L’examen de la loi sur les séparatismes débute tout juste au Sénat, et déjà, on a peu de doute sur la teneur islamophobe du texte. Deux amendements sont passés concernant l’interdiction des signes religieux chez les parents qui accompagnent les sorties scolaires : avec 177 voix pour et 141 votes contre, la mesure a été adoptée par les parlementaires, malgré l’avis négatif du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. Un autre amendement a aussi été voté, concernant l’interdiction du port du burkini dans les piscines municipales.
Si elles n’ont pas été nommément désignées, ce sont bien les femmes qui portent le voile qui sont la cible de cet amendement porté par la droite qui va étendre la loi de 2004. Pour rappel, cette dernière interdisait le port de signes religieux à l’école ; plus de quinze ans après son adoption, la question de la laïcité à l’école ne semble pas plus apaisée, et la loi semble avoir passablement renforcé la stigmatisation de la communauté musulmane et diabolisé le port du voile.
En s’opposant à la présence des femmes qui portent le voile lors des sorties scolaires, on donne le feu vert à tous les Julien Odoul de France pour étaler leur haine des femmes musulmanes : on se souvient de la façon dont l’élu RN avait cherché à humilier une accompagnatrice qui assistait avec une classe au conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté…
À la suite de cet incident, le ministre de l’Éducation s’était déclaré favorable à l’interdiction du voile lors des sorties scolaires.
Une extension de la loi de 2004 sur le port du voile à l’école
Avec
l’amendement du sénateur LR Maxime Brisson qui vient d’être adopté, la loi de 2004 devrait donc concerner aussi les accompagnantes des sorties scolaires (car oui, ce sont souvent des femmes qui se portent volontaires), en dépit du fait qu’elles ne sont pas des enseignantes et ne sont pas donc pas soumises à un devoir de neutralité auquel sont soumis les fonctionnaires.
L’amendement vise à établir que « la même interdiction s’applique aux personnes qui participent, y compris lors des sorties scolaires, aux activités liées à l’enseignement dans ou en-dehors des établissements, organisées par ces écoles et établissements publics locaux d’enseignement. »
Bon. Et vous me direz : quelles sorties scolaires ? Nous sommes en pleine crise sanitaire. Et tandis que les taux de contamination crèvent le plafond NOTAMMENT dans les écoles, n’est-il pas scandaleux et navrant que certains sénateurs et sénatrices ont pour seule priorité de faire passer les mères qui portent le voile pour des menaces sur la République parce qu’elles accompagnent des enfants visiter un musée ou une ferme pédagogique ?
Et ce n’est pas la première fois que le sujet revient sur la table. En juin 2019, un amendement similaire avait finalement été retoqué en commission mixte paritaire après un vote du Sénat. Des manifestations de mères en colère avaient eu lieu pour protester contre cette mesure discriminantes, comme à Montpellier où une maman d’élève avait déclaré :
« À un moment donné, il n’y aura plus d’accompagnateur et d’accompagnatrice et il n’y aura plus de sortie scolaire. C’est triste pour les enfants. À l’école, on a besoin de nous quand il faut ramener des gâteaux marocains… »
L’amendement voté cette semaine sera-t-il lui aussi rejeté, après avoir une énième fois attisé les braises de l’islamophobie ambiante ? Affaire à suivre.
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