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Dépression post-partum : non, la maternité ce n’est pas « que du bonheur »

Depuis quelques années, la parole commence à se libérer autour de la dépression post-partum. Une pathologie grave qui peut mettre en danger les jeunes mères et leurs enfants.

Les suites de couches sont une période de chamboulements pour le corps mais aussi pour l’esprit. Le syndrome du baby blues, qui se manifeste généralement quelques jours après l’accouchement,  touche une grande majorité des femmes qui viennent de donner la vie.  Si ses symptômes peuvent être éprouvants (fatigue, hypersensibilité, gros sentiment de solitude etc.), c’est un trouble transitoire qui ne dure pas plus de quelques semaines.

Lorsque le syndrome dépressif ne passe pas et qu’il est accompagné d’angoisses irrationnelles et de troubles somatiques, on ne parle plus de baby blues mais de dépression du post-partum. Cette pathologie, qui n’est pas toujours bien diagnostiquée,  peut avoir de véritables conséquences sur la santé de l’accouchée, mais aussi sur sa relation avec son bébé.

Des symptômes plus inquiétants que ceux du baby blues

Dans la liste des signes avant-coureurs de la dépression post-partum (DPP) , on retrouve (entre autres) l’irritabilité, les pleurs et les colères incontrôlés et incontrôlables, les crises d’angoisses et la culpabilisation. La jeune maman peut souffrir d’insomnies, avoir des difficultés à se concentrer et fuir les interactions sociales. Les signes de DPP peuvent aussi être physiques, avec l’apparition de bouffées de chaleur, de palpitations, de vertiges ou encore de douleurs somatiques.

Émilie, qui a souffert d’une dépression postnatale pour son aînée, a cumulé un certain nombre de ces symptômes :

Au début, c’est passé inaperçu : je mettais pas loin de 2h pour aller au travail et autant pour revenir, et je devais me presser pour récupérer ma fille à temps chez l’assistante maternelle. Dans ces conditions, quoi de plus normal que de se sentir fatiguée et d’avoir du mal à se lever le matin ? Je souffrais par ailleurs de douleurs intercostales. Mais là encore, le fait de porter mon bébé devait y être pour quelque chose, ça ne pouvait être que musculaire… Il fallait aussi gérer les galères quotidiennes et les problèmes d’argent. Vivant à 700 kilomètres de ma famille pour le travail, je me sentais aussi complètement isolée, surtout que l’on venait de déménager en banlieue parisienne pour l’arrivée du bébé.

Mon humeur s’est effondrée au point d’envisager un temps le suicide, puis j’ai essayé de remonter la pente, et ce faisant, obtenu un nouveau poste avec moitié moins de trajet quotidien, et quitté le père de l’enfant.

C’est pendant cette rupture que j’ai fini par aller pousser la porte de mon médecin : je ne dormais plus, j’avais perdu 8 kilos en quelques mois… Il m’arrivait de ne pas aller au travail le matin, en invoquant diverses excuses, car on ne peut pas décemment annoncer à son patron « j’ai cherché une raison valable de me lever et avant que je ne réalise la matinée était déjà passée ».

Avoir peur de faire du mal à son bébé

Face à son bébé, la mère qui souffre d’une dépression post-partum peut être distante (ne veut pas le prendre dans ses bras, ne ressent aucune émotion, se dit que c’était une erreur, etc) ou excessive (a tout le temps peur qu’il lui arrive quelque chose, montre des signes d’affection exagérée en public, a des difficultés à se détacher physiquement de l’enfant, etc.)

Une lectrice de Rockie a ressenti de plein fouet ce puissant désarroi :

Dès mon retour de la maternité, j’ai commencé à me sentir bizarre. Mon bébé était là, dans son berceau, mais je ne me sentais pas du tout attirée par lui. Au contraire, sa présence constante à mes côtés me mettait mal à l’aise. J’étais vidée, il me pompait tout mon temps et toute mon énergie.

J’ai un peu honte de l’avouer mais j’en suis venue à regretter sa venue au monde et à avoir peur de pouvoir lui faire du mal. J’ai rapidement consulté un psychiatre qui m’a beaucoup aidée.

Une manifestation plus sournoise et multifactorielle

Contrairement au blues maternel, la DPP n’apparaît pas forcément tout de suite après l’accouchement. Elle peut même mettre plusieurs mois avant de se manifester (la plupart du temps au cours du premier trimestre de vie de l’enfant). Sa durée diffère aussi : de plusieurs mois à quelques années si elle n’est pas prise en charge suffisamment tôt.

La cause de l’apparition d’une dépression post-partum est multifactorielle : les facteurs biologiques, psychologiques et sociaux jouent un rôle fondamental dans sa survenue. Psychologiquement, un passé lourd de traumatismes, des difficultés financières et les sensations d’isolement et de perte d’identité sont souvent évoqués. Physiologiquement, la chute abrupte du taux d’œstrogènes et de progestérone est généralement montrée du doigt.

