La première colonie de vacances n’allait pas sans appréhension pour les madmoiZelles qui ont témoigné. Larissa se souvient ainsi :
« J’ai désormais 21 ans et j’ai fait des colos de mes 8 à mes 18 ans. De ma première, je me souviens surtout du départ. J’avais donc 8 ans, et n’ayant vécu mes sept premières années de vie qu’avec ma maman, que toutes les deux, j’étais vraiment très attachée à elle. Un jour elle m’a proposé d’aller en colo pendant neuf jours à la neige. J’ai tout d’abord accepté car c’était la première fois que j’allais voir la montage et la neige, la vraie !
Cependant quand ça a effectivement été le moment de quitter ma mère, là je me suis mise à crier et à pleurer, alors que les autres enfants étaient, eux, parfaitement calmes. Ma maman est partie et je suis restée toute seule contre un poteau à pleurer. Je me souviens qu’alors un groupe de petites filles qui partaient avec moi sont venues me voir, se sont présentées et m’ont réconfortées. Après ça je n’ai plus pleuré, et la colo s’est super bien passée.
Après cette première colonie, j’ai fait toutes celles qui étaient disponibles ! Je partais en été, en août pendant trois semaines, et l’hiver pendant neuf jours. »
L’aventuraaa
Pour la très grande majorité des madmoiZelles qui ont témoigné, les colonies de vacances étaient avant tout des moments ailleurs, des expériences exceptionnelles et inoubliables. Comme Laura, 24 ans, le souligne :
« Je me souviendrai toujours des colonies que j’ai pu faire dans ma tendre et douce enfance. Grâce à elles je pouvais m’échapper du quotidien que je vivais auprès de ma famille. Pour moi, c’était comme partir à l’aventure à la Indiana Jones ! Avec ces colos je n’ai vécu que de belles choses. Il y a eu mes premières amourettes de vacances ; je savais que je ne les reverrais pas, ces jolis garçons, mais c’était tellement beau à vivre ! Le contexte, le lieu jouait aussi bien sûr, c’était pour moi comme dans le film Nos Jours heureux.
J’en ai gardé de beaux et jolis souvenirs : les endroits que j’y ai découvert, comme la Corse, les activités que j’y ai fait… Bon, il y a une fois où lors d’une descente en rappel pour l’activité canyoning je me suis fait une double entorse du genou et j’ai fini à l’hôpital de la région… J’ai cependant savouré chaque moment à fond. Aujourd’hui je donnerai n’importe quoi pour y retourner et revivre encore cette expérience qui m’a beaucoup marquée, et que je n’oublierai jamais. »
Larissa est elle aussi très reconnaissante des voyages et des découvertes qu’elle a pu faire en colonies de vacances :
« Jusqu’à mes 12 ans les colos étaient plutôt basiques : on partait en France, dans le Sud ou à la montagne. On faisait beaucoup d’activités, comme du dessin, on construisait des petits objets, on visitait la ville, et enfin il y avait les fameuses boums. Grace aux colos, j’ai appris à faire du ski, de la luge, du chien de traîneau…
Après, à partir de 12 ans, j’ai pu découvrir les destinations étrangères. J’ai commencé par l’Angleterre, qui pour moi a été une véritable révélation : c’est là que je voulais vivre. D’ailleurs en septembre, je réalise mon rêve : je pars vivre en Angleterre ! Puis j’ai fait l’Écosse, la Suède, qui a aussi été une révélation, la République Tchèque, l’Allemagne, la Croatie (ma troisième révélation), et un merveilleux voyage au Canada. Les colos ont été un véritable moyen pour moi de visiter de super destinations a un prix réellement dérisoire pour mes parents. De plus j’ai pu faire des activités que je n’aurais jamais pu faire en simple vacances avec mes parents comme le rafting, l’escalade en Angleterre, les parcs aquatiques d’Écosse, la sculpture sur glace en Suède ainsi que la pêche sur glace, la balade en bateau au Canada pour voir des baleines. »
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C’est également ce qui a marqué Gwen, 25 ans :
« Mon expérience en colo a commencé un soir où je suis rentrée de l’école, et où j’aurais dit (selon les dires de ma maman) : « Je veux aller en colo ! ». J’avais 6 ans, et mes parents m’ont fait partir à 200 km de la maison, avec une équipe connue de la famille – pas trop loin, et pas avec des gens 100% inconnus. Bref, le rêve pour moi ! Même si je pense que si ça n’avait tenu qu’à moi, je serais partie plus loin.
