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Source : Andrea Piacquadio / Pexels
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Victoria, 33 ans et ex-polyamoureuse : « J’ai envie d’être la priorité absolue de mon ou ma partenaire »

Chaque semaine dans Célib, des personnes de tous genres nous racontent les joies et les questionnements de leur célibat, qu’il soit choisi ou subi. Aujourd’hui, c’est Victoria qui, après s’être perdue dans une relation polyamoureuse intense, apprend à poser ses limites et à définir ses besoins. 
  • Prénom ou pseudo : Victoria
  • Âge : 33 ans
  • Lieu de vie : Paris
  • Orientation romantique et/ou sexuelle : bisexuelle

Depuis combien de temps êtes-vous célibataire ?

Je suis célibataire depuis deux ans, et je dois dire que j’apprécie cette période de ma vie.

J’ai mis du temps à découvrir (et surtout à assumer) ma bisexualité, que ce soit auprès de mes proches comme de la société. Quand j’étais adolescente, j’étais très timide, à vivre dans « ma bulle » et surtout, désespérément romantique. Je rêvais de voir un garçon tomber éperdument amoureux de moi, et que l’on fasse notre vie ensemble. Ayant eu un père absent et une mère à tendance dépressive, je crois que c’était un moyen pour moi d’échapper à ce quotidien un peu morose.

Mais cette vision très, très normée de la vie amoureuse n’a pas été facile à concilier avec la réalité. Il n’était pas question pour moi d’être perçue comme autre chose que la « petite amie » de quelqu’un, quitte à souffrir de ce statut… Résultat, à quinze ans, je me suis mise avec mon premier copain, avec qui j’ai aussi eu ma première relation sexuelle. Ça a été une catastrophe. Il pouvait être hyper cruel avec moi, à me délaisser ou à m’ignorer pendant des jours. Mais je restais quand même auprès de lui car j’avais l’impression que c’était « mon rôle ». Clairement, j’aurais aimé découvrir le féminisme à cette époque, cela m’aurait permis de ne pas tolérer ce type de comportement, de me blinder psychologiquement. Il a évidemment fini par me quitter pour une autre fille au bout de quelques mois. Ce qui, avec des années de recul, a été la meilleure décision à prendre car j’aurais été incapable de le faire, même si je me sentais misérable et malheureuse avec lui. 

C’est pendant mes années à la fac que j’ai vraiment découvert ce que c’était que l’amour et le plaisir. Après avoir bien profité de ma liberté avec des garçons, j’ai eu ma première relation sérieuse avec une femme. Nous sommes sorties ensemble pendant deux ans. C’est elle qui m’a permis d’explorer ma sexualité et mon identité. Même si la fin de notre relation m’a énormément fait souffrir, cette période a été une étape fondatrice dans ma vie amoureuse. C’est grâce à cette ex que j’ai vraiment pu m’assumer comme bisexuelle, et découvrir que j’avais le droit d’être aimée et respectée pour qui j’étais. 

Après cette relation, j’ai vécu plusieurs années de célibat choisi, durant lesquelles j’ai eu des sex friends et des coups d’un soir. Puis j’ai commencé il y a trois ans à explorer le monde du polyamour avec une de mes amies pour lesquelles j’avais développé de forts sentiments amoureux. Très vite, on a formé un couple toutes les deux, mais au bout d’un an environ, je suis aussi tombée amoureuse d’un garçon de mon travail. Comme nous étions toutes les deux partantes pour explorer de nouvelles formes de relation, nous avons ouvert notre couple au polyamour. Les débuts ont été incroyablement intenses, mais ça nous a demandé pas mal d’ajustements pour que chacun·e trouve sa place. J’ai vraiment compris à ce moment-là ce que ça voulait dire, « d’aimer » des personnes et d’établir avec elles une vraie connexion émotionnelle. Seulement après deux ans, j’étais littéralement vidée par ces relations. On croit à tort que les polyamoureux·ses sont des gens libertins, qui papillonnent à tout va et ont de multiples relations. Je peux vous assurer que c’est faux ! Ça demande tellement d’énergie, tellement d’investissement d’apprendre à communiquer, à s’assurer du consentement et du bien-être de chacun·e… Bref, un réel engagement à mille lieux du libertinage.

Malgré tous ces efforts et l’amour que je portais à mes deux partenaires, j’ai fini par perdre de vue mes propres besoins et limites et je n’arrivais plus à faire attention aux leurs. J’ai donc mis fin à ces deux relations fin 2021 en l’espace de quelques semaines. Je n’y arrivais plus, tout simplement. J’ai eu un besoin vital de pouvoir me retrouver et de me recentrer sur moi-même.

Depuis, je suis à nouveau célibataire et je profite pleinement de cette période de liberté. Je suis aussi plus au clair sur ce que je souhaite dans une relation et ce que je ne souhaite pas. Par exemple, je ne veux pas que ma future relation soit ouverte ou polyamoureuse. J’ai envie de tester ce que c’est, d’être la priorité absolue de mon ou ma partenaire, et qu’il ou elle soit aussi la sienne.

Aujourd’hui, je dirais que même si j’apprécie mon célibat, je ressens parfois un manque de tendresse et de complicité avec un·e partenaire. C’est aussi pour ça que je ne ferme la porte à aucune nouvelles rencontres et expériences amoureuses à l’avenir. 

À lire aussi : Eden, 25 ans : « Quand je parle de polyamour, les gens sont refroidis »

Comment décrirais-tu ton célibat ? 

