Mise à jour du 21 décembre 2016 – L’accord trouvé en octobre (voir ci-dessous) par Najat Vallaud-Belkacem, la ministre de l’Education et de l’Enseignement Supérieure, vient d’être adopté par le parlement.
Le gouvernement s’est appuyé sur la proposition de loi du sénateur Jean-Léonce Dupont, bien qu’il ne fasse pas partie de la majorité, pour pouvoir mettre en oeuvre cette réforme au plus vite. La loi a été adoptée d’abord par le Sénat en octobre, et vient de l’être le 19 décembre par l’Assemblée Nationale. La prochaine étape est donc la promulgation de la loi, c’est à dire sa mise en place.
Elle devrait prendre effet cette année, et la plateforme prévue par le gouvernement pour réunir l’offre de masters en France devrait ouvrir dès janvier.
Mise à jour du 5 octobre 2016 – La ministre de l’Education vient de l’annoncer : un accord concernant la sélection à l’entrée en master vient d’être trouvé entre les universités, les organisations étudiantes, et le gouvernement.
Selon cet accord, la sélection à l’entrée du master serait donc mise en place, comme annoncé sur le site de Najat Vallaud-Belkcacem :
« C’est à l’entrée du master que les universités peuvent recruter les étudiants selon leur niveau pédagogique, leur projet professionnel, et une fois que les étudiants y sont, ils y sont pour quatre semestres. »
Mais le gouvernement tenait à garantir un droit à la poursuite d’études pour tous. Pour ce faire, la possibilité de saisir le recteur sera ouverte aux étudiant•es dans le cas où certain•es ne seraient accepté•es dans aucun des masters auquel ils ou elles avaient candidaté.
Celui-ci devra alors leur faire trois propositions de poursuite d’études dont au moins une dans son établissement ou sa région académique d’origine, qui correspondent à son projet d’orientation.
Pour faire de cette proposition une réalité, la ministre a annoncé la création d’une plateforme d’information en cours d’élaboration, www.trouvermonmaster.gouv.fr. L’enjeu sera de réussir à savoir dans quelles formations il reste des places et de pouvoir faire des propositions cohérentes, sans faire de cette plateforme un copié-collé de celle d’admission post-bac.
Ce compromis devrait être présenté au Parlement en novembre.
Mise à jour du 16 septembre 2016 – Jean Léonce Dupont, sénateur Les Républicains, a déposé une proposition de loi au Sénat sur le sujet de la sélection en master. Alors que Najat Vallaud-Belkacem prévoit de proposer un texte en octobre, après consultation de toutes les parties prenantes (voir ci-dessous), cette proposition apparaît comme une tentative de court-circuiter le gouvernement sur le sujet.
Le texte vient de paraître et il vise à légaliser la sélection en master de différentes manières — ce qui n’est en effet pas la position de la Ministre de l’Éducation :
« Les établissements accrédités à délivrer un diplôme de deuxième cycle peuvent définir des capacités d’accueil en première année des formations qu’ils proposent et subordonner l’admission des candidats à l’examen du dossier du candidat et à une épreuve ou un entretien, selon des modalités définies au sein de l’établissement et validées par son conseil d’administration. »
Cette première partie du texte permet donc aux directeur•trices de master de sélectionner à l’entrée du cycle de deux ans s’ils le souhaitent, selon des critères propres à chacun. Cela pourra passer par diverses procédures allant du simple examen du dossier, à l’épreuve écrite ou à un entretien d’admission.
Mais ce n’est pas le seul levier envisagé par le sénateur Jean-Léonce Dupont pour permettre la sélection en master : dans le cas où les masters n’opèreraient pas de sélection en première année, il serait possible pour une liste de formations établie par décret de sélectionner entre le master 1 et 2.
« Dans la cohérence du parcours de formation, l’accès en seconde année du deuxième cycle est de droit pour les étudiants ayant validé les deux semestres de première année.
Par dérogation à ce principe, lorsque l’accès à la première année de deuxième cycle est ouvert à tout titulaire d’un diplôme de premier cycle, un décret pris après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche établit la liste limitative des diplômes de deuxième cycle pour lesquels l’admission en seconde année peut être subordonnée à l’examen préalable du dossier du candidat. »
Si le sénateur a consulté la Conférence des Présidents d’Universités, qui se prononce plutôt en faveur d’une telle sélection, il semble que les organisations étudiantes n’aient pas été intégrées au processus… et elles risquent en effet de marquer leur opposition à une telle mesure, notamment l’UNEF. Le consensus sur cette proposition semble loin d’être acquis, ce contre quoi avait pourtant mis en garde Najat Vallaud-Belkacem.
