On peut être une sportive de haut niveau, se penser forte, avoir déjà deux enfants et se taper une énorme dépression du post-partum à la naissance de son troisième enfant.
C’est ce qu’a vécu Laure Manaudou. Elle explique ce par quoi elle est passée dans une vidéo publiée sur la page Instagram du média Brut.
Laure Manaudou et la dépression du post-partum
Dans une vidéo de 10 min, l’ancienne sportive se livre sans filtre sur cet épisode de dépression qui a duré une année entière. Et ce qu’elle décrit, ce sentiment d’être submergée et étouffée, nombreuses sont les mères à l’avoir déjà ressenti :
Je me suis rendu compte que j’ai fait une énorme dépression post-partum. Ça veut dire que pendant un an, j’étais en dépression. Je me suis sentie submergée, étouffée. C’était trop en fait, c’était oppressant. J’ai fait comme tout le monde, je n’ai appelé personne. Et franchement, c’est dommage. Je ne me suis pas comprise. En tant que sportive, je devais être dure.
Être dure, ne pas montrer, ne pas dire la vérité, ne pas dire ce qu’on ressent même parfois à ses proches, à quel point on galère, à quel point on peut en avoir marre, le tout avec la fatigue poussée à l’extrême… Nombreuses sont celles qui peuvent se retrouver dans le discours de l’athlète.
Pendant sa dépression, Laure se demande pourquoi ça lui arrive, à elle. Elle a l’habitude de se montrer forte, elle est une sportive de haut niveau, mais l’un n’empêche pas l’autre. Durant un an, elle explique que l’énervement la domine, qu’elle est agacée tout le temps, qu’elle se sent envahie. Personne dans son entourage ne se rend compte qu’elle sombre, et elle ne demande pas d’aide, parce que ce n’est pas une chose aisée à faire.
Je gueulais sur mon mari la nuit alors que je suis très calme et que je ne crie pas. Je ne suis pas avec quelqu’un qui mettait des boules quiès et qui ne m’aidait pas du tout. Il s’est toujours réveillé pour nos deux garçons. C’était beaucoup de larmes, parce que de l’incompréhension, de la fatigue nerveuse. Pourquoi je n’arrive pas à me relever toute seule ? C’était un sentiment d’échec.
Un jour, Laure Manaudou partage sur Instagram une story où elle parle de ses difficultés. Et face à l’avalanche de messages de mères dans la même situation qu’elle, elle se sent moins seule, et écoutée.
Face aux réactions qu’elle reçoit, elle se demande : pourquoi les femmes, qui sont si suivies médicalement pendant leur grossesse, ne sont pas autant accompagnées après la naissance de leur enfant ? Pourquoi les laisse-t-on seules, et qu’on ne s’occupe que de la santé du nourrisson ?
Les mères sont mises de côté. On ne s’occupe pas bien des femmes, on ne dit pas assez la vérité. On parle des choix des femmes après la naissance, de l’allaitement et du biberon, mais on ne parle pas assez de l’humeur, de la fatigue, du tsunami qui arrive. […] Il faut tout un village pour élever un enfant, et ça ne devrait pas être permis de laisser une maman seule avec un nourrisson.
Aujourd’hui, la sportive souhaite briser le tabou autour des dépressions du post-partum, et sensibiliser les futures mères aux difficultés qui peuvent les attendre après la naissance d’un enfant, qu’il soit le premier, le deuxième, ou le troisième.
Dépression du post-partum : des mesures gouvernementales
Le gouvernement s’est emparé de la situation, en imposant de façon obligatoire, et ce, depuis le 1er juillet 2022, un entretien postnatal précoce pour toutes les mères.
L’entretien postnatal précoce est effectué par un médecin ou une sage-femme entre la 4e et la 8e semaine qui suit l’accouchement, et il est pris en charge par l’Assurance maladie à hauteur de 70 %.
D’après le secrétaire d’État à l’enfance Adrien Taquet, qui s’appuie sur un sondage réalisé en août 2021 par OpinionWay pour l’entreprise de télémédecine Qare, seulement 5 % des mères disent avoir été diagnostiquées par un spécialiste, et 78 % des parents n’auraient jamais entendu parler de la dépression post-partum lors des rendez-vous médicaux.
En ce sens, lors des assises sur la santé mentale, le secrétaire d’État à l’enfance avait déclaré :
« 100 000 femmes par an souffriraient de la dépression du post-partum (15 %, je crois que c’est le chiffre couramment admis). Dans un sondage récent, 30 % des mères et 18 % des pères disent avoir connu un épisode dépressif »
Espérons que les discours des célébrités, des sportives, des influenceuses, et autres, permettront de parler davantage des maux de l’après-grossesse, et que les mères pourront bénéficier d’une véritable prise en charge et d’une aide adaptées à leur besoin. Quand on sait qu’une des premières causes de mortalité maternelle est le suicide, il est urgent que la parole se libère.
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