« Haaaa le sexisme. Vous vous souvenez, ce truc dont on ne parvenait pas à se débarrasser ?
Qui nous cantonnait parfois à des rôles de pot de fleur, nous faisait subir une tonne d’injonctions contradictoires impossibles à satisfaire du type « soit mince, mais ne te nourris que de bonne bouffe grasse » ?
Qui nous objectifiait en permanence, attribuait notre réussite à la qualité des pipes que l’on pouvait tailler au patron et autres débilités ?
Haha, c’est tellement mieux maintenant que plus personne n’a l’idée de siffler une députée juste parce qu’elle porte une robe ! »
J’ai tellement hâte de pouvoir tenir ce genre de discours. D’arriver au moment, dans l’histoire, où non seulement si quelqu’un ose dire qu’une ministre est arrivée au gouvernement grâce à « ses atouts » il sera considéré comme un vieux plouc ringard, mais surtout, où plus personne n’aura l’idée de tenir ce genre de propos.
Malheureusement, on n’en est pas là. Mais un peu pour la postérité, un peu pour la pédagogie, un peu pour dénoncer, on s’est dit qu’on allait recommencer à compiler les phrases sexistes bien lourdes qu’on subit encore au quotidien, dans les médias, dans la vie publique en général.
En espérant que des archéologues du net puissent les déterrer un jour en se disant que quand même, on en a fait du chemin, c’était vraiment abusé à cette époque là. (Faites que ça arrive le plus vite possible svp.)
On commence avec quelques frasques récentes, qu’on enrichira bien entendu au fur et à mesure… En espérant devoir mettre cet article à jour le moins souvent possible.
Laisser une députée parler, c’est comme donner la parole à une chèvre ?
Malheureusement, j’aurai aimé avoir à attendre plus d’un jour avant de déjà pouvoir ajouter une remarque sur ce tableau.
« Une remarque », non pardon, un bêlement. Alors qu’Alice Thourot s’exprimait à propos du projet de loi sur la confiance dans la vie publique, ce jeudi 3 août, c’est bien un cri de chèvre qui a été émis dans l’hémicycle.
LCP a capté la vidéo, mais le son est difficilement audible, à 20 secondes :
Le Lab a relevé l’incident grâce à un tweet d’un député dénonçant cet acte sexiste, sans pouvoir en identifier l’auteur pour autant.
Ça nous rappelle ce mauvais souvenir des caquètements qu’avaient subi Véronique Massonneau en 2013.
Alice Thourot a réagi par la suite, en taclant par la même occasion ceux qui reprochent aux jeunes députés leur maladresse au cours de leurs premiers pas dans l’hémicycle :
https://twitter.com/AliceThourot/status/893104827047301120
Leçon du jour : Couvrir les paroles d’une députée avec des bruits d’animaux est malvenu, et on risque davantage de vous prendre pour un gros porc (ou à défaut, de vous identifier comme la poule/la chèvre à l’origine de ces cris) que de donner du crédit à votre interprétation peu artistique.
Comment s’habiller lorsqu’on est Rihanna et que l’on se rend à l’Élysée ?
Le 27 juillet 2017, Rihanna rencontrait Emmanuel Macron à l’Élysée. Christophe Castaner, porte-parole du gouvernement, est-il déçu de ne pas l’avoir rencontrée à cette occasion ? C’est la question que lui a grosso-modo posé Konbini :
« Ah si ! Bah en fait, je suis arrivé à l’Élysée, elle était encore là et on nous a fait passer par une porte dérobée, j’ai même pas pu rencontrer Rihanna. »
Il aurait pu s’arrêter là, mais il a précisé sa pensée :
« Mais je trouve que finalement j’aurais été un peu déçu, sa tenue était peut-être un poil trop ample. »
À 3:00
Haaaaa, nous y voilà. Rihanna qui n’est pas en habits moulants, c’est décevant. Alors qu’il aurait pu regretter de ne pas échanger au sujet de l’éducation, chose pour laquelle elle était conviée à l’Élysée, il a préféré s’attarder sur le fait que son corps disparaissait dans un costume large.
