Le 9 septembre 2021
Il y a quelque temps, après une relation houleuse, j’ai rompu avec mon ex. J’étais au fond du trou, plein de questions sans réponses, et elle refusait d’en parler… Alors, très malheureux et ayant perdu toute confiance en moi, j’ai pris une décision qui allait prendre un tournant un peu particulier : celle de commencer une psychothérapie.
Une thérapie qui commence après une rupture
Il y avait déjà un moment que l’idée de la thérapie me trottait dans la tête et je savais que j’en avais besoin. Par hasard, j’ai pris rendez-vous chez une psychologue près de chez moi, et mes premiers rendez-vous n’ont tourné autour que d’une chose : cette relation amoureuse avec mon ex. Ce qui n’avait pas marché, ce que je n’avais pas pu lui dire…
En réalité, les questions à aborder étaient bien plus larges. Je n’étais plus sûr de ce que je faisais de ma vie, je faisais des crises d’angoisse, j’étais dans une totale perte de repères.
On a commencé à se voir toutes les trois semaines, puis, pour plus d’efficacité, toutes les semaines. Au départ, je ne regardais jamais ma psy dans les yeux. Derrière son bureau, je la voyais avec beaucoup de distance.
Au bout de quelques mois, j’ai commencé à remarquer qu’elle était vraiment très belle.
Je pensais que mon crush n’avait rien de sérieux
Je pensais à elle, souvent, et je me demandais ce qu’elle pensait de ce que je lui disais. Un jour, j’ai abordé avec elle la question de l’éco-anxiété. Ne sachant pas ce que c’était, elle m’a interrogé là-dessus et progressivement, nous avons commencé à échanger « pour de vrai » sur la question, comme une vraie conversation.
On s’est rendu compte qu’on avait des intérêts en commun en en parlant. Et surtout, quand elle m’a fait comprendre qu’elle avait fait quelques recherches à la séance suivant, je me suis dit qu’elle pensait peut-être à moi en dehors de nos rendez-vous.
J’avais regardé la série In Treatment, et je savais très bien ce qu’était un transfert. Je ne prenais absolument pas au sérieux l’attirance naissante que j’avais pour elle, je savais qu’il y avait quelque chose de mécanique, qui ne dépendait pas de moi dans ce que je ressentais.
Pourtant, j’ai commencé à en faire des blagues autour de moi. Je disais en rigolant « Elle est sympa, on s’entend bien » à mes colocs, et d’une semaine à l’autre, j’avais l’impression d’être fou d’elle, puis plus du tout.
J’ai commencé à me demander à quoi ressemblaient sa famille, sa vie et son quotidien, entre deux séances.
J’ai décidé d’assumer mes sentiments pour ma psy
Le temps passant, il est arrivé qu’on fasse des séances par téléphone. L’ambiance de ces appels était plus intime : j’entendais ses proches, chez elle, elle entendait les miens. Je raccrochais ma curiosité et mon intérêt aux détails de sa vie personnelle que je glanais par ci ou par là.
Ce crush sur ma psy a commencé à prendre de plus en plus de place dans ma vie. J’en parlais souvent, toujours sans rien prendre au sérieux de ces sentiments. J’avais une impression d’interdit impossible à transcender, et je me rendais bien compte que je ne la connaissais pas vraiment… Mais ça faisait bien rire mes potes, quand je leur disais que j’étais amoureux de ma psy.
Jusqu’au jour où j’en ai parlé avec une amie qui n’a pas rigolé, et qui m’a dit :
« Mais fonce ! On s’en fout que ce soit ta psy si tu es amoureux d’elle ».
C’est étrange : ces mois de thérapies avaient eu pour but de reconquérir un peu de confiance en moi, de ma capacité à prendre des initiatives et à assumer ce que je voulais. Au final, c’est ma psy qui m’a donné la possibilité d’assumer ce que je ressentais pour elle.
