Journée nationale de lutte contre le harcèlement scolaire
Ce 9 novembre, c’est la Journée Nationale de lutte contre le harcèlement scolaire. L’occasion de remettre en avant nos ressources sur le sujet et de sensibiliser à cette problématique qui touche beaucoup enfants. Retrouve tous nos contenus sur le sujet dans notre dossier !
Article publié initialement le 3 novembre 2016
Vous en conviendrez avec moi : l’œuvre de J.K. Rowling est remarquable à bien des égards, et même si elle tient place dans un monde magique, son réalisme et sa précision, notamment dans la construction psychologique de ses personnages, sont admirables.
Aujourd’hui, j’ai une colle pour vous : quel est le point commun entre Harry Potter, Ron Weasley, Hermione Granger, Neville Londubat, Luna Lovegood, Severus Rogue, Albus Potter, Scorpius Malefoy ou encore Mimi Geignarde ? La bonne réponse n’est pas qu’ils soient des sorciers, non.
L’angle avec lequel cet article va aborder la série vous aura peut-être échappé, et pour cause : les comportements adoptés par les personnages correspondent en tout point aux réactions de vraies personnes autour de nous. Cela ne saute pas aux yeux car ça nous paraît familier.
Les personnages listés ci-dessus sont exclus, rejetés, moqués par les autres élèves de leur école. Ce sont des victimes du harcèlement scolaire.
Ils nous ont fait de la peine durant notre lecture, mais leur présence ne nous a pas choqués. Cependant, n’avons-nous pas eu le cœur tout gonflé de joie lorsque, un à un, ces opprimés se sont révélés ?
Typologie des exclus de Poudlard
Avant même d’arriver à Poudlard, Harry Potter est une victime des autres élèves, à commencer par son propre cousin. Chétif, il n’a pas vraiment le physique d’un conquérant et fait figure de proie facile pour les esprits malveillants.
Lorsqu’une nouvelle vie s’offre à lui, avec son arrivée à l’école de sorcellerie, il doit faire face aux difficultés d’être un individu rendu célèbre malgré lui.
Il déchaîne sans le vouloir les passions, pour le meilleur comme pour le pire, et souffre d’être le centre de toutes les attentions et des jalousies. Cela va d’ailleurs assez loin, par exemple dans le cinquième tome, quand tout le monde pense qu’il ment au sujet du retour de Voldemort.
Hermione, quant à elle, est née de deux parents moldus (humain comme vous et moi), ce qui n’est pas très accepté dans le monde de la magie, qui privilégient les grandes familles de sorciers qui existent depuis des générations.
Elle est donc la cible des moqueries à cause de ses origines, avec une insulte dédiée, « sang-de-bourbe ». Élève brillante, elle passe pour une madame-je-sais-tout, ce qui n’est bien entendu pas du goût de tous ses camarades, qui ne sont pas très agréables vis-à-vis de son petit côté intello.
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Ron Weasley et toute sa famille vivent dans une très grande précarité. Leurs vêtements sont très usés, leurs livres toujours d’occasion et les petits plaisirs plutôt rares. Il n’en faut pas moins pour que la riche famille des Malefoy (et plus particulièrement le fils Drago) soit parfaitement odieuse avec eux et ne cessent de leur rappeler leur pauvreté.
Neville Londubat est un peu la bonne poire de service, plutôt ridicule avec son crapaud Trevor, il se fait régulièrement humilier par tous les autres élèves.
Luna Lovegood est l’excentrique de service, elle ne rentre dans aucun moule et est surnommée « Loufoca ».
Mimi Geignarde se cache dans les toilettes après avoir reçu des moqueries sur ses lunettes, se fait affubler d’un terrible sobriquet et les élèves continuent de s’amuser en venant l’embêter. Albus Potter souffre d’être le fils du grand Harry Potter et les rumeurs courent dans les couloirs de Poudlard que Scorpius Malefoy (le fils de Drago) serait le fils de Voldemort.
