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Source : Unsplash / Mother of Wilde
Poussez Madmoizelle

« On m’a fait comprendre que si j’arrêtais l’allaitement, je serais une mauvaise mère » : Delphine nous raconte son accouchement

Ah, l’accouchement… Ce moment si incroyable, flippant et transformateur. Parfois rêve, parfois cauchemar, souvent un peu des deux. Une semaine sur deux, dans Poussez Madmoizelle, une personne nous raconte son accouchement. Cette semaine, Delphine revient sur son accouchement douloureux et sur la pression qu’elle a subi à la maternité pour poursuivre son allaitement alors qu’elle souhaitait passer au biberon.
  • Âge au moment de l’accouchement : 31 ans et 10 mois
  • Bébé attendu à la date : 30 août 2020
  • Bébé arrivé à la date : 1er septembre 2020
  • Heure d’arrivée à l’hôpital : 9h00
  • Heure d’accouchement : 16h24
  • Poids et taille de l’enfant à la naissance : 4,450 kg – 54 cm

C’est assez cliché mais je crois que j’ai toujours voulu des enfants. Pour mon mari, c’était plus compliqué, il n’en avait pas vraiment envie. Nous sommes ensemble depuis 2004, j’avais 16 ans et lui 20 ans. 

Nous n’avons emménagé ensemble qu’en 2016, puis nous nous sommes mariés en 2018. J’avais perdu espoir qu’il change d’avis, puis le soir de Noël 2018,  deux mois après notre mariage, il m’a offert un livre : Le Bro Code pour les parents. C’était sa manière de me dire qu’il était prêt. 

Je devais d’abord passer des examens pour ma santé (sans lien avec la grossesse), donc nous avons commencé à essayer en juin 2019 et je suis tombée enceinte fin novembre 2019.

Un accouchement redouté

Quand j’ai appris ma grossesse, j’ai été à la fois très heureuse et très stressée. Je suis stressée pour tout depuis mon enfance, j’ai besoin d’avoir le contrôle pour me sentir bien, donc c’était compliqué pour moi de vivre un moment hors de contrôle. Mon mari, lui, était très content, il est très calme, très posé. Il n’est pas du genre à angoisser face à l’inconnu. 

Ma grossesse s’est déroulée assez classiquement. J’ai souffert de grosses nausées jusqu’à la fin du 1er trimestre, qui m’ont fait perdre 6 kg.

Il y a eu un moment très compliqué au 3e mois de grossesse car mon mari a attrapé le Covid et a failli être hospitalisé plusieurs fois. Il est resté alité et sans presque aucun contact pendant presque 3 semaines. J’ai donc dû gérer la maison, les courses et le chien toute seule et n’ai quasiment parlé avec personne pendant toute cette période. Je pense néanmoins qu’avoir été enceinte durant le Covid a été une chance car mon mari et moi étions principalement en télétravail, je n’avais donc pas la fatigue des transports et il pouvait m’aider à la maison, surtout pour gérer les promenades du chien. 

J’ai également développé des calculs à la vésicule biliaire pendant la grossesse, avec une première crise vers 5 mois de grossesse. C’est une douleur atroce au niveau de l’estomac quand ça se déclenche : j’ai été pliée en deux pendant presque 2 heures, et puis c’est parti. Je n’ai pas refait de crise pendant la grossesse.

À la fin de la grossesse, les nuits étaient compliquées. Ma fille étant un très grand bébé, elle n’avait plus de place et glissait ses pieds sous mes côtes, ce n’était pas très agréable. Le poids de ma puce était estimé à 4 kg, alors je redoutais vraiment l’accouchement. J’avais aussi peur que mon mari, qui a une peur panique des hôpitaux, ne fasse un malaise

Enfin, en tant qu’avocate en droit des victimes, certains des dossiers que j’ai traités durant ma grossesse m’ont beaucoup impactée, notamment l’un d’eux où un enfant est né en état de mort cérébrale car les soignants n’ont pas pratiqué la césarienne assez vite. J’avais peur que cela m’arrive aussi. J’avais déjà traité plusieurs dossiers de grossesses ou d’accouchement qui avaient été dramatiques, je pensais être « blindée » sur le sujet, mais c’était avant d’être enceinte et de pouvoir réellement imaginer que ça pourrait aussi m’arriver.

