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Féminisme

En pleine promo d’un film sur le viol, Yvan Attal s’embrouille sur le tribunal populaire et le consentement

Invité de l’émission Quotidien mercredi 24 novembre pour parler de son nouveau film Les Choses humaines, Yvan Attal a remis en cause la parole des victimes de violences sexuelles qui s’expriment sur les réseaux sociaux. Eurk.

Après Mon chien stupide en 2019, Yvan Attal signe cette année Les Choses humaines, adapté du livre de Karine Tuil qui a fait grand bruit lors de sa sortie pour son évocation du viol, de la culture du viol et du communautarisme.

En pleine promo, Yvan Attal a été invité dans l’émission Quotidien — aux côtés de son fils qui tient l’un des rôles principaux du film. Il en a profité pour donner son avis sur le consentement et la libération de la parole des victimes de violences sexuelles sur les réseaux.

Et on s’en serait volontiers passé.

Yvan Attal remet en cause la parole des victimes sur les réseaux

Dans l’adaptation des Choses humaines, de Yvan Attal, je demande le fils et la femme.

Eh oui, une nouvelle fois, le réalisateur s’entoure de sa propre famille pour incarner les personnages tourmentés de l’adaptation du livre de Karine Tuil. Une féodalité un poil lassante et très caractéristique du cinéma français… qui n’est toutefois pas le constat le plus terrifiant qu’il y avait à tirer du passage d’Yvan Attal chez Quotidien mercredi 24 novembre.

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Non, ce qui a blessé plus d’une internaute, suscitant le courroux de nombreuses féministes et le nôtre avec, c’est bien sûr sa sortie méprisante, à côté de la plaque et dangereuse au sujet du consentement et de la libération de la parole des victimes de viol sur les réseaux sociaux.

Un sujet qui réside au cœur même de l’intrigue de son film puisque Les Choses humaines raconte l’histoire d’une jeune femme qui accuse un jeune homme de l’avoir violée. Le long-métrage, au cinéma le 1er décembre, explore l’opinion de la plaignante ainsi que du jeune homme pour questionner la vérité.

Le cinéaste en a profité pour expliquer ce qu’interrogeait d’après lui le livre de Karine Tuil :

« Ce que j’ai vu dans le livre, c’est ce à quoi on assiste aujourd’hui : on voit des gens qui jugent à l’emporte-pièce tout un tas d’histoires. Pas forcément celle-là [d’histoire, NDLR] mais à fortiori celle-là.

On ne peut juger de ces affaires qu’au tribunal. […] On ne peut pas juger les gens comme ça. J’avais envie de dire que ces histoires sont tellement complexes que qu’elles ne peuvent se juger qu’au tribunal. […] Dans les médias et sur les réseaux sociaux. On ne peut pas juger des gens comme ça. »

Ce passage peut sembler être une remise en cause directe de la légitimité des victimes à s’exprimer sur leur histoire. Il témoigne, d’une part, de la prégnance de la culture du viol et d’autre part de la méconnaissance du sujet par le cinéaste, qui ne sait manifestement pas que la prise de parole sur les réseaux relève parfois du dernier recours pour les victimes de violences sexuelles.

Non content de dévaloriser les mouvements qui sont nés sur les réseaux et qui ont permis à de nombreuses victimes de violences sexuelles d’enfin s’exprimer, Yvan Attal a poursuivi :

« Ça raconte aussi que le sexe, c’est social et culturel. On a pas tous le même rapport au sexe, donc on a une morale différente. »

Dans le film, le personnage du jeune homme accusé de viol a une sexualité légère, contrairement à la jeune femme qui l’accuse de l’avoir violée, pour laquelle les rapports sexuels sont sacrés. Mais avoir un rapport différent au sexe ne dispense pas du consentement.

