Il aura fallu attendre trente-six ans avant de retrouver Tom Cruise dans son mirage F-14 Tomcat survolant la base de la fameuse école de pilotage américaine, Top Gun. Rafales, jeunes pilotes, courses endiablées sur la fameuse moto Kawasaki, musiques étourdissantes et testostérone au max’, Madmoizelle a eu l’honneur d’assister à l’avant-première du nouveau Top Gun : Maverick réalisé par Joseph Kosinski, qui atterrit en salle le 25 mai prochain. Décryptage imminent !
Le pitch, Top Gun : Maverick (2022)
Le temps ne ment pas et Tom Cruise ne semble pas en avoir souffert. Trente ans après avoir été l’un des meilleurs pilotes de chasse de la Marine américaine, Pete Mitchell, surnommé « Maverick », continue de repousser ses limites en tant que pilote d’essai, lui le capitaine éternel. Voler, il n’y a que ça de vrai pour lui. Alors monter en grade pour rester clouer au sol, c’est impensable pour Maverick !
Dans ce nouvel opus, il retrouve les bancs de l’école Top Gun… mais en tant que professeur. Pete Mitchell est chargé de former un détachement de jeunes diplômés de la fameuse école d’aviation pour une mission spéciale qu’aucun pilote n’a jamais réalisée auparavant. Bradley « Rooster » Bradshaw, fils de son défunt ami le navigateur Nick « Goose » Bradshaw, fait partie de la mission, contre vents et marées…
Face à un avenir incertain et une carrière condamnée, hanté par ses fantômes, Maverick va devoir affronter ses pires cauchemars lors d’une mission qui demandera de grands sacrifices… Mais alors, le résultat est-il à la hauteur de trente-six ans d’attente, à la hauteur d’un mythe cinématographique qui a bercé l’enfance de nombre d’entre nous ?
Maverick, derrière la testostérone, de l’émotion et des fêlures
Le Maverick 2.0 doit faire face à la rédemption et combattre son angoisse viscérale de la mort. Quand Pete Mitchell est engagé à Top Gun, il doit former de jeunes pilotes à une mission suicide. Mission impossible pour le héros, toujours hanté par la perte de son partenaire de vol, Goose, surtout que le fils de son défunt ami fait parti du cortège de pilotes sélectionnés. Son ultime combat : ramener son équipage en vie.
Pour Maverick, l’immortalité est une chimère, et le jeune premier solitaire sous les rides du visage de Tom Cruise n’est pas loin. Finalement, l’acteur, à force de prendre rendez-vous continuellement avec la mort lors de cascades uniques en est venu jusqu’à refuser le concept même de celle-ci.
Si Maverick ne fait plus corps qu’avec son F-14 Tomcat et son F-18 Super Hornet, derrière le personnage, Tom Cruise ne fait plus qu’un avec son cinéma à risque. Mais il y a une ombre au tableau : l’arrivée en grande pompe de l’acteur, le 18 mai dernier, en l’honneur d’une projection exceptionnelle du film au festival de Cannes.
Alors qu’un mouvement national de grève des transports en commun sévit de Nantes à Nevers, et de Grenoble à Paris, que le réseau PalmBus cannois est quasiment à l’arrêt, Tom Cruise a décidé d’atterrir en hélicoptère directement sur le tapis rouge sur La Croisette. Une action qui laisse perplexe : où est l’homme qui se revendique comme un fervent défenseur de l’écologie ? Les paillettes l’ont-elles tellement aveuglé au point d’en oublier l’empreinte carbone ?
Jeux de miroirs déformés en hommage au 1er Top Gun
Pour le plus grand plaisir des fans de la série, Top Gun : Maverick s’amuse avec des scènes miroirs carrément infidèles au premier volet. Premier reflet ? L’arrogance du personnage de « Hangman » (Glen Powell), un mélange hybride du dédain jadis d’Iceman, et de l’audace de Maverick. À lui seul, il rejoue le concours de testostérone omniprésent dans Top Gun. Seulement cette fois, la compétition autrefois amicale, et les combats simulés, disparaissent au profit malheureux de la réalité.
Autre clin d’œil pour les adeptes du premiers opus : la séquence de beach-volley, confrontant l’équipage de Maverick et celui d’Iceman, est remplacée par une partie de football américain faisant office de team building. Il y a aussi la première rencontre entre les pilotes se faisant, comme dans le premier film, au bar de la base Top Gun, mais qui s’articule de manière totalement différente, jusqu’au moment où Rooster se met au piano, et entame, comme son défunt père en son temps, Great Balls Of Fire.
