Le tchip fait parti intégrante du mode d’expression des personnes noires, en France comme ailleurs. Il y a quelques jours, une mesure plutôt surprenante a été prise par le proviseur adjoint d’un lycée d’Evry : Éric Bongo a décidé d’interdire le « tchip » au sein de son établissement.
Qu’est ce que le tchip ?
Le tchip se traduit par un bruit de bouche généralement utilisé par la communauté noire. Les Africain•e•s, les Antillais•es et les Afro-Américain•e•s utilisent cette production sonore pour exprimer leur mépris, leur dédain ou leur désaccord. Cité par Slate, Eric Bongo explique sa démarche :
« Le tchip est interdit au lycée, comme toute insulte, car c’est une insulte […] 80% des élèves, dans certaines classes, sont noirs. Il faut qu’ils se débarrassent de certains codes culturels qui sont inappropriés au monde scolaire et au monde de l’entreprise. »
Une vidéo postée par la chaine Zmokheur explique ce qu’est le tchip ainsi que les règles autour de son utilisation.
La ministre Christiane Taubira avait même utilisé le tchip, pour répondre aux attaques racistes du Front National dont elle était la victime !
https://www.youtube.com/watch?v=XUJJ9VfWiHI
Elle qualifiait cet acte de « concentré de dédain » surtout utilisé par les femmes. Lors de cette interview, Christiane Taubira, Garde des Sceaux, s’est servi d’un code culturel provenant de son département d’origine, la Guyane, pour répondre à une agression dans le domaine politique. C’est l’une des première fois où on entendait tchiper dans un programme non humoristique de la télévision française.
Le tchip doit-il disparaître des écoles ?
Le tchip doit donc respecter des codes bien précis. On ne tchipe pas son supérieur hiérarchique, un professeur ou ses parents : ce n’est pas respectueux. Le problème dans cette interdiction du tchip dans un établissement scolaire est qu’il y a une volonté de supprimer un code culturel ancré dans le mode de vie de nombreux individus, au lieu de vouloir corriger ses dérèglements ou ses débordements. Il paraît évident que le tchip doit être interdit en classe, mais vous ne pouvez pas retirer le droit à un individu, même enfant ou adolescent, de s’exprimer avec ce qu’il considère comme sa langue ou le seul moyen d’expression qu’il connaît !
On ne peut pas, par exemple, interdire à un individu de souffler pour marquer son ras-le-bol, de hausser les épaules ou même de prononcer « merde » sous le coup de l’agacement. Mais on peut interdire à un•e élève de pratiquer ces actes envers une personne d’autorité, à qui il doit le respect.
Ici, on assiste (encore une fois…) à une stigmatisation de certains élèves de la part d’un système éducatif qui souhaite que les jeunes racisé•e•s rejettent des codes culturels considérés comme inadaptés.
Le proviseur adjoint a voulu légitimer son acte par le fait qu’il est lui-même d’origine africaine et considère le tchip comme un acte déplacé, comme il le confie au Parisien :
« J’ai grandi en Afrique, et quand j’étais petit, j’avais interdiction formelle de tchiper les autres. C’est extrêmement vulgaire. »
La vulgarité de l’acte se trouve en réalité dans le fait de le pratiquer dans les mauvaises conditions et avec les mauvaises personnes. Vous ne pouvez pas interdire une façon de s’exprimer à un individu qui l’a totalement intégrée dans ses codes de langage. Il ne s’agit pas de la première fois que de nouvelles règles tentent d’interdire des codes culturels issus d’autres pays. Le voile porté comme un vêtement traditionnel ou encore les jupes longues sont régulièrement remis en cause dans une société qui veut conformer tous les individus à une culture unique, plutôt que de voir la variété comme une richesse…
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Selon vous, doit-on bannir le tchip des écoles, ou le traiter au cas par cas comme n’importe quelle autre marque d’agacement ?
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