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« Fat », l’incroyable poème sur les troubles du comportement alimentaire

Caroline Rothstein a écrit un poème sur les troubles du comportement alimentaire, qu’elle déclame dans une vidéo. Ça fout les poils en l’air.

Caroline Rothstein est une auteure, performeuse et défenseure du body empowerment. Que ce soit en allant visiter et présenter son travail dans les écoles ou sur sa chaîne YouTube, elle prône le body positive 

(l’idée de remonter l’estime de son corps).

Dans sa toute dernière vidéo, publiée hier, elle parle de son expérience personnelle : pendant de très longues années, Caroline a été sujette aux troubles du comportement alimentaire. 

L’anorexie et la boulimie ont rythmé sa vie et elle a réussi à mettre les mots sur les sensations qu’elle éprouvait — au passé, puisqu’elle est guérie. Le résultat est poignant de réalisme, de sincérité et d’émotions. D’espoir, aussi (et comme de bien entendu, on vous a traduit tout ça en français) :

« Je ne suis pas grosse. Ça m’a pris 22 ans pour me débarrasser de ces mots sur le papier, de la même façon que j’ai débarrassé mon corps des ulcères, des yeux injectés de sang et des dents sans émail.

22 ans pour raconter le conte de ma boulimie, de mon anorexie et de mes troubles du comportement alimentaire — et bon sang, j’ai marché pieds nus à travers des salles de bain désertes pour voir le mirage de l’image déformée de mon corps qui me fixait dans l’eau sale des toilettes.

Je rêvassais de liberté. Je rêvassais d’apprécier l’abondance de nourriture autour de moi, je rêvassais de dîner sans avoir envie de me tuer. Et comme la société, je voulais guérir et expliquer. Moi aussi, un jour, j’allais changer. Alors j’ai déchaîné la mélodie de mon âme sale et j’ai réparé les trous dans mon estomac en les rapiéçant avec de la cire de bougie karmique.

Je suis libre. Libre de faire des calculs trigonométriques pour vomir avec élégance dans un filtre à huile en papier quand il y a du monde autour pour que personne ne m’entende. Libre du problème des tickets de caisse pour de la nourriture gâchée à cacher dans des sacs poubelles blancs avant de les jeter dans le caniveau de l’autre côté de la rue, libre de la peau sèche, des cheveux qui tombent, de la peau qui saigne et de la peur de la mort parce que la nourriture m’a donné le pouvoir de mettre de l’ordre dans un monde de chaos, la nourriture m’a donné l’amour et la sécurité que je craignais de trouver dans ma sexualité, la nourriture m’a donné un remède au sentiment d’abandon que mon père me faisait ressentir à cause de ses voyages incessants pour toucher un maximum d’argent que j’allais vomir dans les toilettes.

Ce n’est pas un poème sur la lutte à travers des milliers de petits-déjeuners, de déjeuners et de dîners quand des milliers de personnes luttent sans petits-déjeuners, déjeuners et dîners. Ce n’est pas un poème sur les millions de larmes coulant tandis que mes doigts sales et pleins de peur essoraient en tremblant le sol de la salle de bains alors que des millions d’enfants sont retenus captifs, tremblants de peur, sans sécurité.

Ce n’est pas un poème à propos de la culpabilité d’avoir le privilège d’avoir des TCA, car on m’a souvent dit que j’étais égoïste parce qu’une force incontrôlable me mettait les doigts dans la gorge.

C’est un poème sur le contexte, sur le fait que je peux utiliser un outil linguistique pour articuler intelligiblement la douleur qui a vécu en moi. Un poème sur le fait d’avoir joué à la roulette russe avec moi-même parce que mes doigts sont des canons de revolver déclenchant de la tragédie le long de ma gorge. Sur les longs regards d’autodénigrement lancés à la terroriste dans le miroir qui détournait mon système digestif de l’intérieur. Sur la façon dont mes yeux ont appris à faire l’amour à la partie en bas à gauche de mon torse, et sur le soleil qui se couche dans les crevasses de cellulite sur mes cuisses.

C’est un poème sur le traumatisme de la régurgitation que je ne peux pas digérer dans le meilleur des cas. C’est un poème sur le fait que je ne suis pas grosse. »

Et pour en lire plus sur le sujet, le témoignage d’une madmoiZelle touchée par les troubles du comportement alimentaire.

via


Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.

Les Commentaires

9
Avatar de Jessica_LeG
24 novembre 2013 à 15h11
Jessica_LeG
C'est exactement ça.
Elle résume tout...
Ce sentiment de culpabilité parce que tu n'arrives pas à garder cette nourriture en toi, que tu vois tout cet argent allez droit vers les égouts, que tu te dit que c'est mal mais que tu ne sais pas quoi faire pour te sentir mieux.
L'envie de ne pas y avoir recours est présente, elle est forte, mais on reste tellement faible face à ça.
On devrait toute pouvoir s'en sortir, mais c'est pas aussi simple...
0
Voir les 9 commentaires

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