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Féminisme

Messieurs, l’égalité hommes-femmes ne se fera pas sans vous

Très chers lecteurs, vous considérez qu’il est impossible de vivre dans une société où l’égalité hommes-femmes n’est pas respectée, et pourtant, vous ne vous revendiquez pas « féministe » ? Pourtant ce n’est pas un gros mot. Voici comment passer le cap.

Publié initialement le 26 novembre 2013

« Féminisme » n’est pas un gros mot. Il fait référence à « la volonté d’améliorer et d’étendre le rôle et les droits des femmes dans la société » (définition du Larousse). Parce que les droits des femmes ont tant évolué au cours du XXème siècle, parce que les inégalités résiduelles ne sont plus aussi évidentes dans notre société, ce « combat » peut vous sembler dépassé.

Vous pouvez, tout en étant convaincu que tous les individus devraient jouir des mêmes droits, indépendamment de leur genre, hésiter à vous revendiquer vous-même « féministe ». Peut-être parce que le terme « féminisme » vous paraît désuet, peut-être parce que vous ne retrouvez pas votre vision du féminisme parmi les discours et les actions des groupes féministes militants. Peut-être parce que vous n’êtes pas témoin, autour de vous, de ces discriminations contre lesquelles « les féministes » continuent de s’insurger.

Et pourtant ces discriminations persistent. Sans forcément prendre les armes ou rejoindre les Chiennes de Garde, il est possible (et nécessaire !) d’agir pour lutter contre ces inégalités persistantes.

L’Égalité ne se fera pas sans vous !

La lutte pour l’égalité des droits ne se fera pas sans vous, messieurs. Le féminisme a besoin de vous, tout comme les hommes ont besoin du féminisme pour se défaire eux-aussi des stéréotypes de genre« Sois viril mais ne sois pas macho », « un garçon, ça ne pleure pas », « un enfant a besoin de sa mère plus que de son père », et tout autant de « petites phrases » qui jalonnent votre existence d’homme et visent à vous cantonner dans le rôle du « mâle protecteur », image édictée par le modèle patriarcal de notre société.

sexism

L’ennemi du féminisme, ce ne sont pas les hommes, ni même les machos : c’est le patriarcat, dont les femmes ne sont pas les seules victimes. Vous avez donc tout autant intérêt que les femmes à vous affranchir de ses codes oppressants.

« Le patriarcat désigne « une forme d’organisation sociale et juridique fondée sur la détention de l’autorité par les hommes » (source)

Dès lors, comment les hommes doivent-ils se comporter pour devenir les alliés dont le féminisme a besoin ? Sur son blog, Michael Urbina, étudiant en Gender & Women Studies, a répertorié 101 façons d’être un allié des féministes au quotidien.

De notre côté, on a préféré ramener cet inventaire à 7 grandes lignes de conduite à observer par ceux qui aspirent à rejoindre le mouvement en faveur de l’égalité :

  1. Prendre conscience
  2. Écouter
  3. Se documenter
  4. Comprendre
  5. Apprendre
  6. Agir
  7. Accepter

—– Prendre conscience —– de votre position dans la hiérarchie sociale

Si vous êtes un homme blanc hétéro en France, on peut dire que votre expérience de la discrimination est relativement limitée. Quand des femmes vous disent qu’elles se font régulièrement harceler dans la rue, quand des gays ou des hommes à l’apparence efféminée expliquent qu’ils se font régulièrement insulter ou mépriser, quand des personnes « non blanches » vous racontent leurs expériences de discrimination, vous pouvez commencer par ne pas minimiser ni mettre en doute ces expériences par une remarque sceptique, du genre :

« Quand même, tu exagères, ça ne peut pas être si grave » « Je pense que tu vois le mal partout » « Il ne faut pas te victimiser comme ça »

C’est un fait : les hommes blancs occupent dans notre société une position de privilège, héritée de l’histoire.

https://www.youtube.com/watch?v=qg48ZZ2wYfM

« Si vous êtes blanc et que vous n’admettez pas que c’est génial, vous êtes un trou de balle. Et je suis un homme ! Combien d’avantages une seule personne peut cumuler ? » — Louis CK, génie du standup

Même si depuis le siècle dernier, on déconstruit activement ce privilège, les mentalités évoluent lentement et les changements ne sont pas immédiats.

