Tout en haut du panier des films qui ont pris une saveur plus qu’amère au moment de les revoir, on retrouve les films de Richard Curtis. Vous ne le saviez peut-être pas, mais le réalisateur néo-zélandais de 66 ans est l’homme derrière les comédies romantiques les plus cultes du cinéma, de Quatre Mariages et un enterrement, Coup de foudre à Notting Hill à Love Actually en passant par Le Journal de Bridget Jones.
Grossophobie, misogynie, viol : des films qui posent problème
Dans ce dernier film, le personnage de Renée Zellweger est constamment complexé et critiqué pour son apparence (alors qu’elle pèse 60 kg, même si ces insultes auraient été tout aussi inacceptables si elle en pesait 150).
C’est aussi à Richard Curtis que l’on doit le très problématique Good Morning England. Dans une scène du film, un homme a un rapport sexuel avec une femme dans une chambre plongée dans le noir. Pendant le rapport, il s’extirpe de la pièce en catimini et envoie son ami puceau à sa place, sans que la femme ne s’en aperçoive. Outre la représentation très humiliante de cette femme, présentée comme stupide, cet acte constitue un viol. Pourtant, il n’est présenté que comme un gag potache, censé être d’autant plus ridicule que le premier homme est gros tandis que le second est mince.
« Ces blagues ne sont plus drôles »
En bref, la liste de ce qui pose problème dans le cinéma de Richard Curtis serait longue, très longue. C’est ce que lui a fait remarquer sa fille Scarlett, militante et écrivaine féministe, organisatrice de l’évènement « Feminists Don’t Wear Pink (and other lies) » (« Les féministes ne portent pas de rose (et autres mensonges) »), en partenariat avec Le Times.
Lors de cet évènement, Scarlett Curtis a interviewé son père. Elle l’a notamment interrogé sur « les critiques de plus en plus nombreuses sur la représentation des femmes et des personnes racisées » dans ses films. Richard Curtis a alors admis qu’il « regrettait de ne pas avoir été en avance sur son temps », rajoutant que les blagues sur le poids des femmes « ne sont plus drôles » :
« Je me souviens à quel point j’ai été choqué il y a cinq ans lorsque Scarlett m’a dit : ‘N’utilise plus le mot « gros » dans tes films.’ Wow, tu avais raison. Dans ma génération, appeler quelqu’un « le gros » [était drôle] – dans Love Actually, il y avait des blagues à ce sujet à propos des femmes. Ces blagues ne sont plus drôles. »
« Je ne savais pas écrire ces rôles » : quand Richard Curtis découvre l’intérêt de collaborer avec des femmes et personnes racisées
Le réalisateur a aussi reconnu que le fait de situer son film de 1999 à Notting Hill, un quartier diversifié de Londres en excluant toute présence de personnage racisé était une erreur.
Richard Curtis a confié :
« Je venais d’une école et d’un groupe d’amis avec très peu de diversité. Je me suis borné à penser que je ne saurais pas comment écrire ces rôles. Je pense que j’étais juste un peu stupide et dans l’erreur à ce sujet. J’avais l’impression que moi, mon directeur de casting et mes producteurs, ne regardions pas vers l’extérieur.
Le témoignage de Richard Curtis réactive une question majeure dans la façon dont sont produits les films et séries. Plutôt que de confier l’écriture à une seule personne, de nombreux·ses travailleur·se·s racisé·e·s de l’industrie appellent à être employé·e·s pour écrire leurs propres films et séries mais aussi pour collaborer à la création de ceux des autres. Le problème de la diversité à l’écran se joue d’abord derrière la caméra.
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