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Psycho

Jeunes générations et rapport au travail

Justine décrypte pour vous une étude de l’INSEE qui analyse le rapport au travail et les parcours professionnels selon les générations.

Il y a une petite centaine d’années (en 2009), j’ai débarqué sur le marché de l’emploi, le cœur léger et le bagage mince, persuadée que le monde n’attendait que moi et qu’à cœur vaillant, (presque) rien d’impossible. Gavée de séries, j’avais peut-être bien dans l’inconscient un modèle professionnel à la Carrie Bradshaw (qui écrivait deux secondes flanquée sur son pieu avec l’air inspiré et publiait ses jérémiades – qui évidemment passionnaient le tout New-York, dans un journal carrément important, tout ça pour un salaire incroyable) ou à la Grey’s Anatomy (le Seattle Grace est bourré de médecins fantastiques et autres génies de la science, comme si la médiocrité n’existait pas), des modèles où l’épanouissement professionnel est évident et où le travail, c’est un accessoire drôlement cool…

Après avoir sué au Mc Do pendant mes études, j’étais hyper motivée à m’insérer, à construire un projet professionnel de foufou sous le regard forcément bienveillant de mon conseiller emploi, à poser mes fesses dans une entreprise heureuse où j’allais faire un job de psychologue BADASS (et accessoirement voyager, me payer des livres-pas-de-poche, acheter des milliers de trucs – comme si entrer sur le marché de l’emploi, c’était aussi entrer sur le marché des vacances et de la consommation).

BON. Autant se l’avouer : ça ne s’est pas exactement passé comme ça et c’était juste pour vous dire qu’aujourd’hui, nous allons causer de générations et de rapport au travail.

Avons-nous les mêmes perceptions de l’emploi que nos aînés ? Connaît-on les mêmes problématiques professionnelles que nos parents, nos grands-parents ?

En mars 2012, l’INSEE a publié une étude sur les transformations des parcours d’emploi et de travail selon les générations, retraçant les trajectoires et ressentis de 14 000 personnes de 20 à 74 ans. Alors… Les choses ont-elles changé ?

Les constatations objectives : des parcours moins stables et plus d’expériences de chômage pour les jeunes générations

Je suis à peu près sûre que cela ne vous surprend pas : plus diplômées, exerçant moins souvent des métiers industriels, les générations les plus récentes ont des parcours moins stables et connaissent le chômage davantage que leurs aînées. Évidemment, le chômage ne touche pas autant tous les parcours : les ouvriers et employés en sont les victimes « privilégiées », les femmes sont également plus nombreuses à faire état d’un épisode de chômage de longue durée (autant vous dire que pour les femmes ouvrières ou employées, c’est un peu le jackpot).

La différence passé/présent tient aussi dans les premiers pas professionnels. Les jeunes générations connaissent plus de difficultés à s’insérer dans la vie active, passent plus souvent par une phase « morcelée », alternant périodes de travail de courtes durées et épisodes de chômage. Somme toute, l’accès à l’emploi semble plus complexe, et la stabilité d’un CDI arrive bien plus tard.

Les conclusions subjectives : un rapport au travail moins favorable pour les générations récentes

L’étude aborde également des critères moins « objectifs », se situant plus du côté des ressentis

, de ce que les participants perçoivent à propos des conditions de travail (qui concernent d’une part la perception de la pénibilité physique et d’autre part les contraintes organisationnelles et psychosociales).

Les différentes générations déclarent un niveau de pénibilité similaire, ce qui pourrait signifier que les mutations technologiques n’ont pas suffit à réduire ce problème. En revanche, les contraintes psychosociales sont plus fortement ressenties chez les jeunes générations, où l’on souligne par exemple plus de difficultés en lien avec l’organisation du travail, une reconnaissance au travail moindre, un sentiment que leurs compétences ne sont pas pleinement utilisées… Ces remarques sont d’autant plus prégnantes lorsque le parcours est marqué par l’instabilité et le chômage.

De la même manière, les jeunes générations perçoivent plus de pression au travail (contraintes de rythme, insécurité de l’emploi…), mentionnent un soutien social dégradé et plus de difficultés à concilier vie familiale et vie professionnelle.

Alors, le travail est-il devenu un fardeau ? Les jeunes générations sont-elles plus exigeantes ? Peut-on faire des corrélations entre trajectoire d’emploi et pénibilité ou stress au travail ? La perception du travail est en réalité extrêmement complexe, et pourrait dépendre d’une multitude de facteurs : en effet, le travail a muté au fil des années ; en effet, les attentes des jeunes générations ne sont peut-être plus les mêmes…

Peut-être aussi que la précarité ambiante aggrave la dégradation de notre rapport au travail.

Sans aucun doute, l’analyse mériterait d’être approfondie, les interprétations sont à prendre avec des pincettes (voire des grosses pinces) (voire des couverts à salade) – nous ne sommes pas un groupe homogène, et il y a fort à parier que les perceptions pourraient varier selon les classes sociales.

Peut-être aussi que « de nos jours » – mais c’est une considération personnelle et carrément pas validée par la science, nous sommes poussés à « faire des études », à « choisir des voies », et que nous nous heurtons ensuite à un marché de l’emploi hostile, où nous n’aurions somme toute plus vraiment le choix. Ce week-end, quelqu’un m’a dit un truc que j’ai trouvé drôlement juste au sujet des études et de l’insertion professionnelle : « Je peux tout faire, mais je ne peux rien faire« .

Et vous savez quoi ? Dans une étude menée par Baudelot et Establet (2000), à la question « Qu’est-ce qui est pour vous le plus important pour être heureux ?« , 38% d’un échantillon de jeunes Français entre 17 et 28 ans mettrait le travail en tête de liste – avant la santé, l’argent, la famille et l’amour. Peut-être qu’à ce moment-là de nos parcours se joue quelque chose de spécial, de l’ordre de l’intégration sociale, quelque chose qui nous permettrait de trouver nos places de jeunes adultes…

Et vous, comment imaginez-vous votre arrivée sur le marché de l’emploi ? Pour celles qui ont déjà vécu ce moment, quelles remarques pouvez-vous en faire, le recul aidant ?

Pour aller plus loin


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Les Commentaires

20
Avatar de e.g.
3 juin 2012 à 06h06
e.g.
De mon experience professionnelle, ce que j'en retiens c'est que, cette generation, nous n'avons pas le mee sens de l'organisation.
Je suis tout a' fait d'accord avec l'article sur le point de la reconnaissance au travail ... peu de reconnaissance de la part de l'employeur.
Meme avec un niveau d'etudes et d'experience professionnelle, il est super difficile de trouver un emploi correct et stable.
J'ai eu differentes experiences pro, dans differents domaines (on va pas cracher sur du boulot parceque ca correspond pas a' notre specialite', surtout si on a besoin de sous !)
on m'a fait le reproche que je mon CV ne vulait rien dire, que je devrais, avant de chercher un boulot, me recentrer.
Donc meme si nous sommes motivees des fois les futurs employeurs ne font pas la part des choses.
Il y a reellement des gens qui veulent travailler (ce n'est pas un mythe !)
On trouve toujours des excuses pour ne pas nous embaucher.
J'ai quand meme bosse' plus de 3 ans en service RH, j'ai eu beaucoup de difficultes pour trouver un autre emploi.
Et finalement je decide de faire une reconversion professionnelle parceque la precarite ne me laisse pas le choix.
Recommencer de zero, nouvelle formation oblige.
J'ai cette impression d'etre un echec social (et meme en etant de cette generation Y, il y a beaucoup de gens dans mon cas ... ).
Bonne chance a' toutes !
0
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