La première étape a été de me dire : ce n’est pas une blague. Je pense tout le temps à elle, c’est qu’elle me plaît vraiment. Et puis un jour, pendant une séance, j’ai fini par lui dire
« Ça fait quelques semaines que je pense beaucoup à vous, je crois que je fais un transfert ».
J’espérais qu’on en parle et qu’on passe à autre chose
J’avais très peur qu’elle réagisse en me disant qu’il fallait qu’on arrête cette thérapie ensemble. Moi, je n’avais aucune envie de ne plus la revoir : ce que j’espérais, c’était qu’on en parle, et qu’on passe à autre chose. Je me disais qu’en parler me soulagerait d’un poids, et ça a été le cas.
Elle m’a répondu en me racontant une histoire personnelle qui aurait peu d’intérêt à être racontée ici mais qui voulait dire la chose suivante : on a rarement une relation « normale » avec son ou sa psy, c’est normal qu’on s’y attache, et il ne fallait pas s’inquiéter.
Ça tombait bien, c’était exactement ce que je voulais entendre. J’ai passé la semaine suivante à me dire que j’avais fait le bon choix d’en parler, que c’était une illusion, et que j’étais prêt à passer à autre chose.
Je suis arrivé à ma séance d’après très serein. J’ai parlé d’autres choses, comme d’habitude, jusqu’à ce qu’elle prenne la parole, chose qu’elle faisait très rarement.
Elle m’a dit « J’aimerais bien comprendre ce que vous m’avez dit la semaine dernière, je n’ai pas compris ce que vous ressentiez ».
J’ai essayé d’étayer un peu, de manière très confuse. Je ne comprenais pas ce qu’elle n’avait pas compris. On a réussi à changer de sujet, jusqu’à ce qu’elle me dise d’un ton un peu froid :
« Mais c’est vrai qu’avec cette histoire de transfert et de contre transfert, c’est un peu compliqué. »
Un transfert, et un contre-transfert
Évidemment, je suis allé taper « contre-transfert » sur Google à la seconde où j’ai passé la porte de son cabinet. Le résultat était limpide : c’est quand le praticien a lui aussi des sentiments pour son patient.
Je suis rentré chez moi en criant à mes colocs : « Elle a dit contre-transfert ! ». Mais vu le ton froid et distant qu’elle avait employé, on était quand même loin de la déclaration d’amour…
La séance suivante a commencé par une tirade de ma part, qui peut être résumée à peu près par ces mots :
« Bah en fait, j’ai pensé qu’à une seule chose cette semaine, donc je vais vous en parler : vous me plaisez. La semaine dernière, vous m’avez dit “contre-transfert”, donc j’ai une question. Est-ce que je vous plais aussi ? »
J’étais assis dans la pièce depuis 30 secondes.
Elle m’a répondu « Oui », en gardant une poker face totale, et à ce moment précis, je suis bien conscient des emmerdes qui arrivent. Mais je m’en fous, je suis content.
Je reprends.
« Ma deuxième question, c’est est-ce que vous êtes célibataire ? »
Elle me renvoie : « Je ne peux pas répondre à cette question pour l’instant. »
Je ne me souviens plus tellement de la suite de cette conversation. Je crois qu’elle m’a dit avec beaucoup de distance et un peu de sarcasme quelque chose de l’ordre de : « Vous croyez quoi, qu’on va sortir ensemble ? » — et que j’ai répondu, avec plus de confiance en moi que je n’en avais jamais eu dans ma vie :
« Bah oui, pourquoi pas ? »
C’est la première fois que je l’ai vue perdre ses moyens. D’un coup, la façade si professionnelle qu’elle gardait habituellement se fissurait.
La séance s’est poursuivie de manière confuse. On a reparlé de moments de la thérapie, ou plutôt des changements de notre relation durant la thérapie… On s’est évidemment dit que ce serait notre dernière séance, et qu’on ne se reverrait plus. Je n’allais pas continuer à lui parler de ma mère ou de ma vie en séance, ça n’avait plus aucun sens.