Jean-Léonce Dupont s’est également fendu d’une tribune publiée sur le Huffington Post pour expliquer son souhait de légaliser la sélection en master. Il y explique son point de vue en partant du principe que que la licence et le master sont les seules formations à ne pas avoir un droit légal à la sélection en enseignement supérieur, et que cela crée une génération de personnes sur-diplômées qui n’ont pas davantage accès à l’emploi.
Si l’on croise son discours avec celui de Najat Vallaud Belkacem, la question de fond pourrait donc éventuellement se résumer à :
« Tu préfères… Des chômeurs les plus éduqués possibles, ou des chômeurs qui cessent d’étudier après une licence ? »
Que d’optimisme donc !
Cependant je ferai une dernière remarque ici : si on s’attarde sur le système Licence-Master-Doctorat, il faut noter la différence entre les licences « générales » et les licences « professionnelles ». Si ces dernières ont pour but de favoriser l’insertion sur le marché du travail directement après leur obtention, les licences générales ont en effet vocation à être complétées par un diplôme professionnalisant… aka le master.
Article initialement publié le 12 septembre 2016 –
C’est la rentrée ! Pour beaucoup c’est la reprise du chemin qui mène sur les bancs des amphis et des salles de classe. Mais parmi la masse des 2 550 000 étudiant•es français, certain•es sont peut-être dans une impasse, notamment à une étape pourtant cruciale de leurs parcours : en plein coeur de leur master.
Najat Vallaud-Belkacem a décidé d’initier une réforme pour mettre fin à ces situations délicates.
La sélection en master 2, illégale mais pratiquée
Il est en effet fréquent, et en particulier dans certaines filières spécifiques comme le droit
ou la psychologie, que des étudiant•es soient refusé•es en master 2 après avoir pourtant obtenu leur master 1. Cette sélection est héritée du système qui précédait celui de l’harmonisation européenne licence-master-doctorat et dans laquelle le niveau bac +4 était la maîtrise. Cette situation aurait pourtant dû être temporaire, cette réforme ayant eu lieu il y a 14 ans, en 2002.
Par défaut, il est illégal de sélectionner à l’entrée du master 2.
En février dernier le Conseil d’État a tranché cette question épineuse : il est illégal de sélectionner à l’entrée du master 2, en tous cas tant que les formations autorisées à le faire n’auront pas été listées par décret.
Pour mettre fin au vide juridique qui en découlait et à cette différence entre les faits (il y a une sélection) et la loi (cette sélection est illégale), le ministère de l’Education avait publié en mai un décret autorisant 1304 formations de master 2 à procéder à une sélection. C’est environ 40% des formations de master existantes.
La communauté universitaire n’était pas enthousiaste à la suite de cette publication. Certains des masters qui estimaient devoir pratiquer la sélection n’ont en effet pas obtenu gain de cause — bien que la liste soit plus longue que celle qui était initialement prévue : 1300 au lieu de 850. Les organisations étudiantes telles que l’UNEF sont quant à elles mécontentes de cette sélection qui perdure.
Des incohérences de parcours
Ce décret a cependant une vocation provisoire, et Najat Vallaud-Belkacem essaie depuis le début de l’été de trouver des pistes qui mèneraient au consensus de la communauté universitaire sur ce sujet.
Le vrai problème, c’est de laisser des étudiant•es s’engager dans des formations au bout desquelles ils et elles ne pourront pas aller.
Le vrai problème, c’est de laisser des étudiant•es s’engager dans une formation de master 1, en sachant que tou•tes n’auront pas une place en master 2… Ils et elles obtiennent donc un demi-diplôme, une formation qui n’est pas finalisée.
Cela peut compliquer leur insertion sur le marché du travail et conduit nombre d’entre eux à « bricoler leurs parcours » ou à « redoubler artificiellement ».
Pour autant, il ne serait pas forcément plus efficace de transposer simplement la sélection à l’entrée en master 1 plutôt qu’en master 2 puisque là encore, les licences ne sont pour la majorité pas considérées comme des diplômes professionnalisants. La problématique de l’entrée sur le marché du travail ne serait donc pas résolue.
« D’abord, les universités doivent pouvoir recruter à l’entrée du master, et non pas en milieu de master, l’idée étant d’avoir un diplôme conçu comme un cursus de quatre semestres qui ne s’arrête pas en plein milieu, comme c’est le cas aujourd’hui.