C’est d’autant plus dommage que, juste après, l’intervieweuse lui demande s’il lui arrive de se googler et qu’il répond ceci :
« Oui oui, de temps en temps je vérifie quand même. Parfois je suis surpris par ce que je vois.
Quand vous tapez Christophe Castaner, la première chose que vous voyez c’est s’il y a marqué « compagne », « marié », « maîtresse ».
J’avoue que j’ai trouvé ça un peu réducteur quand même. »
Mais alors, tout le raisonnement est là ! C’est réducteur de ramener quelqu’un à sa vie de couple, effectivement. Mais pourquoi infliger le même traitement à d’autres, en les ramenant à leur style vestimentaire ou à leur corps ?
Leçon du jour : ne pas ramener autrui à son corps/sa sexualité/son apparence/insérer ici tout type de stéréotype réducteur (surtout lorsqu’on ne souhaite soi-même pas en être victime).
À lire aussi : Le code vestimentaire professionnel, entre mystère et sexisme
Sexualité et responsabilité ne feraient pas bon ménage ?
Au début du mois de juillet, on apprenait par voie de presse qu’il était possible (même pas sûr hein, possible) que Marlène Schiappa ait écrit des livres érotiques avant de devenir secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes.
C’est après un article de l’Express à ce sujet que Benoît Rayski, contributeur pour le journal en ligne classé à droite Atlantico, avait rédigé un article plein de slut-shaming.
Déjà traitée de « reine des salopes » par le même journal, elle subissait cette fois-ci un procès en incompétence, au prétexte qu’elle avait écrit de la littérature érotique.
Mais non, mille fois non, avoir une sexualité quelle qu’elle soit, traiter d’érotisme, voire de pornographie peu importe, dans des livres ou ailleurs : ce n’est pas une preuve d’incompétence politique.
Ce genre de raccourci n’est ni plus ni moins que du slutshaming, le fait de stigmatiser ou rabaisser une femme du fait de son comportement sexuel.
Leçon du jour : s’il y a des reproches à faire à quelqu’un sur son travail, faites-les sur le fond. Pas sur la base de livres érotiques précédemment écrits par votre cible.
La lessive, incompatible avec la députation ?
Les élections législatives de 2017 achevées, l’Assemblée Nationale s’est fortement féminisée. Cependant, pas au bon plaisir de certains candidats sortant battus, dont François Rochebloine.
Vaincu par Valéria Faure-Muntian, il avait tenu les propos suivants sur France Bleu Saint-Étienne Loire :
« J’étais disponible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 et 365 jours par an au détriment de ma vie familiale.
Je ne pense pas qu’elle aura le temps de faire sa lessive et d’emmener ses enfants à l’école, comme elle m’a dit qu’elle était une personne normale, moi aussi je l’étais et j’avais une chance d’avoir une épouse qui m’a bien accompagné… »
En sous-texte, on pouvait lire l’idée qu’une femme, ça s’occupe des enfants, qui prennent décidément trop de temps pour avoir une activité professionnelle importante en plus.
Alors oui, c’est un fait : il peut être compliqué de concilier vie professionnelle et vie familiale. Mais c’est surtout des freins qui nous sont appliqués par la société, l’idée que l’on est une « mère indigne » si l’on ne se plie pas à ces normes, qui rend cela compliqué. Pas le fait d’être une femme.
Alors certes, il s’était expliqué, mais un peu tard et de façon un peu gauche, face au Lab d’Europe 1 :
« C’est elle qui l’a écrit, c’est pas moi : « Je suis une personne normale, je fais mes lessives et j’emmène mes enfants à l’école ». Mais pour être député, je considère qu’il faut l’être à temps plein.
C’est pas une moquerie, j’ai du respect pour la femme en général, elle est l’égale de l’homme. La femme a toute sa place dans la vie politique. »
Leçon du jour : cantonner les femmes au foyer lorsqu’elles veulent en sortir, c’est d’un autre temps !
À lire aussi : « Le sexisme en politique : un mal dominant », un docu sur le machisme dans les coulisses du pouvoir en France [MAJ]
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