Allaitement et dépression post-partum

La mise en place de l’allaitement est souvent une cause de stress pour les mères, quel que soit leur niveau d’expérience. À la fatigue physique et émotionnelle s’ajoute la peur de ne pas réussir à nourrir leur bébé, celle de ne pas avoir assez de lait (ce qui est possible mais très rare) ou encore la crainte de souffrir.

C’est un moment éprouvant, et si tout ne se passe pas comme espéré, il peut plonger les mères dans une grande détresse liée à la culpabilité de ne pas pouvoir subvenir naturellement aux besoins de leur enfant.

Face à cette affliction, de nombreux chercheurs se sont demandés si l’allaitement et la dépression post-partum pouvaient être liés mais, comme le rappelle une étude publiée en 2016

, il n’existe aucun consensus scientifique sur le sujet.

En effet, leurs conclusions diffèrent : certaines stipulent que les femmes qui allaitent ont plus de risques de faire une DPP, et d’autres, au contraire, énoncent que l’allaitement protégerait la femme de la dépression et permettrait aux symptômes, s’ils sont déjà installés, de disparaître plus rapidement.

Le diagnostic et la prise en charge de la DPP

Contrairement au baby blues, la dépression post-partum est une vraie maladie qui requiert une prise en charge professionnelle. Malheureusement, de nombreuses femmes en souffrance ne sont jamais diagnostiquées ni traitées : peu décident de consulter, voyant leur grande instabilité physique et émotionnelle comme un coup de mou passager.

Pourtant, lorsqu’elle est identifiée à temps, la DPP peut être soulagée grâce à différents protocoles de soins qui allient souvent un suivi psychologique/psychiatrique et la prescription d’antidépresseurs (si la jeune mère allaite, le traitement sera adapté en conséquence). La prise en charge précoce de ce trouble est importante pour éviter des répercussions sur la mère (apparition de symptômes psychotiques etc.) mais aussi sur le développement social, émotionnel et cognitif de l’enfant.

Dans certains cas sévères où les idées noires de la femme pourraient la mettre en danger ainsi que son bébé, une hospitalisation en unité mère-enfant peut être envisagée.

Et si j’étais concernée par la dépression post-partum ?

Si tu as donné la vie récemment, tu te demandes peut-être si tu as un risque de souffrir de dépression post-partum. Déjà, rassure-toi : si le baby blues concerne une majorité des jeunes accouchées (avec une intensité et des symptômes propres à chacune), la vraie DPP ne touche qu’entre 10 et 15% des mères.

Pour différencier le trouble passager de la pathologie, le site de l’association Maman Blues, qui est une plateforme de soutien, d’écoute et de conseils, insiste sur le principe de conscience : « dans le cadre du baby blues, [la mère] reste consciente que ses sentiments et émotions sont disproportionnés. Elle garde […] comme un recul salvateur où elle peut douter de la véracité de ses peurs. Il s’agit d’inquiétudes avec lesquelles elle arrive à composer et non d’angoisses qui la débordent. »

Si jamais tes symptômes t’empêchent de prendre soin de ton bébé et que tu n’éprouves plus aucun intérêt pour les activités du quotidien, n’hésite surtout pas à en parler à ton médecin traitant, à une sage-femme, ou encore à consulter directement un psychologue en ville ou dans un centre médico-social. Tu peux aussi t’inscrire à des groupes de parole comme ceux que Maman Blues propose dans de nombreuses régions en France et en Belgique.

Et si c’était la thyroïde ?

Il est aussi possible que la liste de tes symptômes ressemble beaucoup à une dépression post-partum, mais qu’elle n’en soit pas une. En effet, elle peut être confondue avec une maladie auto-immune touchant la thyroïde, la thyroïdite du post-partum.

C’est ce qui s’est passé pour Émilie après la naissance de son deuxième enfant :

C’est une prise de sang qui a permis de repérer mon dérèglement thyroïdien, et honnêtement, si mon médecin n’avait pas pensé à regarder de ce côté-ci, on aurait pu penser que je faisais une dépression post-partum.

Lorsque j’ai passé une échographie de la thyroïde, le médecin en charge m’a dit : « cela fait un moment que vous ne devez pas vous sentir bien, mais ne vous en faites pas, avec le traitement, cela ira beaucoup mieux ». Et il a eu raison.

Quel que soit le diagnostic final posé par les médecins, que la dépression post-partum soit confirmée ou non, il est important de ne pas s’isoler en attendant que ça passe. Demander de l’aide peut être difficile, surtout dans une période où la confiance en soi et en ses capacités est ébranlée par un tout petit être de 3,5 kilos, mais c’est salvateur.

J’en profite d’ailleurs pour remercier toutes les mamans qui ont accepté de partager avec moi leur expérience sur cette pathologie encore trop souvent minimisée.

Article réalisé avec l’aide de Margot Barbier de Chalais, psychologue clinicienne à Levallois-Perret (92).

Et toi, tu as été confrontée à la dépression post-partum ? Ou tu te poses la question ? Viens en parler dans les commentaires !


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