Vous ne voyez pas le problème ? C’est sans doute parce que vous n’avez pas conscience de la position de privilège que vous occupez. Il ne s’agit pas d’auto-flagellation – ce n’est pas de votre faute si vous êtes nés dans une société patriarcale, si vous avez reçu une éducation genrée.

En revanche, il vous appartient de prendre conscience des privilèges qui découlent de votre position sociale, dans toutes les sphères de la société. Quelques exemples…

  • Au travail : d’abord, il faut avoir conscience que, du simple fait que vous êtes un homme, vous gagnez peut-être 27% de plus qu’une femme qui occupe le même poste que vous (Parité salariale, la France loin derrière, en 2011, et Le Pariteur en 2013). Votre compétence n’est pas remise en question par le fait que vous soyez un homme. Votre supérieur-e remettra rarement en question votre implication dans l’entreprise si vous lui annoncez que vous allez devenir père. Avoir conscience de cette réalité, c’est déjà devenir un allié.
  • Dans l’espace public (rue, bars, etc.) : vous circulez librement sans que votre espace personnel ne soit envahi par des remarques, des injonctions, voire des contacts physiques indésirables. En tant qu’allié du féminisme, vous ne devriez pas participer au harcèlement de rue, parce que ce n’est jamais « inoffensif », ni « juste pour rire », c’est toujours irrespectueux et parfois à la limite de l’agression verbale et physique.

La liste serait longue, et pris individuellement, ces exemples peuvent vous paraître insignifiants. Mais c’est leur accumulation et leur récurrence qui amène au ras-le-bol de celles qui en font les frais.

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« Ton harcèlement constant de la gent féminine me rend malade » — Adventure Time, un dessin animé qu’il est bien.

Cette prise de conscience vous permet dans un second temps de prendre du recul sur l’éducation que vous avez reçue, et de corriger ainsi des réflexes sexistes que vous pouvez avoir. Mais c’est aussi et surtout l’occasion de redéfinir son identité propre en dehors des stéréotypes de genre.

Non, l’homme « le vrai » n’a pas à être conforme à un portrait-robot dicté par son genre. Chaque individu est libre de se définir. Vous aussi, vous supportez le poids des attentes que la société patriarcale fait peser sur votre genre. Sur le même sujet : Le genre n’est pas une théorie — Je veux comprendre.

Personne n’a dit que la position de privilégié était toujours confortable : elle a aussi son lot d’inconvénients, même s’ils sont moindres comparés à la situation dominée de la femme.

Prendre conscience de votre position de privilégié vous permet de redéfinir votre identité autrement que par opposition / antagonisme à la féminité, et contribuer à démolir l’idée que les attributs dits « féminins » renvoient à la faiblesse / la fragilité / la vulnérabilité, etc., peut être un bon début.

Quand vous pourrez porter la jupe sans que ce geste ne soit connoté d’aucune manière, nous aurons déjà parcouru un bon bout de chemin vers l’égalité !

—– Écouter —– la parole des femmes sur leurs expériences 

tinafey

« Si je dois écouter encore un homme aux cheveux gris avec une coupe de cheveux à 2$ m’expliquer ce qu’est le viol, je vais péter un plomb » — Tina Fey, déesse sur Terre

Votre position de privilégié peut vous rendre aveugle ou insensible à certaines expériences, qui peuvent vous être tout simplement inconnues. La peur du viol que l’on connaît le soir, la nuit, seule dans une rue déserte, par exemple.

Mais cet exemple pris parmi tant d’autres justifie de privilégier la parole des femmes au sujet de bien des expériences inconnues des hommes. Le mépris, le dédain, l’insulte que l’on peut ressentir, par exemple, face au harcèlement de rue quotidien, aucune explication même bienveillante ne peut l’atténuer.

