Article initialement publié le 28 janvier 2011
Amies poulettes, la vie de chroniqueuse sexe est un enfer terrifiant et monstrueux, je suis obligée de regarder du porno. Comment ça mon excuse est foireuse ? Comment ça je… maman, arrête de lire cet article, ok ?
Quoi qu’il en soit, vous savez sans doute qu’il existe maintenant du porno fait pour nous les femmes, et surtout, PAR nous les femmes.
Du porno pour femmes.
Le porno pour les femmes, par les femmes
Il y a eu Ovidie et maintenant il y a Erika Lust, une Suédoise (viking attitude !) installée à Barcelone (caliente !).
Elle a déjà plusieurs succès à son actif, ce qui n’est pas anodin dans le milieu ultra-compétitif du porno, et c’est une « vraie » réalisatrice qui fait de « vrais » films – et pas des scènes de gonzo (= pseudo-amateur) qui durent quatre minutes mais avec douze pénétrations.
Le porno pour femmes, c’est peut-être l’occasion de vous réconcilier avec le genre.
J’ai visionné Five Hot Stories For Her, une de ses premières œuvres qui rassemble cinq histoires (donc). Il y en a pour tous les goûts : lesbien, gay, SM, avec deux amants, avec le livreur de pizza… c’est une chouette manière de pique-niquer (oh la vanne) dans ses fantasmes.
Et en tant que consommatrice de porno traditionnel, laissez-moi vous dire qu’on sent la différence.
Porno pour femmes : il y a un scénario
Je ne parle pas d’un thriller à rebondissements mais simplement de personnages qui ont une vie, des interactions et des raisons de faire l’amour (et pas seulement : « oh tiens un mec passait par là, oh c’est marrant ça, j’avais pas remarqué qu’ils étaient douze »). Le sexe n’est pas gratuit.
Porno pour femmes : les gens parlent !
Truc de fou ! Des dialogues ! Euh, qui dépassent le « prends-moi comme un Labrador, homme sans pitié » ! Dans le film d’Erika Lust, les personnages papotent, s’engueulent, passent des coups de fil… enfin, comme dans la vraie vie, quoi.
Porno pour femmes : là où les gens s’embrassent
Sans doute une de mes plus grosses satisfactions de spectatrice : enfin des acteurs et actrices porno qui se roulent des pelles (ou qui se bécotent doucement). Non, rouler des pelles aux organes génitaux de l’autre ne compte pas.
Porno pour femmes : les gens se marrent
Avant le sexe, pendant, et après. Terminées les mines dépitées (et encore, quand on voit la tête), les grimaces de souffrances et les poses de pétasses. Le sexe ressemble à ce qu’on connaît dans la vie : un moment où tu peux aussi rigoler, te sentir complice, te faire des câlins.
Porno pour femmes : on voit les acteurs
Et pas seulement les actrices… Là encore, grande satisfaction. Le porno tradi se fout totalement des hommes, pour peu qu’ils bandent. Leur visage est hors-cadre, notamment avec la mode de la vue subjective (POV).
Ce qui est dommage quand on aime les mecs, leur corps, et leur sourire. Cette fois, ils ne sont pas oubliés, et du coup, ils sont aussi vachement plus beaux que dans le X habituel.
Porno pour femmes : les acteurs ne bandent pas tout le temps
Mais oui mais oui, on aperçoit encore moins que des demi-molles. Par un bizarrerie médicale, il semble qu’on ne puisse trouver de pénis au repos que dans du porno de femme.
Dans le porno féminin : les actrices ne sont pas parfaites
D’accord, elles ne le sont pas non plus dans le porno pour mecs, et on trouvera ici quelques seins refaits – mais aussi de la cellulite (un peu), des ventres mous, des seins naturels (aussi), des tatouages, des piercings, des filles normales qu’on n’appellera pas « matures ». Bon, elles sont belles quand même.
Dans le porno féminin : le rythme est plus lent que dans le porno classique
Troublant quand on est habituée au porno de papa : cette fois, on a le temps d’attendre que l’action se produise.
Pendant les scènes de sexe elles-mêmes, ça va vite, le rythme est haché, dans une esthétique assez clip. Mais pendant les scènes de comédie, on construit les personnages, on les laisse parler, on n’a pas l’impression de se trouver face à des poupées gonflables sous coke.
Dans le porno féminin : les gros plans manquent
Petite déception pour moi : pas de focus extralarge sur l’action. On aime ou pas le côté chirurgical. Moi j’aime. Du coup, on m’a privée de quelque chose qui est important pour construire mon fantasme. Vous ne trouverez pas non plus de sodomie dans ce film… à part entre deux mecs :)
Dans le porno féminin : réalisation se focalise sur les réactions des acteurs
A la mécanique des corps s’ajoute la mécanique des émotions. Erika Lust filme beaucoup les visages et les acteurs ont l’air d’aimer sans en faire des tonnes. Point de gémissements répétitifs mais des hardeurs qui ont l’air de s’amuser. Et puis c’est beau un homme qui jouit, non ?
Voilà pour les différences. Mais attention, un porno pour femmes reste un porno. Ce qui signifie que les personnages font l’amour, et même beaucoup, pour des raisons parfois ésotériques, pendant une éternité, dans 112 positions différentes, et en jouissant volontiers sur le corps/visage des filles. On ne va pas TOUT changer non plus.
Conclusion ? Aux lectrices qui ont envie de se lancer dans le monde du fantasme en vidéo avec quelque chose d’excitant ET de respectueux pour les femmes, je recommande vraiment de tenter l’expérience.
La réponse au mauvais porno n’est pas la suppression du porno : c’est un meilleur porno (je paraphrase les féministes pro-sexe, là, en douce). Erika Lust est un exemple du X futur, celui que notre génération va construire et qui se moquera pas mal des vieux clichés. Je pense que ça vaut le coup de l’encourager.
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