« Dénonciation calomnieuse ». C’est l’objet de la plainte déposée par Patrick Poivre d’Arvor contre 16 des femmes qui l’accusent de harcèlement et de violences sexuelles.
« Depuis l’emballement généré par la déferlante #MeToo, la libération de la parole des femmes connaît malheureusement son lot d’excès et de dérives, et les moyens mis en œuvre pour servir cet objectif légitime peuvent s’avérer pervers et dévastateurs » estime PPDA, selon France Info.
PPDA contre-attaque
Dans sa plainte, il qualifie au passage ces femmes de « journalistes ou écrivains en mal de renommée et/ou féministes de la dernière heure » et met leur plainte sur le coup du dépit amoureux et d’un élan de « vengeance tardive ».
Cette plainte arrive à un moment loin d’être anodin, en amont de l’émission Complément d’enquête qui sera diffusée ce jeudi 28 avril sur France 2 et qui contient un nouveau témoignage d’une femme ayant cotôyé PPDA à TF1, Estelle Youssouffa. Elle raconte notamment l’atmosphère de toute-puissance qui règne autour du présentateur :
« Il y avait un carnet qui était disponible pour toute la rédaction pour qu’on puisse se joindre ; PPDA pouvait accéder à tous les numéros, et ne se privait pas de le faire. »
Le reportage révèle aussi une nouvelle plainte pour viol et le témoignage anonymisé d’une nouvelle plaignante — des faits qui auraient eu lieu en 1995.
Plusieurs des femmes qui dénoncent les comportements de l’ex-animateur et qui avaient témoigné à visage découvert dans Libération en novembre 2021 ont pris la parole sur les réseaux sociaux à l’annonce de cette plainte :
La plainte pour dénonciation calomnieuse, une technique bien connue pour intimider les victimes
Cette plainte pour dénonciation calomnieuse, c’est ce qu’on appelle dans le jargon judiciaire une procédure bâillon. En gros, il s’agit pour la personne accusée, ou bien l’entreprise, de contre-attaquer par l’intimidation, mais aussi de faire durer la procédure, ce qui n’est pas sans conséquences.
« Il s’agit non seulement de détourner l’attention, mais surtout d’épuiser en temps et en argent ceux qui participent à ce débat, en les impliquant dans des procédures juridiques coûteuses dont ils ne peuvent généralement pas assumer les frais », résume la journaliste Weronika Zarachowicz dans Télérama.
Les effets bénéfiques de la plainte de PPDA ?
Paradoxalement, certaines femmes accusant PPDA se réjouissent de cette plainte à leur encontre. C’est ce qu’explique l’une d’elles dans Complément d’enquête, Muriel Reus, dont l’affaire a été classée sans suite, les faits étant prescrits :
« Ça va nous permettre peut-être enfin d’avoir un procès ! Ça va nous permettre de pouvoir nous exprimer publiquement, ça va nous permettre de pouvoir faire témoigner d’autres personnes et peut-être d’autres victimes. C’est même assez inespéré. »
Elle n’a pas tort.
C’est par exemple l’affaire Baupin qui nous le prouve. L’ancien député EELV Denis Baupin avait attaqué pour dénonciation calomnieuse les femmes qui l’ont accusé de harcèlement et d’agression sexuelle, ainsi que les médias qui ont recueilli leurs témoignages en 2016 (Mediapart et France Inter).
C’est finalement l’élu qui a été condamné pour procédure abusive en 2019 après un procès qui avait permis aux victimes de s’exprimer devant la justice.
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Crédit photo : Capture (KTOTV)
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