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Trois femmes en costume devant un point d'eau // Source : cottonbro studio de Pexels
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PFAS : dans quels vêtements trouve-t-on ces polluants éternels qui nous empoisonnent ?

Vous faites déjà attention aux ingrédients qui composent votre alimentation et vos cosmétiques ? Mais qu’en est-il de vos vêtements ? Car leurs matières premières nécessitent plusieurs étapes de transformation, parfois avec des produits chimiques controversés, comme le BPA ou les PFAS. Décryptage alors qu’une loi vient de passer en France le 4 avril 2024 pour limiter l’exposition à ces polluants éternels.

Si les PFAS étaient peut-être encore un mystère pour vous avant avril 2024, la France ne parle maintenant plus que de ça. Et pour cause : les député·e·s français·e·s ont adopté une proposition de loi visant à réduire l’exposition aux « polluants éternels », sans interdire les ustensiles de cuisine qui en contiennent. Notamment parce que la majorité alliée aux Républicains et au Rassemblement national aurait « cédé aux lobbyings de Seb [NDLR : qui détient notamment TEFAL], au détriment de la santé des Français », ont réagi les député·e·s écologistes, comme le rapporte l’AFP notamment relayée par Le Monde le 4 avril 2024. Outre les ustensiles de cuisine qui continuent de faire débat, les PFAS et d’autres polluants éternels se trouvent aussi dans des objets au plus près de nous au quotidien : nos vêtements.

Que sont les PFAS et pourquoi cela concerne aussi nos vêtements ?

Alors que le grand public sait de mieux en mieux faire la traque aux ingrédients indésirables dans l’alimentation et dans les cosmétiques, ce n’est pas encore le cas pour la mode. Pourtant, le secteur textile regorge aussi de substances pouvant être néfastes pour l’humain et l’environnement. Dont des fameux polluants éternels comme les PFAS (substances per- et polyfluoroalkylées) : des composés chimiques aux caractéristiques anti-adhésives et imperméables.

C’est ce que souligne le Guardian, prenant le cas du personnel navigant commercial de la compagnie aérienne Alaska Airlines. Suite à l’adoption au printemps 2011 de nouveaux uniformes, plusieurs membres de l’équipage de bord à commencer à souffrir d’éruptions cutanées et de problèmes respiratoires. La compagnie a fini par faire tester les tenues, ce qui a révélé une présence anormale de phosphate de tributyle, de plomb, d’arsenic, de colorants connus pour être allergisants, ou encore du fumarate de diméthyle (un antifongique tellement allergisant que l’Union européenne l’a interdit). Une étude de l’université de Harvard datant de 2018 a révélé que le nombre de personnel navigant souffrant de ce genre de symptômes allergiques a doublé depuis l’introduction de ces nouveaux uniformes. Certains employés ont même développé des maladies auto-immunes et/ou sont morts prématurément, sans que la compagnie aérienne, ni le fabricant d’uniformes (Twin Hill) ne soient tenus pour responsable. D’autres compagnies aériennes proposent des tenues de bord semblables, en polyester aux couleurs vives, soi-disant « haute performance », car antifongique et ininflammables, relève le Guardian.

Ces vêtements qui regorgent de substances controversées ou inconnues

Quand on se penche sur l’état de santé des travailleurs et travailleuses textile, surexposés aux produits chimiques utilisés dans la production de certains vêtements, ce genre de souci de santé s’avère omniprésent, en réalité, comme on peut le lire dans l’ouvrage To Dye For: How Toxic Fashion is Making us Sick – and How We Can Fight Back d’Alden Wicker, paru fin juin 2023. Si ce problème paraît flagrant pour les ouvriers textile et les professions où le port d’un uniforme s’avère obligatoire (je me souviens encore de mon uniforme Quick qui me provoquait de l’eczéma sur tout le corps…), les vêtements du quotidien peuvent aussi être concernés.

