Nettoyééééé, balayééééé, astiquéééééééé… KAZ LA TOUJOU PENPAN. Hum, pardon, je m’emballe. Dès qu’on parle de ménage, j’ai toujours envie d’entamer à plein poumons l’hymne de Zouk Machine.
Plus sérieusement, je voulais commencer cet article en rappelant que le sujet des tâches ménagères n’est pas trivial mais crucial.
Déjà, parce qu’elles nous occupent plusieurs heures par semaine : environ 21h30 par personne selon l’Insee. Un chiffre moyen qui varie bien sûr selon la composition du foyer et le genre. Ainsi, une mère vivant en couple y consacre plutôt 34 heures par semaine.
La répartition des tâches ménagères : une vraie source de conflits
Surtout, les tâches ménagères peuvent être une vraie source de conflits voire de souffrance au sein d’un couple, comme le raconte Sara, 35 ans.
“La répartition des tâches ménagères est un sujet qui fait trembler mon couple. Ça fait huit ans que je partage la vie d’un homme et si le quotidien se passe relativement bien, un nuage (de poussière) plane constamment au-dessus de nous. Nous ne partageons ABSOLUMENT PAS la même vision de la propreté ou du rangement.”
Une différence de tolérance à la saleté et au désordre qui se double chez le compagnon de Sara d’une éducation sexiste.
“L’attitude totalement je-m’en-foutiste de mon amoureux face à son lieu de vie provient d’une éducation où on lui a appris que d’autre personnes géraient et géreraient toujours pour lui le lave-vaisselle, les chaussettes sales et l’achat du PQ.”
Si l’éducation genrée explique parfois le déséquilibre en matière de tâches ménagères au sein d’un couple, ce n’est pas toujours le cas. Chez Marie-Amandine, par exemple, la situation est inversée.
“En couple depuis 11 ans, j’ai découvert le concept de « charge mentale » l’année dernière et j’ai compris pourquoi mon mari n’en pouvait plus et était au bord de la rupture ! Il a pris ce fardeau sur ses épaules depuis le début de notre histoire et, face à ses appels à l’aide, je ne savais que répondre : dis-moi ce qu’il faut que je fasse !”
Pour Constance, 25 ans, qui vit désormais en couple avec son amoureuse, la charge mentale, c’est-à-dire le fait d’avoir toujours en tête la logistique quotidienne de la maison, est aussi un truc dont il faut discuter entre femmes.
“Le dialogue et l’observation m’ont permis de mieux comprendre ma partenaire et à quel point elle se préoccupait beaucoup plus que moi des tâches ménagères. De son côté, elle a compris que ce qu’elle voyait comme un manque d’implication de ma part était en réalité une sensibilité différente face à la propreté.”
Tu peux faire ça « en passant » ?
D’autres facteurs peuvent aussi venir aggraver une situation déséquilibrée, comme le fait de bosser depuis la maison. Certes, on a plus de latitude pour organiser son temps quand on est freelance, mais on peut vite se retrouver pris·e dans un engrenage : et si je lançais une lessive pendant cette conf call ? Et si je faisais les courses à midi ? Et si je passais l’aspirateur au lieu de faire ma compta ?
Encore pire : l’autre peut partir du principe que comme tu es à la maison, tu peux bien faire ça « en passant ». Résultat des courses : on se retrouve à gérer toute l’organisation de la maison tout en travaillant à plein temps. Méfiance, donc.
Mais le véritable piège qui peut venir foutre en l’air une répartition jusqu’ici plutôt égalitaire des tâches ménagères, c’est l’arrivée d’un enfant, et le congé maternité. C’est ce qui s’est passé pour Audrey.
“Après la naissance de notre bébé, la situation s’est bien déséquilibrée. C’était plus facile pour moi – qui bossais à mon compte avec des horaires réduits – d’aller faire les courses aux heures où il n’y a personne et de gérer la cuisine/vaisselle puisque je mangeais à la maison le midi… Ça a fini par devenir pesant, surtout que c’était accompagné d’une grosse charge mentale liée au bébé (repas, couches, rendez-vous chez le pédiatre, etc).”
