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Féminisme

J’ai pris un coup par un harceleur de rue (et il l’a payé cher) — Témoignage

Il y a quelques années, Juliette a subi une agression dans la rue, suivie de plusieurs coups. Sauf qu’elle a porté plainte, et que le harceleur s’est trouvé fort dépourvu quand le jugement fut venu.

— Publié le 13 avril 2016, pendant la semaine contre le harcèlement de rue

En parlant d’anecdotes autour du harcèlement de rue, j’en ai moi-même plusieurs concernant cette épuisante banalité que toutes les femmes subissent quasiment quotidiennement.

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Mais il y en a une dans le tas qui est un peu plus remarquable qu’une autre, comme la boule noire dans Motus… et pour cause : je me suis fait frapper.

Ne soyez pas attristé•es ou horrifié•es pour moi, c’était il y a maintenant presque quatre ans, et vu la conclusion de l’histoire, j’ai plus tendance à en rire. Bon, évidemment, je m’en serais bien passée, mais disons que comme j’ai tendance à voir le verre à moitié plein, je me dis que ça fait un récit de plus à raconter !

C’est l’histoire de trois filles qui rentrent de boîte de nuit…

Tout est dans le titre. Cette aventure se déroule pendant le mois de juin 2012, deux semaines après mes vingt ans.

Avec ma plus vieille amie (que je connais depuis la maternelle) et une autre pote, nous avions décidé de nous faire une petite soirée toutes les trois qui a commencé par un verre dans un bar, puis plusieurs, et fini par une entrée en boîte.

La nuit est dansante et assez alcoolisée, mais pas à outrance. Sur les coups de cinq heures du matin, nous sentant toutes les trois fatiguées, on décide de prendre nos clics, nos clacs et le chemin de nos chez-nous respectifs.

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On a bien dansé mais il est temps de rentrer.

Et c’est là que ça se gâte. À peine sorties de la boîte, un casse-couilles homme commence à nous suivre, nous hélant de façon plutôt extrêmement lourde, nous demandant pourquoi on partait si tôt et si on voulait pas finir la soirée quelque part.

Réponse : non.

Étant quelqu’un que l’on qualifie souvent de « grande gueule », et voyant que mes copines sont gênées mais n’osent pas répondre à ce charmant monsieur, je décide de lui rétorquer un « Non, merci, on va rentrer chez nous » de courtoisie, en pensant qu’il allait se contenter de ça.

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C’est toujours non.

Mais que nenni ! Voilà que l’assaillant continue à nous suivre, se faisant de plus en plus oppressant et agressif dans ses propositions. Je continue à lui répondre (et c’est là que fut mon erreur), me faisant moi aussi plus ferme, sans pour autant être insultante.

Le harceleur se faisait de plus en plus oppressant et agressif dans ses propositions.

Puis il a atteint le point de non-retour. Il a commencé à me fustiger de sympathiques invectives telles que « sale pute , « va niquer ta mère », « je te baise », et autres réjouissances.

L’alcool m’aidant, j’ai décidé de rebrousser chemin pour aller vers lui et lui dire de la fermer et d’arrêter de nous suivre, mais à peine ai-je atteint son niveau qu’il m’a littéralement foutu un coup de boule.

Honnêtement, ça fait mal.

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À lire aussi : Baisse les yeux. Tais-toi. Ravale ta colère et déglutis tes larmes.

Du coup de boule à l’arrivée des pompiers, puis de la police…

Me voilà projetée à terre, essayant de comprendre ce qu’il m’arrive. Par chance, j’ai eu le réflexe de me rattraper sur les coudes, et ma tête n’a pas tapé au sol, mais quand même : j’ai mal aux coudes, j’ai très mal aux dents, à la bouche, je saigne beaucoup, et je suis surtout choquée.

Mes copines, ayant assisté à toute la scène, courent vers moi et vers Jean-Michel Connard. L’une essaye de l’éloigner tandis que l’autre tente de me relever.

J’y arrive tant bien que mal, sauf que je retombe à terre, puisque monsieur m’a également recollé une droite derrière, histoire de montrer qu’il n’avait pas fini.

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Illustration du con.

Là je vous avoue que c’est assez obscur : je ne me rappelle plus bien comment on s’est dépêtrées de tout ça, mais je crois que d’autres personnes sont arrivées à ce moment-là, pour éloigner mon agresseur et faire en sorte que je reprenne un peu mes esprits.

Pendant ce temps, mon amie d’enfance avait appelé les pompiers puis la police, pendant que mon autre copine racontait aux badauds ce qu’il s’était passé, afin qu’on ait le plus de témoins possible.

À lire aussi : Un harceleur, une pré-adolescente, et mon courage à deux mains

Les secours et les forces de l’ordre (j’ai l’impression d’être dans Enquête Exclusive quand je dis ça) sont arrivés étonnement vite : je crois que cinq minutes après m’être relevée, ils étaient déjà tous là.

Je finissais donc cette soirée en jonglant entre ma déposition aux flics et l’attention que je portais aux pompiers qui m’examinaient, vu que je saignais quand même beaucoup.