« Mais vous venez de me découper là ! »

La naissance était prévue pour le 30 août 2020, mais ma fille n’avait pas envie de sortir. J’ai donc eu un rendez-vous de suivi planifié pour le 1er septembre, avant qu’un déclenchement ne soit fait le 3 septembre. 

Finalement, j’ai perdu les eaux le 1er septembre vers 10 heures, quand je me suis installée sur le lit pour un monitoring. Je n’avais eu aucune contraction avant, et elles sont arrivées juste après à moins de 5 minutes d’intervalle.

C’était compliqué, j’avais très mal mais nous étions 8 à accoucher le même jour, donc les places en salles d’accouchement étaient assez restreintes. J’ai demandé plusieurs fois la péridurale – la seule requête que j’avais formulée dans mon projet de naissance – mais on me disait qu’il fallait attendre car toutes les salles étaient occupées. 

J’ai fini par être installée en salle de naissance vers 13h30, avec pose de péridurale vers 14 heures. L’anesthésiste m’a piqué au moins 4 ou 5 fois pour que finalement elle ne fonctionne pas un seul instant.

C’était très douloureux, les sages femmes étaient partout à la fois… Vers 16 heures, je n’en pouvais plus, alors une sage-femme m’a dit que je pouvais commencer à pousser mais qu’elle ne pouvait pas rester pour le moment. Je crois qu’elle est revenue 5 ou 10 minutes plus tard.

Ma fille a eu beaucoup de mal à sortir du fait de son poids. Je me souviens avoir hurlé de douleur, j’ai senti le coup de scalpel pour l’épisiotomie, la puéricultrice m’appuyait sur le ventre pour aider la descente

Les sages-femmes ne comprenaient pas pourquoi j’avais mal alors que j’étais sous péridurale. Elles n’ont compris qu’elle ne fonctionnait pas que lorsque j’ai dit « mais vous venez de me découper là ! » quand elle m’a fait l’épisiotomie… Sur le moment, j’ai aussi été assez choquée quand on m’a appuyé sur le ventre car ma sage-femme l’avait dit que c’était interdit (appelée expression abdominale, cette pratique est considérée comme une violence obstétricale et est interdite depuis 2007, ndlr). Finalement, ce n’était pas plus mal car j’ai pu échapper à la ventouse et aux forceps. 

Je me souviens que la sage-femme m’a demandé si je voulais toucher la tête de ma fille, je l’ai fait, mais c’était très bizarre

Elle est sortie à 16h24. La douleur ne s’est pas arrêtée, j’ai senti les 4 ou 5 points de suture qu’on m’a fait. Mais je m’en fichais, ma fille était dans mes bras.

Une rencontre magique

C’est encore une fois très cliché, mais la rencontre a été magique. Sa petite bouille toute ronde, son petit nez tout écrasé car elle n’avait plus de place dans mon ventre, sa petite coupe de cheveux mulet, la découverte de son poids et du fait qu’elle ne rentrerait pas dans des vêtements taille 1 mois…

Je ne crois pas avoir pleuré mais mon mari oui. Le personnel était débordé ce jour-là, heureusement qu’il a été présent pour moi tout le long de l’accouchement…. Même si j’avoue avoir eu envie de le tuer quand il tentait de me détendre en faisant des blagues nulles ou m’invitant à respirer comme je l’avais appris en séances de préparation à la naissance !

Les premières heures après la naissance se sont bien déroulées. La première nuit a été assez calme même si elle réclamait beaucoup à manger.

Passer aux biberons, un soulagement

Le reste du séjour à la maternité a en revanche été une véritable épreuve. Comme je souhaitais allaiter, on m’a vraiment beaucoup mis la pression alors que ma fille n’arrêtait pas de réclamer le sein et que j’étais exténuée.

En plus elle ne faisait pas pipi, ce que je trouvais très inquiétant, je leur demandais tout le temps si c’était normal, et si c’était possible que je n’ai pas de lait.  La sage-femme spécialisée en lactation m’a « gentiment » fait comprendre que si j’abandonnais maintenant pour passer au biberon, je serais une mauvaise mère. J’ai donc continué le jour d’après mais je n’en pouvais plus, elle tétait mais dans le vide. 

