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Société

Et si #metooinceste faisait enfin changer la loi autour du consentement ?

Suite à la publication du livre « La Familia Grande » de Camille Kouchner, le hashtag #meetooinceste submerge Twitter. Des victimes dénoncent ce qu’elles ont vécu, brisant l’omerta. Dans la foulée, de nombreuses associations exigent une réforme du système judiciaire.

Sur Twitter ce week-end, rompre le silence a été le maître-mot.

Après la sortie du livre La Familia Grande de Camille Kouchner(éd. Seuil), qui raconte l’inceste commis par son beau-père Olivier Duhamel sur son frère, des milliers de victimes ont pris la parole sur Twitter pour dénoncer les violences qu’elles ont subies.

Cousins, frères, pères, grand-parents…  Avec le partage massif du hashtag #metooinceste, l’inceste a été révélé comme une réalité en France, et non pas une occurence exceptionnelle. Et des associations féministes et de victimes réclament un changement de la loi.

Une libération historique de la parole

Ce week-end, il était difficile de passer à coté du mot « inceste » sur Twitter mais également Facebook. À travers des récits brefs et glaçants, les victimes ont éclaté le mur du silence qui entourait ce crime.

 

Une initiative qui rappelle forcement le mouvement MeToo, né lui aussi sur Twitter en 2017, qui dénonçait les violences sexistes subies par les femmes à la suite de l’affaire Harvey Weinstein. Et aujourd’hui, une nouvelle vague libératrice émerge grâce au livre de Camille Kouchner. Face à ce déferlement, Isabelle Aubry, présidente de l’association Face à l’inceste, a réagi dans L’Humanité, affirmant : « C’est vraiment un MeToo spécifique.»

Alors que les témoignages affluent encore, la démarche des victimes permet de donner vie à des chiffres bien trop souvent ignorés.

D’après un sondage commandé par Face à l’inceste et publié en novembre, 6,7 millions de Français se déclarent victimes d’inceste, dont 78% de femmes.

Au-delà de ces nombres, à la lecture de ces messages, on découvre que l’entourage savait. Mais aussi que dénoncer les faits n’est pas chose aisée en raison de la nature du crime.

En effet, le prédateur est quasiment toujours un membre de la famille plus âgé, qui a une autorité sur la victime. Par conséquent, la libération de la parole prend beaucoup plus de temps. Et celle de l’écoute, encore plus… C’est l’une des raisons pour laquelle les associations réclament un changement de la loi.

Changer la loi pour protéger les victimes

Domination patriarcale, honte, culpabilité, peur de briser la famille… Autant de raisons qui conduisent les victimes à prendre la parole de plus en plus tard.

Afin de lutter contre ce phénomène, les associations exigent un changement de la loi dont l’imprescriptibilité. Isabelle Aubry réclame :

« Il faut que tout acte de pénétration sexuelle sur mineur de moins de 13 ans soit considéré comme un viol et que les faits soient imprescriptibles en cas d’inceste. »

Une position partagée par

Emmanuelle Piet, présidente du Collectif féministe contre le viol mais qui veut aller encore plus loin avec une infraction spécifique. Elle souligne justement :

« L’inceste doit être remis dans la loi. En 2011, il l’était. C’est-à-dire que le viol est « tout acte de pénétration sexuelle commis sur la personne d’autrui par menace, contrainte, violence, surprise ou inceste ». Mais la mention a été supprimée après une question prioritaire de constitutionnalité au motif que l’inceste n’était pas assez explicité. »

Autre cheval de bataille : «  le consentement », notion qui n’existe pas dans la loi. Actuellement, en France, la loi dispose que : 

  • Tout acte sexuel entre un majeur et un mineur ou un adolescent de moins de 15 ans est une atteinte sexuelle. Un délit puni de sept ans de réclusion criminelle et 100.000€ d’amende.
  • Si une relation sexuelle sans pénétration est commise sans le consentement de la personne, les faits sont qualifiés d’agression sexuelle. C’est un délit jugé en correctionnelle puni de dix ans de prison et de 150.000€ d’amende lorsque la victime à moins de 15 ans.
  • Si l’acte sexuel implique une pénétration et est commis sans le consentement de la victime celui-ci est qualifié de viol. C’est un crime jugé aux assises passible de 20 ans de prison si la victime a moins de 15 ans.

Donc, lors d’un procès, le ministère public doit apporter la preuve que les faits se sont produits sous la menace, la violence, la contrainte ou la surprise.

La question du consentement des enfants

Dans le cadre d’un inceste, les enfants ne sont pas toujours capables d’exprimer leur absence de consentement, surtout face à un membre de leur famille en qui ils ont a priori confiance. Par conséquent, les faits sont souvent correctionnalisés.

Isabelle Aubry alerte :

« Nous devons protéger nos enfants en considérant qu’il ne peuvent pas donner leur consentement à l’inceste, il faut faire évoluer cette loi d’un autre temps. »

Afin de sensibiliser sur le sujet, l’association a lancé le vendredi 20 novembre 2020 une campagne à la télévision et sur les réseaux sociaux pour inciter le grand public à demander la modification de cette « aberration législative ».

Selon l’enquête Ipsos pour Face à l’inceste, 82% des Français sont favorables à un changement de la loi en 2020 dont Brigitte Macron. Invitée du 20 Heures de TF1, elle a affirmé souhaiter une réforme judiciaire.

Du côté des politiques, la députée Alexandra Louis a proposé de renforcer l’interdiction des relations sexuelles entre un adulte et un mineur de moins de 15 ans. Sur le plateau de LCI ce dimanche 17 janvier, Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté, a apporté son soutien à cette proposition :

« Je soutiendrais la proposition de loi de la députée Alexandra Louis pour durcir la loi sur les questions d’inceste, parce qu’elle propose de créer des infractions particulières et de remettre à plat ces crimes-là. »

En parallèle, Adrien Taquet, secrétaire d’Etat chargé de l’Enfance et des Familles, a pris la parole sur Twitter et a rappelé la création de la commission sur l’inceste et le violences subies pendant l’enfance.

Mais suite à la démission de la présidente Élisabeth Guigou, ancienne garde des Sceaux et proche d’Olivier Duhamel, cette comission a été suspendue.

À l’évidence, on est en train d’assister à l’éclatement de la bulle silencieuse autour de l’inceste. Espérons qu’il y aura un avant et un après #metooinceste, dont l’onde de choc et le souffle libérateur se poursuivent.

À lire aussi : Un chiffre choc : une personne sur dix affirme avoir été victime d’inceste en France


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Les Commentaires

3
Avatar de KtyKoneko
19 janvier 2021 à 21h01
KtyKoneko
j'y croirai quand cela se fera
soupiiir dépité
déjà, il faudrait commencer par abolir la prescription, ce serait un grand pas en avant
1
Voir les 3 commentaires

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