Avec cette énumération, vous l’aurez compris : dans son œuvre, J.K. Rowling donne sa chance à un grand nombre d’harcelés de prendre leur revanche !
Et typologie… des harceleurs d’Harry Potter
Là où J.K. Rowling frappe un grand coup, c’est qu’elle ne se contente pas d’avoir des personnages harcelés qui vont se rebeller. Elle montre aussi que certains individus, que l’on aurait voulu croire bons et gentils, peuvent aussi se révéler être des bourreaux.
Qui n’a pas grincé des dents devant le comportement profondément odieux de James Potter, le père d’Harry, ainsi que des Maraudeurs, à l’encontre de Rogue ? Moqué, humilié, Rogue est la victime injuste de James, Sirius et Lupin, ceux que l’on prenait pour des héros, et qui deviennent d’un coup d’un seul détestables.
Même Ron et Harry, nos deux compères, finissent par vexer Hermione, au point que celle-ci court se réfugier dans les toilettes… au moment où un troll attaque l’école (et elle leur sauve la vie).
Harry Potter, harceleur ? Même Hermione, victime directe, se montre très dure envers Luna Lovegood.
Alors bien sûr, le personnage qui incarne le plus directement le harcèlement est Drago, mais même si cela fait mal à nos cœurs de fans, la plupart des personnages dits « gentils » ont un comportement humiliant ou de témoin silencieux. Et cela a de quoi nous faire cogiter !
Le bien qui triomphe dans Harry Potter
Si vous avez lu la série, vous l’aurez remarqué et vous en aurez ressenti une profonde fierté : les personnages harcelés deviennent des héros de l’histoire. Chacun, à sa manière, va reprendre le contrôle de sa vie et claquer le bec de tous leurs détraqueurs détracteurs.
Par leurs qualités humaines remarquables, leur courage, leur persévérance, leur intelligence, leur bonté, ils vont s’imposer face aux autres. C’est finalement un beau message pour les harcelés : vous pouvez être des héros, quoi qu’en disent les autres.
Mieux encore : les personnages harcelés peuvent compter sur les autres, des adultes, des professeurs mais aussi des adolescents, pour prendre leur défense et pour prendre conscience de l’anormalité profonde de la situation.
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D’ailleurs, et c’est d’autant plus intéressant, les élèves qui prennent la défense des autres le font en lançant des sorts… qui échouent.
C’est le cas de Ron dans le tome 2, lorsqu’il défend Hermione face à Drago qui l’a encore une fois traitée de « sang de bourbe ». Il lui jette un sort, qui finit par se retourner contre lui : guérir la violence par la violence n’est pas la meilleure des solutions, même dans Harry Potter !
Hermione trouvera finalement le réconfort grâce à Hagrid, qui la rassurera sur sa valeur de sorcière en lui disant qu’elle est capable de réussir n’importe quel sort.
En clair, c’est l’amitié, la solidarité, le courage et la prise de conscience qui font que ces personnages méprisés vont finir par briller.
Les harceleurs peuvent être n’importe qui, même ceux pour qui l’on aurait de l’estime, et c’est bien ce que montre la série Harry Potter en refusant les personnages parfaits, en déconstruisant les figures de héros et en donnant du relief à ses protagonistes.
Ce qui est avant tout une manière de donner de la valeur et de la crédibilité à son œuvre participe aussi à apporter une pierre à l’édifice de la lutte contre le harcèlement. J.K. Rowling montre la complexité voire la cruauté que peuvent avoir les élèves les uns envers les autres tout en montrant des dénouements heureux et tout simplement justes.
Alors la littérature, en tant que fenêtre sur le quotidien, ne serait-elle pas un moyen de susciter une impression de reconnaissance au moment où le lecteur devient lui-même spectateur d’une scène de harcèlement dans sa vie quotidienne ?
Quand le lecteur verra un élève se faire humilier par un autre, va-t-il ressentir instinctivement le même malaise qu’il éprouvait lorsqu’il a découvert que Rogue se faisait malmener par James, et agir ? Le livre est un outil à ne pas sous-estimer.
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