En journalisme, il y a des règles, qu’on respecte ou pas. Au cas où vous ne les connaîtriez pas encore, l’étudiant en communication que je suis vous propose de partir à la rencontre d’un chaleureux mécanisme : les lois de proximité et leur rôle dans la hiérarchie de l’information.
Le mort-kilomètre : Meurtre dans Paris VS Trafic d’organes au Zimbabwe
Ah, le mort-kilomètre, quelle loi de proximité géographique magnifique. En gros, on part du principe que vous, lecteurs, allez plus vous intéresser à des trucs plus proches de chez vous. Votre voisin s’est tiré une balle ? En toute logique, ça devrait plus vous faire cliquer que si le suicide avait eu lieu à des milliers de kilomètres de chez vous. Un exemple ? Vous entendez davantage parler des gamins qui disparaissent en France que de ceux, bien plus nombreux, qui se volatilisent dans d’autres pays. Le monde est cruel.
La loi de proximité chronologique
Franchement, à moins d’être passionné d’Histoire, un article sur un fait passé, sans rapport avec aujourd’hui, ça vous excite ? Mouais. Vous comprendrez donc pourquoi les médias privilégient l’actu chaude et se séparent volontiers d’un sujet jugé un peu trop vieux. En revanche, on voit toujours arriver les marronniers, chaque saison. Paradoxal ? Pas du tout, ce qui m’amène à la troisième loi.
La loi de proximité psychoaffective, moteur du succès
Eeeet oui, le lecteur – ou la lectrice, ne soyons pas sexistes – est particulièrement intéressé par des choses qui se réfèrent à l’environnement social qui l’entoure. Mais encore plus par ce qui le touche personnellement. Parlez de boulot, de sécurité, de pollution, et l’intérêt est soulevé. Si on y ajoute un poil de proximité géographique, ça nous explique pourquoi la presse locale existe encore (et tant mieux). L’humain, c’est important dans la presse, pas forcément par humanisme, mais parce que ça fait tout aussi vendre qu’un bon vieux fait divers. D’où les éternels sujets sur la rentrée des classes, super #old, qui plaisent quand même à la ménagère et ses enfants collés aux basques.
La loi de proximité sociale, l’effet de masse
Cette loi rejoint souvent celle énoncée plus haut, la psychoaffective. C’est grosso modo la même chose, mais en prenant le lectorat comme une masse, à qui on va parler de sujets plus globaux. Plus les sujets sont ceux qui flottent dans « l’air du temps », plus ils marchent. En ce moment, les élections présidentielles sont au cœur de l’actu parce qu’elles intéressent la masse, sans toucher chaque lecteur au fond de son coeur comme une chanson de Bonnie Tyler.
Ces lois ne sont pas les seules règles applicables au journalisme, loin de là. Mais elles suffisent à expliquer pourquoi Hollande bouffe plus de temps d’antennes que les massacres à Homs. Plus proche géographiquement, plus proche des intérêts de la masse, inscrit dans l’actualité du moment et parfois gravé au burin dans le cœur des militants, les primaires citoyennes vont continuer à agiter la presse française, et tant pis si les morts ne prennent que la deuxième place dans la hiérarchie de l’info.