Précédemment dans #62jours : Il faudra parfois serrer les poings
#JeudiConfession : entre nous ? Je ne pensais pas réussir à écrire tout les jours de cet été un sujet original. J’avais quelques billets en réserve, pour « les jours sans », ainsi qu’une liste de sujets où puiser l’inspiration, si elle ne me venait pas.
Avant même de commencer, j’anticipe mes propres limites, et je me place déjà dans le rôle de ma meilleure alliée.
Pas de pression Clémence, en cas de coup de mou, je suis là. Moi c’est toi, alors on n’est jamais loin l’une de l’autre. Tout ce que tu fais au présent pour l’avenir, je te le rends quand tu galères au présent.
Demander de l’aide, un réflexe perdu avec l’âge
Je ne sais plus à quel moment dans ma p’tite tête de mule le conseil « débrouille-toi ! » est devenu : débrouille-toi toute seule, toujours. Pourtant, au début, quand j’étais petite, demander de l’aide était le recours le plus naturel qui soit face à un problème.
J’y arrive pas ? Je demande. Pour résoudre un problème de maths ou accéder à l’étagère du haut, pour apprendre à faire mes lacets ou retenir l’altitude du point culminant des Pyrénées, mes tables de 7, 8 et 9, ou réciter L’Albatros : j’y arrive pas? Je demande de l’aide.
Et puis, au fil des ans j’imagine, demander de l’aide est devenu honteux. Pourquoi ? Parce qu’il y a tout un tas de compétences que je suis censée avoir, que je censée savoir faire ?
La faute, le manque et l’évidence
Je suis sortie de l’école, et j’ai perdu l’habitude de demander de l’aide. C’était devenu un signe de faiblesse, d’ignorance, presque une faute dans ma vision du monde professionnel. Et surtout, c’était plus du tout un réflexe. C’était un dernier recours : je suis en échec, j’ai besoin d’aide.
Je devais me résoudre à demander de l’aide, comme un condamné à mort fait la paix avec son dieu au matin de son exécution. Vraiment beaucoup trop de drama pour ce qui devrait pourtant être une évidence, comme elle l’était déjà, lorsque j’avais 6 ou 8 ans : j’ai un problème, j’ai besoin d’aide.
Mais c’est dur de demander de l’aide quand on a la sensation d’être en faute. Je devrais savoir ça. Je devrais connaître la solution. Je devrais y arriver.
Pourquoi en suis-je convaincue ? Souvent, par la comparaison : les autres y arrivent. Cette autre personne, en particulier —insérez ici rôle modele et/ou rivale, plus ou moins atteignable, elle y arrive, DONC je devrais y arriver. Ah bon ?!
Donc, pour résumer : je me fixe moi-même un standard ambitieux, et quand j’échoue à l’imiter, je me flagelle de mon échec. Et si je dois demander de l’aide, on est à la limite de l’humiliation.
Excellent état d’esprit dites-moi, very productif, much encourageant… (non)
Aide-toi toi-même, la devise que j’ai poussée trop loin
Je suis sévère avec moi-même, dans cette analyse. Je crois surtout que si une partie rechigne tant à accepter de l’aide, et encore plus à en demander, c’est aussi
une conséquence de l’expérience.
J’ai sans doute eu trop souvent le sentiment d’être jugée lorsque je demandais de l’aide, à quelqu’un qui ne comprenait pas mes difficultés, pour qui la solution était une évidence.
J’ai certainement eu trop souvent l’impression de m’endetter auprès de quelqu’un en lui demandant de l’aide. Et j’ai sans doute reçu des aides inefficaces, inadaptées à mes problèmes, qui ont dont davantage contribué à les aggraver qu’à les résoudre.
Mais à l’aune de ces 55 jours de réflexion, j’en ai désormais une autre lecture :
étais-je véritablement jugée par les autres, ou était-ce mon propre jugement, sévère envers moi-même, que je projetais à travers leur regard? étais-je en capacité de demander et d’accepter sereinement de l’aide, ou était-ce le rejet de ma vulnérabilité qui me faisait concevoir l’aide reçue comme un endettement, plutôt qu’une connexion humaine, avec tout ce qu’elle comporte d’émotions et de bienveillance ? étais-je véritablement en capacité d’expliquer clairement mes problèmes, et de solliciter l’aide adéquate, alors que j’étais à ce point sévère envers moi-même, perfectionniste, et régulièrement paralysée par le doute, ma peur de l’erreur, et de l’échec ?
Questions rhétoriques… Les réponses m’apparaissent évidentes, aujourd’hui, alors qu’elles étaient loin de l’être il y a moins de 2 mois.
Une évidence à l’horizon
Bon sang mais c’était pourtant évident. Oui, sans doute. Apprendre à demander et à accepter de l’aide, c’est quand même la base pour devenir ma meilleure alliée. Ça aurait dû être la leçon numéro 2, juste après les excuses à moi-même.
Sauf qu’il me fallait passer par toute une liste d’étapes, pour réussir à comprendre ça. Demander de l’aide, accepter de l’aide, c’était mission impossible lorsque j’étais encore dans le rejet de ma vulnérabilité. L’embarras, la honte, la bienveillance mal-placée, tout ça m’empêchait de voir la solution.
Cette évidence, c’est comme l’horizon, dans un jeu de perspectives. Tu vois, au loin, qu’il y a une route qui passe par ce col. Mais tu ne vois pas devant toi par où passe le chemin.
Il faut l’emprunter, l’arpenter, le suivre, s’y perdre même parfois, pour à la fin arriver au fameux col, se retourner et se dire « ah tiens, c’était donc là qu’il passait, ce chemin ».
C’était donc une évidence, que je voyais au loin, sans savoir comment l’atteindre. J’y suis presque, désormais.
Et c’est vrai que ça en fait, du chemin parcouru. C’était long, ardu, mais tu sais quoi ? Ça m’a fait le plus grand bien.
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