Récit d’un con qui reste sur les lieux de l’agression

Juste avant d’embarquer dans le camion des pompiers direction les urgences pour me faire mieux ausculter (notamment au niveau des dents), les policiers m’ont évidemment demandé si je pouvais leur faire un descriptif de mon assaillant, vu que je souhaitais déposer plainte.

À lire aussi : Agression sexuelle et dépôt de plainte : les conseils d’un policier

Mieux qu’un portrait de cette andouille, je n’ai eu qu’à le pointer du doigt en disant « C’est lui », puisque ce con était tout simplement posé sur un rebord de fenêtre à cinq mètres de moi, regardant la scène depuis son siège de fortune.

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T’es con ou t’es con ?

Je n’ai eu qu’à le pointer du doigt en disant « C’est lui », puisque ce con était tout simplement à cinq mètres de moi.

Je ne sais pas vous, mais si un jour me prend l’idée complètement débile d’agresser quelqu’un, je profiterais du temps de latence entre le coup de téléphone aux flics et leur arrivée pour me barrer en vitesse, histoire d’essayer d’échapper à une arrestation.

Mais non, lui a décidé de rester, tout à fait po-po-po-sey sur le cô-cô-cô-tey, et s’est donc fait arrêter et embarquer devant moi.

Bref, tout s’enchaîne assez vite, je passe aux urgences, je me fais désinfecter et je reçois des glaçons pour faire dégonfler mes lèvres, j’appelle mes parents, et on va directement au commissariat pour porter plainte, les certificats médicaux en main, prouvant bien que mes blessures étaient bien les conséquences du coup que j’avais reçu.

Après la plainte, le procès

Une fois que tout fut enregistré, j’ai évidemment attendu quelques temps avant que Jean-Michel Débile soit condamné.

J’ai d’abord passé trois jours en mode Shauna Sand, avec les lèvres ultra gonflées, et très souvent au téléphone avec mes potes qui prenaient de mes nouvelles, car je refusais de sortir avec cette tête-là.

J’ai également enchaîné les rendez-vous chez le dentiste pour voir si mon incisive droite (celle qui avait pris le coup) allait tenir le choc.

Bonne nouvelle : elle était certes descendue de quelques millimètres, mais n’avait pas l’air d’avoir l’intention de se déchausser. Heureusement parce que sinon, bonjour la tronche de pirate.

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Moi pendant trois jours après mon agression — la joie de vivre en moins.

Quelques mois plus tard allait se tenir le procès de mon agresseur, et attention mes enfants, c’est pas triste.

Comme j’avais peur de potentielles représailles et que je n’étais pas obligée d’assister à l’audience, j’ai décidé de rester chez moi. Ma mère, elle, a préféré y aller, mais en restant dans le public, comme ça elle n’avait pas besoin de se présenter en tant que parent de l’illustre personne que je suis de la victime.

L’audience commence. L’avocat qui me représente montre les photos que les officiers de police avaient fait de moi juste après mon agression pour faire état de l’ampleur des dégâts (très honnêtement les clichés avec lesquels je chope le plus sur Tinder) (non), les certificats médicaux, les témoignages de mes amies et tout le toutim pour bien dire que bon, voilà quoi, c’est quand même lui qui a fait une connerie.

Et là, on arrive à la partie marrante : la défense du mec. Accrochez-vous les paupiettes, c’est du grand art.

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Moi entendant sa version des faits : une allégorie.

Pour ce monsieur, les faits se sont déroulés ainsi : il rentrait tranquillement de soirée lorsque j’ai commencé, soutenue par mes amies, à le traiter de tous les noms, allant même jusqu’à l’insulte raciste (chose qui me ressemble énormément, vous vous en douterez) (spoiler alert : non).

Et si je me suis retrouvée blessée, c’est parce que celui-ci aurait simplement avancé la tête vers moi pour régler le problème. C’est qu’il contrôle pas sa force, ce monsieur.

Je ne m’arrêterai jamais de répondre à mes harceleurs. Car en plus, maintenant, je ne crains plus les coups.

Ma mère m’a d’ailleurs raconté qu’à ce moment-là, la juge d’instruction n’a pas pu retenir un gloussement, et l’a remis à sa place en lui montrant de nouveau les photos de mon visage plein de sang et tuméfié.

Tout cela s’est soldé par un retour en prison pour lui (car il était en mise à l’épreuve suite à une liberté conditionnelle, après qu’il a été condamné à de la prison ferme pour plusieurs faits similaires), une grande victoire pour moi et une petite pour la lutte contre le harcèlement de rue, mais avec une dent qui fait toujours un peu mal quatre ans après.

De cette aventure, je n’en retiens qu’une seule chose : je ne m’arrêterai jamais de répondre à mes harceleurs. Car en plus, maintenant, je ne crains plus les coups.

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Les Commentaires

35
Avatar de Cerise_confite
29 mai 2019 à 11h05
Cerise_confite
Je réponds presque toujorus aux mecs qui me harcèlent dans la rue, et ce qui me bouffe c'est que mes amies me disent "non mais faut pas faire ça, tu vas te faire casser la gueule un jour"! Et ma dignité qui se casse jour après jour à force de ne rien dire, de baisser la tête, j'en fais quoi? Et pourquoi on doit tout de suite rebondir sur MA manière de réagir à une agression extérieure?
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