Je me souviens des grands jeux, particulièrement d’un jeu de l’oie géant, ainsi que d’une journée « à l’envers » où nous avons commencé la journée par le dîner, mis ses habits à l’envers… Ce furent mes premières nuits sous la tente (les locaux ne pouvaient pas nous accueillir, n’étant pas aux normes), mes premières boums, dont les titres résonnent encore dans ma tête. J’ai même encore des objets avec mon nom cousu dessus, comme ça pouvait se faire à l’époque.
J’y suis allée trois ans de suite. La seconde année j’ai emmené trois copines, et l’année suivante nous sommes parties à six.
Mon pire souvenir, je crois que ça reste la journée où les parents étaient invités à venir nous voir, une semaine avant la fin. Cette journée était magique, les moniteurs prévoyaient toujours un petit spectacle avec notre participation… Sauf qu’après, nos parents repartaient et nous restions encore une semaine. Mais bon, un câlin, un jeu et c’était reparti !
Plus âgée, je suis partie en tant que « fille de ». En effet, mon beau-père avait été embauché sur plusieurs sessions de colo en tant que cuisinier. Avec mes petits frères, nous avons pu participer à différents séjours. Sur l’une des colos, j’ai même été la plus âgée (14 ans à l’époque), grâce au boulot de mon beau-père. Je dois dire que ça jouait beaucoup sur la popularité, et c’était pour moi une sacrée revanche, car le reste de l’année, c’était plutôt l’étiquette « invisible » que je me traînais.
Je pense que grâce à tout ça, j’ai pu faire des activités que mes parents n’auraient pas pu m’offrir, comme faire de l’équitation, aller à la mer ou découvrir des coins de France. Je suis très reconnaissante envers ma mère pour tous ces beaux moments. »
Pour Cam, 18 ans, il a par contre fallu trouver la colo qui lui correspondait :
« Les colos et moi, ça a commencé très tôt, je devais avoir 6 ans quand je suis partie pour la première fois ! J’ai toujours été très indépendante et, dès le début, la colo était une manière pour moi de découvrir autre chose que le cocon familial. On ne m’a jamais forcée à partir, c’était plutôt à moi de convaincre mes parents pour pouvoir rester le plus longtemps possible !
J’ai testé beaucoup de types de colo. Les colos à thèmes, les plus sportives, les multiactivités… Mais au fur et à mesure des années, la puberté n’aidant pas non plus, je devenais plus timide, plus réservée et, ne trouvant pas vraiment chaussure à mon pied dans les séjours, j’ai fini par ne plus partir qu’avec mes parents. Puis un jour, je suis tombée par hasard sur un prospectus, présentant des colonies de deux semaines où le but était de préparer une comédie musicale pour la fin du séjour.
Emballée par l’idée, j’ai retenté l’aventure – la colo de la dernière chance en quelque sorte. Eh bien, j’y suis retournée trois ans de suite, avec à chaque fois des étoiles dans les yeux du début jusqu’à la fin. C’était une équipe d’animateurs formidables, qui redonnaient le goût du travail et de l’effort, la fierté de maîtriser une partition et un texte en deux semaines, et surtout des amitiés solides qui continuent encore aujourd’hui, alors qu’on ne part plus en colo ensemble. Le secret des colos, c’est de trouver celle qui vous ressemble. »
C’est bien aussi l’avis de Manon, 16 ans :
« Tout a commencé lorsque j’étais en sixième. Je ne connaissais rien à la musique, ça ne m’intéressait pas tellement, et je ne jouais d’aucun instrument. Mais avec ma première colo, avec l’organisme VMSF (Vacances Musicales Sans Frontières), ça a complètement changé ! Cet organisme propose des séjours d’une à trois semaines autour de la musique pop rock (surtout rock et parfois reggae, orchestre ou métal) et un autre thème comme le manga, la photo, la vidéo…
J’ai ainsi découvert le rock, le métal, la guitare, la liberté, enfin le bonheur quoi ! J’ai tellement aimé que j’y suis retournée neuf fois. Et chaque fois ce fut incroyable, au fur et à mesure je retrouvais des gens que j’avais déjà croisés dans d’autres colos. Ça facilitait le contact, donc je me suis mise à aller vers les gens plus facilement, à engager la conversation avec tout le monde sans peur d’être jugée parce que je ne connaissais pas le milieu.
Ces colos m’ont ouvert l’esprit car les gens avaient tous des personnalités et des goûts très différents, et dans un groupe il faut savoir s’entendre avec tout le monde. Aujourd’hui j’écoute du métal, du rock, je fais de la guitare et de la basse, mais surtout, la musique est ma passion. »
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Une très bonne ambiance
En plus des activités, l’ambiance joue énormément dans la réussite des colos. Marie se souvient encore des personnes qui ont rendu ses séjours géniaux.