L’écoute précède toute action

Un reproche souvent fait aux hommes qui parlent de féminisme, y compris ceux qui se revendiquent féministes, est de confisquer la parole des femmes. Bien sûr, l’idée n’est pas que les hommes n’ont pas le droit de parler, mais que lorsque l’on parle d’une oppression, les personnes oppressées sont souvent les mieux placées pour en parler.

Les hommes ont tendance à parler davantage et à couper la parole aux femmes — encore une fois, c’est une conséquence de l’éducation différenciée : on apprend aux filles à « être sage, discrète » et aux garçons à « s’affirmer », ces préceptes influencent nos comportements d’adultes. Apprendre à laisser la parole aux femmes est donc important pour devenir un allié.

Le principal écueil à éviter est de tomber dans le « mansplaining », terme emprunté au féminisme américain qui désigne une forme de condescendance propre au patriarcat :

« Est-ce que ça veut dire que les hommes n’ont pas leur place dans les conversations féministes ? Non, mille fois non. Évidemment que les hommes peuvent être impliqués, peuvent combattre aux côtés des femmes pour l’égalité des sexes et sont les bienvenus dans les débats.

Mais à partir du moment où un, ou plusieurs hommes remettent en cause la parole des femmes sur ce qu’elles ont vécu, ce qu’elles vivent, ce qu’elles pensent et ce qu’elles étudient, ce n’est plus d’une discussion qu’il s’agit : c’est de paternalisme. »

– Extrait de Je veux comprendre… le mansplaining

—– Se documenter —– sur le sexisme et ses conséquences

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« Chaque fois que tu pointes du doigt je vois un pénis. »

Internet regorge d’articles, de tribunes, d’éditoriaux, de billets de blogs, de témoignages qui permettent de s’informer, de se sensibiliser aux problèmes que continue de poser quotidiennement le sexisme dans notre société.

Lisez madmoiZelle ! On s’efforce de parler de féminisme sans braquer celles et ceux qui en ont une piètre image. On y explique des concepts sans condescendance, sans agressivité.

—– Comprendre —– les divers combats menés par les féministes

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On reproche parfois aux féministes leur virulence sur des sujets qui n’apparaissent pas prioritaires aux yeux de l’opinion publique (par exemple avec la suppression du « mademoiselle » dans les formulaires administratifs). Prises isolément, il est vrai que certaines luttes peuvent paraître anecdotiques. Mais il faut comprendre que c’est souvent la répétition de ces événements, de ces problèmes, qui les rendent inacceptables.

Comprendre « l’objectification » du corps de la femme

Il est important de comprendre qu’en 2013, le corps de la femme est encore à bien des niveaux un objet : objet décoratif, objet sexuel, la « femme-objet » est une réalité de la société patriarcale. Impossible de traverser une ville sans croiser une femme-présentoir : présentoir de lingerie, de parfum de luxe, etc. (lire à ce sujet : Les femmes et la nourriture dans la pub, une équation complexe).

Alors si une femme de votre entourage s’offusque par exemple de votre « calendrier de charme », ce n’est pas à elle d’avoir « un peu d’humour » mais plutôt à vous de vous poser la question : est-ce que mon calendrier de charme contribue à cette « objectification » du corps de la femme ? Peut-il être offensant pour une collègue ?

Comprendre la culture du viol

Elle découle en partie de cette réduction du corps de la femme à l’état d’objet. Si vous avez un jour pensé qu’une fille « l’avait (un peu) cherché », vous avez été influencé par la culture du viol. Comprendre ce mécanisme vous permettra, à l’avenir, de ne plus participer, activement ou passivement, au « victim blaming » qui consiste à attribuer à la victime d’un viol ou d’une agression sexuelle une partie de la responsabilité qui n’incombe qu’à son agresseur.

Et sur ce point, deux précisions :

  • Point de grammaire : on ne dit pas « se faire violer » mais « être victime de viol » ou « avoir été violé·e ».
  • Aucun vêtement, aucun comportement ne doit excuser ni permettre à une personne de se passer du consentement pour forcer l’autre à avoir un rapport sexuel. Le consentement est essentiel.