La très gentille et compétente puéricultrice que j’avais eue lors de l’accouchement venait me donner des biberons en cachette pour nourrir la petite. Puis le 3e jour, j’ai dit stop, que je faisais ce que je voulais et que j’allais arrêter l’allaitement pour passer aux biberons. Ça a été un vrai soulagement, ma fille mangeait à sa faim, et miracle, elle faisait pipi. 

Toujours la même puéricultrice m’a dit de n’écouter que moi, que je savais ce qui était bon ou pas pour mon bébé. Elle a été ma bouée de sauvetage durant mon séjour à la maternité. 

Le retour à la maison a été une délivrance car je ne supportais plus l’hôpital. 

À lire aussi : Je n’aime pas allaiter, je suis un monstre ou quoi ?

Un sentiment d’échec persistant

Le post-partum a été très compliqué, j’ai fait une grosse dépression, je me sentais nulle de ne pas avoir réussi à nourrir ma fille au sein, de l’avoir mise en danger comme elle n’urinait pas au départ. 

Je passais mes journées à pleurer, tout me stressait, j’ai plusieurs fois eu envie de m’enfuir en me disant qu’elle serait mieux avec une autre maman…

Le pire dans tout ça, c’est que c’était un super bébé, elle a fait ses nuits vers 7 semaines, elle était très calme, on pouvait la poser sans qu’elle hurle, on n’a pas eu les pleurs du soir… Bref le bébé parfait, mais ça a été encore pire pour moi, car je me sentais « mal placée » pour me plaindre alors que j’avais le bébé parfait. Si je disais la moindre chose, on me faisait comprendre que franchement ce n’était pas si compliqué comme elle était vraiment cool.

J’angoissais quand je savais que j’allais être seule avec elle, je faisais semblant d’aller bien devant elle, mais dès qu’elle était couchée, je m’effondrais

Elle a 2 ans et demi aujourd’hui, mais j’ai parfois toujours ce sentiment de ne pas être à ma place, de ne pas bien faire avec elle, surtout quand je suis fatiguée.

En plus, ma santé a continué à se détériorer avec ma vésicule biliaire, je faisais de plus en plus de crises. J’étais incapable de m’occuper d’elle pendant ces moments-là car la douleur est insoutenable, pire que celle de l’accouchement. Heureusement, ma mère qui habite à 500 mètres pouvait prendre le relai si mon mari était au travail.

Je pense que si on ne m’avait pas mis la pression pour l’allaitement, je n’aurais pas eu ce sentiment de ne pas être une bonne mère, incapable de nourrir ma fille. Le stress aurait été présent, mais pas ce sentiment d’être une mauvaise mère.

Je retiens de mon accouchement cette rencontre hyper forte avec mon mini-moi. Mais je ne suis pas certaine de vouloir un deuxième enfant. En tout cas, si je saute le pas, clairement je ne retenterai pas l’allaitement pour ne pas vivre le même échec.

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Les Commentaires

19
Avatar de A Kane
29 août 2023 à 23h08
A Kane
ça se fait de plus en plus !
Dans ma maternité, c'est devenu plutôt rare les épisios en systématique sur les extractions instrumentales.
Et franchement j'ai vu pas mal de périnée intact malgré des spatules
Hyper contente de lire ça! Chez nous on est peut-être un peu en retard. Dans mon hôpital on a de plus en plus de ventouse sans épisio et périnées intact, mais l'obstétricien d'un des hostos voisins qui fait les forceps sans épisio a limite une réputation de semi légende en mode "ohmondieu comment fait-il", donc on y est pas encore tout à fait (mais on espère grave qu'il viendra donner un petit cours aux nôtres :yawn
@Gringo je n'ai pas vu d'articaïne, mais ici on ne suture pas sans lidocaïne à moins d'avoir une péri encore suffisamment efficace pour tout bloquer, et on vérifie bien bien avant de mettre l'aiguille de suture, parce que pareil, ça semble juste horrible d'y aller sans rien.. J'ai eu une fois une femme qui n'avait pas de péri et qui avait reçu un bloc pudendal en préparation d'une instrumentale, mais qui a finalement eu bébé sans, on s'est rendu compte qu'elle avait une petite zone pas anesthésiée et qu'on ne pouvait pas lui donner plus de lidocaïne, bah on lui a proposé d'aller faire la suture en salle d'opération avec une anesthésie régionale. Elle a choisi la suture sans anesthésie au final vu que c'était seulement sur une petite zone, mais au moins on lui a donné le choix de ne pas souffrir quoi..
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