Je dirais que mon célibat est une période enrichissante où je me concentre sur moi-même, sur mes passions et mes ami·es. J’adore la liberté que cela m’offre, mais parfois, je ressens un petit vide. Surtout durant l’hiver, où les sorties sont plus rares. J’ai essayé de me trouver un·e « mec ou meuf pour l’hiver », comme le fait aussi l’autrice Naya Ali, mais ça n’a pas donné grand chose de plus que quelques dates sympas, suivis de relations sexuelles décevantes. 

[Célib] Visuel intérieur • Citation (6)

Votre célibat a-t-il une incidence sur votre vie amicale ou familiale ?  

Mon célibat n’a pas vraiment d’incidence négative sur ma vie amicale ou familiale. Cependant, je dois admettre que parfois, je me sens un peu seule lorsque je vois mes ami·es en couple. Le fait de voir les gens suivre la voie traditionnelle couple-mariage-bébé me fait comprendre que ce n’est pas ce à quoi j’aspire aujourd’hui, mais je sens bien que je suis de plus en plus en décalage avec certain·es de mes ami·es. 

Votre célibat a-t-il un impact sur votre moral, au quotidien ?

Généralement, mon célibat a un impact positif sur mon moral. J’adore ne dépendre de personne, mener ma vie comme je l’entends sans avoir de compte à rendre. J’aime aussi être seule chez moi, dans un environnement qui me ressemble à 100 %. Aujourd’hui, même si je suis ouverte à me mettre à nouveau en couple, je ne sais pas si je serais prête à laisser quelqu’un·e entrer dans mon univers que j’ai appris à construire et à chérir seule. 

Pensez-vous qu’être célibataire vous permet des choses que vous ne pourriez pas faire en couple ?

Oui, absolument. Être célibataire me donne la liberté de faire mes propres choix et de suivre mes propres aspirations sans avoir à compromettre avec quelqu’un d’autre. J’adore le fait de pouvoir partir où je veux, quand je veux, sans attendre l’approbation de qui que ce soit. C’est ça pour moi, la vraie liberté du célibat.

À l’inverse, pensez-vous qu’être célibataire vous empêche de faire des choses que vous pourriez faire si vous étiez en couple ? 

Parfois, je pense que mon célibat peut m’empêcher de vivre certaines expériences, comme partager des moments intimes et des projets de vie avec un·e partenaire. Dur dur, par exemple, de projeter des sorties seule comme aller au restaurant. Par contre, je ne m’interdis pas de partir en vacances seule. L’été dernier, je suis partie trois semaines toute seule en Asie du sud-est et ça a été les meilleures vacances de toute ma vie. Contrairement à ce qu’on peut penser, on fait mille fois plus de rencontres en tant que célibataire à l’étranger qu’en couple. 

Le lieu géographique où vous vivez a-t-il un impact sur votre rapport aux relations amoureuses ?

Je pense que le lieu où je vis peut influencer mes rencontres et mes opportunités amoureuses, mais cela dépend aussi de ma propre attitude et de mes choix. Après, en vivant à Paris, les opportunités de rencontres sont bien plus vastes que si je vivais au fin fond de la Creuse. Mais je me demande aussi parfois si cette « offre illimitée » de rencontres ne rend pas les relations plus superficielles… 

Cherchez-vous activement à trouver une relation amoureuse ? 

Pour le moment, je ne cherche pas activement une relation amoureuse. Si elle vient à moi, tant mieux, sinon, je peux tout à fait m’en passer ! 

Le célibat amoureux a-t-il un impact sur votre vie sexuelle ? 

Mon célibat n’a aucun impact négatif sur ma vie sexuelle. Être célibataire ne signifie pas devenir abstinente. Je suis libre d’explorer ma sexualité seule, mais aussi de rencontrer des partenaires si je le souhaite via les applis. 

Est-ce que je ressens une forme d’injonction à être en couple ?

Oui, parfois, je ressens une pression sociale à être en couple, notamment par mes ami·es « casé·es » et qui ont parfois du mal à comprendre pourquoi moi, je ne le suis toujours pas. Même si je les adore, il leur arrive d’être maladroit·es ou un peu pressant·es, par exemple en voulant absolument me faire rencontrer quelqu’un·e de « parfait·e pour moi » alors que je ne leur ai rien demandé, et que ça ne m’intéresse pas vraiment.

Estimez-vous que le célibat a un impact sur vos finances ?

Je dirais que mon célibat a un impact neutre sur mes finances. Je n’ai pas à partager mes dépenses avec un·e partenaire, mais je ne bénéficie pas non plus des avantages financiers d’une relation partagée, comme la moitié d’un loyer et des courses. De manière générale, tout est plus cher pour les célibataires, ce que je trouve quand même un peu injuste. 

Avez-vous un budget « dating » ? 

Non, je n’ai pas de budget spécifique pour les rencontres, même s’il est vrai que payer les verres/repas lors des dates peut vite peser sur un budget. Par contre, je ne fais pas d’effort vestimentaire ou make-up particulier. 

Quels sont vos projets pour le futur ? 

Je n’exclus pas d’ouvrir mon coeur et mon univers à quelqu’un d’autre à l’avenir, mais ça n’est pas un « projet ». Encore une fois, tant mieux si je rencontre quelqu’un·e, sinon ce n’est pas la fin du monde. Je me contente très bien de moi-même et honnêtement, je suis la meilleure personne avec qui je peux être pour le moment ! 

De manière plus concrète, j’aimerais pouvoir déménager prochainement dans un appart plus grand, et continuer de profiter de ma famille et de mes ami·es. L’essentiel pour moi est de conserver cet équilibre que j’ai réussi à construire ces dernières années.

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