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Laissons Rihanna et son utérus tranquille, bon sang

Alors que Rihanna est apparue en pleine forme à La Barbade, des rumeurs ont commencé à circuler sur un possible baby bump. Et si on arrêtait de scruter l’utérus des femmes ?

Lundi, Rihanna était nommée héroïne nationale de son pays d’origine, La Barbade. La classe ! Pour recevoir cette belle distinction, elle s’est rendue sur place avec A$AP Rocky, son compagnon. Vêtue d’une robe orange, bien moulante, elle a commencé à faire l’objet de rumeurs concernant une possible grossesse.

En cause ? Un prétendu baby bump — un ventre arrondi par un début de conception. S’ajoute à cela des déclarations qu’elles avait confiées à Vogue British l’année dernière :

« Dans dix ans ? J’aurai 42 ans ! Je serai vieille. J’aurai des enfants, trois ou quatre. »

Rihanna-Barbade
La première ministre Mia Amor Mottley en train de nommer Rihanna héroïne nationale. © Capture d’écran YouTube d’une vidéo du Guardian.

Cette déclaration — et ce ventre vaguement gonflé — justifie t-elle qu’il soit permis d’analyser chaque prise de poids de la chanteuse de Diamond et de faire à tout bout de champs des annonces à sa place ? La réponse est non.

Un démenti de plus : Rihanna n’est pas enceinte

Rihanna a démenti la rumeur via un message à voir dans le post Instagram ci-dessous, non sans une grosse pointe d’exaspération.

« – Est-ce que je peux venir à ta baby shower sis ? Vrai ou non, tes bébés vont être magnifiques ! Désolée, tout le monde s’intéresse à ton utérus en ce moment
– Haaa ! Stop ! Ça pourrait être la dixième baby shower ! Tout le monde me saoule avec ça, chaque année, lol »

Mais grossesse ou non, là n’est pas l’important. Ce possible baby bump ne devrait pas être un sujet. Pourtant les rumeurs concernant les grossesses font les choux gras des magazines, notamment people.

Ces rumeurs qui circulent autour d’une possible grossesse de Rihanna ne sont pas récentes. Au Diamond Ball, un gala de charité qu’elle organise depuis cinq ans, le 12 septembre dernier, la star de 33 ans avait déclaré :

« Je suis une femme noire, née d’une femme noire, elle-même née d’une femme noire, née d’une femme noire, et je vais donner naissance à une femme noire. »

Il n’en fallait pas plus pour que les médias se déchaînent et annoncent la grossesse de Rihanna. Calmos, peut-être ?

Arrêtons de spéculer sur la grossesse des célébrités

Avec tous ces commentaires permanents sur l’évolution du ventre des célébrités (mais aussi sur toutes les parties de leur corps), on en vient à se demander : le corps des femmes appartient-il à tout le monde ? Les journalistes de ces magazines people s’arrogent le droit de commenter, critiquer, supputer… en analysant le physique des stars sous toutes les coutures.

Ces articles aussi sont encouragés par une grossophobie latente. Les célébrités devant être minces et filiformes, le moindre écart à cette règle apparaît comme une provocation ou… une annonce de grossesse.

Et Rihanna fait régulièrement l’objet de fat-shaming — en 2017, elle avait été surnommée Thickanna (« thick », signifiant « épaisse »). Elle s’était d’ailleurs sentie obligée de répondre qu’elle avait un « corps changeant ».

Le seul ventre un peu renflé acceptable pour une star est donc celui d’une femme enceinte, comme le soulignait d’ailleurs Mona Chollet dans Beauté Fatale :

« Quant aux vedettes qui ne sont pas enceintes, elles doivent d’autant plus veiller à garder un ventre plat que le moindre renflement suffira à lancer la rumeur d’une grossesse dans les tabloïds : une méprise déjà gênante quand on n’est pas célèbre, mais encore plus quand on doit publier un communiqué de démenti.

À l’été 2011, c’est ce qui est arrivé à l’héritière-cagole Paris Hilton, suscitant la vive inquiétude de l’intéressée (« J’espère qu’ils n’ont pas raison ! »). En résumé : quelques grammes en moins et on est anorexique ; quelques grammes en plus et on est enceinte. C’est dur, d’incarner l’épanouissement… »

Le but de tout cela est clair : il s’agit surtout d’attirer les lectrices, curieuses et friandes de ce genre d’informations, mais en s’appuyant bien fort les préceptes du patriarcat. À savoir le jugement continuel du corps des femmes, une grossophobie qui s’exprime sans se dire, et les femmes réduites à leur fonction procréatrice.

Même quand elles sont célèbres, les femmes doivent procréer

Jennifer Aniston a aussi souvent fait les frais de ces injonctions à la maternité. Elle s’était d’ailleurs exprimé sur le sujet sur le HuffPost en 2016, regrettant que son corps soit sans cesse scruté et objectifié :

« On peut être accomplie quand on est célibataire ou en couple, avec ou sans enfant. C’est à nous de décider de comment notre corps est censé être beau. »

Sous ces rumeurs permanentes se cachent aussi des injonctions à la maternité. Encore actuellement, les femmes qui ne veulent pas d’enfants ne sont pas considérées comme étant dans la norme. Elles doivent toujours se justifier. Le chemin pour normaliser le fait d’être childfree est entamé, mais il reste encore pas mal de boulot !

Lorsque les femmes expriment leur nulliparité (volontaire ou non), leur corps est scruté et commenté. Et quand des femmes sont enceintes, elles doivent faire face à une nouvelle dépossession de leur corps.

Le corps des femmes enceintes n’est pas propriété publique

Lorsque la grossesse est avérée, que l’on soit une star ou une non, on a souvent l’impression d’une sorte de dépossession de son corps. Quand on est une personne lambda, cela passe par les commentaires permanents, sur la prise de poids (jugée acceptable ou non), par les personnes qui se mettent à vous toucher le ventre rebondi sans crier gare et par une réduction assez fréquente au rôle de génitrice.

Le corps des femmes enceintes devient la propriété de tout le monde.

La personne peut alors être réduite à son unique rôle de future mère : son ventre et son corps deviennent espace public. La journaliste Renée Greusard expliquait dans son livre Enceinte tout est possible que lorsqu’elle était enceinte, un ami a commencé à ne l’appeler plus que « maman » ! La femme enceinte devient dans un sens la personne qui porte le bébé, et non une personne à part entière.

La curiosité quant à la vie des stars est assez compréhensible, mais tentons de réfléchir à ce que cela dit du traitement que l’on réserve aux femmes dans nos sociétés. Essayons de mettre un terme à la mainmise par tout un chacun faite sur le corps des femmes. Si on laissait les utérus un peu tranquilles, le monde en s’en porterait que mieux.

À lire aussi : Jessie J s’exprime sur sa fausse couche : « des millions de femmes à travers le monde ont déjà ressenti cette douleur »<br>

Image en une : © Instagram de Rihanna


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Les Commentaires

4
Avatar de audrey974
31 mars 2022 à 14h03
audrey974
@adita
Sérieux ? J'ai pas encore 30 ans qu'on me fatigue déjà avec ça régulièrement, qu'est-ce que ce sera une fois que j'aurai soufflé mes 30 bougies...
Bon courage, vous aurez peut etre la tranquilité à 40 ans, je n'attends que ca d'avoir 40 ans, et j'ai encore 30 ans !mais j'ai la chance de vivre loin de mes proches!
0
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