Je lui ai demandé si on pourrait se revoir hors du cadre de la thérapie, et elle m’a dit que non. Avec un ancien patient, ce n’était pas possible.
« On est trop dans la merde »
Elle a fini par me dire :
« Il est 15 heures, nous avons fini notre dernière séance. Je peux vous le dire : vous me plaisez beaucoup, depuis longtemps, mais je suis en couple, et je suis dans la merde. »
Elle a juste eu le temps de mentionner qu’elle n’avait pas de patient après moi et j’ai dû partir en courant pour un rendez-vous professionnel. J’ai passé le trajet à me demander ce qui venait de se passer dans ma vie.
Après ce rendez-vous qui aura finalement duré 10 minutes, je rentre chez moi. Je pense au fait qu’elle est seule dans son cabinet, que je n’ai rien à perdre à y retourner pour lui parler.
Je suis arrivé devant son immeuble tout tremblant, sans savoir ce que j’allais faire. Je l’ai appelée en lui disant que j’étais revenu, mais que je ne savais pas trop pourquoi j’étais là.
Quand elle m’a ouvert la porte de son cabinet, pour la première fois, je me suis installé ailleurs que sur mon siège de patient. Elle était totalement différente de d’habitude, à fleur de peau.
Elle m’a dit « On est trop dans la merde ». Je n’ai même pas entendu la connotation négative de la phrase : elle avait dit « on », on était devenus une équipe, qui partageait un secret en commun. Le souci de cette équipe, c’est qu’il y avait un déséquilibre énorme entre nous. J’avais 10 ans de moins qu’elle, pas de partenaire, pas d’enfants, et mon métier n’était pas en jeu dans la balance.
On s’est embrassés pour la première fois dans son cabinet
Elle m’a dit que ça faisait des semaines qu’elle ne dormait plus, qu’elle y pensait tout le temps, à cette chose qu’il y avait entre nous.
On s’est embrassés pour la première fois au-dessus de son bureau, dans une position absurde. Ça faisait des lustres que j’y pensais, j’avais déjà un peu imaginé ce moment. Dans la réalité, on s’embrassait un peu mal.
C’était très étrange, de la voir si proche de moi pour la première fois, mais c’est très rapidement devenu agréable. On était dans son cabinet, dans cette pièce où j’avais fait tous ces mois de thérapie, et on s’est embrassés très longtemps, en enfonçant cette journée dans le n’importe quoi total.
Elle passait son temps à se demander si c’était sa faute, si elle avait fait quelque chose pour engendrer ça, si c’était une mauvaise psy. On était heureux et bloqués. Quand son patient suivant a sonné, j’ai dû filer.
Elle voulait qu’on se revoie le soir même. Je lui ai proposé de passer chez moi le soir même, mais elle l’a très mal pris. Elle s’est braquée, s’est demandée si j’avais fait tout ça seulement pour coucher avec elle, sans aucun sentiments. Moi, j’ai eu très peur d‘un coup.
Je me suis rendu compte que ça faisait des mois que je parlais tout seul face à elle, et que je commençais à peine à apprendre qui elle était. C’était terrifiant : elle savait tout de moi, je ne savais rien d’elle. Nous ne nous sommes pas revus avant quelques jours.
Les débuts de notre relation, sur fond de confinement
Pour notre premier « rendez-vous », nous sommes allés nous promener et j’avais un milliard de questions. Elle m’a parlé de sa vie, de sa famille, de son boulot, de son couple… C’était la première fois que j’étais l’amant de quelqu’un, et il y avait quelque chose de très « adulte » là-dedans. On avait prévu d’aller au restaurant, et finalement, on a passé notre temps à se parler et à se rouler des pelles dans un parc.
Le confinement a été annoncé trois jours après.
Pendant toute cette période, on s’est appelés en visio. J’étais confiné avec des potes, elle en famille, proches géographiquement mais avec des modes de vie complètement différents, sans aucune idée de quand on se reverrait.
