20 juillet 2017. Avant d’aller me coucher, je fais un dernier tour sur Internet.
Chester Bennington, le chanteur de Linkin Park, s’est suicidé.
Quoi ? Non. Hein ? Je fouille. C’est vrai. Mike Shinoda l’a confirmé. J’ai une boule dans le bide, un chat dans la gorge. Je repars dix ans en arrière. J’ai à nouveau envie de hurler.
Linkin Park, c’était LE groupe de mon adolescence. Celui qui m’obsédait, ornait mes murs et tournait en boucle dans ma chaîne hi-fi.
Alors j’ai eu envie de lui rendre hommage.
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Linkin Park a compris et respecté ma rage d’adolescente
Quand j’étais au collège, j’ai commencé à être en colère.
J’étais en colère contre toutes ces émotions que je ne savais pas exprimer. Contre les journées grises entre les murs du bahut. Contre mes parents qui m’interdisaient ou m’imposaient des trucs.
J’étais en colère de ressentir tant de choses et d’être trop stupide pour les faire sortir. En colère de n’avoir aucun talent artistique. En colère que Fabien, de 5ème C, ne veuille pas sortir avec moi. En colère de ne même pas oser le lui demander.
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Linkin Park a trouvé mes oreilles, la voix de Chester est venue s’appliquer sur ma colère, comme un baume, ou plutôt comme une saignée.
Enfin un exutoire : écouter Hybrid Theory, en boucle en boucle en boucle, et m’immerger dans cette voix.
Linkin Park ne m’a pas enseigné à gérer ma colère, mais m’a appris que je n’étais pas la seule à la ressentir. Qu’il y en avait d’autres comme moi.
Personne ne soupçonnait que cette petite collégienne en tennis Cache-Cache, avec des feutres parfumés plein son sac, s’asseyait parfois près du cimetière pour écouter Linkin Park à s’en péter les tympans.
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Linkin Park, mon premier goût de grande
Linkin Park, ça a aussi été un de mes premiers goûts disant « je suis plus un bébé ». Une des premières façons de me distinguer.
Dans mon collège, tout le monde écoutait Sinik et Diam’s. Les « métalleux » et les « gothiques » (des termes TRÈS vagues) n’étaient pas très bien vus.
Entre Hybrid Theory et Meteora, j’ai assumé mon amour pour Linkin Park. Le sigle du groupe recouvrait mes trousses, mes agendas, mon sac Quiksilver et la tranche de mes fausses Converse.
Linkin Park, ce n’était pas la honte : c’était cool. C’était mon goût de meuf différente — un peu snob, je ne le nie pas.
C’était une façon de dire : je n’ai pas beaucoup d’ami•es, vous ne m’aimez pas, eh ben ça tombe bien car je ne suis pas comme vous, et un jour je partirai loin de vous, vivre ma vie, avec Chester dans les oreilles.
Linkin Park, monument de ma pop-culture
Linkin Park a connu un succès fou. Je suis TRÈS loin d’être la seule ado à avoir écouté leurs albums dans le bus l’emmenant au collège ou au lycée.
C’était le groupe préféré des emos et des skateurs, des ados qui se sapaient chez Goéland, qui mettaient trop de khôl et sifflaient de la Smirnoff Ice sur les rampes du skate-park.
Crawling, Breaking the Habit ou Numb étaient les hymnes des incompris•es, des ados torturé•es qui couvraient leurs Skyblogs de poèmes en rose sur fond noir et de photos de meufs avec le mascara qui coule.
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Linkin Park, c’était le groupe des ados qui avaient pas forcément beaucoup d’ami•es, et les trouvaient en ligne ou se réfugiaient dans d’autres mondes.
Les premiers millennials à avoir passé leur nuit en session LAN ou sur des forums, à pirater Matrix Reloaded sur eMule ou à faire chauffer leur Playstation 2.
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Dans les tréfonds de Dailymotion et de YouTube, on trouve les oeuvres de ces ados qui plaquaient les chansons de leur groupe préféré sur des extraits de leurs animes ou jeux vidéo favoris.
https://www.youtube.com/watch?v=-CKBitnAOLA
Linkin Park, comme les peluches Diddl, les agendas Emily the Strange ou les matinées à regarder Yu-Gi Oh, restera toujours un symbole de mon adolescence. Et j’ai beau être moins en colère, je connais toujours In the End par coeur.
Adieu, Chester, et merci pour tout. Je suis désolée que tu n’aies pas pu guérir comme tu m’as aidée à le faire.
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Les Commentaires
Merci Mymy pour ce bel hommage. <3
PS : Une amie a fait une cover sur Crawling, je vous conseille d'y jeter une oreille, et de sangloter, comme je le fais...