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Parentalité

Élever un garçon après #MeToo : entre craintes et responsabilités

Éduquer les garçons dans une perceptive féministe est un enjeu essentiel. Mais dans une société encore empreinte de sexisme et alors que la charge éducative repose toujours davantage sur les femmes, la tâche n’est pas si facile.

Pour Louise, maman d’un petit garçon d’un an, l’annonce du sexe de son enfant s’est accompagnée de nombreuses questions et nuits blanches. « J’ai eu comme une sensation de vertige, se souvient la trentenaire. Après tout, c’est une grande responsabilité d’élever un garçon aujourd’hui. La lutte contre les inégalités et les violences faites aux femmes passe nécessairement par un changement des mentalités et des comportements des hommes. L’éducation des petits garçons est donc un enjeu majeur. Je me suis demandé si j’allais être à la hauteur. »

Le mouvement #MeToo a incontestablement eu un impact dans notre approche de l’éducation des enfants. En mettant en lumière l’ampleur des violences auxquelles les femmes sont confrontées, il a également révélé la persistance des comportements sexistes et de schémas de pensée virilistes chez de nombreux hommes. Face à l’injonction de « protéger les filles », les féministes ont donc répondu par un appel à « éduquer les fils ». De quoi mettre la pression aux futurs parents.

À lire aussi : 5 ans après #MeToo, 5 femmes de 20 à 40 ans racontent ce qui a changé pour elles

Éducation féministe vs société sexiste

Aurélia Blanc, journaliste et autrice du livre Tu seras un homme féministe mon fils (Marabout, 2018), a pris conscience du poids de ces appréhensions lors de sa grossesse. « J’ai constaté à ma grande surprise que la perspective d’attendre et surtout d’élever un petit garçon me chamboulait pas mal. Une de mes grandes interrogations était de me dire : comment faire pour élever un garçon dans une perspective féministe, dans une société qui reste profondément sexiste ? », explique-t-elle. Une question qui la conduira à l’écriture de ce manuel d’éducation antisexiste.

L’influence parentale a bien évidemment ses limites. Et malgré les avancées en la matière, élever un garçon féministe reste encore un combat quasi quotidien contre nos normes culturelles et sociétales. « Deux modèles masculins cohabitent. L’un, ancien, fondé sur un idéal masculin viril et l’autre plus récent qui intègre des valeurs comme le respect des femmes, l’égalité entre les sexes ou le non-recours à la violence. Même s’il y a une remise en question de cet archétype de l’homme dominateur et supérieur, notre société peine à sortir totalement de ce vieux modèle. Nous restons dans un monde tourné vers la performance et le profit avec une valorisation de la fonction sociale et une moindre tolérance de l’échec pour les garçons. Difficile dans ces conditions de se tourner vers des valeurs comme l’empathie. Face à ces contradictions, les parents, comme les garçons sont un peu perdus », explique Christine Castelain Meunier, sociologue au CNRS et autrice de Et si on réinventait l’éducation des garçons ? (Nathan, 2020).

Cette opposition entre deux modèles et cette absence de feuille de route claire sur ce qu’est l’identité masculine font de l’éducation des garçons un exercice d’équilibriste parfois complexe.  

À lire aussi : On devrait éduquer nos fils comme on éduque nos filles, pas l’inverse

Une culpabilité supplémentaire pour les mères

« En tant que parents féministes, élever une fille peut sembler plus valorisant. Il est question d’émancipation et d’indépendance. L’idée avec un garçon est de tout mettre en œuvre pour qu’il ne devienne pas une partie du problème plus tard. On se demande forcément si cela ne va pas être trop pesant », confie Aurélia Blanc.

Une transmission moins évidente et positive, qui peut faire naitre beaucoup de culpabilité. D’autant que l’image de la mère féministe est encore accolée à un certain nombre de caricatures. « Lorsqu’on dit que l’on souhaite élever son fils de façon féministe, il y a tous les clichés de la mère castratrice qui veut éradiquer les hommes. J’ai eu le droit aux blagues du style « avec une mère aussi féministe, ton fils est mal barré ». Il faut composer entre la peur de louper l’éducation féministe de nos enfants, mais aussi celle d’en faire trop et de le rendre coupable de quelque chose qui le dépasse », raconte Louise. 

Autant d’appréhensions qui viennent se rajouter à la longue liste des questionnements et culpabilisations habituelles des mères. « Aussi féministe et nécessaire soit-il, ce devoir d’éduquer les fils aux questions d’égalités et de genre reste une injonction supplémentaire qui se pose en premier lieu aux mères. Il est important de les déculpabiliser et de rappeler que finalement on fait ce qu’on peut dans une société qui ne nous aide pas beaucoup », précise Aurélia Blanc.

D’autant que dans ce combat contre les stéréotypes de genre, le rôle des pères et des hommes en général est primordial. Christine Castelain Meunier en est persuadée. « L’exemplarité joue un rôle crucial. Il y a par exemple un enjeu à repenser la place du père. Avoir une figure paternelle faite de présence et de liens basés sur la sensibilité, l’affectivité et l’humanité contribueront à faire évoluer les choses. Plus il y aura de modèles d’hommes, entre guillemets, de valeurs qui s’affirmeront plus nous progresserons… mais cela représente un rapport de force à l’échelle de l’histoire. »


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Les Commentaires

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Avatar de Patrickbateman
27 août 2023 à 14h08
Patrickbateman
@MaïaLéa Je suis dans la même problématique. J'ai accouché d'un garçon et il est clair qu'au niveau des tâches domestiques, il va participer, à son échelle, dès que possible.
Néanmoins ce qui me questionne / m'inquiète c'est qu'à la maison, je gère 70% du temps ces tâches de par nos emplois du temps respectifs. J'espère que cela ne va pas fausser les choses...
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Voir les 2 commentaires

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