Les plus accros au shopping en ligne l’ont sûrement déjà remarqué : il devient de plus en plus aisé d’obtenir des facilités de paiements sur des eshops de grandes enseignes. Apple vient d’annoncer vouloir déployer une nouvelle fonctionnalité, Pay Later, qui permettra de payer en 4 fois sans frais, que ce soit en ligne ou en physique. Le service bancaire Klarna, qui permet lui aussi de payer en 3 fois sans frais, est déjà intégré sur plein de boutiques en ligne comme Shein, Boohoo, Uniqlo, Undiz, ou encore COS. Même chose pour Paypal, disponible presque partout. Des eshops comme Zalando permettent même de commander en ligne des vêtements et ne payer que ce qu’on décide de garder une fois tout reçu.
Or, tous ces services de facilités de paiements ont la fâcheuse tendance à conduire plein de jeunes vers l’endettement, faute d’éducation financière suffisante. Sur Insta et TikTok, nombreux sont les personnes à peine vingtenaires à témoigner autour de problèmes causés par les politiques « Achetez maintenant, payez plus tard » (Buy Now, Pay Later, souvent abrégé BNPL).
« Si vous ne pouvez l’acheter en une fois, peut-être que vous ne devriez pas l’acheter même en 4 fois »
C’est le cas d’une vidéo de l’influenceuse Madeleine White qui résumait sur TikTok pour alerter son audience :
« Mes potes, ce n’est parce que vous pouvez payer plus tard que vous ne paierez rien. 400 dollars, ça reste 400 dollars. Et si vous ne pouviez vous permettre de l’acheter en une fois, ça veut peut-être dire que vous ne devriez peut-être pas l’acheter. »
En effet, il arrive souvent que de jeunes personnes qui n’ont pas l’habitude de gérer des finances ignorent ou sous-estiment l’impact à long terme de telles méthodes de paiements, comme vient de le rappeler le ELLE étatsunien :
« Une enquête menée par Piplsay, 43 % des membres de la génération Z ont manqué au moins un paiement en 2021. Une étude réalisée par Qualtrics pour le compte de Credit Karma a révélé que plus de la moitié des répondants de la génération Z et de la génération Y ont manqué au moins un paiement, par rapport à la génération X (22 %) et aux baby-boomers (10 %). Scott Galloway, professeur de marketing à NYU, a qualifié la BNPL de « l’équivalent de la crise des prêts hypothécaires à risque » pour la génération Y et la génération Z dans un épisode du podcast Pivot. »
Si la réalité économique aux États-Unis diffère de celle de la France, on peut tout de même trouver cela éclairant sur les écarts de pouvoir d’achat et de rapport à l’argent en fonction des générations.
À quand davantage d’éducation financière pour toutes et tous ?
Pouvoir ainsi retarder l’inévitable peut donner l’impression d’avoir un budget beaucoup plus important que la réalité, voire illimité. Cette illusion peut provoquer des désastres financiers, alimentés par l’accélération des tendances modes sur des réseaux comme TikTok et Instagram où arborer la dernière micro-trend peut aider à gagner en popularité et viralité. Et puisqu’il s’agit de vogues toujours plus éphémères, leurs adeptes s’orientent souvent vers des marques d’ultra fast-fashion. Cette approche de la mode jetable forme un cercle vicieux consumériste avec la multiplication des facilités de paiements dans lequel tombe de nombreuses jeunes personnes. Bref, des arguments supplémentaires pour davantage d’éducation financière.
À quand des cours au lycée par exemple pour comprendre ses fiches de paie, payer ses impôts, contracter ou non un crédit, le négocier, et bien comprendre ce qu’il en retourne ? En attendant, c’est peut-être le moment de se réjouir des frictions à l’acte d’achat, car devoir taper tous les numéros de sa carte bleue, le CVV (Card Verification Value : les trois petits chiffres au dos de la carte), voire la double-authentification avec son téléphone tiennent peut-être moins de temps perdu que d’opportunités de réflexion avant de (c)raquer.
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Crédit photo de Une : Capture d’écran TikTok.
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