Les mots sont importants, surtout lorsqu’on les utilise mal. La cinquième définition du mot « gitan » dans le 23ème dictionnaire de la Real Academia Española (RAE), par exemple, a profondément choqué la communauté gitane. Elle dit en effet que le terme « gitan » peut être utilisé comme synonyme de « fraudeur », autrement dit quelqu’un qui essaye de tromper les autres avec diverses ruses et mensonges, explique El Pais.
À l’occasion de la Journée internationale des gitans, le 8 avril dernier, le conseil d’État du peuple gitan a donc lancé une campagne pour dénoncer cette stigmatisation par les mots. Elle explique qu’« une définition discriminatoire engendre la discrimination ».
#YoNoSoyTrapacero (« Je ne suis pas un fraudeur ») et #YoNoSoyTrapacera (« Je ne suis pas une fraudeuse ») est le titre d’une vidéo qui demande à des enfants gitans leur réaction face à cette définition, afin de sensibiliser les adultes à cette injustice linguistique.
L’intervieweuse commence par demander aux enfants ce qu’ils aiment dans la vie : voir leurs amis, aller en vacances, manger des glaces, se vernir les ongles… Et ce qu’ils voudraient faire plus tard, ce à quoi certains répondent qu’ils veulent étudier le droit, les mathématiques ou encore les langues.
L’interlocuteur demande ensuite aux enfants de se saisir du dictionnaire sur la table à côté et de chercher dedans le mot « gitan ». Arrivés à la définition « fraudeur•se », elle les interroge sur la signification du mot et les incite à la chercher. Commentaires des enfants :
– Les gitans ne font pas ça.
– Les autres gens peuvent le faire aussi.
– Je n’aime pas ce que ce dictionnaire dit de nous.
– Ça nous insulte.
– Ça me paraît injuste.
– Parce que je ne suis pas comme ça.
Cette assimilation des gitans aux fraudeurs est d’autant plus choquante pour la communauté qu’une définition semblable, qui n’utilisait pas le même mot mais véhiculait la même idée, avait déjà été publiée dans la 22ème édition du dictionnaire. La communauté gitane avait demandé son retrait ou sa modification, que la RAE avait refusé au motif que :
« Le lexicographe fait un exercice de véracité : ceci reflète les utilisations linguistiques effectives, mais il n’incite personne à quelque disqualification que ce soit, ni ne prête l’oreille à son acquiescement aux croyances ou aux perceptions correspondantes. »