« Partir avec d’autres enfants de mon âge était génial : dans ma famille, il n’y avait que ma grande sœur, qui n’avait pas envie de jouer avec moi… ! Je me souviens que trois années de suite, j’ai fait des colonies différentes, mais à chaque fois je tombais avec une fille avec laquelle je m’entendais extrêmement bien. C’était vraiment le hasard, et du coup on était toutes contentes quand on découvrait qu’on s’était inscrites au même endroit.
Mais ce qu’il y a de mieux, c’est quand les animateurs sont vraiment cool. Une fois, en colonie de ski, les animateurs nous ont autorisé•e•s à aller skier habillé•e•s comme on le voulait. Avec des copines on s’est donc amusées à skier en pyjama ! Une autre fois, c’était le dernier soir et les animateurs nous avaient dit d’aller nous coucher tôt – on faisait la tête parce qu’on ne voulait pas rentrer. Ça faisait vingt minutes qu’on était couchées quand ils ont débarqués dans nos chambres en hurlant qu’il était trop tôt pour aller se coucher et qu’il était l’heure de la boom, qu’on devait se bouger si on ne voulait rien rater ! »
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Sherling, qui est partie en colonie chaque mois d’août de ses 5 à ses 17 ans, a elle aussi tenu à faire les louanges des animateurs et animatrices qui ont rendu ses colonies de vacances inoubliables :
« Je dirais que ce sont les monos qui sont au coeur de la colonie. Ce sont eux qui permettent la cohésion dans la colonie et qui mettent à l’aise les enfants, même les plus timides comme moi. Ils m’ont pratiquement tous laissé un excellent souvenir car ils m’ont valorisée, et permis de me dépasser. C’était un peu nos deuxièmes parents : ils glissaient des bonbons sous nos oreillers pour faire la petite souris ou nous faisaient chanter à tue-tête dans la rue pour oublier qu’on venait de se payer cinq bornes à pied et qu’on était fatigués ! »
L’ambiance était aussi spéciale pour Éléonore, marquée par les belles rencontres qu’elle a faites en colo :
« Mes colos m’ont permis de faire des rencontres exceptionnelles. J’ai gardé le groupe d’amies avec lesquelles je partais chaque année. Encore maintenant, alors que nous ne partons plus ensemble, nous sommes toujours en contact. Pour moi les colos c’était surtout des rencontres exceptionnelles. Je traînais toujours avec des gens qui ne correspondaient pas forcément aux personnes avec qui je restais habituellement au collège. Chaque année c’était alors des personnes totalement différentes que je rencontrais, et j’adorais ça.
Les colos me rendaient plus sociales et m’aidaient aussi à me sociabiliser dans la « vraie vie ». Je dis la « vraie vie » parce que les colos, c’est un monde à part. On est assez différents, beaucoup plus libérés, personne n’a peur du ridicule quelles que soient les circonstances ; toutes nos émotions semblent décuplées, le temps semble passer très lentement, et quand on rentre tout nous manque. Je crois que c’est ça aussi qui me donnait tant envie de repartir l’été suivant. Je retrouvais mes amies que je ne voyais qu’une fois par an, je découvrais toujours de nouvelles choses et de nouvelles personnes et surtout, c’était toujours trois semaines en dehors du temps et de bonheur intense. »
Pour beaucoup, les colonies ont ainsi été de véritables bouffées d’air frais, des espaces de liberté et de tolérance. Élisa se souvient :
« Je fais des colos depuis que j’ai sept ans, étés comme hivers, et maintenant que je suis majeure, je suis animatrice. J’ai beaucoup voyagé et rencontré des tas des gens. J’ai eu des mauvais souvenirs mais ils sont peu nombreux faces aux très bons.
Si je devais choisir une colonie parmi toutes, ce serait celle où je suis partie un mois en Grèce. J’avais quinze ans. C’était une colonie bivouac, on bougeait tous les trois jours de camping à pieds, avec nos sacs sur le dos. On était soixante sans compter les animateurs et on dormait tous ensemble à la belle étoile. J’y ai vu les plus beaux décors de toute ma vie. Mais ce qui a rendu ma colonie meilleure que les autres, c’est que j’y ai rencontré une fille. À 15 ans j’étais vierge, me pensais hétérosexuelle et j’avais un copain. Mais ça a vite changé.
Elle s’assumait bisexuelle, on est devenues très proches rapidement. Les animateurs n’ont ont grillées bien avant que nous mêmes ne réalisions ce que nous étions l’une pour l’autre. Au début on s’embrassait pour rigoler, et c’est vite devenu plus sérieux (même si officiellement on disait qu’on craquait pour des gars de la colonie). J’ai réalisé que moi aussi j’étais bisexuelle.
