essentiellement dans le fait de parler de sexualité, non pas de façon triviale ou comme d’une « préférence », mais comme le produit d’une série de conditionnements, de rapport de pouvoir ainsi que des multiples obligations à l’hétéronormativité.

Même si elle s’avère imparfaite par moments, Feel Good s’éloigne des séries « à thème homosexuel » souvent superficielles, en incluant enfin le lesbianisme dans une construction diégétique plus complexe et finalement plus politique que le pitch ne le laisse imaginer. Et c’est, en soi, une petite prouesse.

À lire aussi : Yann Gonzalez : « Quand on crée un personnage de cinéma, il est pansexuel »

Les Commentaires
4

Avatar de Querencia
6 juillet 2021 à 07h13
Querencia
Je ne serais donc pas choquée si la VF la genre au féminin en tout cas au début puisque, sans se sentir tout à fait femme, Mae Martin se genre bien comme telle.

Ah bien sûr Après, ça ne serait pas la première fois que les traducteurs français passent à la trappe une non-binarité (Coucou She-ra et Double Trouble), pour ça que je préférais savoir si ses pronoms sont respectés tout le long
1
Voir les 4 commentaires

Plus de contenus Série télé

Sarah Michelle Gellar dans Buffy contre les Vampires // Source : D.R
Pop culture

Canneséries 2023 : Sarah Michelle Gellar (Buffy contre les vampires) est l’invitée du festival dédié aux séries

Pop Culture

Redécouvrez les origines des super-héroïnes Marvel à travers une collection de comics inédite

Humanoid Native
You saison 4 Joe // Source : netflix
Série télé

You : que sait-on de la cinquième (et dernière…) saison de la série Netflix ?

4
outlander-saison-7
Série télé

Outlander saison 7 : on a enfin la date de diffusion (et une mauvaise nouvelle)

jon snow game of thrones
Pop culture

Les séries HBO enfin de retour en France : c’est sur Prime Video, avec le Pass Warner

1
the last of us  // Source : HBO
Pop culture

The Last of Us : Dernière saison ? Date de sortie ? Tout ce que l’on sait sur la saison 2 de la série HBO

1
Auli'i Cravalho // Source : prime video
Pop culture

Le Pouvoir : date de sortie, où regarder, casting… Tout savoir sur la série féministe dystopique évènement de Prime Video

3
bang-bang-baby-critique-et-interview-canneseries
Série télé

Bang Bang Baby : vous allez prendre une gifle devant cette série sur une ado en quête d’amour paternel, sur Prime

Desperate housewives // Source : tmdb
Pop culture

Festival Séries Mania : dates, projections, invités… Tout savoir sur le festival dédié aux séries du monde entier

Daniel Bruhl dans le film A l'Ouest, rien de nouveau // Source : Netflix / Reiner Bajo
Actualité mode

Pour sa série sur Karl Lagerfeld, Disney+ a trouvé son casting haute couture, dont un étonnant Kaiser…

séries disney
Pop culture

Les 8 meilleures séries à voir sur Disney+

La pop culture s'écrit au féminin