La culture du viol c’est aussi, par exemple, prendre pour acquis qu’une femme veut coucher avec un homme parce qu’elle est venue chez lui, qu’une femme trop ivre pour consentir est d’accord « par défaut », ou qu’elle « doit » à qui que ce soit un rapport sexuel.

Rappelons-le, céder n’est pas consentir et l’écrasante majorité des viols sont commis par des hommes qui connaissent la victime (des potes, des camarades de classe, des membres de la famille…), pas par des psychopathes tapis dans un parking souterrain. Pour vous en convaincre : « Je connais un violeur », le Tumblr qui noue la gorge

—– Apprendre —– à remettre en question ses habitudes 

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« C’est pas bien pour une femme de lire. Après elle commence à avoir des idées et à réfléchir. » — Tu l’as dit, Gaston !

Vous savez maintenant comment devenir un allié passif du féminisme, voire simplement ne plus être un allié passif du patriarcat à votre insu. Ces trois dernières étapes peuvent vous permettre de devenir un allié actif du féminisme, de prendre part activement à la construction d’une société plus égalitaire.

Apprendre à adopter un langage non sexiste

Les mots ont de l’importance. Et ces mots peuvent heurter plus profondément qu’on ne l’imagine. Le vocabulaire insultant ou dégradant vis-à-vis des femmes ne doit plus être banalisé.

Ce n’est pas seulement renoncer à ces insultes envers les femmes elles-mêmes, c’est aussi refuser de les utiliser entre vous, entre potes, parce qu’elles restent profondément dégradantes : « fais pas ta meuf, fais pas ta chieuse », ces insultes (ainsi que les injures homophobes « pédé, pédale, tafiole » etc.) doivent disparaître du langage courant.

Les blagues misogynes appuient sur des stéréotypes trop fermement ancrés dans les esprits pour pouvoir être de simples blagues innocentes. Elles sont trop souvent déplacées pour pouvoir être drôles pour tout le monde (ou drôles tout court, d’ailleurs).

  • « On ne peut plus rigoler / on ne peut plus rien dire »

Si, on peut. Mais il faut avoir en tête la réalité du rapport dominant-dominé entre les groupes pour pouvoir rire des stéréotypes. Bérengère Krief peut faire un sketch sur le harcèlement de rue, parce qu’elle connaît le sujet (elle en est victime) et parce qu’elle caricature les agresseurs.

Mais un homme ne peut pas faire de l’humour sur « la drague de rue » en niant la dimension harcèlement, en riant et/ou en moquant les victimes (par exemple, les réactions des filles dans la vidéo de Guillaume Pley n’ont rien de drôle).

Un ami vraiment raciste qui ferait une grosse blague raciste, ça ne vous ferait pas rire. Vous en seriez gêné·e. C’est le sens de la phrase de Desproges bien souvent invoquée à tort : « on peut rire de tout mais pas avec n’importe qui », c’est-à-dire qu’on ne peut pas rire d’une blague raciste avec des personnes qui sont convaincues que le stéréotype raciste dont on se moque est une réalité — il était face à Jean-Marie Le Pen lors de ce réquisitoire dans l’émission Le Tribunal des Flagrants Délires.

N’acceptez pas que des amis sexistes fassent des blagues sexistes, et comprenez que les femmes et les alliés du féminisme s’en offusquent.

Apprendre à dialoguer

Apprendre à dialoguer, c’est par exemple ne pas se braquer lorsqu’une personne se revendique féministe. Ne pas dire « tu exagères » lorsqu’une femme vous raconte son expérience du sexisme ordinaire, mais lui demander plutôt d’étayer ses propos si vous n’êtes pas convaincu.

Devenir un allié actif du féminisme, c’est adapter son comportement au quotidien pour favoriser le dialogue et participer à la compréhension du message. Quand on dit que l’égalité ne se fera pas sans les hommes, c’est bien à ce niveau que vous intervenez, dans la légitimation et la diffusion du message.

—– Agir et réagir —– au quotidien

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« Peu importe ce qu’on vous dira, les mots et les idées PEUVENT changer le monde. »

Le sexisme ordinaire ne se combat pas lors de batailles héroïques. C’est une affaire du quotidien. C’est une remarque déplacée qu’il faut éviter de faire, c’est une situation sur laquelle il faut intervenir, mais pour protester, pas pour « porter secours à une demoiselle en détresse ».