Je me rappelle du niveau de tolérance dans cette colonie. C’est le lieu où les gens ont le mieux accepté ma bisexualité. Nous n’avons reçu aucune remarques désobligeantes. Il y avait également un mec gay dans cette colo, et ce fut pareil pour lui, il était autant respecté que les autres. »
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Jackson, qui vient tout juste de finir sa cinquième colonie, y retournerait pour ces mêmes raisons sans hésiter :
« La colo est l’endroit où j’ai passé mes meilleures vacances. Lorsque que j’étais au collège, mes bonnes notes me valaient des moqueries de la part de mes camarades. J’avais fini par me renfermer sur moi-même, devenant extrêmement timide et réservée, au point de n’être que l’ombre de moi-même. Mes séjours en colo étaient alors une bulle d’air, dans laquelle je pouvais enfin être celle que je voulais. Je pouvais, une semaine par an, faire des blagues nulles et des jeux de mots douteux, rire aux éclats et faire l’idiote sans craindre le ridicule. Penser à mon prochain séjour était ce qui me faisait tenir durant l’année scolaire.
Finalement, la colo m’a aidée à grandir. Elle m’a permis de ne pas oublier la fille déjantée en moi lorsque qu’on me collait l’étiquette « intello » sur le front. Elle m’a appris à ne pas craindre le ridicule, et à dépasser ma timidité pour aller vers les autres. Elle m’a appris à m’ouvrir aux autres, moi qui déteste exprimer mes sentiments ouvertement.
J’y ai rencontré des colons, des animateurs et des intervenants formidables, toujours à l’écoute lorsqu’on en a besoin. Je n’ai jamais été jugée sur mes tenues colorées ou mon humour étrange. Aujourd’hui j’ai 17 ans et je viens de rentrer de ma dernière colo. J’ai l’impression qu’une page s’est tournée pour moi, celle de mon enfance. J’ai l’impression d’être un enfant perdu, chassé du Pays Imaginaire parce qu’il a trop grandi. »
Cam, 18 ans, insiste quant à elle sur l’intensité de l’expérience :
« Ce que j’ai toujours aimé dans les colos, peu importe lesquelles, c’est cette impression de vivre une vie entière en quelques semaines. Tout se passe tellement vite que cela nous force à accélérer tout ce qu’on entreprend. Les amitiés se forment en une journée et se brisent en quelques minutes, les couples se font et se défont, les gens changent et comprennent des choses sur eux-même à une vitesse impressionnante. Je n’ai jamais autant évolué et gagné en confiance en moi que durant ces semaines privilégiées de ma vie. C’est une parenthèse qui nous permet d’être et de devenir qui on veut, car on arrive tous, ou presque, sans connaître personne. C’est la chance de recommencer une vie, d’effacer les ardoises comme on ne peut pas toujours le faire dans la vie de tous les jours. C’est une véritable chance d’aller en colo, une formidable expérience de vie, et pour moi les personnes qui ne veulent pas ou plus tenter l’expérience n’ont juste pas trouvé la bonne.»
Clara, 19 ans, en a la même conception :
« Ce qui m’a marqué des colos de mon enfance, c’est tous les amis qu’on pouvait se faire en peu de temps, et moi qui étais timide en temps normal, je me déchaînais là-bas. Et puis les monos, ils étaient jeunes et tellement cool, ils ont été mes premiers modèles : « Quand je serai grande, je serai comme toi » était ma phrase fétiche. J’ai toujours trouvé qu’ils avaient un don pour inventer les jeux les plus drôles et les meilleures veillées !
Plus tard, les colonies, c’était une parenthèse enchantée dans chacun de mes étés, que j’attendais tous les ans avec la même impatience et les même appréhensions : « Est ce que ce sera aussi bien que l’année dernière ? », « Est ce que je vais me faire autant d’amis aussi cool ? » etc. Mais au final, tout se passait mieux que les années d’avant.
Le plus marquant, c’est que ces quelques semaines sont toujours vécues intensément par chacun d’entre nous. Lorsqu’on apprécie quelqu’un, on l’adore ; lorsqu’on a du mal avec quelqu’un d’autre, on le déteste. Les embrouilles sont inévitables à l’adolescence et vont souvent très loin. »
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De mauvaises expériences…
Certaines madmoiZelles ont cependant passé de mauvaises vacances en colonie, comme Marie :
« Il ne peut pas toujours y avoir une bonne ambiance, et vivre 24h sur 24h les uns sur les autres ne fonctionne pas toujours très bien. Je me souviens d’une colonie où l’une des filles s’était mis à dos quasiment toutes les autres filles. Du coup elles passaient leur temps à s’embrouiller pour un oui ou pour un non. »
C’est ce dont Sherling a également fait l’expérience :
« Les moments les plus difficiles, c’est forcément quand le courant passe mal avec les autres dans sa chambre. Personnellement, ça m’est arrivé une fois et ça m’a gâché toutes mes vacances cette année-là. Les filles me faisaient des crasses pas possible, comme cracher sur mon lit pour me dérider « car t’es vachement pas marrante ». On ne partageait pas le même humour. Pour moi, les camarades de chambre sont vraiment le point déterminant. Le cadre n’a jamais gâché mes vacances en colonie. Que les locaux soient moches ou les lits pas très confortables, finalement ce qui importe le plus, c’est le lien avec les personnes. Et ce sont celles avec qui on partage sa chambre que l’on côtoie le plus, et mine de rien, ce sont par conséquent celles avec lesquelles on constitue un groupe et avec qui on a envie de faire des activités.
