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Parentalité

Droit de visite des pères : la parole aux femmes

Le droit de visite des pères fait souvent l’objet de débats passionnés : entre justice, égalité parentale et protection des enfants. Mais au-delà des grands principes, que ressentent réellement celles et ceux qui le vivent ? Quand les décisions judiciaires croisent les réalités du quotidien, la théorie du « devoir de visite » se heurte parfois à des histoires bien plus complexes.

Emmanuel Macron a affirmé, dans un entretien diffusé par ELLE, mardi 7 mai, que les parents devaient exercer « leurs responsabilités » à « deux ». Le chef de l’État veut mettre en place une mesure exigeant des pères de famille absents qu’ils rendent visite à leur(s) enfant(s) jusqu’à l’âge adulte. Selon lui, ce devoir de visite doit faire comprendre aux pères que « c’est un devoir d’être parent, et que c’est un devoir qui ne s’arrête pas au moment du divorce ou de la séparation ».

Entre le devoir de visite imposé par la loi et le lien à reconstruire après une séparation, certaines femmes racontent des expériences douloureuses, parfois même dangereuses, trop souvent tues. Face à la proposition d’Emmanuel Macron d’instaurer un devoir de visite des pères, le débat s’enflamme : peut-on imposer un droit de visite quand le lien est rompu ?

Cette décision émerge dans un contexte où 85 % des familles monoparentales sont composées de mères seules. Ces familles seraient environ 1,7 million en France, selon les chiffres avancés par le chef de l’État.

Mais alors, que pensent les concernées de cette déclaration ?

L’avis de Mélissa, mère solo d’un enfant de 3 ans

« Honnêtement, j’avoue avoir été atterrée par cette annonce.

Autant, les dernières annonces du gouvernement envers des mesures possibles (comme semaine de quatre jours pour les parents séparés lors de leur semaine de garde, la mise en place d’un statut juridique pour la maman solo, etc.) étaient plutôt positives et tendaient vers la reconnaissance de ce modèle familial malheureusement de plus en plus répandu et pour lequel le quotidien est difficile.

Mais cette annonce me semble rétrograde et surtout complètement déconnectée de la réalité.

Pour moi, on ne peut pas forcer un père à voir son enfant. Je le vois pour le papa de mon fils. Il le voit de temps en temps, j’ai quelques SMS où il me dit que son fils lui manque, mais pas d’actions pour tenter de le voir davantage. Par exemple, actuellement, cela fait plus de trois semaines qu’il n’a pas pris de nouvelles.

Si un père ne veut pas s’occuper de son enfant, pourquoi le forcer ? Ce sera pénalisant, autant pour la mère que pour l’enfant. L’enfant peut ainsi nourrir certaines attentes envers son géniteur alors que finalement, ce dernier n’obéira qu’à une injonction du gouvernement pour éviter une amende.

Puis si, en plus de ça, le père est toxique, violent ou autre… À quoi bon le laisser dans la vie de son enfant ? Simplement pour que son père accomplisse un devoir qu’il n’a pas envie de réaliser ?

C’est triste, mais parfois, il vaut mieux l’absence d’un géniteur toxique ou peu investi plutôt qu’une présence en pointillé qui ne sera que plus difficile à vivre pour chacune des parties engagées.

Je trouve que cela montre une fois de plus la déconnexion du gouvernement sur les sujets familiaux ou la réalité des Français. »

L’avis de Lila, mère solo de deux enfants de 7 et 13 ans

« La proposition d’Emmanuel Macron de ‘forcer’ l’autre parent à respecter son droit de visite et d’hébergement, ou de l’obliger à en avoir un, est une bêtise totale.

Si le parent est démissionnaire, le forcer ne pourra avoir que des incidences sur le bien-être de l’enfant (ou des enfants) et la quiétude du parent gardien. Ma fille aînée ne voit plus son père depuis janvier 2020. Non pas qu’elle refuse ou que j’empêche son père de la voir, mais il a décidé lui-même de ne plus donner de nouvelles.

Contrairement à ce que certains hommes pensent, les mères — car majoritaires, donc je parle de cette majorité et non pas des cas particuliers de pères, même s’ils existent, mais sont peu nombreux — ne souhaitent que ça.

Que les pères prennent leurs responsabilités, prennent en vacances ou en week-end régulièrement les enfants, gardent le lien… Qu’ils se séparent de la mère, mais pas de leur(s) enfant(s) ! Sauf si l’autre parent est défaillant (avec des violences, des conduites à risques, etc.). 

Il y a encore trop de désinformations sur la monoparentalité. Je le vois en vrai chaque jour ! Pour certains, la PMA n’a pas sa place, par exemple. Ou bien les gens ne comprennent pas non plus qu’on puisse passer d’un boulot avec un bon salaire, à assumer seul(e) ses enfants, à autre job moins rémunérateur, et être en précarité financière. Ils ne comprennent pas qu’un choix de famille monoparentale n’est pas un excès de matriarcat et de féminisme exacerbé, mais souvent simplement un non-choix. Car parfois, le parent en face n’a jamais assumé son rôle de parent. Être parent, ce n’est pas faire qu’acte de présence ou filer de l’argent, c’est bien plus large et prenant comme rôle. »

L’avis de Paula, mère solo d’un enfant de 4 ans

« Personnellement, le père n’a pas reconnu mon enfant — d’un commun accord — donc je ne suis pas concernée.

Mais je pense à toutes les mères inquiètes de voir débarquer le père, non pas parce qu’il a envie de voir ses enfants ni qu’il ne les aime, mais parce qu’il est obligé.

Je pense aux enfants forcés d’être mis devant le fait que leur père ne les voit que s’il est obligé par la loi. À ceux aussi qui ne veulent plus voir leur père (ou 2ᵉ parent) et qui seront obligés, eux aussi, de subir cette situation. 

Si la relation entre les parents n’est pas saine et sereine, cette obligation de visite ne fera qu’empirer la situation. Et je ne parle même pas des conséquences pour les enfants !

Je pense aussi aux femmes victimes de violence de la part de leur conjoint et qui arrivent à partir… mais que la justice ne suit pas. Celles qui se battent pendant des années pour arriver à obtenir une protection judiciaire. Je pense à celles qui n’en ont pas ou pas encore et qui vont se retrouver avec des visites obligatoires de leur ex dangereux.

À mon avis, il faudrait plutôt :

  • un droit de demande de visite si le parent qui a la garde le souhaite
  • une meilleure mise en place des protections judiciaires 
  • développer au maximum les solutions de garde, surtout pour les parents isolés 
  • que le président réfléchisse avant de parler, et qu’il s’occupe d’abord de virer les personnes de son gouvernement qui sont coupables de violences. »

À lire aussi : « Il a besoin d’une figure paternelle » : et si on fichait la paix aux mères solo ?

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Les Commentaires

9
Avatar de Machiavelli
19 mai 2024 à 19h05
Machiavelli
Pour le coup, parole de concerné.es, j'espérais également avoir la paroles d'enfants/ados concernés. Car au final, c'est bien elleux les premières concernées. On oublie aussi trop souvent l'avis des mineurs.
J'aurais trouvé ça plus intéressant que l'avis de la dernière temoignante qui au final n'est pas une concernée
Exactement, merci.
Contenu caché du spoiler.
5
Voir les 9 commentaires

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