C’est difficile à regarder. Difficile parce que tabou, difficile parce que rare, difficile parce qu’il est presque impossible de ne pas projeter son propre ressenti et être dénuée de tout jugement. Pourtant, cette jeune femme de 23 ans, Laury, partage un témoignage fort : elle explique être en train de renoncer à ses droits parentaux envers sa toute jeune fille de trois ans, Mia.
Le regret maternel, un témoignage bouleversant
Dans l’interview proposée par Konbini, les paroles de Laury sont fortes. Elle explique avoir accouché d’une petite fille nommée Mia lorsqu’elle avait seulement 19 ans, et l’avoir élevée seule ces dernières années.
Elle partage son ressenti de très jeune mère qui a appris à élever son enfant sans pour autant l’aimer comme elle l’aurait pensé : elle se voyait plus comme une personne ayant la charge de l’enfant, pas comme son parent.
Après des années à « jouer à la maman », son mal-être est si fort qu’elle fait une tentative de suicide, alors que sa fille dort dans la pièce à côté. C’est le déclic pour elle : elle demande à ce que son enfant soit éloigné d’elle.
Pensant au début que ça ne serait que temporaire, le temps de se remettre, elle prend finalement la décision de confier sa fille pour de bon aux services sociaux et de renoncer à ses droits parentaux, avant de faire un geste qu’elle pourrait regretter.
Aujourd’hui, cela fait un an qu’elle n’a pas revu Mia. Cette dernière est confiée à une famille aimante qui la gâte, et Laury commence à aller mieux. Elle raconte qu’elle va lui écrire une lettre un jour, pour lui expliquer que rien de tout cela n’est de sa faute. Elle n’était juste pas la mère qu’il lui fallait. Sa culpabilité est énorme, mais elle prend la décision qui lui semble être le mieux, pour elles deux.
« Un enfant a seulement besoin de ses parents » : pas toujours, non
Si nous ne pouvons qu’imaginer la souffrance qu’a dû rencontrer cette jeune mère face à la décision terrible qu’elle a dû prendre, nous pouvons aussi admirer son courage. Cela n’a pas dû être facile d’admettre avoir besoin d’aide, cela a dû être horrible de prendre la décision de confier son enfant à d’autres. Prendre conscience de ses difficultés, accepter de faire partie de celles qui regrettent, de celles qui ne s’épanouissent pas dans la parentalité, de celles qui admettent que non, la maternité n’est pas faite pour elles.
Ce qu’il faut retenir, même si Mia risque d’être traumatisée d’avoir été abandonnée par sa mère, c’est qu’elle a sûrement aussi été sauvée. Sauvée d’un manque d’amour, sauvée de possibles mauvais traitements, sauvée d’un avenir incertain. C’est dur, c’est même extrêmement dur, mais si Laury a pris cette décision, c’est que c’est ce qu’il y avait probablement de mieux à faire pour son enfant.
Le regret maternel n’est pas un sentiment rare qui ne touche que quelques mères, parfois. C’est un phénomène si tabou qu’il est difficile de jauger et de connaitre la quantité de mères concernées. Pourtant, grâce au compte Instagram @le_regret_maternel par exemple, ou encore le hashtag #RegretMaternel sur Twitter, on peut voir et comprendre que ces femmes ne sont pas si rares, et que leur parole doit être entendue.
Le regret maternel : à qui la faute ?
Si certaines femmes ne se révèlent être finalement pas du tout aptes à la parentalité, il peut y avoir des facteurs déterminants. Désillusion de la maternité, charge mentale et émotionnelle trop fortes, dépression du post-partum non diagnostiquée, entraide inexistante et manque de relais de la part du co-parent, de la famille, des amis, des institutions… Tous ces facteurs peuvent conduire à une réaction en chaîne qui peut plonger les mères concernées dans un tourbillon infernal, et les conduire au mieux à une forte dépression, au pire à des violences ou un infanticide.
Ce témoignage, celui de Laury, est nécessaire, même s’il est difficile à regarder. Il met le doigt sur un tabou fort, et il nous pousse à transférer nos propres ressentis sur notre parentalité — pour celles et ceux qui ont des enfants.
Être parent n’est pas facile. Être mère est compliqué, et c’est un monde tellement bourré d’injonctions qu’il est parfois extrêmement dur de naviguer dans ces tumultes et les jugements des autres, qu’ils soient parents ou non.
Oser dire qu’on regrette d’être mère, sans se prendre la réflexion toute faite « il ne fallait pas faire d’enfant », est incroyablement dur et la parole de Laury, jeune mère de seulement 23 ans, est édifiante.
Mais comme nous vous le disions dans un précédent article sur le regret maternel, plus les femmes seront informées sur la réalité de la maternité et plus on luttera contre les injonctions à avoir des enfants, moins il y aura de désillusions à l’arrivée chez les mères.
Il faut absolument continuer à libérer la parole des mères (et l’écoute des autres) pour que le poids du silence ne s’ajoute pas à celui des regrets.
À lire aussi : « Il faut à tout prix dédramatiser le regret de maternité »
Crédit photo image de une : Rawf8
Les Commentaires
Moi je ne préfère rien, je pense simplement qu'une pilule ou vasectomie réversible serait plus populaire auprès des hommes que ces choses là. Et nous disposons d'un éventail tout de même plus large et plus ou moins contraignant selon les personnes. Après effectivement, c'est toujours plus contraignant pour nous étant donné que c'est malheureusement à notre charge dans l'extrême majorité des cas. Mais quand bien même, ça ne change effectivement rien selon moi au problème posé.