Dire « je suis un mec bien » ne suffit pas : il faut agir, ne pas laisser passer les blagues misogynes, ne pas cautionner le harcèlement de rue en laissant un pote siffler une fille qui passe… Ce sont toutes ces attentions du quotidien qui contribuent au final à faire la différence.

Vous pouvez agir. Sans confisquer la parole, sans accaparer l’espace, vous pouvez agir au quotidien pour faire progresser l’égalité hommes-femmes. Par exemple en réagissant quand vous assistez à une forme de sexisme.

Réagir quand vous êtes témoin de sexisme

Votre position de privilégié peut vous donner davantage de poids dans ces situations. On ne vous traitera pas d’hystérique mal baisée ou de « Miss Monde » (n’est-ce pas Guillaume Pley) si vous dites à un homme d’arrêter de siffler les filles dans la rue, par exemple. En voici d’autres :

  • Prendre conscience de son privilège dans le monde professionnel, cela consiste à traiter vos collègues avec égal respect, sans distinction de genre. Lorsque votre position vous le permet, n’hésitez pas à relever les remarques et commentaires déplacés (établissant une corrélation entre apparence physique et compétences, par exemple).
  • Prendre conscience des nombreuses références aux stéréotypes de genre, du renforcement de la domination masculine dans la culture populaire (cinéma, musique, publicité, télé, jeux vidéo….)
  • Avoir conscience du sexisme infusé dans les clichés publicitaires, par exemple, et remettre en question l’organisation genrée du foyer. Le partage des tâches obéit à une logique genrée si insidieuse qu’il faut activement la déconstruire. Sans quoi elle persiste, et pire, on la reproduit sur ses enfants (les filles s’occupent de la cuisine et de la lessive, les garçons tondent la pelouse et participent au bricolage).

Ne pas prendre part au harcèlement de rue

Une évidence, et pourtant, beaucoup de « mecs biens » participent à ce fléau quotidien. Les filles ne marchent pas seules parce qu’elles ont envie d’être abordées. Les filles ne se mettent pas en jupe parce qu’elles ont envie qu’on commente leur tenue (souvent, c’est une bête question de météo ; je m’étonne d’ailleurs que le lien météo favorable/jupe n’ait jamais été fait, et que l’on continue d’associer la jupe à une sexualité supposée… quoi que certains commencent à faire le rapprochement.)

Corollaire : on mate discrètement. Certaines filles aussi se rincent l’œil de temps à autre, mais rarement de manière aussi ostentatoire et démonstrative que certains représentants du « sexe fort ». On peut quand même bien se faire plaisir sans objectifier la personne !

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« Ça va c’est un compliment ! T’es tellement coincé ! » — Pas très sympa, hein ? (vidéo)

On peut draguer dans la rue, à condition de se comporter de façon respectueuse, et surtout, de respecter le refus de la personne qui n’est pas dans la rue pour être séduite mais pour vaquer à ses occupations, et qui a probablement déjà dû gérer une ou plusieurs interventions plus ou moins insultantes/agressives/polies avant la vôtre.

Ne pas prendre part au slut-shaming, body-shaming…

Agir pour construire des relations égalitaires

Si vous êtes pour l’égalité des droits et le respect des individualités dans leur diversité, vous êtes féministe. Si vous aussi, vous n’hésitez pas à vous revendiquer féministe, vous contribuez à débarrasser le mot « féminisme » de la connotation négative qu’on lui confère parfois. Et plus les hommes seront nombreux à revendiquer ce label, moins les femmes qui le font seront réduites à « une bande d’hystériques ».

Repenser votre manière de draguer

Attention à votre manière de flirter : commençons déjà par ne pas confondre séduction et harcèlement. Ensuite, n’hésitez pas à faire bouger les lignes des codes de la séduction dans laquelle la femme est « l’objet », tandis que l’homme en est l’acteur.