Maïa Mazaurette, avec sa pédagogie habituelle, est alors intervenue pour remettre l’église au milieu du village :

« On pourrait aussi se dire que le consentement est là pour mettre un cadre autour. Pour dire : alors on est peut-être pas d’accord mais on en parle. Et là ça résout tout. »

Ce qui n’a pas empêché Yvan Attal de placer la conjonction de coordination « mais » après l’évocation de la notion de consentement :

« Pour moi le consentement, il n’y a pas de question. Mais avec le film on peut se rendre compte qu’il y a des affaires qui peuvent être différentes et un peu plus complexes quand on prend en compte un certain nombre de choses. Personne n’a envie d’une relation pas consentie. Mais il y a des moments un peu plus complexes. »

Sans surprise, la Toile, dont Attal méprise l’utilité, s’est insurgée (à juste titre) :

Yvan Attal aux manettes d’un film sur les violences faites aux femmes, pertinent ?

Internet, ce fameux tribunal populaire qu’Yvan Attal exècre, a comme à son habitude fouillé dans les déclarations de ce dernier pour explorer son positionnement sur le sujet des violences faites aux femmes.

Ainsi ressort qu’en 2009, le réalisateur a dit en toute tranquillité, interrogé par Marie-Claire sur son rapport à sa femme (Charlotte Gainsbourg), à leur vie commune, leur passion et leur métier :

« Si elle part avec un homme, je prends la carabine et je la tue. Le pire, ce serait qu’elle parte avec un grand acteur. Je serais encore plus humilié. On est atteint dans sa virilité.

Quand j’ai été quitté par une fille que j’aimais, il ne s’agissait que de moi. On pense qu’on ne vaut pas le coup. On n’a plus envie de soi… La preuve : l’autre n’a plus envie de vous. Au-delà du manque de l’autre, cela vous renvoie à votre échec. »

Une déclaration qui n’a pas fait grand bruit à l’époque. Il faut dire qu’en 2009, le féminisme n’en était pas à son stade actuel, et qu’on glamourisait encore plus qu’aujourd’hui les violences conjugales en qualifiant les féminicides de « crimes passionnels ».

Heureusement, le monde est en train de changer. Et peut-être qu’à l’avenir, pour réaliser un film sur le viol, on ira plutôt vers quelqu’un qui n’a pas évoqué le fait de tuer sa conjointe si elle le quittait.

À lire aussi : Accusé de viols, Nicolas Hulot attaque en premier pour qu’on ne puisse pas l’interroger sur le fond


Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.

Les Commentaires

27
Avatar de Lady Salmakkia
8 avril 2022 à 18h04
Lady Salmakkia
prétendre savoir aussi bien (voire mieux) que Charlotte Gainsbourg ce qu'elle a pu vivre et dans quel milieu elle a baigné, ça revient à la déposséder de son vécu et je trouve ça très dérangeant.
J'arrive un peu tard dans la discussion, mais je voudrais ajouter que Charlotte Gainsbourg a publiquement déclaré que sur le tournage du clip "Lemon Incest" son père était allé trop loin et que cela l'avait mise très mal à l'aise. A cette époque son père était séparé de Jane Birkin et j'imagine c'est cette dernière qui avait la garde principale des enfants compte tenu de l'alcoolisme notoire du père. Pourtant Serge Gainsbourg et sa fille Charlotte ont vécu ensemble le temps du tournage, ce qui a renforcé cette atmosphère exclusive et étouffante.
Seulement voilà Serge Gainsbourg est vénéré en France, considéré comme un génie intouchable, et d'ailleurs sa fille Charlotte s'est exprimée sur le sujet en déclarant qu'elle s'est toujours sentie très aimée par le public parce qu'elle était la fille de Gainsbourg, et on sent dans ses interviews qu'elle aussi l'idolâtre complètement.
Le discernement peut être altéré par de nombreux paramètres, et comme le dit @Esturgeon, le statut de victime ne dépend pas du ressenti de la victime elle-même, puisqu'elle a pu évoluer dans un environnement biaisé où elle ne se perçoit pas comme une victime, et même parfois elle est désignée comme une personne privilégiée de recevoir les "faveurs" qu'on lui accorde.
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