Dernière née de la volonté de Disney d’adapter ses classiques de l’animation (La Belle et la Bête et Le Roi Lion y sont passés) en prise de vue réelle, La Petite Sirène était attendue au tournant. Sortie en 1989, l’adaptation en dessin animé du conte de Hans Christian Andersen a bercé plusieurs générations de jeunes femmes et pour cause. Il s’agissait de l’un des premiers Disney à raconter l’histoire d’une émancipation féminine : l’adolescente Ariel se rebelle contre son père et effectue ses propres choix.
Depuis 2019 et l’annonce de la chanteuse et actrice métisse Halle Bailey dans le rôle principal, le film de Rob Marshall a dû gérer une polémique raciste. Après plusieurs années de développement, le pari de moderniser ce dessin animé culte a-t-il été relevé ?
Si on a un peu tiqué face aux versions numériques des animaux parlants – Polochon, Seb et Eurêka, aux bouilles si choux dans le dessin animé – le défi technique colossal que représentait la mise en scène d’un monde sous-marin magique et musical est relevé haut la main. L’univers des sirènes en live action se révèle aussi féérique que celui du dessin animé.
Meilleure réponse aux critiques nauséabondes, Halle Bailey est parfaite dans le rôle d’Ariel. Elle y insuffle sa force, son espièglerie et sa voix sublime. Cette Ariel est partie pour être la nouvelle idole des enfants et on s’en réjouit !
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Sous l’océan, la diversité
Si l’histoire reste globalement la même que celle du dessin animé (qui diffère de celle du conte original), en 34 ans, la société a légèrement évolué ! Rob Marshall a donc apporté diverses modifications pour moderniser l’œuvre, à commencer par de nouvelles chansons.
Le Prince Eric a désormais droit à son solo, intitulé “Par-delà l’horizon”, pour chanter ses désirs, au même titre qu’Ariel a toujours son mythique “Partir là-bas”. Cette séquence participe à mieux caractériser ce personnage plutôt fade dans le dessin animé. Eric possède ici une vraie personnalité et il exprime ses sentiments. Il respire une masculinité non-toxique qui, on l’espère, nourrira les petits garçons de nouveaux imaginaires. Comme Ariel, le Prince adoptif étouffe sous la pression familiale, en l’occurrence, celle de sa mère noire et reine de cette île fictive des Caraïbes. Les deux tourtereaux partagent également un goût pour l’aventure.
Un peu plus tard, les deux jeunes gens sont entraînés au cœur d’un marché coloré pour une séquence musicale, où des personnages blancs et racisés dansent ensemble dans une liesse générale. Le conte La Petite Sirène a toujours porté en lui la thématique de l’acceptation de l’autre et la nécessité du vivre ensemble. Cette version, menée par une sirène noire, perpétue ce message d’appel à la tolérance et sonne comme une ode aux mélanges des cultures. Certes, l’ensemble peut paraître naïf, mais le film Disney est avant tout destiné aux nouvelles générations et se doit de porter des messages positifs et universels.
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Une Petite Sirène gentiment écolo et féministe
Les discrètes modifications effectuées tout au long du film reflètent les changements de notre société. Interprété par Javier Bardem, le Roi Triton explique sa haine des humains par le désastre écologique dont ils sont responsables et qui impacte fortement le monde sous-marin. De son côté, Ariel effectue un passage à l’âge adulte plus réfléchi. Elle réalise davantage ce à quoi elle renonce (son identité de sirène) et se demande si elle prend la bonne décision. Une façon d’insister sur son agentivité. Même si elle perd momentanément sa voix, Ariel n’est pas un personnage qui subit l’action. Elle choisit son destin et se bat aux côtés d’Eric pour venir à bout de la sorcière Ursula.
Incarnée avec gourmandise par la brillante Melissa McCarthy, cette méchante iconique est fidèle à sa version animée. On aurait bien vu l’ajout de quelques scènes revenant sur les raisons pour lesquelles la sœur de Triton a basculé du côté obscur (Maléfique, la sorcière de Cendrillon, a bien eu droit à sa rédemption dans deux films !).
Le dernier grand changement concerne la fin du film. Rob Marshall zappe l’étape du mariage pour une jolie scène de réconciliation entre le peuple humain et marin, qui accompagne le départ à l’aventure des explorateurs Ariel et Eric. Ce conte-là pourrait se terminer par l’épitaphe : “Et ils vécurent heureux, et explorèrent le monde”. Pour le mariage et les enfants, on verra plus tard !
A ceux ou celles qui crieraient à l’hérésie, rappelons que dans le conte original, Eric se marie avec une femme de son rang, tandis que la petite sirène (dont il n’est pas amoureux, snif), se sacrifie pour lui. Bonjour tristesse…
Cette nouvelle itération de La Petite Sirène nous rappelle la faculté des contes à être réinterprétés à volonté selon les préoccupations et les mœurs d’une époque. Bien malin celui ou celle qui saura prédire à quoi ressemblera une adaptation de La Petite Sirène dans trente ans.
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