Les Pick Up Artists et coachs en séduction se fourvoient sérieusement lorsqu’ils présentent la séduction comme un rapport de force. Il n’y a pas d’un côté les hommes-qui-veulent et les femmes-qu’il-faut-convaincre, avec un panel d’approches « d’attaque » qui marcheraient à tous les coups, sur toutes les femmes.

Est-ce que votre manière de flirter, d’approcher, de séduire est respectueuse ? Que penseriez-vous de la personne qui utiliserait la même approche sur vous ? Vous sentiriez-vous envahi, utilisé, voire insulté ? C’est que votre approche n’est sans doute pas la bonne. Séduction et féminisme ne sont pas antinomiques, bien au contraire !

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« R2-D2, arrête d’essayer de sucer ma bite » — Voilà. En gros, ne soyez pas R2-D2.

Partager l’espace

La nuit, la rue, les bars, les espaces publics… Ne pas se comporter comme un troupeau de hyènes en possession d’un territoire. Les hommes ne sont pas des prédateurs et les femmes ne sont pas du gibier. Agissons en conséquence et la rue cessera d’être une jungle (surtout la nuit)

Politesse, pas galanterie

La galanterie est une forme de sexisme. En revanche, tenir une porte, laisser la priorité, offrir de régler une addition, ce ne sont pas des marques de sexisme, ce sont des formes de politesse. Si vous ne tenez la porte qu’aux femmes, vous êtes peut-être galant vis-à-vis des femmes, mais vous êtes un mufle vis-à-vis de tous les autres. Les femmes ont besoin d’être respectées en tant qu’individus, pas d’être secourues en tant que princesses sans défense.

Repenser la répartition des tâches au sein du couple

L’implication dans les domaines auparavant réservés exclusivement aux femmes (tâches ménagères, éducation des enfants…) n’est pas nécessairement facile, même pour les meilleures volontés. Disons-le sans aucune condescendance : repasser, cuisiner, ça s’apprend. Personnellement, j’ai dû apprendre, ce n’était pas inscrit dans mon code génétique.

Les tâches ménagères n’ont pas de sexe. Les hommes et les femmes ne sont pas naturellement programmés, ou plus doués pour l’une ou l’autre tâche. Tout s’apprend. Peut être que votre moitié adore cuisiner et déteste bricoler. Si vous vous y retrouvez, aucun souci. Mais si vous partez du principe que c’est elle qui cuisine parce que « les femmes sont douées pour ça » ou (pire) « toutes les femmes aiment cuisiner », vous avez tout faux.

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Le Zesty Guy, preuve vivante que cuisine et virilité font très bon ménage

Repenser votre conception de l’humour

Car une femme qui dit « cette blague est misogyne, elle n’est pas drôle », c’est bien connu, elle n’a pas d’humour. Un homme qui dit la même chose a plus de crédibilité (déjà, on ne peut pas lui répondre « ben t’as tes règles ou quoi ? », ça écrème sérieusement les possibilités de réparties sexistes).

—– Accepter —– de n’être pas toujours à l’aise

C’est une situation inconfortable : vous avez pu, sans doute, vous comporter de façon ouvertement sexiste au cours de votre existence, tout comme bien des femmes. Vous avez pu participer au renforcement de ces stéréotypes, tout comme bien des femmes. Vous avez pu abuser de la situation dominante que vous confère cette société patriarcale.

Le féminisme ne fait pas le procès des hommes, ni en général, ni en particulier. Il n’y a donc pas lieu de se sentir agressé. On peut se sentir inconfortable, certes. Il faut l’accepter, comme il faut accepter aussi que devenir un allié n’ouvre pas un droit à une récompense. Ni récompense pour les alliés, ni condescendance pour ceux qui n’y sont pas (encore) !

awkward

Parfois dans la vie on est mal à l’aise. C’est pas grave.

Savoir accepter qu’on a pu se tromper

Certaines situations, certaines discussions et débats pourront avoir pour effet de vous placer dans une situation inconfortable, dans l’incompréhension, face à vos doutes. C’est une étape nécessaire sur la voie de la réforme. C’est aussi accepter de faire des erreurs parfois, d’être repris quand on se trompe (et apprendre à se reprendre soi-même).