Et il y a la séquence émotion où la réalité se mêle à la fiction : Tom Cruise retrouve Val Kilmer, qui revient dans le rôle d’Iceman. Ce dernier vit actuellement avec un cancer de la gorge qui l’empêche de parler et les scénaristes n’ont pas hésité à inclure cette donnée dans le scénario. Les deux personnages ne feignent pas leur sentiment, et l’humour désamorce avec brio la gravité du moment.
Une réalisation immersive signée Joseph Kosinski
Sans dénaturer l’œuvre originale de Tony Scott, Joseph Kosinski met sa patte en faisant de Top Gun : Maverick un blockbuster totalement immersif. Il reprend sans se cacher les codes visuels du premier opus, avec la scène d’ouverture ou encore celle du retour à vitesse supersonique de Maverick en moto sur la base militaire de Top Gun, tout en utilisant au maximum la lumière naturelle avec de superbes scènes de lever et coucher de soleil.
Mais tout le talent de ce film repose sur les scènes de vols d’avions et de combats aériens : tout ce que nous voyons a été tourné pour de vrai. Les acteurs ont suivi durant cinq mois un programme intensif d’entrainement afin de pouvoir encaissé les « G » déclenchés par les manœuvres de pilotage. Leur programme a été directement supervisé par Tom Cruise, qui a suivi lui-même en 2018 un ASTC (Aviation Survival Training Curriculum) complet sur la base militaire de Miramar.
Aucun trucage à l’horizon, aucun fond vert, tout est seulement réel. Les acteurs ont même dû apprendre à se filmer eux-même lorsqu’ils étaient dans leur cockpit. Une expérience immersive pour les acteurs mais aussi pour les spectateurs. En préambule du film, dans une vidéo face caméra, Tom Cruise assure au spectateur que ce film doit se voir seulement sur grand écran. Rires dans la salle : génération 2.0 oblige, née avec les plateformes de streaming, on a pensé que l’acteur en faisait des caisses…
Pourtant, il faut le reconnaitre, il n’a pas tort. Top Gun : Maverick transforme chacun de nous en pilote de mirage. On ressent chaque virement des avions ou encore quand les personnages se prennent les « G ». C’est éprouvant, sensoriel et magistral : nous voguons à un moment donné vers la plus belle des libertés offerte par l’infini champ des possibles du ciel…
Ne vous méprenez pas, bien sûr, lorsque les avions explosent, les effets spéciaux s’invitent au rendez-vous. Mais ils sont cohérents et rythmés. Promis, même si les films d’aviation ne sont pas votre péché mignon, on ne s’ennuie pas une seconde. Le blockbuster moderne ne dure que deux heures et onze minutes, ce qui est peu prétentieux aujourd’hui !
En ce qui concerne la musique de ce nouveau volet, signée Lady Gaga, Hans Zimmer et Harold Faltermeyer, elle reprend certains thèmes du premier film tout en les développant. Et franchement, la bande originale de Lady Gaga vous hantera tout autant que Take my breath away de 1986. En prendre pleins les yeux et les oreilles, la promesse est tenue : vous en ressortirez pas indemne !
Des symboles post ère #Metoo seulement amorcés
Certes le film est honorable et divertissant mais il manque quelque peu une vraie prise de position de la part des scénaristes et du réalisateur. Pour la première fois, Top Gun : Maverick met en scène un personnage de pilote féminin « Phoenix » (Monica Barbara). Mais le rôle, s’il est correct, reste cependant très bref et secondaire. On ressent un parti pris post #MeToo, mais il est peu exploité. Le film reste dans le symbole et non dans l’action réelle de faire bouger les lignes sur la place des femmes dans les grands blockbusters. Entre nous, aujourd’hui l’armée de l’air française compte plus de 30% de femmes dans ses effectifs militaires d’après le bilan social des armées en 2017. Alors, pourquoi ne pas aller plus loin ?
Nous espérions que le rôle de Phoenix ait plus d’impact sur l’intrigue générale… En vain. C’est convenu, presque hypocrite. La deuxième figure féminine du film, Penny Benjamin (Jennifer Connely), l’amour de jeunesse de Maverick, est reléguée au simple rôle de l’amante du personnage principal… Et c’est tout.
Vous comprendrez donc notre déception de voir un tel film mythique, qui va certainement rameuter du monde dans les salles obscures, ne pas refléter les luttes sociétales omniprésentes aujourd’hui dans notre société mais seulement rester au stade du divertissement. « À nous l’ivresse, l’ivresse de la vitesse », soufflait Maverick dans le premier film. Dommage que la vitesse zappe quelques combats…
Image en Une : © Paramount Pictures
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