Son compagnon, fatigué par son travail, ne comprenait pas que gérer un bébé et la logistique de la maison était tout aussi crevant. Il a fallu qu’Audrey retourne travailler à plein temps dans un bureau et que lui prenne ses mercredis pour s’occuper de leur enfant, pour qu’il réalise.
“Au bout de quelques semaines, il était sur les rotules, et s’est excusé d’avoir considéré que le temps à la maison était du temps pour moi ou du repos… On a pu, à partir de là, repartir sur des bonnes bases. On n’est toujours pas sur du 50/50 mais on s’en rapproche.”
Lister toutes les tâches à accomplir
Si tu as le sentiment que la situation est trop déséquilibrée dans ton couple, je ne peux que t’encourager à en parler avec ton ou ta partenaire.
Prendre un dimanche aprèm pour lister à deux toutes les tâches à accomplir est un bon point de départ. On peut aussi pendant deux semaines noter chacun de son côté tout ce que l’on accomplit. Un peu laborieux au début, cela permet de se rendre compte de tout ce que l’autre fait (ou pas).
Ensuite, une fois les tâches listées, il faut discuter ensemble pour convenir de la fréquence à laquelle elles devront être effectuées. C’est le moment où il faut faire des compromis si vos seuils de tolérance à la saleté sont très différents.
Une fois que vous êtes d’accord, vient le moment de se répartir les tâches et là, il y a deux écoles. Ceux qui alternent en mode “on fait la vaisselle chacun son tour” et ceux qui ont chacun leurs tâches persos : “Ok, je fais toutes les lessives, mais dans ce cas tu gères les courses et la cuisine”.
On peut aussi essayer de faire un maximum de choses ensemble pour aller plus vite (les courses, le ménage, la cuisine, étendre le linge) ou combiner les deux approches, en prenant en compte les appétences et les répulsions de chacun. Même si, ne nous voilons pas la face : personne n’aime récurer les chiottes.
Les mauvaises habitudes reviennent aussi vite que les mycoses
On peut aussi mettre les enfants à contribution, en fonction de leur âge bien sûr. Voire essayer de rendre ces moments ludiques, comme Paloma et Jon le font avec leurs quatre enfants.
“Tous les week-ends, on a une ‘ménage dance party’. On met de la musique et pendant 10 minutes on range ensemble toute la maison comme des malades.”
Et puisque les mauvaises habitudes reviennent aussi vite que les mycoses, afficher cette répartition des tâches ménagères sur le frigo ou le mur n’est pas une mauvaise idée. Avec un peu de chance, ça donnera même des idées à vos potes moins organisé·es.
L’autre piste pour faire diminuer les conflits est à chercher du côté de la technologie, comme Constance et son amoureuse l’ont découvert lorsqu’on leur a offert un lave-vaisselle à Noël.
“Des débarrassages beaucoup plus rapides, moins de scrupules à cuisiner avec beaucoup d’ustensiles, une nouvelle routine pour équilibrer les tâches ménagères autour du lave-vaisselle et globalement BEAUCOUP MOINS d’embrouilles liées au partage des tâches ménagères.”
Émilie a, elle, compris après plusieurs années de vie commune que la technologie pouvait être un facteur de motivation pour les tâches ménagères.
“Pour mon conjoint, prendre une éponge c’est de l’ordre de monter l’Everest. Par contre, s’il y a de la technologie c’est plus facile. Il s’occupe donc de remplir le lave-vaisselle, le faire tourner et ranger la vaisselle. Il ramasse ce qui traîne par terre avant de lancer le robot-aspirateur, puis le robot-serpillère. Il s’occupe aussi de nettoyer les parois de la douche avec une éponge qui tourne au bout d’une perceuse. (Oui, oui, une perceuse…) Autant de tâches dont je ne m’occupe plus.”