Elle me dira plus tard qu’elle fantasmait beaucoup sur ma vie de « jeune » à ce moment-là. Moi, je la sentais devenir plus possessive.
Quand nous avons pu ressortir de chez nous, nous nous sommes promenés ensemble. Il faisait moche, et il y avait quelque chose de bizarre entre nous. Une forme de froideur. J’avais l’impression qu’on avait plus tant de choses à se dire.
Je suis rentrée en essayant de me convaincre que tout était cool, même si je sentais que quelque chose manquait.
« Quelque chose n’allait pas »
Il ne s’était encore rien passé entre nous, mais nous avions très envie de coucher ensemble.
Après s’être revu dans un parc, nous avons décidé de passer un moment ensemble qui ne soit pas dans la rue. Je ne voulais pas qu’elle vienne chez moi et rencontre mes colocs, qui avaient déjà tant entendu parler d’elle et avec qui je venais de passer deux mois non-stop.
On est allés dans un hôtel un peu miteux, comme des amants des années 80. On était tous les deux un peu tendus : quand on prend une chambre d’hôtel en pleine journée, tout le monde sait pertinemment ce qui se passe. C’était un peu artificiel, mais on en parlait et on réussissait à en rire.
On a couché ensemble, après des mois d’attentes, et même si le moment était très agréable, il s’est passé quelque chose de bizarre. Pendant l’acte, d’un seul coup, j’avais des flashs où je me remettais à la voir comme ma psy, pas comme la personne que j’avais appris à connaître.
Peut-être qu’on avait un peu trop attendu, qu’on en avait trop parlé. Peut-être qu’elle n’était pas à l’aise de tromper son partenaire, qu’on était tous les deux très stressés.
J’ai commencé à sentir que quelque chose manquait, qu’on avait des vies très éloignées. On partageait peu de points communs, on avait des rythmes très différents… Parfois, notre relation pouvait manquer de légèreté.
Mais elle avait mis beaucoup de choses en jeu dans cette relation, et même si elle m’avait déresponsabilisé plusieurs fois, en me rappelant que tout ça était sa décision à elle et son problème à gérer, je me sentais parfois un peu responsable de cette histoire, un peu obligé de continuer.
Une rupture teintée d’amertume
J’ai commencé à être sûr que je ne tomberai pas amoureux d’elle, malgré toute la passion qu’on avait partagée. Un jour, elle m’a demandé s’il y avait un problème, et j’ai réussi à répondre « Oui, je crois ».
Elle est arrivée dans le quart d’heure qui a suivi, et nous en avons parlé. Je lui ai dit que je sentais que quelque chose bloquait, et elle m’a dit que quelque part, ce que je lui disais l’arrangeait. Ça lui enlevait un problème à gérer.
Elle a fini par me dire :
« Ça ne m’étonne pas tellement, que ça ne puisse pas marcher. Tu as tendance à déprimer et à être mal dans ta peau, à être plutôt gris. Moi, je ne suis pas du tout comme ça. »
J’ai été très surpris par ma réaction : spontanément, je me suis mis à pleurer. Je trouvais ça hyper triste d’être gris. Je n’avais pas envie de l’être, et pourtant c’était un constat implacable de sa part, de la part de quelqu’un à qui j’avais raconté pratiquement l’intégralité de ce qui se passait dans ma tête. Il m’a fallu du temps pour accepter que c’était sûrement une forme de revanche de sa part, pas un « diagnostic ».
Après ça, on s’est vaguement revus, et on s’est écrit quelques fois, jusqu’à ce que je comprenne qu’elle préférait qu’on ne s’écrive plus.
Ce que je savais d’elle, c’est qu’elle m’avait guéri
Je crois que le fait qu’elle soit ma thérapeute a malgré tout joué beaucoup plus que ce que j’espérais sur ces sentiments.