De plus, les rivalités peuvent parfois pourrir l’ambiance lors d’activités. Ma pire colonie était en fait un voyage linguistique où aucun des seize adolescents que nous étions ne s’entendait avec les autres. »
Cam souligne ainsi les problématiques potentielles des colonies rassemblant des enfants ou des adolescents pas toujours tendres les uns avec les autres :
« Évidemment en colo, comme dans la vie réelle, tout n’est pas toujours rose. Mes pires souvenirs d’été démarrent avec l’entrée au collège. Les colos 12-15, c’est pour moi la galère. Entre les garçons un peu bêtes surexcités à l’idée de voir les filles se changer, et les filles un peu hautaines qui contrôlent le camping et excluent les « moches », c’était la dictature des préjugés. C’était l’époque où on était encore des enfants mais où l’on voulait absolument être grands. On refusait de se doucher, de manger, de dormir, de se mettre en rang, de faire les veillées… Et quand la moitié de ta colo se résume à des cris, des disputes et des punitions collectives, c’est vite décourageant.
C’était aussi des moments de solitude, surtout quand on est en marge des autres, le plus petit ou la personne un peu originale du camp. La cruauté est grande quand on a douze ans. Je me souviendrai toujours de cette gamine de 8 ans, la plus jeune d’un groupe de trente, que les garçons les plus âgés réveillaient toutes les nuits en lui faisant croire que la « dame blanche » l’avait maudite et qu’elle allait mourir avant la fin du séjour. La pauvre est partie au bout d’une semaine, traumatisée. En plus de ça, il arrive qu’on tombe sur des camps miteux, des tentes mal isolées de la pluie, une gamine qui a des poux (ça c’est à chaque fois, on ne va pas se mentir) ou des animateurs qui n’aiment pas leur travail. C’est vraiment le meilleur moyen de passer une colo pourrie. »
Et pour Kazual, 20 ans, une colonie a carrément viré au cauchemar :
« J’ai fait de nombreuses colonies. J’ai même passé quatre étés d’affilée dans une même colonie, où j’avais ma bande d’amis, où tout était génial, les autres ados comme les moniteurs. Mais je préfère me pencher sur une colonie qui m’a fait vivre, sans exagérer, les deux pires semaines de ma vie.
Rien que dans les transports, je semblais être la seule enfant qui n’avait pas déjà trouvé de camarade avec qui s’asseoir. J’ai commencé à me sentir mal lorsque, parcourant le couloir du bus, mon écouteur s’était coincé dans un siège, m’empêchant d’avancer. Une fille a alors commencé à se moquer de moi – appelons-la Laura.
Au foyer, dans le bâtiment, des petits groupes s’étaient déjà formés, mais je ne faisais partie d’aucun. Je me suis donc retrouvée avec trois filles que je ne connaissais pas, dont Laura bien sûr. Toute timide que j’étais, je n’ai rien dit lorsqu’on m’a dit de me mettre sur le lit en hauteur. Entre mon vertige et mes crises de somnambulisme, bonjour les frayeurs, mais il m’était impossible d’en placer une. Dans le trio il y avait une fille qui semblait gentille : j’ai vite tenté de me rapprocher d’elle, mais trop tard, elle s’entendait déjà très bien avec les deux autres, sans pour autant me « renier » lorsque je venais lui parler.
Les petites moqueries ont commencé. Parce que j’étais « grassouillette ». Parce que j’avais des cheveux roux (alors qu’ils étaient blonds vénitiens enfin !). Mais aussi parce que j’étais timide et que j’avais un cheveu sur la langue. J’étais la cible parfaite, en fait. Le soir, je faisais semblant de dormir, et les moqueries commençaient. Laura m’imitait avec mon cheveu sur la langue, tandis que les autres rigolaient bien. Quand je mangeais, elle s’amusait à imiter ma manière de mâcher. Lors d’une journée randonnée-escalade, elle s’est amusée à me balancer des cailloux alors que je grimpais des endroits pas très stable. Une nuit encore, elle m’aurait trempé le petit doigt dans l’eau (et ça n’avait pas marché). Elle adorait aussi me faire boire la tasse à la piscine, sans me laisser une minute pour respirer. J’en avais peur. Elle faisait quarante kilos tout mouillés et moi soixante, et j’étais martyrisée par elle.
