J’ai mis un peu de temps à lancer Mrs. America, je pense m’y être mise par défaut ou par dépit : je n’avais rien d’autre à mater, donc même si le pitch ne me tentait pas plus que ça, je lui ai donné sa chance.
Le casting royal, comportant Cate Blanchett, Rose Byrne, Sarah Paulson ou encore Uzo Aduba, a achevé de me convaincre. Et je n’ai rien regretté !
Mrs. America, une série sur le féminisme
Mrs. America est une mini-série, qui ne comportera donc qu’une seule saison. Elle comporte 9 épisodes, qui ont tous été diffusés — aux États-Unis sur Hulu & FX, en France sur Canal+.
L’intrigue se déroule aux États-Unis, à la fin des années 70. Les féministes militent pour faire passer dans la Constitution l’Equal Rights Amendment (E.R.A.), qui vise à garantir l’égalité des droits entre femmes et hommes.
Selon le système fédéral américain, cet amendement doit être ratifié par 38 États pour entrer dans la Constitution. La bataille semble gagnée d’avance, puisque Démocrates comme Républicains sont en faveur de cette ratification…
Mais c’était sans compter sur un sérieux grain de sable dans les rouages : Phyllis Schlafly, une femme au foyer pleine d’ambition qui rassemble un mouvement antiféministe et conservateur dédié à lutter contre l’E.R.A. mais aussi contre d’autres avancées comme le droit à l’avortement.
Mrs. America, une série par et pour les femmes
Après avoir fait ses armes sur la cultissime Mad Men, la sous-cotée Halt and Catch Fire et la piquante Desperate Housewives, la showrunner Dahvi Waller a pris les rênes de Mrs. America.
Elle a choisi de mettre en lumière les femmes, toutes ces femmes qui pensent sincèrement militer en faveur des autres femmes, qu’elles soient féministes ou conservatrices.
Bien qu’il y ait quelques personnages masculins dans la série, incarnés par des acteurs de renom (John Slattery, James Marsden…), ils sont clairement au second plan. Ce sont les femmes, les héroïnes.
Au point qu’Udo Azuba a expliqué dans le podcast américain Still Watching qu’elle avait été très heureusement surprise, elle qui pensait ne plus jamais retrouver une équipe féminine après la fin d’Orange is the New Black
(elle y jouait Suzanne alias Crazy Eyes) !
D’autres points forts sont à noter niveau diversité : l’épisode centré sur Shirley Chisholm, incarnée, donc, par Udo Azuba, est écrit et réalisé par des femmes noires, ce qui est assez rare pour que l’actrice elle-même le souligne, toujours dans Still Watching.
Shirley Chisholm était la première femme afro-américaine élue au Congrès, et la première personne noire à se présenter pour la candidature à la présidence dans un grand parti (elle a fait campagne pour devenir la candidate démocrate lors des élections de 1972).
Mrs. America, une série pour parfaire son éducation féministe
Je suis toujours un peu embêtée quand on me demande des conseils pour enrichir sa culture féministe.
À part un semestre d’études de genre à la fac, je n’ai pas eu d’éducation féministe « classique » ; j’ai appris, comme beaucoup, par les réseaux sociaux, Internet, les mouvements les plus modernes…
Je manque cruellement de recul et de connaissances sur l’histoire du féminisme. Et Mrs. America est venue combler quelques-unes de mes lacunes !
J’avais entendu ici et là les noms de Gloria Steinem, Betty Friedan… mais sans jamais me pencher sur ce qu’elles ont accompli (indice : beaucoup de choses). Ces féministes de ce qu’on appelle « la seconde vague » n’étaient pour moi que des idées abstraites et bien peu précises.
En retraçant le combat de toute une époque, Mrs. America enrichit ma culture mais aussi ma curiosité. J’ai envie de dire La femme mystifiée, le livre de Betty Friedan qui semble avoir donné vie à cette « seconde vague du féminisme », j’ai envie de regarder des interviews de Gloria Steinem et même de voir l’odieuse Phyllis Schlafly en chair et en os !
Mrs. America, une série plus moderne qu’elle n’y paraît
Mrs. America a beau se dérouler il y a 50 ans, j’y ai reconnu beaucoup de préoccupations très modernes qui te seront familières si tu baignes un peu dans les discours féministes actuels.
La place de l’intersectionnalité, la prise en compte par le féminisme des différentes oppressions et notamment du racisme, est abordée de front — par le personnage de Shirley Chisholm mais aussi par des femmes noires moins connues qui ne se sentent pas forcément à l’aise dans un mouvement très blanc de peau.
Les désaccords entre féministes sont traités sans fards, et tu sais probablement aussi bien que moi qu’il y en a… disons… pas mal ! La « starification » de certaines membres du mouvement, plus « acceptables aux yeux du grand public » (notamment Gloria Steinem, jeune, belle, sexy et hétéro), fait débat, par exemple : faut-il cacher son aspect radical afin de plaire au plus grand nombre, ou l’assumer pour ne pas risquer une victoire au goût amer ?
Et bien sûr, via Phyllis Schlafly et ses co-militantes se pose LA question : un féminisme pour toutes les femmes est-il possible ? Comment réagir face à une femme anti-féministe ?
Toutes ces interrogations sont toujours d’actualité et Mrs. America ne prétend pas y répondre, simplement les poser sur la table et explorer plusieurs pistes, au nom des droits des femmes.
Si tout ça te donne envie, va donc binger les 9 épisodes de Mrs. America sur Canal+ !
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