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Vie quotidienne

Traumatisée par un rendez-vous médical, j’ai pourtant décidé de faire médecine

Cette madmoiZelle a été traumatisée pendant une auscultation chez une gastro-entérologue. De cet évènement, elle a gardé des séquelles, mais aussi une envie de travailler dans le domaine de la médecine.

J’ai 18 ans et je suis actuellement en PACES (Première Année d’Études Communes aux Études de Santé). Comme beaucoup d’autres étudiants et étudiantes, j’ambitionne de travailler dans le domaine de la santé.

Une ambition qui détonne cependant avec la promesse que je m’étais faite, il y a deux ans en arrière : celle de ne plus jamais avoir affaire à ce milieu.

Mon opération et mes douleurs

Ces mots vous paraissent sans doute exagérés, pourtant, deux années plus tard, cela reflète toujours aussi bien cet état émotionnel — que j’espère ne plus jamais revivre — qui m’avait dépassée.

Je venais de sortir d’une consultation banale et pourtant, j’avais cette impression d’avoir été violée. Spoiler, ce n’était pas chez un gynécologue.

Si ce n’est pas chez un gynécologue, que reste-t-il alors? Un ou une gastro-entérologue !

La gastro-entérologie est la spécialité médicale qui se consacre à l’étude de l’appareil digestif, à ses troubles et anomalies, ainsi qu’à leur traitement.

La discipline s’intéresse ainsi à différents organes (l’œsophage, l’intestin grêle, le côlon, le rectum, l’anus), mais aussi aux glandes digestives (le foie, les voies biliaires, le pancréas).

(source)

Cela faisait quatre mois que je souffrais d’un abcès dans la fesse avec une fistule anale.

Devant la lenteur de la guérison suite à une opération et ma souffrance, mes parents, refusant de rester « inactifs », avaient préféré consulter un nouveau spécialiste.

Recommandée par ma tante, j’avais même obtenu un rendez-vous rapidement, j’étais chanceuse ! (toi même tu sais la galère pour obtenir une IRM).

Je suis donc allée à ce rendez-vous confiante, alléchée par la perspective d’avoir un peu de tranquillité après (et plus de parents inquiets).

Ce n’était pas la première fois qu’on allait m’observer les fesses et cet autre trou d’où s’échappait continuellement du pus.

J’espérais secrètement qu’elle aurait une autre méthode pour guérir, plus rapide que les longs mois qui s’annonçaient pour l’instant.

L’auscultation qui m’a traumatisée

Honnêtement, je n’ai pas beaucoup de souvenir de ce qui s’est passé avant l’auscultation.

Ce dont je me souviens clairement, c’est le premier truc sur lequel j’ai tiqué. Je devais me mettre à « quatre pattes », cela m’a interpellée.

D’habitude, j’étais en position latérale, tournée.

Là, je me suis sentie sans défense, vulnérable pendant que je faisais descendre ma culotte. Complètement exposée. Je n’avais plus de vêtement excepté mon haut.

Cette position me gênait sans que je sache expliquer pourquoi. Je n’osais pas poser de question. Après tout, elle est douée, non ? C’est pour ça qu’on va la voir ?

Sans prévenir, elle a soudainement enfoncé son doigt dans mon anus. J’ai commencé à pleurer. Elle me faisait mal et surtout, je ressentais son doigt à l’intérieur de moi. Cette sensation me dégoutait.

Je n’avais jamais eu de relations sexuelles, je n’avais jamais été en contact aussi « intimement » avec quelqu’un. Alors, je pleurais, je me sentais sale, encore plus humiliée.

Je n’avais qu’une hâte : qu’elle arrête. J’avais l’impression d’être à sa merci. La honte se mélangeait à cela, je me sentais faible de pleurer, de réagir ainsi.

La honte et la tristesse après ce rendez-vous médical

L’auscultation s’acheva après ce qui me paru être une éternité (je doute que plus d’une minute se soit écoulée). Assise sur la chaise face à elle je pleurais encore, en m’excusant de pleurer.

Impossible de m’arrêter.

J’avais juste ce sentiment de malaise et cette honte persistante. J’avais l’impression d’avoir été violée, qu’on avait pénétré mon intimité, et je trouvais cela injuste.

Je me suis sentie mal une fois rentrée. J’en voulais à ma mère

. Je lui ai dis que j’avais très mal vécue l’auscultation, que je n’avais pas été prévenue, que je ne voulais plus jamais revoir cette personne.

Et cela s’est arrêté là.

Ma mère comprenait, bien sûr, mais elle n’imaginait pas le sentiment profond de mal-être qui avait pris possession de mon corps. C’était comme si je sentais encore sa présence, encore sa menace.

À part cette petite discussion que nous avons eu dans la voiture, je n’ai plus jamais abordé ce moment de nouveau.

Quelques jours plus tard, c’était comme s’il ne m’était rien arrivée. C’était du passé maintenant. Je pensais avoir enfoui ce souvenir en moi.

Quand mon traumatisme refait surface

Évidemment, sinon il n’y aurait pas de témoignage, il m’est revenu brutalement pendant une auscultation, à une différence près : cette fois-ci, la doctoresse m’avait prévenue.

