La Daronne est la reine des conseils pas si cons enrobés dans une grosse dose d’humour plus ou moins subtil. La voici de retour pour voler au secours d’un lecteur !
La question pour la Daronne
Chère Daronne,
Je suis marié et père de deux enfants de 1 et 4 ans. De base, je suis un peu fragile, mais depuis qu’ils sont nés, je suis très souvent malade. Ma femme est plus solide que moi, et apparemment, nous devrions tous avoir le même système immunitaire qu’elle ! On dirait que je lui fais un affront monstrueux à chaque fois que je suis malade.
Non seulement, elle ne fait pas preuve de compassion, alors que c’est quand même peu demandé quand on est au lit avec 39 de fièvre, mais elle me reprocherait presque mon état. Si j’ai le malheur de me plaindre, elle soupire ou change de sujet. Nous nous sommes déjà embrouillés à ce propos, mais elle considère que sa réaction est normale : j’en fais des tonnes et je cite « ça dure des plombes à chaque fois », mais en plus, je ne ferais pas ce qu’il faut.
Selon elle, il suffirait que je me couche avec les poules, prenne des vitamines et me lave davantage les mains et je serai déjà nettement moins souvent malade.
Quand je suis en forme, tout va très bien entre nous et nos rapports sont affectueux. Mais ce conflit revient à chaque fois que je suis malade. Je comprends que ce soit pénible pour elle. J’ai enchaîné les virus qui m’ont cloué au lit, et ont fait peser l’intendance sur elle pendant mon « absence ». Mais ce n’est pas comme si je faisais exprès. Personne n’aime être malade.
Qu’en penses-tu ?
Jeremy
La réponse de la Daronne
Mon petit ibuprofène,
Ma compassion est absolue, tout comme mon empathie. Je traîne depuis un mois une crève coriace, assaisonnée selon les semaines de toux, d’oreilles bouchées, de maux de tête, et même de symptômes digestifs hérités de la gastro de mes chers rejetons. Pourtant, je peux t’affirmer avec la certitude la plus absolue que personne chez moi ne s’en est rendu compte. Enfin, j’exagère : le Daron a râlé à plusieurs reprises, car mes quintes et mes ronflements l’empêchaient de dormir. Curieusement, le moment où mon état de santé s’est suffisamment dégradé pour attirer enfin l’attention méritée a correspondu à celui où le Daron s’est aussi vu terrassé par un ultime virus hivernal.
En bons coéquipiers soudés dans cette aventure parentale étrange, nous avons partagé les tâches infantiles. Il n’empêche que s’il n’avait pas été malade AUSSI, je me serais épargné la lecture fébrile d’une histoire du soir particulièrement psychédélique.
Cette introduction nous montre qu’il est toujours possible de contribuer au labeur familial, même aux portes de la mort. Elle nous montre aussi que face au mec hétéro malade, il y a une femme qui en théorie est parfaitement autorisée à avoir, elle aussi, des moments où elle peut tout laisser tomber. Même si, saleté de hasard, il y a toujours quelque chose qui l’en empêche.
A-t-on le droit d’être malade quand on est parent ?
À travers vos courriers, je réalise un peu plus chaque semaine à quel point la nature s’est fichue de nous. Le petit enfant exige par principe que l’on soit systématiquement opérationnel et alerte, mais il est également l’animal le plus contagieux qui peuple cette planète. Face à cette version domestique de dragons de Komodo, les chances de survie en bonne santé à court terme sont faibles, puis inexistantes au-delà.
Si à chaque fois qu’ils étaient malades, les parents se retiraient du monde, on manquerait sérieusement de monde pour veiller sur la marmaille. Je ne nie pas que des cas de force majeure nous immobilisent pour de bon (coucou la grippe). Par contre, je ne suis pas certaine qu’avoir 39, le nez qui coule et mal à la tête en fait partie.
Tu n’es peut-être pas responsable du fait que ta femme soit rarement malade, ni même que les mères en général se permettent peu de l’être. Mais la parentalité exige de revoir ses standards en matière d’alitement. Je comprends que ce soit particulièrement désagréable d’être en si mauvaise santé, cela dit, je comprends aussi que ce soit particulièrement rageant de devoir tout assumer à la maison pour un mec qui ne prend même pas au sérieux ses conseils.
Prendre soin de toi ?
Je ne peux pas te dire si le fait de prendre des vitamines, te laver les mains ou encore te coucher tôt changera quoi que ce soit à ton état. Cela dit, la qualité du sommeil influe sur le fonctionnement immunitaire, certaines carences aussi. Même si je te l’accorde, tomber malade, c’est assez sympa, car on peut éviter le tunnel du soir. Sauf pour certaines. Suivez mon regard. Je dis ça, je ne dis rien.
Ce que te demande ta compagne ne me semble pas particulièrement contraignant. Surtout la partie où il s’agit de se laver les mains et d’avaler un cachet quotidien. Si les résultats ne sont pas convaincants, tu auras prouvé à ta femme qu’elle avait tort et tu pourras continuer d’enchaîner les virus, au chaud dans ton plumard.
Non, je plaisante.
Tu consulteras un généraliste pour passer un bilan, t’assurer que tout va bien et quémander des astuces pour booster ton système immunitaire en carton. Tu fais que tu veux de ton corps et de ta santé, mais n’oublie pas que ce sont les autres qui trinquent quand tu n’en prends pas soin. Lorsque tu te moques ouvertement des conseils de ta femme, tu lui envoies le message suivant : son inconfort est moins important que ta flemme. Voilà.
On rigole, on spécule, mais on n’oublie pas le respect
Certaines situations sont si ridiculement systématiques et si clichées, que les rôles s’inversent injustement. Tu venais chercher de l’aide, tu repars avec une prescription de vitamines et de lavage de mains, et le conseil de faire un effort même si tu souffres. Effort si pénible que j’espère que lui au moins déclenchera chez toi l’envie de te prendre en main médicalement.
Cela dit, j’aimerais aussi vous inviter à en discuter à froid, c’est-à-dire quand tu n’as pas de fièvre et que tu es en bonne santé. De ce que je lis dans ton courrier, vous avez seulement eu l’occasion de vous embrouiller à ce sujet. Échanger et écouter calmement vos frustrations mutuelles avant d’envisager un plan d’action correct pour la prochaine fois, en voilà une meilleure idée. Quant à toi, pour compenser, tu pourrais spontanément lui proposer une soirée « off » par semaine. Même en pleine forme, elle sera autorisée à s’enfermer dans votre chambre sans communiquer avec le monde extérieur. Crois-moi, elle ne rêve que de ça.
Je te laisse, je dois aller à la pharmacie pour acheter du paracétamol au Daron
La bisette,
Ta Daronne
Les Commentaires
@Tardigrade j'aimerais bien batchcooker mais je trouve difficilement le temps. Un jour, peut-être... Mais l'hiver, on a effectivement des soupes en brique qui font l'affaire les soirs de flemme.