La Direction de la Recherche des Études de l’Évaluation et des Statistiques (DREES) vient de publier une étude qui parle de nous. Des jeunes. En France, en 2016. Et qui n’est ni méprisante ni caricaturale grâce à la magie des questionnaires et des statistiques représentatives.
L’étude dresse un portrait de notre génération, en mettant le doigt sur nos angoisses, nos doutes et nos espoirs. Oui, tout ça. en même temps il faut dire qu’initialement elle fait 105 pages, et tu peux la consulter en intégralité ici.
Cet article est le premier d’une petite série qui résume l’étude et aborde les questions qui nous turlupinent. Et pour bien commencer, parlons des femmes et de leur place dans la société…
Les stéréotypes de genre, pas très populaires chez les jeunes
Bonne nouvelle les ami•es ! 87% d’entre nous (des 18-29 ans) ne sont pas d’accord avec cette affirmation : « Dans l’idéal, les femmes devraient rester à la maison pour élever leurs enfants ».
Alors ça n’a peut-être rien d’une nouvelle par chez vous, car vous êtes de belles personnes bien entourées mais sachez que la moyenne de l’ensemble de la population qui partage cette opinion est de 74%, avec un petit 60% pour les plus de 65 ans.
La génération à venir est au taquet sur la question des stéréotypes de genre
Malgré tout, la génération à venir est au taquet sur la question puisque l’étude précise que sur le spectre des réponses, il était possible de choisir « plutôt d’accord ou plutôt pas d’accord » et que 88% des moins de 25 ans ont répondu « pas d’accord ». Du coup, cette tendance s’accentue chez les plus jeunes, ce qui me laisse espérer que la société va dans le bon sens (je croise les doigts).
Mais ce n’est pas tout, et puisqu’on parle de progrès, l’étude met aussi en avant un affaiblissement des stéréotypes de genre, particulièrement chez les jeunes générations. Voici les affirmations auxquels ils ont été soumis et leurs réponses :
« En temps de crise, il est normal de privilégier l’emploi des hommes aux dépens de celui des femmes »
93% des moins de 30 ans ont répondu qu’ils n’étaient pas d’accord.
« Les mères savent mieux répondre aux besoins et attentes des enfants que les pères »
55 % des moins de 30 ans ont à nouveau répondu qu’ils n’étaient pas d’accord. À titre de comparaison, la moyenne de toutes les classes d’âge se situe à 48%. Il y a donc plus d’une personne majeure sur deux qui est d’accord avec cette affirmation. Il y a encore du chemin à parcourir…
« Les filles ont autant l’esprit scientifique que les garçons »
Ah ! Des résultats intéressants : si 87% des moins de 30 sont plutôt d’accord avec cette affirmation, la moyenne globale (tous âges confondus donc) est à… 88% ! Avec un pic à 90% pour les plus de 65 ans… Les personnes âgées sont donc statistiquement plus progressistes sur ce coup.
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Des résultats que l’étude n’explique malheureusement pas mais qui rappellent que certaines choses ne sont jamais acquises, et que la sensibilisation aux questions de genre et d’égalité est loin d’être terminée.
Les femmes sont globalement plus tolérantes
L’étude s’est ensuite penchée sur « les nouvelles formes de couple et de famille »
. En ce qui concerne le mariage, 68% des moins de 30 ans pensent qu’il n’est pas le cadre idéal pour vivre une relation de couple tandis qu’à l’autre extrémité du spectre, les plus de 65 ans ne sont que 39% à le penser.
De la même façon, 90% des moins de 30 s’accordent à dire que « les homosexuels sont des personnes comme les autres » pour un exemple qui se situe à 84%. Une fois encore, les jeunes font donc preuve d’une plus grande tolérance à l’égard de nouveaux modèles.
Mais à l’intérieur de ce groupe hétérogène de jeunes de moins de 30 ans, il existe de réelles disparités… par exemple entre hommes et femmes. Les opinions des femmes sont généralement les plus ouvertes à ces nouvelles formes de couple et de famille, comme le montre ce tableau :
Sur cette différence, l’étude précise que cette différence d’opinions et de tolérance entre hommes et femmes est transgénérationnelle : elle s’observe avec plus ou moins d’acuité dans tous les classes d’âges (avec une distinction très forte chez les plus de 65 ans).
En revanche, quant il s’agit de trouver des explications à ce phénomène, l’étude suggère seulement :
« Peut‐être faut‐il voir dans ces distinctions, particulièrement parmi les hommes, un fort attachement au modèle prépondérant des rôles sexués de la mère et du père dans la parentalité ? »
Ce à quoi j’ai très très envie de répondre :
La parentalité et son effet loupe sur la place des femmes dans la société
Les inégalités et les divergences concernant la place des femmes dans la société pourraient se résumer ainsi : « On pense que… mais dans la pratique... ». On pense que les êtres humains devraient être égaux, mais dans la pratique on laisse subsister des inégalités (voire on y contribue, dans certains cas).
Par ce « on » anonyme, j’entends la population dans son ensemble, mais surtout les plus jeunes générations. Car pour nous l’égalité est un truc « normal », nous avons été éduqué dans l’idée que c’est un truc que la société recherche et que l’on doit vouloir. Bon sauf que la société est moyennement impliquée dans le processus dans les faits mais c’est l’idée… Pourtant, l’égalité, on en est encore loin.
Avec la parentalité, on retrouve un peu cette notion d’opinions et de faits non concordants. Sur l’affirmation « dans l’idéal, les femmes devraient rester à la maison », les résultats montrent une divergence d’opinions entre les hommes et les femmes, mais aussi entre les classes d’âges : pour les moins de 25 ans, 90% des femmes et 86% des hommes ne sont pas d’accord.
Mais, dès que l’on observe la tranche d’âge juste après, c’est-à-dire celle des 25-29 ans, 85% des femmes et 88% des hommes ne sont pas d’accord. Donc, si les hommes sont plus nombreux en vieillissant à être en désaccord avec cette affirmation, pour les femmes c’est l’inverse !
Une différence que l’étude explique partiellement par l’entrée en parentalité : en gros, une partie d’entre nous, en devenant parent, change d’avis. L’étude tente d’expliquer ce changement d’opinion (avec les sources de l’étude entre parenthèses) :
« Premièrement, ce sont encore très largement les mères qui prennent en charge l’éducation des enfants (Saint Pol, Bouchardon, 2013) et, lorsqu’elles travaillent, la charge de la conciliation entre la vie professionnelle et la vie parentale repose essentiellement sur elles (Pailhé, Solaz, 2006). Dès lors, leurs préférences pourraient être partiellement « adaptées » à une situation dans laquelle le temps parental repose essentiellement sur les mères.
Deuxièmement, pour certaines jeunes femmes, c’est notamment la maternité qui semble structurer l’identification sociale (Testenoire, 2006). Elles sont d’ailleurs amenées, par une décision plus ou moins directement contrainte, à reléguer la sphère professionnelle à la charge des hommes privilégiant la sphère domestique et familiale. »
Pour faire simple, le fait que la société rende davantage les femmes responsable des enfants joue un rôle dans cette prise de position, en mettant plus de moyens à disposition pour elles que pour les hommes, mais aussi dans les mentalités, en donnant un rôle social fort aux mères et en les « pénalisant » sur le plan professionnel.
La place des femmes dans la société en 2016 ? Il y a encore du progrès, mais cette étude est encourageante…
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