Tout ce temps, je pensais qu’il était peu probable que mon attirance pour elle soit réciproque. Je la trouvais très professionnelle et j’avais une estime immense pour son travail. La chose principale que je savais d’elle, c’est qu’elle m’avait guéri. Depuis ma thérapie avec elle, ma vie a changé et j’ai l’impression d’être le Dalaï Lama.
Je n’avais accès qu’à des bribes de sa vie, et j’extrapolais beaucoup.
Quand j’ai appris à la connaître, j’ai réalisé qu’elle était bien plus complexe et différente de ce que j’avais imaginé à partir de détails. Elle m’a appris plus tard qu’elle avait beaucoup appréhendé de me raconter sa vie à notre premier rendez-vous, parce qu’elle avait peur de ne pas être à la hauteur du fantasme que j’avais construit.
Ce qui était troublant, au-delà du fait qu’elle savait tout sur moi et que je ne savais rien d’elle, c’est qu’elle a pris des décisions bien avant moi.
La première fois que nous nous sommes embrassés, cela faisait des semaines qu’elle s’interrogeait sur son boulot, son couple, ce que tout ça voulait dire pour elle. Elle en avait parlé à d’autres psys, s’était renseignée sur ce qui était professionnel ou pas dans le cadre de la thérapie, et avait appris au préalable qu‘il n’avait rien de déontologiquement critiquable si notre parcours de soins était terminé au moment des faits.
Au moment où elle a eu des feux verts de ma part et de celle de sa propre psy, elle était à fond, et très sûre d’elle : elle avait déjà fait un choix intime. Alors que moi, je débarquais dans un truc où je n’étais sûr de rien, parce que je ne la connaissais pas du tout. J’avais juste envie d’être honnête et d’assumer ce que je ressentais…
Je crois que nous étions investis à des degrés d’intensité différents.
J’ai sous-estimé le bagage de la thérapie
Je crois que j’ai aussi sous-estimé le bagage que la thérapie représentait, de la place que ça prenait dans sa tête. Parfois, d’un coup, elle m’avouait ce qu’elle pensait d’une chose que je lui avais racontée pendant la thérapie, alors qu’elle ne l’avait jamais fait avant.
Elle m’a révélé après coup que sa lecture de mon profil psychologique l’avait orientée dans sa manière de se comporter avec moi, pour me plaire. Elle faisait parfois référence aux traits de ma personnalité d’une manière clinique, comme pendant la thérapie, en me disant des choses comme « manque d’empathie, dévalorisation de soi ».
Elle-même disait qu’elle ne comprenait pas comment elle pouvait avoir envie de me pécho alors qu’elle savait les choses les plus pathétiques et les plus tristes qu’il y ait à savoir sur moi.
Moi, je trouvais ça plutôt flatteur. Je suis rentré pour la première fois dans son cabinet avec la certitude profonde que j’étais incapable d’être aimé. De manière très étonnante, j’ai appris que ce n’était pas le cas pendant la thérapie, et cette histoire me l’a prouvé.
Et puis, j’ai adoré les moments passés avec elle : même si ça n’a pas marché, c’est une histoire que je ne regrette pas d’avoir vécu !
Selon Karen Demange, psychologue clinicienne, ce témoignage est une illustration parfaite de mécanismes courants dans une relation entre patient et thérapeute.
Elle explique :
« Une thérapie, c’est avant tout une rencontre entre deux personnes et deux inconscients : si je n’aime pas mon psychologue, je n’irai nulle part !
C’est pour cela qu’on parle d’alliance thérapeutique : un lien qui existe entre thérapeute et patient, et qui permet au parcours de soin de porter ses fruits. Elle permet au patient de se sentir écouter, de sentir qu’il peut progresser en compagnie de son ou sa psychologue. »
Selon la spécialiste, il est donc tout à fait normal de sentir une forme de bienveillance agréable de la part de son thérapeute. À cela peut s’ajouter un transfert.
« La notion de transfert décrit les moments où les patients vont transposer sur leur thérapeute des attentions, un regard, une écoute particulière.
