Pour ce deuxième numéro de Premier rang, l’invitation est lancée aux amateurs d’histoire, de biopics et de destins de femmes hors du commun. Simone Veil a droit à un biopic aussi épique que l’a été sa vie, avec Simone, le voyage du siècle.
Un biopic impressionnant
Le réalisateur Olivier Dahan (à qui l’on doit le célèbre La Môme avec Marion Cotillard) a mis les bouchées doubles pour raconter le destin hors norme de Simone Veil, de son enfance, en passant par ses combats politiques et ses tragédies.
Il en ressort un film aux allures de fresque d’une durée de 2h20, à cheval sur plusieurs décennies et plusieurs pays. Avec son montage extrêmement dynamique et son budget colossal, Simone, le voyage du siècle parvient à retranscrire la tension entre l’ambition d’une femme entièrement dédiée à rendre le monde meilleur et l’horreur venue court-circuiter cette ambition, et contre laquelle Simone Veil n’a jamais cessé de se battre.
Ainsi, le film prend le temps de s’attarder sur chacune des causes qui ont été celles de Simone Veil – son combat pour le droit à l’avortement, le droit des prisonniers à jouir de conditions de vie dignes, ou encore son investissement dans la lutte contre le Sida et sa présence auprès des malades. Le biopic regorge de scènes à mi-chemin entre l’invention et la reconstitution et apparaît donc, au-delà du divertissement épique, comme une ressource historique précieuse et brûlante d’actualité.
Pour en parler, Madmoizelle a rencontré les comédiennes Rebecca Marder, interprète de Simone Veil de ses 15 à ses 37 ans, et Élodie Bouchez, actrice campant le rôle d’Yvonne Steinmetz, la mère de Simone Veil.
Entretien avec Rebecca Marder et Élodie Bouchez
Madmoizelle. Le film est long et dense. On devine que le tournage a été une expérience particulièrement intense…
Élodie Bouchez. Ce film est le combat d’une vie. Le tournage a duré de septembre à janvier, ce qui est assez long. Ça a été une traversée pour nous tous : une traversée d’époques, de saisons, de décors qui nous ont fait voyager avec ce personnage et ses combats. Quand on a eu terminé le tournage, c’était aussi une forme de satisfaction, de soulagement d’être arrivé au bout de cette épopée.
Rebecca Marder, comment vous êtes-vous préparée pour incarner ce grand rôle ?
Rebecca Marder. Simone, le voyage du siècle raconte le destin hors du commun de Simone Veil, ses combats, sa vie intime. Le film est une vraie traversée. En tant qu’actrice, il est rare d’incarner une trajectoire aussi longue, dense et de traverser autant d’époques. Il s’agissait donc de se renseigner sur les différentes périodes traversées, tout en étant au présent pour chaque période incarnée.
Pour ma part, j’incarne Simone Veil de ses 15 à ses 37 ans, c’est-à-dire du moment où elle est raflée puis déportée jusqu’au moment où elle devient directrice de l’administration pénitentiaire. Pour me préparer au rôle, il s’agissait de tout voir, tout lire tout écouter d’elle. J’ai lu sur les combats qu’elle a menés tout au long de sa vie, je l’ai l’observée en interview. J’ai décortiqué des ouvrages plus politiques sur les différentes périodes de la République. C’était une expérience très intense et un tournage exceptionnel.
Tous les membres de l’équipe, nous sommes là, comme une prière géante pour la mémoire, pour la transmission. C’est important que ce soit raconté.
Rebecca Marder
Élodie Bouchez, vous jouez le rôle déterminant de la mère de Simone Veil. Vous êtes-vous documentée pour l’incarner, ou y a-t-il eu une part importante de création dans votre façon de vous approprier le rôle ?
Élodie Bouchez. Rebecca s’est beaucoup préparée avant le tournage, moi un peu moins ou différemment puisque la documentation et les enjeux autour de la mère de Simone Veil étaient différents.
Il y avait quelques éléments clés concernant cette femme – sa gentillesse, sa générosité, son aversion pour l’injustice, qu’elle a transmises à ses enfants et sa fille Simone. Elle a poussé ses filles à être indépendantes, autonomes. Je me suis accrochée à ces valeurs. À partir de ces éléments biographiques, je me suis chargée de représenter ce que peut être ce lien incroyable entre une mère et ses enfants.
Comment avez-vous vécu les scènes dans les camps de concentration, dans lesquelles vous apparaissez très soudées avec Judith Chemla ?
Élodie Bouchez. C’était une expérience très forte. On était toutes les trois comme trois petits oiseaux collés, comme on pouvait imaginer ces trois femmes dans l’horreur de ce qu’elles ont vécu. Nous nous sommes laissés porter par cette situation atroce.
Rebecca Marder. La reconstitution de cette période est toujours délicate. C’est un sujet que l’on traite difficilement. Prétendre reconstituer le pire de ce dont l’humanité est capable est délicat. Les premiers jours de tournage de cette partie du film, j’étais dans un état de choc et de sidération, car nous étions dans une reconstitution d’Auschwitz. C’était un décor en Hongrie.
Les premières heures, je me suis même posé la question : « est-ce que ce n’est pas obscène de prétendre reconstituer l’inimaginable ? ». Puis je me suis dit que non, car nous étions tous là pour nous souvenir. Tous les membres de l’équipe, nous sommes là comme une prière géante pour la mémoire, pour la transmission. C’est important que ce soit raconté. On ne peut pas raconter Simone Veil sans raconter la Shoah. Judith Chemla, Élodie Boucher et moi avons eu la chance d’être très soudées, à l’écran, par nos personnages, et dans la vie.
Quelle autre figure féminine historique inspirante rêveriez-vous d’incarner ?
Élodie Bouchez. J’avoue que je ne me projette jamais de cette manière là dans des rôles. Je me laisse porter par la manière dont les réalisateurs et réalisatrices ont envie de m’imaginer. Donc je crois que je ne m’autorise pas à avoir des envies !
Rebecca Marder. Moi aussi !
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Crédit de l’image à la Une : © Warner Bros
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