Savoir s’excuser

Savoir s’excuser si on réalise qu’on a fait une erreur, sachant que « désolé que tu aies mal compris » n’est pas une excuse, mais de la condescendance.

Et cela vaut aussi pour les femmes, qui, souvent, se rendent compte au fil de leur éducation féministe que certains de leurs comportements sont problématiques, puisque le sexisme est partout (les femmes aussi font du slut-shaming).

Accepter les opinions divergentes

Poursuivre le même objectif ne veut pas dire être nécessairement d’accord sur toute la ligne (et ça ne vaut pas que pour le féminisme !). Au sein même des féministes, des dissensions existent, mais l’objectif final reste le même, quels que que soient les moyens envisagés par les différents courants pour y parvenir. Les divergences ne doivent pas faire oublier que nous sommes tous allié·e·s (par exemple, taper sur les Femen à base de slut-shaming, c’est contre-productif ; critiquer de façon constructive certaines de leurs actions ou leurs prises de positions, c’est bien plus productif).

Acceptez que l’inaction rend complice… Ne pas agir, c’est contribuer passivement au renforcement de l’ordre établi. Ce n’est pas une accusation, mais il n’y a pas non plus d’excuse : c’est un état de fait.

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On a besoin de votre aide !

Être un allié du féminisme, ce n’est pas le parcours du combattant. Ce n’est pas prendre les armes et construire des barricades. Nous n’avons pas besoin de soldats obéissants.

Nous avons besoin d’alliés de tous horizons, y compris et surtout parmi la classe « privilégiée », celle dont la parole et la légitimité ne sont pas remises systématiquement en question dans l’espace public. L’égalité ne pourra pas être atteinte sans vous, sans le concours des hommes, nombreux et convaincus par la légitimité de cette cause, par la légitimité du féminisme.

On ne vous demande pas de « brûler vos soutiens-gorge ». Mais on vous demande de nous aider à construire cette société égalitaire, respectueuse des identités individuelles et de la libre détermination de chaque individu.

Ne rien faire, c’est contribuer à renforcer un système qui vous oppresse également, en vous enfermant vous aussi dans des stéréotypes de genres.

Votre position de privilège ne vous rend pas plus libres, mais simplement plus confortables : « la cage est dorée ». Le féminisme ne cherche pas à améliorer « le confort » des femmes. On veut faire péter notre cage. Et la vôtre également.

« Les hommes qui veulent être alliés féministes n’ont pas besoin qu’on leur donne un espace dans le féminisme. Ils ont besoin de prendre l’espace qu’ils ont dans la société et de le rendre féministe. » source

Plus les hommes seront nombreux à revendiquer l’égalité, plus cette revendication s’imposera comme légitime et incontournable dans le débat public.

Pour aller plus loin :

Note de la rédaction : très chers lecteurs et lectrices non-membres, notre forum de discussion étant un espace de discussion non-mixte depuis sa création – pour des tas de raisons qu’il serait très long d’expliquer ici (on le fera un jour), nous vous invitons si vous le souhaitez  à débattre du sujet sur le fil de commentaires Facebook ci-dessous.

Découvrez le BookClub, l’émission de Madmoizelle qui questionne la société à travers les livres, en compagnie de ceux et celles qui les font.

Les Commentaires

40
Avatar de L'orchidee
16 août 2015 à 15h08
L'orchidee
Bonjour !
Cela fait longtemps que le harcèlement de rue me pèse. Plasticienne, je souhaite réagir.
Je cherche pour ma prochaine vidéo visant à lutter contre le harcèlement de rue des filles qui acceptent d'être filmées pour un court métrage de quelques minutes. Aucun critère de sélection : être vous même et vous sentir concernée par le harcèlement de rue, vous engager pour lutter contre. Être dispo sur Paris République au moins 4 à 5h, accepter d'être maquillée. Pas de rémunération mais goûter ou repas à partager ! À votre disposition pour en discuter. contact(at)fannybastien.fr www.fannybastien.fr

Merci d'avance! Fanny
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