Dans le transfert, il y a quelque chose de narcissique : on aime le fait que la personne en face de nous nous accepte pour ce qu’on est, ne nous juge pas, ne veuille pas nous changer. Et ce sentiment d’empathie et de bienveillance est incarné par le ou la thérapeute, envers qui on peut transférer des sentiments affectifs.
Cela n’est pas forcément lié aux sentiments amoureux : on peut faire un transfert amical, maternel; ou paternel. »
Ces sentiments sont renforcés par le principe même de la thérapie : les patients arrivent avec des soucis, ou des choses irrésolues, et le suivi leur permet de prendre confiance en eux, de s’aimer plus. Parce que le thérapeute y participe, on finit par l’aimer plus lui aussi, en somme.
Karen Demange ajoute que les thérapeutes sont très conscients de ces mécanismes, qui font partie du soin.
« Dans le cadre de la thérapie, il peut aussi se produire des contre-transfert. Mais attention, le terme n’est pas synonyme de sentiment amoureux ! C’est plutôt ressentir quelque chose pour un patient : ça peut aussi être un contre-transfert négatif, ou de l’agacement.
C’est un mouvement dans lequel le thérapeute sort de son rôle purement professionnel, et peut aussi ressentir des choses d’un point de vue personnel.
On dit souvent que les psychologue se doivent à une neutralité bienveillante envers leur patients. Mais au fur et à mesure de la thérapie, on n’est plus neutre : on connaît notre patient, en tout cas ce qu’il peut nous dire — ce qui peut être très subjectif. »
Mais même si les psychothérapeutes sont formés à étudier ces phénomènes, il n’existe pas de protocole pour savoir comment les gérer. Cela peut conduire à des situations difficiles à gérer pour les thérapeutes, qui doivent concilier leur étique personnelle et professionnelles en plus de l’aspect humain.
La spécialiste poursuit en expliquant que les relations entre thérapeute et patient sont très tabou. Si l’interdit ne figure pas explicitement dans le code de déontologie des psychologues, il est important de pouvoir différencier les cas d’abus de pouvoir, qui existent, et ceux dans lesquels les personnes impliquées partagent le même sentiment et semblent être dans un cadre bienveillant, comme c’est le cas dans ce témoignage.
Elle précise par ailleurs qu’avoir choisi d’interrompre la thérapie avant de s’engager dans la relation est une bonne décision — d ‘autant plus qu’elle coïncide, dans le cas du témoignage, à la fin du parcours de soin.
Si d’aventure vous ressentiez vous aussi une forme de transfert envers votre psychothérapeute, elle recommande avant tout d’en parler : dans le cas contraire, cela fausserait les suites de la thérapie.
« La première des choses à faire, c’est d’en parler au thérapeute. Il faut dédramatiser la situation, la faire sortir de sa tête : ensuite, on peut continuer à progresser en s’interrogeant sur ce mouvement psychique vers l’autre.
A contrario, si on le cache au cours de la thérapie, elle n’avancera plus. Taire un transfert, c’est sortir du cadre thérapeutique puisqu’on entre dans le but de séduire l’autre. »
Crédit photo : Cotton bro / Pexels
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Les Commentaires
Quand à elle, à ce niveau, je n'ai pas les compétences pour dire si elle a été pro ou pas. En tout cas , elle a parlé à un superviseur de son contre transfert massif, elle a culpabilisé. Elle s'est peut-être fait un fantasme aussi. Sûrement , elle connaît le psychisme de son patient, mais le psychisme d'une personne seule constitue-t-elle une personnalité toute entière? C'est une grande question. Il est vrai qu' elle fantasme sur sa vie de djeune par exemple , si j'ai bien compris ses explications. Comme elle a dix ans de plus, si ca se trouve, elle a eu des années fac difficile, dans sa vingtaine(admettons , il est dans la vingtaine, elle dans la trentaine, ) et elle a été très solitaire, et elle fantasme sur la vie plus dynamique de ce jeune, sa coloc , sa bande de potes etc.