Avez-vous déjà été dans cette situation frustrante où un individu profère une remarque si absurde que vous ne savez pas comment lui répondre ? Ce n’est même pas que vous ne savez pas ce que vous voulez lui répondre : vous le savez très bien. C’est plutôt qu’il est le trente-sixième troufion de la semaine à balancer la même bourde, et que vous ne savez plus en quelle langue dire les choses.
Oui, demander à une femme contrariée si elle a ses règles, c’est insultant. Non, être homosexuel n’est pas une passade, et la vie sexuelle de cette personne ne te regarde pas, d’ailleurs. Parfaitement, comparer quelqu’un à un singe en référence à la couleur de sa peau est un délit. Vous voyez le genre.
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Pour cette fois cependant, et parce que j’entends et lis beaucoup trop de remarques de ce genre en ce moment et que ça ne choque pas assez de gens… J’aimerais revenir sur trois types de remarques spécifiques. Attention, coup de gueule allant crescendo.
Je ne me maquille pas pour vos beaux yeux (mais pour les miens)
C’est assez affolant comme l’idée qu’une femme se maquille nécessairement pour plaire à un homme, voire aux hommes dans leur ensemble, est ancrée dans les moeurs. Ou de manière générale que tout ce que fait une femme, elle le fait pour plaire. (Enfin, elle a plutôt intérêt, parce que sinon c’est du laisser-aller !)
Une idée un poil gerbante dans ses vagues relents d’obligation sociale, non ?
On pourrait penser que c’est terminé, ces histoires. Qu’on a enfin compris qu’une femme peut bien s’habiller et s’apprêter comme elle le désire, parce qu’elle ne doit ni brushing, ni œil de biche, ni jambe lisse à la société. Pourtant, si elle se maquille, elle va gagner l’approbation, et si elle fait l’impasse sur l’eyeliner, elle ne fait « aucun effort »…
Non, en vrai, c’est encore plus pervers que ça. Une femme qui se maquille, c’est une femme qui cherche l’attention. C’est donc une femme qui attend le verdict et les compliments de ces messieurs. Une femme qui veut pécho. Une femme qui se soumet au système qui veut qu’elle se maquille pour plaire aux hommes. Une femme superficielle. Une femme qui n’a aucune confiance en elle. Une femme qui fait de la « publicité mensongère », puisqu’elle cache son vrai visage. Ouuh. On part très loin dans le délire.
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Au bout d’un moment, est-ce qu’on ne pourrait pas se lâcher mutuellement la grappe ?
On peut se maquiller pour plaire à quelqu’un. Ce n’est pas interdit. Mais de base, si une personne fait ça, c’est quand même qu’elle se trouve jolie de cette manière. Vous voyez ce que je veux dire ? On se maquille avant toute chose parce que ça nous plaît. Que ça nous amuse, titille notre fibre artistique ou qu’on aime juste bien les couleurs. Ou on ne se maquille pas du tout, pour des raisons qui nous sont également propres. C’est si difficile que ça à piger ?
Mes bichons, les femmes ne se maquillent pas pour vos beaux yeux. Vous n’êtes pas le centre de notre existence.
« Non » ne veut pas dire « peut-être » (et encore moins « oui »)
Mais qu’est-ce qui ne tourne pas rond ? Comment peut-on voir la moindre similitude entre deux mots aussi différents et à la signification aussi diamétralement opposée que « oui » et « non » ? Est-ce que les parents ne répètent pas assez la vieille rengaine à leurs enfants ? Quand c’est non, c’est non.
Et encore, quand c’est « non, tu ne peux pas jouer avec mes clés », c’est une chose. « Non, tu ne peux pas m’inviter à boire un verre/me toucher/m’embrasser/avoir une relation sexuelle avec moi. », c’en est une autre. Une femme n’est pas un jouet. Tu ne peux pas disposer d’un être humain comme d’un objet.
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Et je me fous, mais alors, je me contre-fous de savoir que « mais j’ai envie », « mais elle m’a chauffé pendant deux heures », « mais avant elle disait oui », « mais je suis sûr qu’au fond elle a envie », ou autres « mais c’est difficile de résister pour un homme ». Les choses sont en réalité très simples :
- T’as envie ? Elle a dit non.
- Elle t’a chauffé ? Peut-être que oui, qu’elle flirtait, mais là, elle ne veut plus. Ou peut-être que non, et que tu prends tes désirs pour des réalités. Dans tous les cas, elle a dit non.
- Avant elle disait oui ? Là elle a dit non.
- Tu es sûr qu’au fond elle a envie ? Ben elle a dit non.
- C’est difficile de résister pour un homme ? Tu fais passer tous tes congénères pour des bêtes incapables de résister à la moindre pulsion et qui ne voient pas vraiment pourquoi le faire, parce qu’ils estiment avoir le droit de se servir quand ils en ont envie. Ne prends pas ton cas pour une généralité. Elle a dit non.
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Oh, et post-scriptum : contrairement à ce que raconte le bon vieux dicton qu’on ressort un peu n’importe comment, qui ne dit mot ne consent pas. Le respect, ça te dit quelque chose ? Un p’tit truc sympa qui commence à avoir du succès, et qui fonctionne dans les deux sens…
Être féministe ne signifie pas vouloir la suprématie des femmes
Alors là, on arrive à un concept plus compliqué. Enfin, apparemment. Je ne sais pas par où commencer, voyons… Vous savez comme parfois le simple fait de prononcer le mot « féministe » suffit à faire frissonner les gens ? C’est parce que c’est un mot sale. C’est un gros mot. Oh oui, ohlala. Il suffit de voir le tollé qu’a soulevé la sortie du film Mad Max, et surtout le fait de l’avoir qualifié de « film féministe »…
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Une catastrophe qui a ébranlé les petits coeurs virils des amoureux de la testostérone et des mollets poilus de ce pauvre Max.
« Ouiii, ce film est une propagande féministe, c’est une attaque contre les hommes, une véritable atteinte à la société et ses fondements en cherchant à modifier la place de l’homme, qui est viril, et de la femme, qui est douce est fertile. »
Si je grossis les propos ? J’aimerais bien. Parce que là, ces gens outrés auraient VOULU avoir l’air cons qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement !
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Mais prenons les choses dans l’ordre. Être féministe, ça fait peur à certaines personnes — pourquoi ? Parce que pour ces personnes, le féminisme est un mouvement radical, qui s’est formé (ou pas) en réaction à l’oppression que subit la femme dans toute l’Histoire de l’humanité. Pour ces personnes, les féministes sont des enragées chroniques qui haïssent l’espèce masculine et cherchent à renverser leur suprématie pour passer d’une société patriarcale à une société qui donnerait plus de pouvoir aux femmes qu’aux hommes.
Sauf que ça, c’est la définition du sexisme. En fait.
Mais alors, être féministe, c’est quoi ? C’est vouloir l’égalité hommes-femmes.
Oui, c’est tout con, hein ?
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Alors maintenant, si on reprenait Mad Max sous un angle différent ? En partant du principe, par exemple, que les personnages féminins sont des personnages au même titre que les personnages masculins, et que, du coup, aucune testostérone n’a été maltraitée pendant le tournage ? Je ne veux pas dire, mais ça relâcherait aussi vachement la pression du côté des « mâles virils »…
À vous ! Quelles évidences en avez-vous assez de répéter ? Videz votre sac dans les commentaires !
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