« La vie des personnes trans n’est pas un divertissement ».
Elles sont plus d’une cinquantaine d’associations, dont Nous Toutes et le Planning familial, mais aussi des élus et des activistes à avoir signé la tribune de Fransgenre en réaction au reportage de M6 qui sera diffusé ce jeudi 6 octobre et qui est déjà disponible sur Salto.

Quatre ans après un Zone Interdite sur le « dilemme des transgenres », M6 a-t-elle fait des progrès dans son traitement de la transidentité ? Va-t-elle échapper au voyeurisme courant dans ce genre de format ? Cette fois, le reportage Trans – Uniques en leur genre est présenté par Karine Le Marchand et se concentre sur Emma, Aëla et Zach, trois personnes trans qui ont été suivies dans leur quotidien.
De bonnes intentions, mais des poncifs persistants sur les personnes trans
Mentions du deadname (le prénom assigné à la naissance d’une personne trans) qui mettent l’emphase sur l’avant de la transition, commentaires du type « né dans le mauvais corps », attention portée aux opérations chirurgicales… malgré sa volonté de faire preuve de pédagogie, le reportage semble reproduire les mêmes poncifs et privilégie les trajectoires individuelles, sans parvenir à montrer la transphobie systémique.
Karine Le Marchand, déjà très critiquée il y a quelques années pour son reportage grossophobe Opération Renaissance, défend son positionnement : « On a essayé de comprendre, auprès d’associations, d’où pouvait venir ce blocage de militants radicaux. Elles ont fait mon éducation sur le sujet ! »
Parmi ces associations, Acceptess T, qui s’est exprimée sur sa participation au processus de création du reportage et a manifesté sa déception :
« Nous avons espéré qu’en 2022 une approche des sujets trans pourrait ne pas être sensationnaliste, ne pas être voyeuriste, qu’on puisse parler de transphobie et s’adresser au grand public. Nous n’avons pas de prise sur la façon dont nous serons montés et diffusés par la production.
Le choix du plateau « débat » après le documentaire montre que nous nous sommes trompé.e.s et que rien n’avance : nos droits sont mis au débat, la parole est donnée à des groupes faisant la promotion des thérapies de conversion. »

Un débat très préoccupant et des invitées ouvertement transphobes
Car c’est la seconde partie de la soirée de M6 consacrée à la transidentité et aux jeunes trans qui inquiètent le plus les associations. Un débat présenté par Karine Le Marchand et intitulé Enfant transgenre : que faire ?, dont aucun extrait n’a pour le moment été diffusé, aura lieu et laisse présager le pire chez les personnes concernées et leurs alliées.
Seront présents en plateau Zach, l’un des témoins du reportage, le psychanalyste Serge Hefez, mais aussi deux personnes aux positions ouvertement transphobes, une mère s’opposant à la prise en charge des mineurs trans et une créatrice de podcast qui se présente comme « rebelle du genre » et engagée contre ce qu’elle nomme le « transactivisme », terme créé et utilisé par les anti-trans « dans le but de donner l’impression que celles et ceux qui luttent pour les droits et la dignité des personnes trans forment un groupe d’extrémistes séparés de l’ensemble de la communauté trans » selon la définition proposée par le collectif Toutes des femmes.
Fransgenre a donc publié un communiqué afin d’alerter sur les propos qui pourraient être tenus lors de ce débat et qui s’en trouveront ainsi légitimés :
« Nous enjoignons M6 et tout autre média à traiter le sujet de la transidentité avec respect et rigueur, sans donner la parole à des militants dont le seul but est de répandre la désinformation et la haine. Pour éviter les regards et les interprétations systématiquement extérieures à leurs vécus, les personnes trans devraient être associées au processus de production des documentaires qui les concernent. »
Quelles seront les conséquences de ce débat auprès d’un public peu averti et peu informé sur les questions trans ? Quel sera son impact auprès d’un adolescent trans qui hésite à faire son coming out auprès de ses proches ? En mettant un jeune homme comme Zach face à deux personnes activement opposées à ses droits, M6 choisit de mettre sur un pied d’égalité le vécu des personnes trans, et la désinformation autour de ce qu’est la transition et l’accompagnement des enfants trans.
Dans le climat actuel où l’on peut voir se diffuser des discours transphobes dans les médias sans contradictions (c’était l’objet de notre dernier MadPrime), l’appel à la vigilance des associations sera-t-il entendu ?
À lire aussi : Ne vous laissez pas avoir par les débats transphobes de certaines « féministes » autour des thérapies de conversion
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
je remets le même sans la citation du coup :
"Pour les enfants je le redis mais les parcours sont déjà très balisés (D'ailleurs j'ai une formation samedi avec des équipes médicales car je fais parti d'une asso et je suis infirmier, je vous ferais un retour si ça vous intéresse)."
-->
D'abord merci de prendre le temps de donner des explications, rien ne t'y oblige et j'imagine que ce n'est pas la première fois.
Je te remercie et je suis en effet très intéressée par ton retour sur ce sujet.
Je suis maman d'une petite fille de 5 ans, actuellement elle ne donne pas de signe (ou je n'en ai pas vu) de s'identifier autrement qu'en tant que fille, mais je m'intéresse à ce sujet au cas où un jour il en serait autrement, évidemment dans le but de l'accompagner correctement quoi qu'il arrive.