Sous-traiter certaines tâches ?
La technologie peut aussi être un formidable atout pour gérer la charge mentale. Dans mon couple, on utilise depuis peu une appli (
Trello, mais il en existe d’autres) pour faire des to-do-lists communes pour les courses ou l’administratif. On a aussi partagé nos calendriers Gmail, pour qu’on ait tous les deux en tête les anniversaires et autres rendez-vous familiaux. On est tous les deux « chefs du projet maison » : mieux vaut inscrire dans l’appli ce qu’il y a à faire, plutôt que le garder chacun dans un coin de notre tête.
Enfin, certains couples font le choix de sous-traiter certaines tâches. En se faisant par exemple livrer les courses ou en embauchant quelqu’un pour faire le ménage. Une solution qui a bien sûr un certain coût et ne résout pas tout, comme l’explique très bien Capucine, en couple depuis trois ans.
“Nous avons la chance d’avoir deux carrières qui nous permettent de nous offrir ce luxe mais c’est un peu comme mettre un pansement sur une plaie béante… L’argent nous permet de soigner la surface mais cela ne règle pas le problème de fond. Je dois penser à organiser la vie de la maison sinon… rien ne se passerait. Et ça nous a quasiment mené à la rupture.”
Le dernier conseil que je pourrais te donner, c’est de ne pas hésiter à dire à l’autre quand la situation te pèse.
Comme l’explique très bien Titiou Lecoq dans son essai Libérées ! Le combat féministe se gagne devant le panier de linge sale : personne n’a envie d’être assimilée à l’image de la mégère qui râle sans arrêt.
Mais demander à l’autre de faire quelque chose ou exprimer sa frustration ne fait pas de toi une mégère. Et ce n’est pas parce que l’on aime sa famille que l’on doit prendre en charge tout son entretien.
Remettre à plat son organisation à chaque changement de vie
Par contre, il faut accepter que l’autre fasse les tâches ménagères à sa manière, comme l’explique bien Marie-Amandine, plutôt du côté “détente” de la force.
“Je ne peux PAS faire la vaisselle après le dîner, sous peine d’avoir des hauts le coeur. Or, mon mari me demandait toujours de faire la vaisselle à ce moment-là. À présent, il a vu que je faisais très régulièrement la vaisselle qui était dans l’évier le matin avant d’aller au travail. Il me laisse donc « l’opportunité » de m’en occuper au meilleur moment pour moi. Nous faisons désormais tous les deux des tâches ménagères mais quand nous le « ressentons » et il y a moins de conflits. Et comme je suis moins « agressée » par ses demandes, je suis plus proactive !”
Enfin, soyez prêt·e à remettre à plat votre organisation à chaque changement important (nouveau boulot, déménagement, maladie, naissance d’un enfant, etc). Tout équilibre est fragile et la vie n’est pas une longue serpillière tranquille.
Pour aller plus loin :
(Re)lire la BD de la dessinatrice Emma sur la charge mentale.
Lire (et faire lire) le livre de Titiou Lecoq : Libérées ! Le combat féministe se gagne devant le panier de linge sale. Je t’en parlais déjà à la fin de cette sélection de livres féministes.
Lire l’étude du Credoc sur « Comment les décisions se prennent en couple », et notamment la partie qui explique comment l’arrivée d’un enfant déséquilibre la prise en charge des tâches ménagères.
Se plonger dans les statistiques de l’Insee sur le sujet.
Et enfin, si tu veux voir des couples dans leur bordel milieu naturel, tu peux aller regarder la série l’Art du rangement de Marie Kondo sur Netflix. Certains épisodes illustrent parfaitement le poids de la charge mentale, comme l’explique très bien Titiou Lecoq (encore elle) dans sa dernière newsletter.
Et dans ton couple à toi, vous avez réussi à trouver un équilibre ? Partage avec nous ton expérience et tes astuces pour mieux répartir les tâches ménagères dans les commentaires.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
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