Je me plaignais à la seule fille gentille de ma chambre, que j’ai surnommée Gabrielle ; je pleurais des moqueries de Laura, j’en devenais malade, je faisais tout pour les éviter elle et son autre comparse. Gabrielle me disait que cela passerait, que les filles faisaient leur crise d’ado. Ça n’excusait rien du tout.
Étant la seule de mon groupe à ne pas savoir skier, j’ai vite demandé à arrêter cette option étant donné que les moniteurs me délaissaient. Du coup, j’ai été mélangée avec le second groupe, et j’ai rencontré deux filles avec lesquelles j’ai sympathisé. J’ai pu leur raconter mes problèmes de chambre, et l’une d’elle m’a proposé de venir dans la leur ! Ô joie !
Quand on a demandé aux moniteurs le changement, un problème est advenu : mes amies avaient une chambre de deux lits et la mienne en comptait quatre. Impossible donc de changer de chambre. Les moniteurs savaient bien que je n’étais pas bien dans cette chambre, que j’étais LA victime de cette colonie et de sa petite vingtaine d’enfants. Mais non, c’était trop dur de mettre un matelas par terre. Ils me disaient qu’ils allaient parler à Laura, mais ça ne s’est jamais arrêté. Quand elle me noyait, le moniteur qui était là lui disait de s’arrêter en rigolant, puis partait nager dans son coin, laissant à mon bourreau l’occasion de reprendre son jeu.
Quand je suis montée dans le bus de retour, j’ai pris ma première bouffée d’oxygène depuis deux semaines. Enfin, le cauchemar était fini. Mais il a laissé bien des marques. Pendant plusieurs mois, je n’ai plus voulu retourner à la piscine (moi qui adorais l’eau !), faisant des crises lorsque ma mère voulait à tout prix que j’y aille. Je n’ai parlé de ce qui était arrivé qu’à la meilleure amie de ma soeur, qui m’avait vue dans tous mes états suite à la proposition d’une virée à la piscine.
Cette colonie date maintenant de plus de dix ans, et pourtant, j’en garde encore de mauvais souvenirs. Je me souviens encore des prénoms des filles de ma chambre, de leurs têtes, de leurs moqueries. Rien que d’écrire ce témoignage arrive à me serrer la gorge. Je ne suis pas quelqu’un de violente, ni une personne qui souhaite le malheur des autres. Mais j’espère ne jamais la croiser, car je ne me reconnaitrais tout simplement plus. »
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Candice, 22 ans, a elle aussi détesté les colonies de vacances, mais pour d’autres raisons :
« Je suis allée deux fois en colonie de vacances : à 6 et 10 ans. Pour commencer, il faut savoir que j’ai toujours détesté dormir dans un autre lit que le mien et surtout à des kilomètres de chez moi. Autant vous dire que ma première expérience a été désastreuse. À l’époque j’ai eu l’impression que mes parents m’envoyaient en colonie pour pouvoir mieux se concentrer sur mon petit frère.
J’étais aussi une enfant terriblement timide et dont on se moquait beaucoup ; donc j’étais terrifiée à l’idée que ce que je vivais à l’école puisse se reproduire durant mes vacances ! Je me suis sentie seule, je pleurais tous les soirs pour rentrer chez moi et aucune activité ne pouvait me donner le sourire. Certes, j’y ai sans doute mis beaucoup de mauvaise volonté… Mais m’éloigner de chez moi, à seulement 6 ans, pendant des semaines, je trouvais ça barbare ! Encore plus quand c’était pour me faire revivre ce que je vivais déjà tout au long de l’année scolaire. De plus, je vis dans le Sud, un lieu déjà idéal pour les vacances, non ? De ce fait, j’ai tout autant détesté la deuxième expérience.
Ils m’ont fait partir dans une région où le soleil et la chaleur n’étaient pas les bienvenus (malheur, moi qui aime tant le soleil et la chaleur !) et où les animatrices étaient des bonnes sœurs. Cette fois-ci j’ai tenté d’y mettre du mien, mais le règlement était incroyablement strict. Tous les soirs, on nous faisait marcher dans la campagne pour voir… des vaches. C’est cool les vaches, mais tous les soirs, non merci ! Et il y avait les dimanches à l’église. Je suis légèrement phobique des églises, donc ça a été assez dur.