Et, en même temps, tout titulaire de licence doit se voir proposer une poursuite d’études en master s’il le souhaite. On ne peut en effet pas abandonner les étudiants qui veulent continuer après la licence, alors que ce diplôme ne suffit pas à s’insérer dans le monde professionnel. »
Cela reviendrait à favoriser un arrêt des études anticipé pour beaucoup de jeunes, ce qui, d’après la ministre, n’est pas souhaitable — et on est bien d’accord sur ce point-là. D’autant plus qu’ainsi qu’elle le rappelle dans son interview, ce sont des jeunes sur lesquel•les l’Etat a déjà investi : pourquoi gaspiller cet investissement ?
Quelles solutions ?
L’idée serait de permettre la sélection pour certains master 1 tout en proposant des alternatives aux étudiant•es qui auraient été refusé•es dans leurs premiers choix.
Les solutions avancées par Najat Vallaud Belkacem incluent notamment une meilleure répartition de l’offre et de la demande à l’entrée en master. Actuellement, on compte 164 000 étudiant•es en master 1 et 154 000 en master 2 (selon la ministre) ; la différence n’est donc pas si élevée.
L’idée serait de permettre la sélection pour certains master 1 tout en proposant des solutions aux étudiant•es qui auraient été refusé•es dans leurs premiers choix pour qu’ils et elles accèdent à une autre formation.
Najat Vallaud Belkacem a bien précisé pendant son interview qu’il était très important de veiller à la cohérence des autres propositions qui peuvent être faites dans ce genre de situation puisque que le fait de ne pas étudier dans un domaine qui nous plaît est une des causes majeures de l’échec durant les études supérieures.
Master 1 option « Mais qu’est-ce que je fais là ? »
Elle ne table pas pour autant sur un outil similaire à APB, la plateforme disponible après le bac, car les formations de master ne sont pas toutes basées sur le même calendrier. En revanche, elle envisage à la place un outil d’informations pour permettre à chacun de repérer quelles sont les formations disponibles, quels en sont les calendriers et les pré-requis qui les accompagnent.
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Quelques réserves…
Pourtant, si dans l’idée pouvoir proposer aux étudiant•es déçu•es des alternatives paraît être la solution la plus crédible, elle soulève quelques problèmes et questions.
La première est celle de la mobilité géographique. Dès lors que ce système sera national, il y a fort à parier que l’on proposera à des étudiant•es des formations dans des villes différentes. Or, tou•tes n’auront pas forcément les moyens de partir vivre ailleurs.
Face à cette éventualité, Najat Vallaud-Belkacem a répondu que le ministère tenterait de limiter les difficultés que cela pourrait générer :
« On va faire en sorte que le droit à la poursuite d’études soit proposé et permis dans le cadre géographique de l’étudiant•e.
Mais la mobilité géographique, je le maintiens, doit être promue et cela doit passer par un soutien financier pour ceux qui n’en ont pas les moyens. »
Outre la mobilité, se pose également la question de la qualité des formations alternatives proposées et de leur mise en valeur. Elles risquent en effet de passer pour des « masters poubelle » où atterriraient uniquement les personnes refusées dans les formations plus prestigieuses… Il faudra donc veiller à ce que cela ne soit pas le cas !
Il va falloir nous faire entendre !
Une chose est sûre, c’est un sujet qui est bien plus important pour notre avenir que beaucoup d’autres questions dont on risque d’entendre (un peu trop) parler pendant cette année électorale.
Si on ne veut pas qu’il passe à la trappe, il va donc falloir nous faire entendre et bonne nouvelle : ça ne tient qu’à nous !
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Les Commentaires
Donc quand la filière n'est pas totalement différente c'est tout à fait possible. Des DUT carrière juridiques peuvent passer en licence simple ou licence pro, des licences pro juridiques en master juridique de la même filière, par exemple. Pour les autres études (genre cycle d'ingénieur), ça peut marcher aussi après une licence pro. Dans tous les autres cas, quitte à faire un peu d'expérience professionnelle, la validation d'un diplôme plus prestigieux après quelques années de travail peut vraiment être une bonne solution
Et bien sûr, les services orientation des facs ne sont pas mauvais en général, ils sont capables d'aider à cerner une envie et ce qui nous empêche d'y accéder. Ils donnent aussi un coup de main pour les lettres de motivation et dossiers, et ils permettent le concept du "semestre rebond" (si votre année de fac ne vous plaît pas, pensez-y).