To Dye For How Toxic Fashion is Making us Sick – and How We Can Fight Back

Par exemple, en octobre 2022 le Center for Environmental Health de Californie a trouvé des niveaux élevés de bisphénol A (perturbateur endocrinien avéré) dans des chaussettes et des soutiens-gorge de sport en polyester-spandex de dizaines de grandes marques, dont Nike, Athleta, Hanes, Champion, New Balance et Fruit of the Loom. Les taux atteignaient parfois jusqu’à 19 fois la limite de sécurité fixée en Californie. Le mois suivant, c’est l’ONG Greenpeace Allemagne qui publiait les résultats de tests sur des articles SHEIN : 15 % des produits contenaient des produits chimiques dangereux qui enfreignent les limites réglementaires de l’UE. Début 2023, la marque de culotte menstruelle Thinx était reconnue coupable de contenir des substances nocives, dont des PFAS, des produits perfluorés quasi indestructibles qui s’accumulent donc dans l’eau, l’air, les sols, et les organismes exposés (d’où leur surnom de « polluants éternels »).

En France, des écologistes proposent une loi contre les PFAS

Il existe des plafonds à ne pas dépasser pour certaines substances réputées allergisantes chez certaines personnes. Cependant, encore trop peu d’études s’intéressent au potentiel effet cocktail de plusieurs ingrédients combinés, même en deçà des limites autorisées. Pire encore : plein d’ingrédients chimiques sont retrouvés sur des échantillons de vêtement sans qu’on soit capable de les identifier, pour l’heure, ce qui peut être inquiétant. Sans dire que toutes ces substances utilisées dans l’industrie textile (et ailleurs) sont mauvaises en soi, on a besoin de pouvoir les étudier isolément et combinées entre elles afin de savoir les identifier et en connaître l’innocuité ou non.

À la différence de substances controversées comme le BPA qui peuvent être métabolisés et éliminés par le corps une fois qu’on cesse d’y être exposé, d’autres s’accumulent dans l’organisme. Les PFAS en particulier (qu’on retrouve par exemple dans les vêtements aux matières anti-taches, utilisés pour des uniformes professionnels, mais aussi certains uniformes scolaires d’enfants, ou encore des vêtements se voulant imperméables), sont dans le viseur de certains gouvernements, dont la France. Car Certaines études lient les PFAS au développement potentiel de cancers, d’anomalies fœtales, de troubles de la reproduction, d’obésité et de dysfonctionnement immunitaire.

Le livre noir de la mode, de Audrey Millet
Dans son essai Le livre noir de la mode, l’historienne Audrey Millet évoque notamment la toxicité grandissante des vêtements.

Fin janvier 2023, l’historienne de la mode Audrey Millet présentait à Bruxelles auprès du Parlement européen un rapport sur la présence des produits nocifs dans les vêtements vendus en Europe. Et pour elle, comme pour le reste de l’industrie textile qu’elle a sondée, « le prochain grand scandale sanitaire sera la toxicité des vêtements. Pour l’heure, cela bloque sur les investissements qu’une démarche sur ces questions impliquerait », rapporte le média spécialisé Fashion Network. Dans son sillon, des écologistes français ont déposé en avril 2023 une proposition de loi visant à interdire les Pfas dès le 1er janvier 2025 quand ils ne sont pas indispensables, à contrôler sur l’ensemble du territoire national leur présence dans l’eau potable et à inscrire dans la loi le principe de pollueur-payeur pour les entreprises responsables de ces pollutions, relaie par ailleurs Libération.

BPA, PFAS… Concrètement, comment s’habiller sans s’intoxiquer ?

En attendant, qu’est-ce qu’on peut faire, concrètement ? On peut interpeler l’opinion publique et nos élus politiques concernant ce que le député écologiste Nicolas Thierry qui porte le combat contre les PFAS à l’Assemblée nationale et qu’il présente déjà comme « l’un des pires scandales sanitaires ». Et l’on peut s’informer, afin de choisir des vêtements de la façon la plus éclairée possible. Privilégier la seconde main, a fortiori s’il s’agit de vêtements bien vintage, utilisés, et non neuf, permet de se dire qu’une partie des substances controversées à pu partir au fil des lavages. Concernant les vêtements neufs, on peut se tourner vers des labels garantissant une certaine traçabilité comme bluesign, GOTS, et surtout Oeko-Tex. Il vaut mieux privilégier des matières naturelles comme le coton, la laine, la soie, plutôt que des matières synthétiques, a fortiori si elles se revendiquent anti-tache, anti-odeur, facile d’entretien, ou sans-repassage. Mieux vaut également laver tout vêtement neuf avant de le porter pour la première fois.

À lire aussi : PFAS : quels sont ces endroits où les polluants éternels sont présents ?


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