Encore une fois, j’ai eu l’impression qu’on m’avait envoyée en colonie pour se concentrer sur le nouveau petit frère qui venait de naître (deux petits frères, deux séjours en colonie, troublant non ?). Mais j’ai aussi eu l’impression qu’on me punissait pour je ne sais quelle faute. J’étais pourtant une petit fille très sage, toujours discrète, qui ne posait aucun problème. Pourquoi m’envoyer dans une colonie-prison ? Pourquoi avec des bonne-sœurs qui m’obligeaient à aller à l’église alors qu’aucun membre de ma famille n’est croyant ? Pour ne plus revivre ça, j’ai fait un deal avec mes parents : je voulais bien aller chez mamie, je voulais bien aller en centre aéré mais pitié, plus jamais de colonie ! Je ne suis sans doute pas faite pour vivre en communauté avec des règles et des activités à part. »
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Caroline a fait deux colonies de vacances à deux âges très différents, et pense que la teneur de l’expérience dépend des caractères et des âges des colons :
« Pour ma première colo j’avais une dizaine d’années et elle s’est très mal passée. Ma mère étant au foyer et très maman poule, le fait de me retrouver au milieu d’une tripotée de gamins surexcités sans aucun repère familial pour me rassurer m’a absolument terrorisée ! Je me souviens surtout des activités de groupe et/ou sportives qui m’ennuyaient, les « grands » qui se moquaient de ma dégaine de petite fille modèle et des nuits à sangloter silencieusement dans mon lit superposé. Finalement, mes parents sont venus me chercher une semaine plus tôt que prévu !
En même temps, j’étais plutôt mal partie : enfant assez solitaire de type « rat de bibliothèque », je n’aimais pas avoir un emploi du temps imposé, j’avais rarement plus d’un•e ou deux ami•e•s à la fois, je ne savais pas m’intégrer à un groupe (et n’en faisais pas vraiment l’effort non plus), et j’appréciais trop mon petit confort pour faire quelques compromis.
J’ai eu l’impression d’être confrontée à la cruauté des enfants pour la première fois. Un jour, j’ai trouvé un groupe de garçons en train de rouer de coups de cailloux une toute petite chauve-souris qui n’arrivait plus à voler. Ils sont restés indifférents à mes protestations et à mes pleurs. Je garde de ce souvenir un goût amer et un sentiment d’impuissance désespérant.
Pas étonnant qu’il ait fallu attendre sept années supplémentaires avant que j’ose retenter l’expérience ! Entre la classe de seconde et de première, ma mère m’a parlé d’une colo linguistique en Allemagne – idéal pour mon niveau d’allemand médiocre malgré les nombreuses années passées à l’apprendre. Tout d’abord réticente, j’ai fini par me laisser tenter, d’autant plus que ma petite soeur tentait également l’expérience (mais ailleurs en Allemagne).
Je me suis retrouvée dans un train de nuit pour la Bavière dans une joyeuse ambiance de chants et de guitare (bien cliché mais tellement sympa). Je me suis fait des amis dès le début, ai réussi à dépasser ma timidité au sein du groupe, à prendre des initiatives pendant les activités et j’ai appris à jouer de la guitare (que j’ai ensuite continuée !). Pour la première fois de ma vie je faisais partie des « cool kids », le beau gosse de la colo est devenu mon « meilleur ami », et j’en suis même venue à apprécier l’allemand (en même temps, quand on essaie de draguer le schöne garçon de l’accueil, ça motive).
D’un autre côté, tout cela m’a aussi renvoyée à mes insécurités : j’étais la seule de mes copines à n’avoir pas trouvé de copain pendant le séjour. Et la Wurst (saucisse) et le Käse (fromage) au petit-déj’, ce n’est pas ce qu’on fait de mieux pour estomper l’acnée !
Toujours est-il qu’à mon retour de colo, j’ai pleuré pendant une semaine. Je garde un excellent souvenir de cette colonie, qui m’a en plus fait découvrir un pays que j’adore désormais ! »
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Des vacances formatrices
Valentine résume :
« Ah, les colos. J’en ai fait de mes 7 ans à mes 16 ans. C’est d’ailleurs elles qui m’ont donné envie de passer mon BAFA et de m’occuper d’enfants pendant les vacances scolaires.
J’en ai de merveilleux souvenirs comme de moins bons. Les amitiés, les copains qu’on retrouve chaque année, le rendez-vous à ne pas rater, les pleurs à la fin, les fous rires, les 400 coups.. J’ai passé cinq de mes étés dans les Landes, à occuper mes journées d’activités diverses avec mes amis de colos. Les premiers amours, les premiers râteaux, les premières peines de cœurs… Ce fut aussi le lieu de ma première cigarette et de mon addiction. On essaye de s’intégrer comme on peut, avec nos défauts et nos qualités.