J’ai donné mon accord. Elle n’a cependant pas pu m’examiner : j’étais trop « contractée ».

La loi de 2002 relative aux droits des malades fait du consentement un droit pour le patient, une obligation pour le médecin.

Selon l’article 36 du code de déontologie des médecins :

« Le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas.

Lorsque le malade, en état d’exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposés, le médecin doit respecter ce refus après avoir informé le malade de ses conséquences. »

Je suppose que mon corps se protégeait malgré moi. J’avais l’impression de revivre ce souvenir, je me suis mise à pleurer et l’auscultation s’est interrompue.

Alors, j’ai fais des recherches, tapé « viol médical » sur Google, parce qu’aussi étonnant que cela puisse paraître, je l’avais ressenti comme ça.

Je n’ai pas trouvé beaucoup de témoignages, la plupart concernaient les gynécologues. Alors, j’ai décidé d’écrire le mien.

Mon rendez-vous médical n’était pas un viol : la doctoresse faisait son métier, elle n’a pas fait cela pour rechercher du plaisir. Pourtant, je l’ai ressenti comme tel.

Les séquelles de mon traumatisme

Je garde des séquelles de cela : je déteste qu’on me touche, même pour un câlin, j’appréhende chacun de mes rendez-vous médicaux de peur de revivre cette expérience.

Je n’ai eu aucune relation de quelque nature qu’elle soit. J’associe, malgré moi, relations avec sexe, et sexe avec ce traumatisme.

J’essaie de déconstruire ces réflexes même si c’est difficile. Parfois, j’y repense et j’ai envie de pleurer.

Je ne me sens pas légitime à aborder ce sujet et les traumatismes qui vont avec. Je souhaite plutôt m’adresser à tous ceux et celles qui ont mal vécu un rendez-vous médical.

J’aimerais vous dire quelque chose d’important : ce n’est pas de votre faute. La manière dont on appréhende les choses ne se contrôle pas.

Aux autres qui peuvent stresser avant un rendez-vous médical : je mets maintenant un point d’honneur à me renseigner et je n’hésite pas à poser toutes les questions qui me viennent à l’esprit pour qu’on me rassure (et je dis si quelque chose me gêne).

Gardez bien à l’esprit que vous pouvez interrompre une consultation quand vous le souhaitez.

Malgré mon traumatisme, je veux travailler dans le médical

Depuis ce « viol », on m’a diagnostiquée une maladie de Crohn.

J’ai toujours cet abcès. J’ai toujours des douleurs. J’apprends à vivre avec et je découvre de plus en plus les personnes qui travaillent dans le domaine de la santé.

Si le milieu médical m’a traumatisée pendant un certain temps, toutes mes expériences (et j’en ai eu beaucoup) à son contact n’ont pas été négatives, loin de là.

J’ai une petite pensée à ces infirmières et à ce clown qui étaient venus dans ma chambre pour me souhaiter mon anniversaire et m’offrir un cadeau.

C’est un des cadeaux qui m’a le plus émue et touchée à ce jour.

J’espère que vous comprenez mieux la raison pour laquelle je souhaite m’orienter vers cette profession : aider comme on m’a aidée.

Me sentir utile, apprendre des choses sur les maladies et sur notre fonctionnement, conserver et apporter une dimension humaine. Je vous ai dit que j’étais une PACES un peu idéaliste ?

Je n’ai jamais osé partager ce souvenir à quelqu’un (famille, amis…) par peur que cette personne porte ce fardeau et s’inquiète inutilement pour moi.

C’est pour cela que je m’adresse à « vous », plutôt que d’utiliser le « tu », pour ne pas m’adresse directement à une personne qui me lit.

Et qui sait, peut-être que j’oserais envoyer ce témoignage à quelqu’un ?

À lire aussi : Des femmes témoignent des violences gynécologiques et obstétricales

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Les Commentaires

7
Avatar de adita
6 février 2020 à 12h02
adita
Je suis dans une asso pour la maladie de Crohn et la RCH et j'ai eu l'occasion d'assister à des groupes de paroles, deux fois j'ai entendu des témoignages qui pour moi sont des viols: Rectoscopie non désirée et pas très utile lors d'un rdv médical "de routine". Je sais bien que les médecins font leur travail mais à un moment faut aussi voir que certains te font passer certains examens intrusifs par pur sadisme/envie et que ça n'a rien de médical.

Ces deux témoignages m'ont vraiment marqué parce que j'en ai passé des dizaines et des dizaines des examens ntrusifs, ceux où tu sens que ta dignité s'est barrée à 12 000km, j'en ai passé des examens douloureux, mais jamais ils n'ont ressemblé à ces deux témoignages là...

Je trouve le témoignage super et j'espère que la madz va bien, super parce qu'on parle très rarement des violences médicales hors gynécologie, et pourtant elles existent, et la gastro-enterologie est particulièrement concernée comme spécialité.
Contenu spoiler caché.
Mais sur cette spé et comme pour la proctologie et l'urologie on touche aux tabous, aux choses "honteuses et sales" et c'est d'autant plus difficile d'en parler et de faire reconnaitre les violences.
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Voir les 7 commentaires

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