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Cinéma

Anatomie d’une chute : un thriller qui plonge dans la complexité (et l’enfer) du couple

Vous avez une envie de cinéma, mais ne savez pas quoi choisir parmi les sorties en salle ? Dans Premier Rang, Maya Boukella, journaliste pop culture chez Madmoizelle, vous recommande un film à l’affiche. Cette semaine, on a découvert une Palme d’or particulièrement méritée avec un film vertigineux qui décortique le couple et la justice.

Cet article ne contient pas de spoilers.

Parasite, Titane et maintenant Anatomie d’une chute : ces dernières années, les films récompensés à Cannes donnent tout leur sens au festival et à sa Palme d’or. Anatomie d’une chute nous a particulièrement rappelé l’expérience du film de Bong Joon Ho, dans sa capacité à utiliser tout ce que le film de genre a de plus haletant, de plus mystérieux, pour révéler de la manière la plus inattendue possible les rapports de force les mieux cachés, les zones d’ombre les plus insondables de la société. Comme Parasite quelques année avant lui, Anatomie d’une chute nous marque longtemps.

Ce mercredi 23 août, le gagnant de la dernière édition cannoise est enfin sorti en salle. On était d’autant plus impatientes de découvrir le meilleur film de la compétition que ce dernier est signé par la réalisatrice française et féministe Justine Triet, qui, en seulement 4 films, a construit une filmographie qui mérite toute votre attention.

Loin du stéréotype du film de compétition trop cérébral et peu réjouissant, Anatomie d’une chute est un thriller et un film de procès hypnotique qui nous a fait retenir notre souffle du début à la fin. Pendant 2h30, on est plongées dans les rouages du couple, sujet particulièrement complexe et digne de l’intérêt des cinéastes. Bien que l’on suive un couple précis, entre les murs étriqués d’un tribunal, Anatomie d’une chute résonne bien au-delà.

Anatomie d’une chute, de quoi ça parle ?

Sandra, Samuel et leur fils malvoyant de 11 ans, Daniel, vivent depuis un an loin de tout, dans le petit village de montagne dont est originaire Samuel.

Un jour, Samuel est retrouvé mort au pied de leur maison. Une enquête pour mort suspecte est ouverte. Sandra est bientôt inculpée malgré le doute : suicide ou homicide ?

Un an plus tard, Daniel assiste au procès de sa mère, véritable dissection du couple.

Le couple et le procès : des territoires de cinéma passionnants

Dans le film de Justine Triet, la chute se décline sous toutes les formes. Bien sûr, au sens littéral, il y a la chute de Samuel, qui tombe de plusieurs étages et meurt sur le coup. Ensuite, on le comprend en lisant le synopsis, le film explore la déflagration du couple. En tant que spectateur, on éprouve un sentiment de chute, au sens d’une plongée. Au fil du film et du procès, on s’enfonce dans les rouages du couple. Plus l’exploration est profonde, plus on se rend compte qu’au-delà de cette famille fictionnelle, Justine Triet perce à jour des mécanismes d’emprise, de domination, de pouvoir, des sentiments de frustration, de rancune ou de jalousie qui s’exercent dans le couple de manière générale.

anatomie d'une chute  // Source : les films pélleas
anatomie d’une chute // Source : les films pélleas

Si Anatomie d’une Chute est à ce point remarquable, c’est notamment grâce à l’intelligence de son dispositif. Ne vous attendez-pas à un film français réaliste, qui suive le quotidien d’un couple, des scènes d’amour aux scènes de dispute. Ici, les séquence où le couple est réuni sont même très rares ; quant au mari, il est pratiquement absent.

Anatomie d’une Chute est un vrai film de procès, et c’est ce qui le rend si détonnant. De fait, il n’y avait pas de façon plus pertinente de mettre en lumière les connexions entre deux réalités qui coexistent, s’éclairent les unes les autres et, le plus souvent, entrent en conflit : le couple et la justice.

Avec un personnage de femme (Sandra) et un espace (le tribunal), Justine Triet soulève une foule de questions : comment rester soi-même dans un couple ? Comment ne pas se fondre dans l’autre ? Comment ne pas crever de l’autre ? Comment ne pas l’écraser ? Et que se passe-t-il quand la justice, qui pense le monde à partir d’une dichotomie entre innocence et culpabilité, pose son regard et tente de juger une structure si complexe, insondable et humaine ?

En plus de porter un suspens inhérent – on est suspendu de bout en bout au mystère de la mort de Samuel – le tribunal est un territoire de cinéma passionnant parce qu’il est précisément le lieu où l’on formule ce que la société trouve suspect, immoral, criminel. L’intimité, la pudeur volent en éclats : la vie personnelle, amoureuse, sexuelle, littéraire (elle est écrivaine) de Sandra est passée au peigne fin sous la pression des questions accusatrices des avocats et sous le regard de son fils qui assiste au procès. Cette soudaine coexistence entre le domaine du personnel, du sentimental, du pulsionnel (le couple, la famille) et celui de l’institution, des règles et de la morale, avec au centre l’amour et la mort rendent le film hypnotique, passionnant, glaçant.

Le plus frappant est sans doute de constater que les jugements de valeur, les préjugés, le sexisme et la violence tacite sont loin d’être cantonnées au domaine du foyer que le tribunal juge mais sont surtout la norme dans le monde de la justice. Parce qu’elle semble trop libre, trop insaisissable, trop insensible, trop indépendante (ne parlant pas parfaitement le français face à un tribunal qui le manie à la perfection, Sandra est bisexuelle et a des relations en dehors de son couple), elle est considérée comme suspecte. Soupçonnée de détester son mari et d’être violente, elle subit la violence sexiste du système qui prétend la juger.

Sandra hurler dans anatomie d'une chute de Justine trier // Source : Le Pacte

Anatomie d’une chute donne moins de réponses qu’il ne pose de questions. Il révèle le trouble au grand jour et montre combien le tribunal échoue à penser cette complexité. Au Huffington Post, Justine Triet a résumé :

 Le film pose, je pense, une question plus ample que « l’a-t-elle tué ? ». Il y a aussi l’idée de « peut-on être responsable sans être coupable », et « peut-on être coupable sans être responsable ».


Découvrez le BookClub, l’émission de Madmoizelle qui questionne la société à travers les livres, en compagnie de ceux et celles qui les font.

Les Commentaires

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Avatar de Blueberry78
1 novembre 2023 à 21h11
Blueberry78
(Désolée envoi trop rapide je continue) des impacts que peut avoir sur un couple le handicap d’un enfant ainsi que du système judiciaire envers les femmes… Je recommande vivement!
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Voir les 4 commentaires

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