C’est aussi là que je me suis rendue compte que la différence d’âge ne doit pas être une barrière à l’amitié. J’ai gardé contact avec des monos (c’est comme ça qu’on les appelait à l’époque) de dix ans de plus que moi, mais aussi des colons de trois ou quatre ans de moins que moi. Cette différence ne m’a pas empêchée de passer de merveilleux moments de complicité, de confidences.
On apprend à se débrouiller seul (sans les parents), à cohabiter aussi (ce qui n’est parfois pas chose évidente)… Ce furent de merveilleuses vacances. Si un jour, j’ai des enfants, j’aimerais pouvoir les envoyer, comme mes parents l’on fait, en colonie de vacances ! »
Gwen a tellement apprécié ses vacances en colonies qu’elle en a fait son métier :
« Aujourd’hui, j’ai 25 ans. J’ai passé mon BAFA dès que j’ai eu 17 ans, l’âge minimum (la session commençait d’ailleurs le jour de mes 17 ans). J’ai enchaîné quelques années après avec un DUT Carrières Sociales option Animation Sociale et Socioculturelle. Je suis ainsi devenue animatrice professionnelle, et je pense que c’est en partie grâce à ces expériences de colo. »
Jackson ne nie pas les défauts des colos, mais elle ne regrette rien :
« Je conseillerais à tout le monde de partir en colo. Tout n’a pas été parfait, il y a eu des séjours où l’organisation était nulle, des séjours où il a fait tellement mauvais que la boue sur mes chaussures est incrustée à jamais, et il y avait cette année beaucoup trop de patates à la cantine… mais il n’y a pas d’endroit où les gens sont plus sympas, plus bienveillants ou plus excentriques qu’en colo. »
Cam est du même avis :
« Les colos, c’est en fait une mini-vie en deux semaines, avec des hauts et des bas, où l’on apprend énormément sur les autres, la vie et soi-même. C’est une expérience que je recommande à tous : les colos, c’est la vie ! »
Clara conseille également les colonies de vacances à tou•te•s :
« Pour moi, les colonies c’est un peu un guide d’apprentissage de la vie, tu apprends à communiquer, à te sociabiliser, à être tolérant, à faire des feux de camps et à te passer de ton portable plusieurs jours durant. »
Les colonies de vacances ont beaucoup joué dans la vie de Larissa aussi :
« La colo m’a surtout donné le goût du voyage : je n’envisage plus ma vie sans voyager maintenant ! Et je sais m’organiser, je n’ai pas de problèmes pour planifier un voyage en Croatie où je dois me déplacer de ville en ville en car je n’ai plus peur de chercher les lignes de car, les horaires, les liaisons de ferrys d’une ville à une autre…
De plus, je pense que les colonies peuvent réellement aider des enfants timides, car ils seront obligés de s’ouvrir pour s’intégrer. C’est ce que j’ai dû faire, m’ouvrir pour ne pas passer mes vacances toute seule. Maintenant, quand je dois aller dans un nouvel endroit, par exemple mon nouveau travail, je reproduis le même schéma qu’en colo, ce schéma inconscient qui nous force à nous ouvrir et à aller vers les autres malgré notre timidité car l’on n’a pas envie de se retrouver seul•e. »
Léa, 22 ans, conclut :
« Personnellement la colonie m’a apportée beaucoup. Déjà elle m’a beaucoup aidée à vaincre ma timidité. Et n’étant pas très populaire durant la période de collège, ce microcosme de courte durée donne lieu à de nouvelles expériences du groupe. On change de place dans le groupe social et ça c’est chouette… si on trouve un groupe sympathique – ce qui a été pour ma part souvent le cas. On reprend confiance en soi, on peut donner une nouvelle forme d’image de soi, ce qui est valorisant pour les enfants et adolescents.
Puis ça fait des amis extérieurs au groupe social scolaire. J’ai d’ailleurs rencontré ainsi une très grande copine. Bref, la colonie de vacances c’est un lieu d’expérimentation vraiment chouette où les parents n’ont pas une place prédominante. C’est une ellipse dans la vie qui m’a aidée à grandir et à accepter le monde social comme plus vaste que celui de mon petit village. »
– Merci beaucoup à toutes les madmoiZelles qui ont témoigné !
Et vous, vous avez passé de bonnes vacances en colonie ?
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Les Commentaires
Bizarrement, alors que j'étais une grande timide, les colos (et les campings quand je partais avec mes parents) étaient les seuls moments où j'avais une vraie vie sociale, des amis, des "sorties", et aussi des chéris - alors que l'année scolaire j'étais complètement une handicapée sociale.